Chapitre 4 : Le bus
Joan, Claire et Ella se figèrent en entendant cette voix féminine hurler.
Une foule se massa à l'autre bout de la cafétéria, auprès d'une personne qui semblait étendue au sol. Joan et Claire aidèrent Ella à se redresser, la tenant chacun par un bras.
Joan avait les yeux rivés vers l'attroupement. Un enseignant aboyait des instructions dans son téléphone à l'attention des secours .
Claire, inquiète, restait focalisée sur Ella :
— Ok, Ella, je ne sais pas ce qui se passe là bas, mais tu es toujours très pâle.
Elle haussa la voix pour se faire entendre dans le vacarme général et capter l'attention de Joan.
— Donc on va sortir d'ici, et on va aller à l'infirmerie !
— T'as raison, sortons-la d'ici, se ressaisit Joan.
Quand Ella sortit de l'infirmerie, elle fut un peu surprise de retrouver ses deux sauveteurs du jour qui l'attendaient, chacun perdu dans ses pensées. Elle trouva cette image un peu mignonne. Ils se retournèrent vers elle, inquiets.
— Hey, me voilà... il est possible que je sois juste un peu anémiée. Il faudra que je fasse une prise de sang mais c'est rien de grave d'après l'infirmière.
Joan fronça les sourcils instantanément et sembla étonné.
— Tu vas faire une prise de sang ?
— Ben oui, elle me trouve pâle et dit que ça pourrait être une simple carence en fer.
— Fallait manger des épinards Barbie, tu vois !railla Claire.
Ella répondit en souriant :
— Vous avez fait connaissance du coup ?
— Pas vraiment ! Pas très loquace, le bonhomme...
Johan hocha les épaules :
— Je n'avais rien à dire.
« Super, l'ambiance » se dit Ella. Elle leur demanda si ils avaient plus d'informations sur ce qui s'était passé au réfectoire.
— Ils ont emmené une fille qui serait tombée raide morte, lui apprit Claire, pour le moment on ne connaît pas du tout les causes du décès. Il s'agirait d'une fille de première année... c'est horrible... elle était avec sa soeur et se serait effondrée devant elle, d'un coup...
Ils restèrent tous les trois un moment sans prononcer un mot, un peu sonnés.
Ella n'en revenait pas. Deux morts en deux jours... et elle faisait des malaises depuis deux jours justement !
Se pouvait-il que ce soit un virus et pas une simple anémie ? Si c'était le cas, se pouvait-il qu'elle soit la prochaine ?
« Non, se rassura-t-elle, pour le prof, ils ont parlé d'infarctus, il me semble... »
Joan gardait la tête baissée vers le sol, l'air pensif. Il écarta une mèche de cheveux qui lui tombait dans les yeux.
Ella détailla quelques secondes l'harmonie parfaite de son visage.
« Ses sourcils épais, ses pommettes un peu saillantes, sa mâchoire légèrement carrée, sa bouche si... »
Il leva la tête et ses yeux surprirent ceux d'Ella, soudain gênée.
Il ne lui sourit pas. Sans laisser transparaître aucune émotion, il lui demanda d'une voix égale :
— Ella, j'aimerais te parler, s'il te plait. Peux-tu m'accorder une heure avant la soirée d'intégration ? C'est important.
La jeune femme sentit qu'il ne s'agissait pas d'une invitation au flirt, ni d'une quelconque manoeuvre. Intriguée, elle accepta. Il s'adressa également à Claire :
— Clarisse, ça t'ennuie pas si finalement je te la vole et que je la dépose ensuite directement à la soirée ?
— Claire, pas Clarisse, rectifia-t-elle simplement légèrement vexée. Non ça ne me dérange pas, évidemment. Si tu veux, tu peux même rester avec nous, on va retrouver quelques amis là-bas.
— On verra, oui. Je dois vous laisser pour le moment. Ella, je passe te prendre chez toi à 18h ?
Elle acquiesça d'un signe de tête.
— Clarisse, à plus ! lança-t-il en s'éloignant, un sourire moqueur collé sur le visage.
Claire écarquilla les yeux, faussement outrée.
— Je rêve ou Ken vient encore de m'appeller Clarisse ? Mais c'est qui, ce dégénéré ?
Ella ria en attrapant son amie par l'épaule. Soudain, elle réalisa que Joan ne pouvait pas savoir où elle habitait. Elle l'appella :
— Joan ! Mais tu n'as pas mon adresse !
Sans cesser de marcher, il se retourna vers elle en souriant :
— Si, je l'ai ne t'inquiète pas..., dit-il avant de disparaître à l'angle d'un couloir.
Claire, étonnée, dit tout haut ce qu'Ella pensait tout bas.
— Super mystérieux, super romantique ou super psychopathe ? T'as une chance sur trois ! Dans le doute, tu m'envoies un message toutes les 15 minutes... Non, toutes les 5 minutes !
Ella leva les yeux au ciel en riant.
— Va pour toutes les 15 minutes !
Une fois chez elle, elle se laissa tomber sur son lit.
Son petit appartement, situé dans un vieil immeuble, ne faisait qu'une trentaine de mètres carrés. Elle avait eu un coup de coeur pour l'immense hauteur sous plafond et la magnifique alcôve dans son salon qui lui avait permis d'installer son lit derrière d'immenses rideaux. Malgré quelques cafards nocturnes qui apparaissaient parfois dans la salle de bains, Ella avait réussi à faire de cet appartement vétuste, son petit cocon.
Et puis en toute franchise, elle n'avait pas les moyens de trouver mieux.
Elle s'assoupit un moment...
Un bus de 24 étudiants se tortillait dans les virages sinueux d'une petite route de Montagne. Ella et Fanny, assises l'une à côté de l'autre riaient des blagues d'Antoine et de Louis, assis juste devant elles. Tous faisant partie de l'équipe de natation de leur université. Ils étaient impatients de découvrir leur hôtel et de se rendre à la soirée de bienvenue.
Ella avait prévu de porter une robe en soie qui mettait sa silhouette en valeur. Elle souhaitait être belle aux yeux d'Antoine. Elle cherchait son baume à lèvres dans son sac à mains. Un peu fébrile, elle maudissait d'être si sensible au mal des transports. Le labello lui glissa des mains et roula au sol. Alors qu'elle se baissait pour l'attraper, elle se sentit poussée en avant.
Des crissements aigus. Des cris. Des objets qui volent, un choc brutal. Une douleur dans la nuque, son corps entier secoué comme une poupée de chiffons. Un choc à nouveau, une chute, des bruits sinistres de ferraille qui hurle. Un vacarme qui déchire tout... du rouge dans les yeux... du noir... une douleur atroce... son coeur au galop...
Le silence absolu. Le calme... Le Néant.
Ella se réveilla d'un sursaut. Des larmes roulaient sur ses joues tandis qu'une douleur terrible lui serrait les entrailles.
« Fanny, Antoine, Louis... tous morts... »
Ces images semblaient appartenir à une autre vie. Ils n'étaient que les vestiges d'un passé auquel elle se refusait à penser.
Elle savait que si elle s'abandonnait trop à ses souvenirs, elle glisserait à nouveau dans les ténèbres.
Répondant à son instinct de survie, elle balaya ses larmes d'un geste vif.
*****
Grâce à vos critiques, j'ai tenté de raccourcir mes chapitres... Que pensez-vous de la taille de celui-ci ? Toujours trop long ?
Dans les prochains Chapitres, vous découvrirez des nouveaux personnages très importants ! J'espère que celà vous plaira :)
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