Prologue

16 janvier 1999

Louis se regarda dans le miroir de la salle de bain, reposant son rasoir dans le meuble. Il passa la main dans ses mèches rousses pour les ramener vers l'arrière, dans une jolie coupe Pompadour qui mettait en avant sa mâchoire carrée et son nez droit menant à de jolies lèvres rosées. Il fut incapable de retenir un sourire quand il remarqua un petit garçon derrière lui dans la glace. Ce dernier avançait timidement dans sa direction, une feuille de papier entre les mains. Il avait les mêmes cheveux que son père mais leur ressemblance s'arrêtait là. Ce n'était qu'un bambin avec une bouille ronde et des yeux marrons tirant vers le doré tout bonnement hypnotisant.

-Tu veux quelque chose, Aaron ?

- Maman a dit de te montrer mon gâteau, répondit-il alors que Louis le prenait dans ses bras.

- Oh, tu l'as dessiné ?

Le garçon hocha la tête et lui montra le dessin. Il s'agissait d'un simple rond marron couvert de tâches roses et de bougie.

- Mm... Tu veux un gâteau au chocolat ?

- Oui, mais je veux plein de framboise dessus ! Et des bougies !

- Combien de bougies, Ronnie ?

Aaron regarda son dessin, puis son père, puis ses doigts. Combien de bougies ? Il leva tour à tour quatre doigts et tendit sa main potelé vers lui en s'exclamant :

- Quatre ! Parce que j'ai quatre ans !

- C'est bien, mon chéri...

L'homme sortit de la salle de bain et alla dans la chambre de son fils avec pour objectif de l'habiller. Il eut la surprise de trouver sa femme dans la pièce. Elle était en train de ressortir tous les vêtements de bébé rangés dans l'armoire avec un petit sourire. Lui qui la croyait encore au lit...

Sarah et lui étaient mariés depuis cinq ans, mais ils s'étaient connus sur les bancs de la faculté de droit. Elle était rousse, elle aussi, et c'était de elle que Aaron tenait ses yeux.

- Je peux savoir ce que tu fais, ma chérie ? Je pensais que tu voulais garder ses vêtements...

- Oui, oui, je les garde ne t'inquiète pas. Ils vont juste servir à quelqu'un d'autre, j'espère...

- Pourquoi, demanda leur fils.

Il laissa son papa le poser au sol et le regarda avancer vers son épouse pour l'embrasser. Il fit la moue, mécontent de ne pas obtenir une réponse immédiate à une de ses questions le jour de son anniversaire ! Et dégoûté de voir son papa aussi collé à sa maman. Il n'aimait pas quand ils faisaient ça... Pourtant, les deux adultes ne faisaient pas beaucoup attention à lui, les yeux plongés dans ceux de l'autre. Ils semblaient sur un autre monde, un monde de grands qu'il ne pouvait pas encore comprendre. Plus vieux, il saurait pourquoi tout devient invisible autour de soi quand on est avec l'être aimé... Mais pour le moment, tout ce qu'il voulait c'était son gâteau !

- Tu es sûre, Sarah?

- Sûre de chez sûre, je viens de faire un test. Je suis enceinte.

- Tu es fantastique, mon amour !

- Je sais, je sais... Ronnie, viens par là. Je vais t'expliquer quelque chose de très important.

Piqué par la curiosité, et aussi parce quelque chose de très important, c'était quelque chose de plus important que son gâteau, le petit garçon rejoignit ses parents. Ces derniers le regardèrent en souriant et s'assirent sur le lit. Sarah le fit monter sur ses genoux et posa la tête sur l'épaule de son époux.

- Maman attends un bébé, expliqua-t-elle, tu vas devenir grand frère.

- Grand frère ? Comme Christian et Jean ?

- Christian et Jean sont cousins, mais oui, c'est en quelque sorte la même relation qu'eux, répondit Louis.

- Oui. Tu vas devoir veiller sur lui et montrer l'exemple. Il faudra qu'il soit fier de toi comme nous le sommes.

- Promis, maman ! Promis, promis !

La rousse sourit et embrassa la tête du petit Aaron. Son innocence était touchante. Qui ne pouvait pas fondre devant lui ? Elle décida de chasser son mari pour habiller son fils et répondre à ses questions sur le bébé. Louis descendit donc dans la cuisine après avoir enfilé rapidement un jean et un polo. Il commença à préparer le gâteau qu'on lui avait expressément commandé dans la salle de bain, un large sourire sur le visage.

Sa famille allait s'agrandir. Il aurait pu célébrer cette nouvelle par autre chose qu'un baiser et un simple dialogue avec son enfant mais il n'était pas du genre à montrer ses sentiments. Il était heureux, mais il ne le montrerait pas comme quelqu'un d'autre. Sa femme savait qu'elle avait eu le droit là au maximum de son affection et de sa joie. Et ça lui convenait parfaitement. Parce qu'elle avait appris à le connaître.

Il mit le gâteau au chocolat au four et se tourna vers l'horloge de sa cuisine. Personne ne devrait arriver avant une bonne heure. Toute la famille allait se réunir pour fêter l'anniversaire du petit, il allait encore être pourri gâté. Pas qu'il détestait ça, mais il voulait l'élever avec les mêmes valeurs que celles que ses parents lui avaient inculquées. Le respect et le travail. Alors il n'aimait pas beaucoup savoir qu'il aurait encore tout ce qu'il souhaitait sans faire d'efforts. Son rôle de grand frère le responsabiliserait sûrement. Qui sait ?

Alors qu'il allait préparer la table de la salle à manger, il entendit quelqu'un sonner à la porte. Cela le surprit un peu mais il se dit que la mère de Sarah avait encore dû vouloir arriver plus tôt pour les aider à tout préparer. Lui qui détestait avoir quelqu'un dans les pattes en cuisine... Il alla ouvrir et manqua de crier envoyant qui se trouvait devant lui, à moitié caché derrière un énorme bouquet de roses blanches et un ours en peluche.

- Surprise !

Il détailla l'asiatique qui lui souriait, accentuant le plissement de ses yeux noirs, ses cheveux sombres tombant sur son visage fin. Éric, son meilleur ami, chirurgien de profession et en perpétuel voyage pour différentes formations et conférences. Ça devait au moins faire un an qu'il ne l'avait pas vu ! La journée commençait beaucoup trop bien, il espérait qu'elle continuerait ainsi !

- Éric ! Ça faisait longtemps ! Bon Dieu, que fais-tu ici et aussi tôt ?

- D'après ta magnifique femme, j'ai beaucoup de choses à te dire,il faut que j'arrive plus tôt et que je te persuade de me laisser prendre un coin de ta cuisine. Tu me laisses prendre un coin de ta cuisine ?

- Il vaut mieux que ce soit toi plutôt que ma belle-mère, rigola le roux en s'écartant pour le laisser entrer.

Le chirurgien entra en souriant et il le débarrassa de ses cadeaux pour lui permettre de retirer son manteau et son écharpe. Sarah descendit au même moment avec son fils qui se précipita dans les jambes de celui qu'il considérait comme un oncle. Éric rigola et parla un peu avec lui de son anniversaire avant de lui tendre l'ours en peluche qu'il avait ramené de son dernier voyage à Londres spécialement pour lui. Après un merci et un gros câlin, le bambin fila jouer dans le salon en serrant son nouveau doudou contre lui. Sarah, elle, eut le droit au bouquet, qui lui tira un sourire :

- Des roses blanches...

- Comme toujours. Elles te vont si bien...

- Merci, Éric. Je vais aller les mettre dans un vase, dit-elle en disparaissant à la suite de son fils.

Les deux amis échangèrent un regard complice puis se rendirent ensemble dans l'antre sacrée de Louis, la cuisine. Éric s'assit dans un coin, comme il l'avait promis, et le regarda reprendre la préparation du repas. Ce fut à l'asiatique d'engager la conversation, comme d'habitude :

- En fait, Louis, j'ai quelque chose à t'avouer. Mais je sais pas trop comment m'y prendre.

- Tant que tu ne me dis pas que ma femme m'a trompé avec toi, tout va bien, rigola son ami.

- Justement, souffla-t-il.

- Pardon, l'interrompit Louis dans un cri.

- Justement, je n'aime pas les femmes, termina précipitamment le chirurgien, je suis gay !

Un ange passa. Il n'avait pas pensé l'annoncer comme ça. Il avait pensé le faire plus subtilement, à vrai dire. Mais il avait paniqué en voyant son meilleur ami se mettre en colère. Ce dernier avait arrêté ce qu'il faisait et se contentait de le fixer comme une bête curieuse. Il avait besoin d'une réaction, d'entendre sa voix, il était si important pour lui. Mais il ne disait rien. Au bout d'une longue minute, il recommença à éplucher ses pommes de terre.

- Louis ?

- Je... Je pensais les homosexuels plus...

- Colorés ? Folles ? Désolé de te décevoir, tout le monde ne rentre pas dans les petites cases des préjugés, soupira-t-il.

- Je ne voulais pas te blesser. Je ne m'y attendais pas c'est tout. Tant que tu trouves l'amour et que tu es heureux, alors ça me va. Tu es mon meilleur ami, avec ou sans... ça.

- Hum... 

« Mais c'est toi que j'aime », ajouta-t-il pour lui-même en croisant les yeux gris qui pesaient sur lui. Il ne pourrait jamais l'avouer à voix haute. Et ça finirait par le tuer, sûrement, de garder cela pour lui. Mais il ne voulait pas le perdre...

Le sourire reprit vite possession des lèvres de Louis. Il était heureux. Ce jour était heureux. Sa vie depuis son mariage et la naissance de son fils était heureuse.

Mais tout allait vite basculer. 


HEY !

J'espère que ce début d'histoire vous plaît, pour ceux ou celles qui désireraient avoir un casting des personnages, vous pouvez le retrouver sur mon rantbook, Rantbook.

Bisous !

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