𝒞𝒽𝒶𝓅𝒾𝓉𝓇ℯ 𝓊𝓃
Acte I
Partie I - Premier meurtre
Dans sa chambre, allongé la tête en bas sur son fauteuil, Drago fixait obstinément le mur recouvert de tapisseries en réfléchissant à ce qu'il pourrait faire de sa vie. C'était les vacances; il avait pris congé au travail pour se reposer, mais ne savait pas du tout à quoi passer ses journées. Il s'ennuyait ferme, loin de l'agitation de sa boutique de potions qu'il avait ouverte avec Severus il y a quelques années.
Secrètement, il aurait aimé se trouver un amant pour l'été. Il serait allé le visiter durant les longues soirées chaudes du mois de juillet et aurait bu du vin cher jusqu'à ce qu'il oublie sa vie merdique. Ensuite, ils auraient coucher ensemble sans sentiment, puis le blond l'aurait laissé après une ou deux semaines pour aller se trouver un autre homme.
Dans ses petites fantaisies, il imaginait un homme grand, bronzé et musclé, aux larges épaules avec une barbe et des cheveux sombres. Il l'imaginait riche également, avec de bonnes manières, un charisme foudroyant, un léger humour pour accompagner le tout. Mais au lit... au lit il serait direct, passionné et infatigable. Drago se touchait parfois en imaginant tout cela avec beaucoup de détails.
En parallèle, Lucius essayait toujours de lui trouver une épouse sous le regard désapprobateur de Narcissa. Enfin, il ne fallait pas être un génie pour comprendre qu'il était gay! Le pire, c'était qu'il était convaincu que son père connaissait parfaitement ses préférences, mais choisissait simplement de les ignorer.
Un jour, lorsqu'il n'était qu'un adolescent, Blaise lui avait rendu visite au Manoir, supposément pour étudier en vue de la nouvelle année scolaire (c'est ce qu'il avait dit à ses parents). Or, son ami et lui avaient baisé tout l'après-midi et Drago soupçonnait fortement Lucius d'avoir deviné ce qu'ils faisaient. Après tout, ils n'avaient pas été si discrets que ça et la famille Malefoy était particulièrement douée avec les fausses apparences.
Dans la bibliothèque, au rez-de-chaussée, Narcissa lisait un livre, l'air parfaitement à l'aise étendue sur un canapé luxueux. Elle prétendait à merveille de ne pas en avoir marre de son rôle de femme au foyer ennuyant, de son mariage arrangé qui ne l'avait jamais rendue heureuse si ce n'était à la naissance de son fils. Elle prétendait à merveille qu'elle avait une vie trépidante que n'importe qui devrait envier et passait son temps à sourire avec légèreté et sensualité à quiconque s'enquérait de sa relation avec son mari tout en déblatérant mensonge sur mensonge.
Son fils lui avait déjà demandé une fois si elle trompait Lucius et elle avait simplement balayé la question d'un geste de la main. Elle avait commencé à le tromper bien avant à sa naissance, mais il n'avait pas besoin de le savoir. Avoir des doutes suffisait.
Quant à Lucius, il lisait le journal dans la cuisine, s'informant attentivement des actualités et perfectionnant déjà d'avance le discours qu'il ferait au Ministère la semaine suivante. Toujours alerte des variations dans le monde de la politique, il maîtrisait l'art de manipuler ses opposants sans aucune violence apparente dans ses propos; il les insultait diplomatiquement avec une politesse absolue.
Lassé d'avoir la tête en bas, Drago s'était mis à lire lui aussi. Mais plutôt que de se rabattre sur un roman ou le journal, il préférait regarder les images d'une revue pour adultes que Blaise lui avait offerte. Il était en vacances; c'était le moment où jamais pour faire ce genre de chose. Et puis, il n'avait pas encore rencontrer le bel inconnu de ses rêves, du moins c'était ce qu'il croyait.
Bref, on ne pouvait pas dire qu'ils formaient une famille très unie au Manoir.
Aux repas cependant, ils se réunissaient dans la salle à manger afin de discuter de sujets divers, alternant d'une banalité à l'autre jusqu'à ce que leurs assiettes soient vides. Ils avaient tous un talent particulier pour faire perdurer les conversations, aussi insipides soient-elles. Puis, pendant le reste de la journée, chacun vaquait à ses occupations dans son coin et cette routine leur convenait très bien à tous.
Ce fut un mardi après-midi en apparence ordinaire que leur quotidien bien organisé vola en éclat — et qu'ils regrettèrent amèrement de ne pas avoir davantage profité des jours précédents.
Drago était plongé dans un livre — un vrai cette fois et non une revue pornographique — quand Lucius entra dans sa chambre sans même toquer, ce qu'il ne faisait jamais normalement, par peur de le découvrir dans une activité gênante. Contrairement à d'habitude, son expression faciale était tourmentée, désespérée. Le plus jeune ne l'avait jamais aperçu comme ça, lui qui était toujours posé et sévère. Une larme coulait sur sa joue; ses mains tremblaient.
— Père? bredouilla-t-il, alors qu'un horrible mauvais pressentiment l'envahissait.
— C'est... c'est ta mère... elle...
Il ne put en dire davantage et éclata en sanglot. Lucius Malefoy pleurait. Comment était-ce possible? Il était absolument contre ce genre de démonstration de faiblesse en public. Drago bondit aussitôt hors de son lit, son cœur se débattant dans sa poitrine. Son père le guida silencieusement, malgré lui, jusqu'à la bibliothèque. Lorsqu'il poussa la porte, le blond hurla. Il faillit s'enfuir en courant, mais ne put s'y résoudre. Même si son instinct lui soufflait avec certitude que Narcissa était morte, il devait vérifier. Il mit deux doigts contre son poignet.
Plus rien.
Il éclata violemment en sanglot à son tour contre Lucius qui le câlina probablement pour la première fois de son existence. Les larges mains du plus vieux le serrèrent avec force, dans une étreinte soudée. Il aurait souhaité mille fois que la première réelle démonstration d'affection de son père ait eu lieu dans d'autres circonstances — après un évènement un peu plus joyeux peut-être.
Mais le monde venait de s'arrêter. Sa maman était morte.
☽☽☽
Installé à son bureau au Ministère, l'Auror Potter s'ennuyait fermement. Il était supposé recevoir une nouvelle mission cette semaine, cependant, les vilains mages noirs avaient apparemment décidé de prendre des vacances eux aussi durant ce magnifique mois d'août ensoleillé. Finalement, c'est seulement mardi soir, vers dix-sept heures, qu'il reçut un appel urgent. Ça tombe bien, je finissais ma journée, pensa-t-il avec ironie.
Lui et Agnès, sa partenaire de mission, se dirigèrent donc d'un commun accord vers le bureau de Kingsley Shacklebolt, l'Auror en chef, afin de recevoir ses instructions. L'homme avait un air grave, un air qu'il réservait uniquement aux cas particulièrement délicats ou difficiles. Harry sentit son estomac faire un saut désagréable; peut-être qu'il n'aurait pas dû se plaindre autant de son ennui.
— Assoyez-vous, ordonna doucement son supérieur.
Il leur laissa à peine le temps d'obtempérer avant d'enchaîner:
— C'est un meurtre, au Manoir Malefoy. Il vient tout juste d'avoir lieux et je veux que vous alliez enquêter pendant que les pistes sont encore fraîches.
En entendant le nom de famille de son ancien ennemi d'école, le brun ressenti une soudaine peur atroce.
— Qui est la victime? balbutia-t-il, loin de son assurance habituelle.
— Narcissa Black Malefoy.
Il soupira, autant d'angoisse que de soulagement. Drago était en vie... mais il venait de perdre sa mère. Harry n'avait lui-même jamais eu à vivre un deuil aussi important. Il pouvait à peine s'imaginer ce qu'on pouvait ressentir dans ce genre de situations.
Kingsley leur fournit les informations de base qu'il possédait bien que ça demeurait plutôt superficiel. Ils allaient devoir aller investiguer sur place pour en savoir plus et si les témoins étaient en état, ce dont l'Auror doutait fortement, les interroger. Le temps de faire tout cela, ils ne dormiraient probablement pas de la nuit. Autant pour son envie d'aventures.
Juste avant qu'ils ne transplanent vers le Manoir, Agnès attrapa avec douceur son avant-bras pour l'interpeller.
— Harry, je sais que tu veux trouver le coupable au plus vite, mais laisse-moi interroger les témoins. Pendant ce temps-là, tu chercheras des indices, okay?
Il grommela quelque chose d'inintelligible avant d'acquiescer. Sa partenaire était convaincue qu'il manquait de ce qu'elle appelait « la sensibilité féminine » pour gérer les situations délicates. Le brun était un homme direct habituellement, cependant, il était question de Malefoy, son ancien ennemi d'école, cette fois. Ce cas le touchait plus personnellement que les autres qu'ils avaient affrontés ensemble.
— Tu peux interroger Lucius... mais j'aimerais m'occuper de Drago.
Elle pinça les lèvres, incertaine.
— Je t'interdit de le brusquer.
— Promis.
Sans plus de tergiversations, ils apparurent à l'extérieur du Manoir, puisque les barrières magiques entourant la demeure les empêchaient d'y transplaner. Ils marchèrent le long d'une élégante allée bordée de fleurs, puis toquèrent doucement à la porte qui s'ouvrît aussitôt sur le maître de la maison. Ses joues étaient humides de larmes et son regard gris rappelait la couleur du ciel d'un jour pluvieux. Il n'arrivait plus à prétendre quoi que ce soit, leur faisant simplement signe d'entrer d'un geste tremblotant.
Lorsqu'Harry pénétra dans le long couloir de la maison richement décorée, il fut surpris d'y déceler une odeur florale timide, mais indubitablement similaire à celle de Drago qu'il avait involontairement associé à son porteur durant leur scolarité. Lucius les guida jusqu'à la bibliothèque, où le meurtre avait été perpétré il y a quelques heures à peine — enfin en théorie. Il pouvait toujours s'agir d'un empoisonnement auquel cas, il aurait eu lieu plus tôt.
La silhouette gracile de Narcissa reposait toujours sur le canapé, sans aucune blessure apparente. N'importe qui aurait pu croire qu'elle était seulement endormie si ce n'était son pouls qui ne battait plus. Harry commença par lancer les enchantements de procédure afin de sécuriser l'endroit, plaça des barrières magiques et ausculta le corps à distance sans rien toucher. Aucun sortilège ne lui apprit la moindre information utile. Tout laissait à croire que Narcissa s'était simplement endormie et était morte dans son sommeil, mais comment cela se pouvait-il? Elle n'était ni âgée ni malade.
— Bonsoir, monsieur Malefoy, commença alors Agnès d'une voix calme. Je suis l'Auror Clark et vous connaissez déjà mon collègue, l'Auror Potter. Je vous présente sincèrement mes condoléances pour votre femme et je comprends que vous ne voulez sûrement pas en parler tout de suite, mais j'aurais quelques questions à vous posez afin que notre équipe puisse trouver le coupable rapidement. Vous seriez d'accord?
Il hocha la tête, l'air toujours aussi mort de l'intérieur. Son fils s'était volatilisé autre part dans le Manoir et le brun n'osait même pas imaginer dans quel état il devait être. Sans faire part de son trouble, il s'installa silencieusement à la gauche de sa partenaire après qu'ils se furent rendus dans un autre salon plus éloigné. La vue de cadavre, même en très bon état, ne les importunerait donc pas durant l'interrogatoire (et le Manoir Malefoy devait compter pas moins de cinq salons, voire plus).
— Monsieur Malefoy, pourriez-vous nous dire quand et où vous avez vue Narcissa en vie pour la dernière fois et dans quel état elle se trouvait?
— C'était ce midi, pendant qu'on mangeait, ici, au Manoir. Elle avait l'air parfaitement normale. On discutait comme d'habitude, de plein de choses pas vraiment importantes.
— Et si vous repensez aux dernières semaines, vous n'avez remarqué aucun comportement étrange? Personne qui aurait pu lui en vouloir?
— Ça m'étonnerait... ma femme est la gentillesse incarnée. Je l'ai jamais incluse dans, euh, mon travail. Elle avait quelques amis, Lily Evans et Severus Rogue, surtout. Elle était proche de sa sœur Andromeda et de son petit-neveu Teddy.
— Merci beaucoup pour ces informations. Est-ce que vous pensez qu'on pourrait interroger votre fils également?
Lucius haussa les épaules, sans émotion apparente.
— Je sais pas... Il est pas sorti de sa chambre depuis une heure.
Harry, qui était resté muet jusqu'ici, remercia l'homme et lui apprit qu'ils allaient maintenant procéder à une auscultation plus en détail du corps. Peu pressé de les regarder faire, ce dernier prit congé, leur indiquant où trouver la chambre de Drago avant de disparaître quelque part dans l'immense demeure. Le brun se tourna vers sa partenaire.
— Aucun des sortilèges de procédure m'a appris quoi que ce soit, excepté le fait que le corps n'a subi aucune blessure externe ou interne. On n'aura pas le choix de faire un examen plus détaillé.
— Parfait, je m'en occupe. Je vais transporter le corps à l'aile légiste de Sainte-Mangouste. Tu peux tenter ta chance avec Drago, mais sinon, on ira interroger les proches de Narcissa. La thèse de l'accident est assez peu probable dans les circonstances.
— Je suis d'accord, c'est clairement un meurtre.
Il se passa une main dans les cheveux, un tic nerveux dont il n'avait jamais réussi à se départir. Les deux Aurors se souhaitèrent mutuellement bonne chance et partirent chacun de leur côté. Harry gravit au ralentit le long escalier qui menait à l'étage en réfléchissant à la meilleure manière d'aborder un fils en deuil. Malheureusement, arrivé à la dernière marche, il n'avait toujours pas trouvé d'entrée en la matière qui lui convienne. Il se contenta de toquer à la porte résolument close et se permit d'entrer, lorsqu'après une minute entière, aucune réponse ne lui parvint. Il toussota pour annoncer sa présence:
— Drago..?
Une masse informe était étalée sur le lit, les yeux dans le vide fixés au plafond et les joues encore mouillées de larmes qui n'avaient pas séché.
— Euh, je te présente mes condoléances, commença-t-il, même si cette phrase de procédure sonnait plus fausse que jamais. Je suis vraiment désolé de devoir te demander ça, mais... penses-tu que tu pourrais répondre à quelques questions?
Après plusieurs interminables secondes durant lesquelles il avait envisagé de laisser le pauvre garçon en paix, celui releva vers lui son regard, qui semblait aussi dur qu'un diamant brute.
— Qu'est-ce que tu veux savoir, Potter?
— Hum, euh...
Toutes les questions habituelles qu'Harry avait posé des tas de fois désertèrent son esprit.
— Est-ce que... est-ce que... tu as une intuition? De qui pourrait avoir fait ça.
Le jeune Auror n'était du genre à croire en l'intuition humaine malgré tout ce qu'Agnès lui avait dit à ce sujet. Cependant, cette fois, il avait une confiance aveugle en celle de Drago pour une raison qu'il ignorait.
— Non. Non, j'ai pas d'intuition. J'aurais jamais cru que quelqu'un aurait pu un jour vouloir faire ça à...
Sa voix mourut, s'éteignant comme la flamme d'une bougie soufflée.
— Aurais-tu d'autres informations, n'importe quoi, qui pourrait nous aider à avoir une piste?
Le silence s'étira à nouveau, s'enroulant sinueusement autour d'Harry tel un serpent. Il tortilla ses doigts ensemble d'inconfort.
— Je devrais pas te dire ça, commença Malefoy. Ça te concerne aussi...
— Quoi? Comment ça?
Un soupir, puis les yeux d'orage du blond s'ancrèrent dans les siens, le déstabilisant légèrement.
— Ma mère, elle trompait mon père... Avec ta mère.
— Pardon?!
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Coucou ^-^ Que pensez-vous de ce premier chapitre? J'espère qu'il vous a plu! ;)
(Perso je le trouve pas mal 🤭)
Le prochain chapitre sera posté à la même heure jeudi prochain, le jour de l'Halloween!
~𝓈𝓅ℴℴ𝓀𝓎 𝓈𝓅ℴℴ𝓀𝓎~ :0
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