Premier pacificateur
Nerveusement, il faisait les cents pas dans la salle immaculée et vide, se rongeant les ongles. Il ne devrait pas être aussi nerveux, tout marcherait comme il le voudrait, comme il l'avait prévu. Elles n'avaient pas le choix, elles avaient bien trop peur.
Mais tant de choses pouvaient changer la donne. Elles étaient puissantes, elles pouvaient très bien décider de se débarrasser de lui plutôt que de collaborer. Un bruit se fit entendre à l'extérieur. Il tira sur ses manches bishop si à la mode à Aryar et qu'il détestait tant pour qu'elles tombent parfaitement bien. Puis il croisa les bras sur son torse, écarta les jambes pour se donner une allure martiale tandis que son visage se fit impassible.
Six femmes vêtues de magnifiques robes et les cheveux couverts par un chapeau pointu entrèrent avec un air aussi froid que lui. Il les dévisagea en levant un sourcil interrogatif. La divine Nephtys, sa suzeraine, avança. Elle avait un sourire léger et un visage relâché. C'était donc fait.
Il se sentit moins tendu subitement, même si d'autres soucis débarquaient avec ces nouvelles responsabilités.
— Notre décision a été prise. Vous avez été élu à l'unanimité premier pacificateur ! déclara solennellement Nephtys.
— Parfait alors ! Chacun de nous à ce qu'il veut.
La bouche de Vénus se plissa instantanément. Qu'il aurait aimé assister aux discussions et la voir plier.
— Ne croyez pas que vous vous en sortirez aussi bien ! intervint Déméter la vampire. Vous allez prêter serment, un serment de sang, qu'on soit certaine que vous teniez vos engagements.
— Et vous en ferez un ?
— Seigneur Harper ! protesta Nephtys.
— Votre excellence il me semble. N'est-ce pas ainsi que vous devez m'appeler désormais ?
Il sentit la colère qui émanait d'elle, il la savourait presque. Il avait fait plier les Divines Conseillères, lui un simple terrien, lui la bâtard rejeté par tous.
— Vous avez raison votre excellence, temporisa Nephtys. Faites ce serment, nous ne vous demandons qu'une garantie. Vous avez notre parole à nous six que de notre côté nous respecterons notre part du marché.
— Très bien, accepta-t-il en s'inclinant.
Il savait s'incliner, se plier aux ordres quand c'était nécessaire. Les autres le trouvaient raisonnable ainsi.
Tendant sa main droite il patienta jusqu'à que Vénus lui tendit un poignard, un vieux poignard comme on n'en faisait plus désormais, le genre de reliques que les divines tenaient de leurs ancêtres et transmettaient précieusement à leurs enfants. Il trouvait cela ridicule. Sans cérémonie ni précaution il prit l'arme tant chérie et s'entailla la paume en prononçant la formule consacré :
— A ma langue est désormais lié mon sang ! Le fil de ma vie est à partir de maintenant dans les mains de ce serment ! Je jure de toujours protéger et défendre Aryar, de ne jamais attenter à la vie ou la sécurité du sang Divin, de ne pas toucher à l'organisation de la cité et de toujours promouvoir Aryar, de la soutenir publiquement jusqu'à ma mort et faire ce qui est nécessaire pour son rayonnement dans l'univers.
Toutes soupirèrent de soulagement et il ajouta malicieusement :
— Du moment que serment est tenu du côté des six Divines de ne jamais attenter à ma vie et de me laisser mener à bien mes projets.
Il décolla le poignard de sa paume et traça avec son sang qui gouttait, la marque de la mort, ignorant leurs regards ténébreux. Elles ne devaient guère être contentes d'avoir elles aussi été impliqués là-dedans mais elles n'allaient pas s'attendre tout de même à ce qu'il se laisse sacrifier seul.
Le sang au sol se mit à fumer et disparut. Alors il se releva et les dévisagea.
— Qu'il en soit ainsi ! déclara Shakti. Allons-nous préparer ! Ne tardez pas excellence !
Elles se retirèrent, exceptée Nephtys. Une fois la porte fermée elle fit apparaitre un divan et s'y assis et jeta son chapeau à côté d'elle.
— Vous étiez obligé ?
— Oui. A part vous ma suzeraine je n'ai confiance en aucune d'entre elles et vous avez toutes les raisons de me tuer.
— Je vous aurez protégée, toujours, ou ne serait-ce que prévenu en cas de danger.
— Il aurait fallu qu'on vous prévienne. Et puis à quoi bon y revenir ? Ce qui est fait est fait.
Son regard se posa sur le sol où quelques minutes plutôt il avait tracé lui-même le symbole qui pourrait lui coûter la vie.
— Nous vous avons confié Aryar seigneur Harper, vous auriez pu vous montrer plus agréable tout de même ! Vous, vous ne nous avez encore rien offert.
— Je ne vous aurez pas trahi, j'ai besoin de vous, souvenez-vous en !
— Je m'en souviens, déclara-t-elle en se levant et rejoignant la seule fenêtre de la pièce.
Il l'y rejoignit et observa la ville en contrebas où il y avait toujours foule, d'humeur festive en ce jour à l'idée de connaître le nom de son nouveau premier pacificateur.
— Bientôt je vous libérerais de Lestrygor et ces bravades et vous serez aimé du peuple tout entier désormais que je suis à vos côtés. Ce n'est pas rien.
— C'est vrai. Mais c'est encore une guerre qui nous attend, soupira-t-elle en se retournant vers lui.
— Je l'emporterais sans souci. Petit à petit Lestrygor va perdre tous ses alliés qui se rallieront à moi. Je suis le maître de l'univers désormais, et l'homme le plus puissant qui n'ait jamais existé. Ils préféreront me soutenir, tout comme vous, surtout avec votre soutien. Ensemble rien ne peut nous arrêter.
— Je me sentirais tout de même plus en confiance si vous repreniez l'empire de Dorémy ou deveniez empereur.
— Cela éveillerait leur méfiance. Faites-moi confiance mon champion est digne de confiance et c'est moi, si méfiant qui vous le dis. Il se soumettra aux Divines je vous le promets, aux futures Divines, mais il le fera. Athéna aura tout pouvoir sur lui.
La Divine quitta la fenêtre pour retourner à son divan.
— Vous n'avez pas choisi la plus éclairée de mes filles.
— Pourtant c'est celle que vous nommerez Divine quoi qu'il arrive.
Il la connaissait trop bien. Il savait qu'elle choisirait la fille de l'amour plutôt que l'une de celle issu d'une alliance politique. Et la manière dont elle se mordit les lèvres lui confirma.
— Le Divin Phœbus sera votre second, apprit-elle pour changer de sujet. Ce sera parfait. Il connait parfaitement Aryar, son rôle, on n'aurait pu rêver meilleur second.
— Le fils de Vénus ?
Elle leva les yeux au ciel.
— Oui, mais pas que.
— Elle a voulu l'y placer pour me surveiller.
— Pas du tout ! Elle ne l'a même pas désigné lui comme second.
— Vraiment. Et il a eu assez de voix ?
Il savait que les divines elfes, fées et anges soutenaient en général le même candidat qui était l'un des leurs, et certainement pas un immortel.
— Il est très apprécié de chacune de nous. C'est l'un des meilleurs Divin, il aime Aryar, il nous aime, obéit à sa mère au doigt et à l'œil. S'il avait été une fille il aurait fait une parfaite Divine conseillère.
— Alors je n'ai aucune chance de le retourner contre sa mère ?
Elle se leva avec un soupir et réinstalla son chapeau sur ses boucles rousses.
— Non et oubliez cette idée ! Il est temps de rejoindre la fête ! Puis-je jeter un œil à votre discours.
— Je n'écris jamais de discours Nephtys ! révéla-t-il avec un sourire amusé.
Cela semblait moins plaire à la Divine qui vit son sourire tomber.
— Mais enfin...
— Faites-moi confiance ! Je suis un excellent orateur et si je suis si aimé c'est justement pour ma spontanéité. Alors détendez-vous. Je ferai un superbe discours.
Elle semblait hésiter à protester mais il insista :
— Confiance ! Maintenant je vais à cette fête et je vais devenir son excellence le premier pacificateur.
Il s'inclina devant elle et franchit la porte la tête haute, la peur au ventre. Il n'était plus Gregory Harper aujourd'hui, il n'avait plus rien de ce bâtard terrien moqué par tous ses camarades, il était le premier pacificateur et avait dans ses mains l'univers tout entier. Pourtant en entrant dans cette salle ou chacun était avec ses proches, riant, échangeant avec plaisir, attendant l'annonce des Divines, il aurait juste aimé avoir sa mère à côté de lui, à onze ans il était peut-être le maître de l'univers, mais il était aussi un petit garçon qui avait besoin d'une main aimante pour le soutenir.
Ce texte avait été écrit à l'occasion de mes un ans sur Wattpad.
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