💮Un café et un piano (Yoonmin) 💮
Il pleuvait, c'était un jeudi. L'amphithéâtre se remplissait peu à peu de jeunes adultes, qui disposaient déjà pour certains leurs affaires devant eux. Sur les vitres, à gauche de la salle, les gouttelettes cognaient avec violence, provoquant un grondement sourd couvert par les bavardages. De temps en temps, un éclair venait zébrer le ciel. Dehors, les arbres agités par le vent ressemblaient à des fantômes apeurés, et si l'on regardait avec attention on pouvait même apercevoir les silhouettes d'étudiants perfectionnant leurs performances en sprint, chassés par l'insistance de cette pluie sauvage.
Malgré la fraîcheur de ce matin d'automne, Park Ji Min ne grelottait pas, blotti dans son pull oversize. Il attentait patiemment ses amis, comme toujours moins attachés que lui à l'importance d'être en avance. Son regard se promenait sur ses voisins et les nouveaux arrivants, les cheveux mouillés et les parapluies qui se repliaient les uns derrière les autres. Les parfums des gens, et des boissons qui voyageaient des distributeurs jusqu'aux bancs lui chatouillaient les narines, il soupira d'aise. Ses cheveux teints en blond caressaient agréablement son front, ses joues étaient réchauffées par ses mains, ses lèvres rosies s'étendaient en un petit sourire.
Puis, il réalisa que son regard s'était accroché sur quelqu'un. Heureusement, l'étudiant aux cheveux d'ébène ne semblait pas avoir remarqué que Jimin le fixait, depuis un temps indéterminé. Pourtant, un seul rang les séparaient. Puis, ses yeux coulèrent presque naturellement le long de sa joue, sa nuque pâle et parfaitement soulignée par la noirceur des cheveux et de la veste qu'il ne semblait pas décidé à enlever. Il nota un casque blanc, porté autour du cou comme un pendentif, et le blond remarqua un verre de café à côté de son ordinateur.
Jimin sursauta quand une main se posa sur son épaule.
-Et bien, hyung ! Tu peux me dire ce sur quoi tu étais si concentré ? s'enquit Jeon Jeong Guk.
Le visage d'ange de Jimin s'éclaira d'un sourire radieux.
-Rien, rien du tout Jungkook.
Et le cours commença dans le fracas de l'orage. Malgré la concentration que Park Ji Min adressait à la parole du professeur de littérature qui déblatérait un tas d'informations à une vitesse sournoise, ses yeux glissaient tous seuls vers ce jeune homme au gobelet de café.
Parfois, Jimin se surprenait à chercher ce visage et ces cheveux corbeaux au milieu des marées humaines. Dans le bus, les couloirs. Il avait même essayé de se poster près des distributeurs à café aux intercours, juste dans l'espoir de lui adresser la parole. En fait, il avait été comme hypnotisé. Jungkook le charriait, en lui répétant que c'était une obsession, mais Jimin n'y pouvait rien. Quelque chose l'avait fasciné, et il était bien décidé à apprendre à connaître ce mystérieux étudiant.
Il fallut attendre l'arrivée des premières chutes de neige pour qu'il réapparaisse enfin. Il était déjà là, quand Jimin arriva. Exactement à la même place que ce jour de pluie. Pas de veste noir, mais un pull beige dans lequel disparaissaient ses mains, et dont le col semblait avaler son cou. Jimin afficha un grand sourire. Soudain, un professeur entra dans la salle. Pourtant, le cours ne commençait pas avant 10 bonnes minutes. Les étudiants cessèrent en quelques minutes le brouhaha, et le professeur annonça : « M. D., qui devait vous faire cours, sera absent pour des raisons personnelles. Puisque nous n'avons pas eu le temps de trouver un remplaçant, votre cours n'aura pas lieu, vous pouvez rentrer chez vous. »
Jimin balaya la salle du regard, les gens fermaient leurs sacs et prenaient leurs affaires. Mais lui ne bougeait pas, il pianotait nerveusement sur le clavier de son ordinateur, les genoux repliés contre son torse. Ses doigts apparaissaient puis disparaissaient à nouveau dans ses manches à une vitesse folle. Jimin hésita, puis se leva doucement.
-Je peux m'asseoir ici ?
Distraitement, le jeune homme aux cheveux noirs releva la tête et dévisagea Jimin. Il retira le casque qui couvrait ses oreilles, et répondit :
-Tu n'es pas avec ton ami ?
Jimin esquissa un sourire, étonné que le jeune homme ait noté quelque chose quant à lui. Devant l'absence de réponse, il répéta :
-Tu sais, le bruyant avec les nez un peu rond...
-Jungkook, il s'appelle Jungkook, rit Jimin. Et ça m'étonnerait beaucoup qu'il vienne, je l'ai prévenu que le prof était absent. A propos de ça, tu ne rentre pas chez toi ?
-J'habite un peu loin, et le prochain cours n'est que dans deux heures, je préfère attendre.
Le blond n'habitait qu'à 10 minutes de l'établissement, mais il répondit que lui aussi.
-Je m'appelle Jimin, dit-il en tendant amicalement la main.
-Moi, Yoongi, et il serra la paume à travers la manche de son pull.
Le blond s'assit, et ils discutèrent tandis que la plupart des étudiants s'en allaient, vidant peu à peu la salle. Yoongi parlait peu, mais toujours pertinemment. Il tripotait nerveusement ses mains, et ajoutait des mots en satoori, quelquefois. Il expliqua à Jimin qu'il faisait ça sans s'en rendre compte, quand il était nerveux. Puis, Jimin lui proposa de lui payer une boisson ou quelque chose à grignoter. Yoongi refusa tout d'abord, gêné, puis accepta face à la volonté de Jimin.
« Un café, s'il te plaît. »
Et Jimin se plut à admirer les traits fins du jeune homme se détendre pendant que la boisson chaude glissait entre ses lèvres. Puis, Yoongi lui tendis son casque.
-Mets ça, et écoute. J'aimerai avoir ton avis.
Dès que le blond l'eut posé sur ses oreilles, une mélodie calme au piano se posa dans ses oreilles. Il aurait juré se sentir flotter, et une larme aurait pu glisser sur sa joue. Tellement doux, tellement pur. Quand vint la dernière note et que le silence remplaça la mélodie, Jimin fit glisser le casque qui retomba nonchalamment sur ses épaules.
-Yoongi, c'est magnifique. C'est toi qui a fait ça ?
Sa voix était presque un murmure, peut-être parce qu'il était ébranlé, peut-être parce qu'il était bouleversé. Le garçon aux cheveux d'ébène hocha la tête, légèrement.
-Je n'aime pas les faux commentaires. Tu n'es pas obligé de dire que c'est beau pour me faire plaisir. Puis ce morceau est très imparfait.
Jimin saisi la main de Yoongi.
-Comment je pourrais dire que je n'aime pas, si j'adore ? C'est ça qui serait hypocrite, dire que je n'ai pas été touché par ta musique. C'est beau Yoongi, réellement. (« et tu l'es aussi, il aurait pu ajouter. »)
Le concerné écarquilla les yeux, s'enfonça un peu dans le pull, retira sa main d'entre les doigts de Jimin. Il rougissait, le blond l'aurait juré.
-Hmm... merci, Jimin.
-Tu... tu veux bien me dire comment s'appelle ce morceau ?
-Il n'a pas de nom. Pas encore.
Sa voix n'était pas sèche, mais désordonnée. Comme intimidée. Jimin lui sourit, un sourire immense et lumineux, et proposa de rester à côté de lui lors du prochain cours. Yoongi accepta.
En fait, il restèrent à côté de nombreuses fois, après celle-ci. Jimin ne lui demanda jamais pourquoi il ne l'avait pas vu pendant si longtemps, alors que maintenant il le croisait tous les jours. Sans trop s'en rendre compte, les mois s'écoulèrent, entre les fous-rires, la rencontre plutôt épique entre Jungkook et Yoongi, les escapades des trois étudiants, parfois accompagnés de Taehyung, à la cafétéria entre deux cours, et l'évolution du morceau sans nom.
Il neigeait aussi, ce jour là. Jimin attendait Yoongi au même endroit que chaque matin, mais le jeune homme ne vint pas. Le lendemain non plus. De même pour toute la semaine. Et la suivante. Il ne répondait plus aux appels, comme s'il avait disparu d'un coup. Les flocons tombaient, les uns derrière les autres, ils couvraient le monde d'un léger manteau blanc, glaçant. Même frigorifié, Jimin revenait chaque matin attendre Yoongi. Il refusait d'abandonner, ou d'imaginer l'étudiant aux cheveux noirs arriver sans qu'il ne soit là pour l'accueillir. De jour en jour, l'inquiétude grandissait, la peur avec lui. La peur qu'il soit arrivé quelque chose à l'étudiant aux cheveux ébène, qu'il soit malade ou blessé, seul, la peur qu'il ne revienne pas.
C'était un vendredi. Jimin sortait de chez lui après être rentré manger, et se dirigeait vers l'établissement rejoindre Jungkook quand il reçu un message. Sur le coup, il ne sut pas réagir. La simple vision du nom de Yoongi sur l'écran l'affolait complètement, ou au contraire le rassurait. Le message en question était court, c'était une adresse. Le temps de la localiser grâce à internet, et Jimin changeait de direction. « Ne m'attends pas, je me sens pas bien je reste chez moi » envoya t-il à Jungkook pour ne pas l'inquiéter. « OK, je reste avec avec Tae, on te souhaite tous les deux un bon rétablissement ahah, à la prochaine »
Yoongi n'avait pas menti, il habitait loin. Ce fut en descendant d'un énième bus que Jimin senti la fin du trajet arriver. Une touffe de cheveux ébène sortait d'un pull beige, couvert d'une veste noire. Les genoux repliés contre son torse, un verre de café sûrement froid posé à côté. Dès qu'il l'eut vu, Jimin s'approcha. Yoongi releva la tête, le blond prit son visage entre ses mains. Sa peau était glaciale. Doucement, il déplia ses jambes. « Suis-moi, il reste cinq minutes de marche. » Sa voix était un peu rauque, comme si elle représentait un effort.
Silencieusement, Jimin glissa ses doigts contre ceux de Yoongi. Il le laissa le guider dans les rues enneigées, plus concentré sur le bruit régulier de la respiration du jeune homme que sur ses propres pas. Sans qu'il ne s'en rende bien compte, ils étaient arrivés, et celui aux cheveux corbeaux retira sa main pour chercher ses clefs dans sa poche. La porte s'ouvrit dans un grincement infernal, et Jimin découvrit les murs crèmes de l'appartement de Yoongi, son piano noir comme ses cheveux, son matériel d'enregistrement, la décoration toute douce, l'air de violoncelle qui se laissait jouer sur un vieux tourne-disque. Enchanté, il sautillait avec légèreté, avant de se laisser tomber sur la banquette sur laquelle il était invité par son hôte.
-Un café ? Lui proposa Yoongi.
-Avec plaisir.
Il ne pouvait pas s'empêcher de sourire, revoir le précieux jeune homme lui faisait un bien fou. Quelques minutes plus tard, le plus âgé revint avec deux tasses desquelles s'échappaient des rideaux de vapeur. Sans un mot de plus, il s'assit à côté de Jimin, presque contre lui.
Et le blond ne pu résister au désir de le prendre dans ses bras, de le serrer contre lui comme pour l'empêcher de partir à nouveau. Yoongi ne le repoussa pas, au contraire il blotti son visage au creux du cou du blond, couvrant sa clavicule de son souffle doux, si doux.
-Hmm, Jimin tu es tout chaud.
-C'est toi qui es glacé... bon sang que je suis rassuré, t'as pas idée d'à quel point je me suis inquiété pour toi.
-Jiminnie, à force de sourire aussi fort tes joues vont avaler tes yeux.
Ils éclatèrent de rire, toujours dans les bras l'un de l'autre. Cette proximité douce les réchauffait énormément, tous les deux. Yoongi avoua à Jimin beaucoup de choses, des mots coincés dans sa gorge qui n'avaient sûrement jamais eu la force de sortir. « Anxiété sociale », « douleur », « amertume », tant de choses que le blond aurait voulu faire taire. Il aurait peut-être voulu que le précieux jeune homme ne connaisse jamais une souffrance interne suffisante pour l'empêcher si longtemps de sortir. Ne jamais imaginer Yoongi pleurer, pleurer de détresse, s'en vouloir d'exister.
Les heures passèrent, deux heures ? Cinq, dix peut-être. Sans qu'ils ne s'en rendent réellement compte, le corps de Yoongi s'était glissé entre les bras de Jimin, son dos contre le torse du blond. Les mains de ce dernier emmêlées entre les doigts du plus âgé, qui jouait distraitement avec. Qui remontaient dans les manches, caressant la peau de du jeune homme à la tignasse ébène. Leurs jambes se resserraient peu à peu, peut-être que les baisers que Jimin déposait dans le cou de Yoongi y étaient pour quelque chose. Peut-être que le moment où Yoongi s'était retourné et avait effleuré les lèvres de Jimin aussi. Peut-être que l'intense chaleur qui avait envahi Jimin à ce moment n'y était pas pour rien non plus. Le moment où il avait tiré sur le col de Yoongi, l'avait ramené contre ses lèvres, l'avait enlacé, avait glissé ses mains sous son pull et dessiné avec douceur le contour de chaque courbe de son corps à même la peau. Et à son tour, Yoongi avait posé une main dans le cou de Jimin, l'autre contre sa nuque. Ce ne fut qu'après un long moment que le jeune homme aux cheveux noirs s'éloigna, et murmura :
-Je crois que je préfère ton goût à celui du café.
Aucun n'aurait pu imaginer que ça se finirait ainsi, à vrai dire. Mais les sensations, la douceur, le désir, tout s'était si puissamment mêlé. Une chose était sûre, Jimin n'aurait jamais osé penser une si belle fin pour conclure ce rêve, admirer, caresser, dévorer des yeux la peau nue de Yoongi, magnifique dans les draps blancs, la couvrir de tendresse et de chaleur, de tout ce condensé d'amour qu'il avait si longtemps mit de côté. L'aimer de tout son soûl jusqu'à ce qu'ils s'endorment paisiblement, leurs peaux nues l'une contre l'autre, comme pour fondre les deux jeunes hommes l'un avec l'autre.
*
La douceur du breuvage aurait presque pu brûler sa gorge, s'il ne s'était pas habitué à cette sensation éphémère de chaleur. Il ne pouvait tout simplement pas accepter le vide qui l'avait rempli quand Jimin avait, à grand peine, fini par repartir. La chaleur du café avait comme perdu sa valeur, perdu sa saveur. Mais que pouvait-il faire face aux lèvres du jeune blond ? La caresse parfumée dans sa bouche ne valait pas un dixième de celles des mains de Jimin contre sa peau. Il se sentait démuni, ou prit en flagrant délit d'addiction. Dans ces moments là, il ne savait pas faire autre chose que composer. Composer, à n'en plus pouvoir, écrire, jouer, s'échapper dans l'immensité du piano. Mais même ici, le manque l'oppressait. Alors, il cessa de lutter. Il se laissa juste porter.
Et quelques jours plus tard, Jimin reçu une curieuse boîte. Aucun nom écrit dessus, juste une clef USB. Et dessus, un seul dossier, un audio. Intrigué, il n'hésite pas à lancer. Dès les premières notes, il ne sut retenir ses larmes. Peut-être parce que c'était cette mélodie qu'il avait si souvent rêvé d'entendre terminée. Peut-être parce que le moment où la voix de Yoongi, rauque, forte, si douce, résonna contre lui, il fut envahi d'un torrent irrépressible d'émotions confuses, mais ô si agréables. Il dû réécouter pour se concentrer sur les paroles, et chaque mot le secouait. Et les larmes continuaient de perler sur ses joues, il ne s'en rendait même plus compte. Tout son lui n'existait plus que pour ça, cette chanson, plus que pour lui, pour Yoongi.
À la fin de l'enregistrement, on pouvait entendre :
« Oh, est-ce que ça enregistre toujours ? Ah oui, la lumière clignote. Alors hum... Jiminnie ? Je, ahah, je ne sais pas trop comment m'ordonner, c'est super gênant. Vraiment, c'est horrible. C'est tout brouillon dans ma tête. Voilà alors, je voulais juste te dire que... heu, ce morceau, bon il n'est pas excellent, je suis pas habitué à chanter... mais il a un nom maintenant. Il s'appelle « First love », ouais c'est ultra niais. Mais ça me semblait bien, pour lui. Puis... heu... t'es le bienvenu chez moi, quand tu veux. Je te ferai du café. Hmm... Jimin, je crois que je t'aime. (on entendait un bruit sourd, le mélange d'un cri d'euphorie et de quelque chose qu'on éteint en vitesse.) »
Les derniers mots prononcés par Yoongi, le blond les avaient écoutés en boucle. Trop de fois pour les compter. Et bon sang, ça le tordait de ne pas avoir son précieux Yoongi aux cheveux ébènes à côté de lui, ou encore mieux, dans ses bras.
« Hmm... Jimin, je crois que je t'aime. »
« Je crois que je t'aime »
Peut-être que... non, c'était sûr.
Il était définitivement amoureux.
***
~~~ Tout d'abord je tiens à dire que First Love est un pur chef-d'œuvre dont je ne me lasserai jamais. ~~~
Un plaisir :)
C'était un gros défi pour moi, que je suis réellement fière d'avoir terminé. J'ai eu l'idée de ce texte un peu par hasard pendant que je cherchais le sommeil, j'avoue m'être faite violence pour ne pas directement me lever et l'écrire.
Et oui, j'ai fangirlé comme pas possible à certains passages ahah, en tout cas ce fut une expérience agréable. Sans accro, du début à la fin, pas d'inspiration qui s'envole d'un coup.
On est pas loin des 3000 mots mine de rien!
Le café c'est délicieux U-U
Et à bientôt [insérez ici un nom de communauté, sachant que je n'ai pas de communauté aled]
PS: Le fanart me plaît beaucoup :)))
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