Happy new year
30 décembre 1999
La sonnerie du téléphone fit sursauter Louis qui somnolait sur son bureau. Un vent de panique souffla en lui. Il ne se rappelait pas avoir de rendez-vous durant la matinée, pourtant. Il était tellement perturbé en ce moment qu'il n'avait peut-être pas fait attention. Il décrocha rapidement après avoir réajusté sa cravate.
- Oui, Jeanne ?
- J'ai Éric en ligne, il a dit qu'il voulait vous parler. Je vous le passe ?
- Oui, s'il vous plaît.
Durant les petites secondes que dura le transfert d'appel, le roux sentit son cœur accélérer. Il eu l'impression de suffoquer et que ses larmes allaient recommencer à couler.
- Salut ! Tu vas bien ?
La voix de son meilleur ami fit disparaître la boule dans sa gorge et il s'enfonça un peu plus confortablement dans son siège avant de répondre.
- Je suis un peu seul à la maison, sans Aaron, mais ça va. Et toi ?
- C'est le calme plat à l'hôpital, pour une fois. Tu fais quelque chose demain soir ?
- Non rien. Je pensais rester à la maison devant un film.
- Écoute, je sors avec des amis dans un bar... je sais que tu aimes pas trop ça,mais...
- Tu ne devrais pas t'en faire autant pour moi, tu sais, je ne le mérite pas, chuchota Louis en serrant le combiné dans son poing.
- Ne raconte pas n'importe quoi. Tu veux venir ?
L'avocat se mordit la lèvre. Il voulait refuser pour retourner sous sa couette, pleurer et dormir tout son soûl. Il savait que ce n'était pas la solution à ses interrogations. Mais cela l'épuisait suffisamment pour dormir, même s'il demeurait quand même fatigué de verser des larmes. Il ouvrit la bouche pour décliner mais il fut coupé par Éric.
- Allez, s'il te plaît, dis oui, le supplia-t-il, j'ai vraiment envie de te présenter certaines personnes.
Comment pouvait-il refuser ? L'asiatique avait vraiment l'air de vouloir qu'il vienne. Il retint un soupir et ferma les yeux. Au pire, il ne resterait pas longtemps. Puis peut être que voir Éric lui ferait du bien ?
- Très bien, répondit-il, je viendrais. On se rejoint directement là-bas ?
- Oui ! Je donne l'adresse à ta secrétaire, ne t'embête à trouver une feuille blanche dans tes papiers ! À demain !
- Ok... À demain...
Louis transférera l'appel à sa secrétaire et raccrocha le téléphone. Il passa une main sur son visage en soupirant. Pourquoi tout se mélangeait dans sa tête ? Il l'avait pourtant compris. Il était amoureux de Éric et Éric était amoureux de lui c'était pourtant simple, non ? Non, ce n'était pas simple. Il avait un enfant, il n'était pas sûr qu'il comprenne que son papa puisse aimer les hommes et les femmes du haut de ses presque cinq ans. Et puis, il y a avait ses parents et ceux de Sarah. Si jamais ils refusaient cette relation, ils essaieraient sûrement d'obtenir la garde de Aaron. Et il était hors de question qu'il perde son fils. Alors quoi ? Il devrait imposer à Éric une relation cachée ?
Il soupira longuement. Il avait passé l'âge de s'en faire pour des problèmes de cœur. Il ne faisait qu'y penser quand il ne pleurait pas ou qu'il ne dormait pas. C'était épuisant... Il attrapa le dossier qu'il était censé traiter depuis au moins une heure et il tenta de se concentrer dessus. Qui sait, avec un peu de chance, il réussirait à oublier que la voix de Éric l'avait apaisée en à peine quelques mots. Et que son cœur battait un peu trop vite à chaque fois qu'il pensait à lui.
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31 décembre 1999
Louis regarda le papier sur lequel Jeanne avait marqué l'adresse du bar où il était censé retrouver son meilleur ami pour fêter le nouvel an. Il tourna la tête vers le miroir de sa chambre et grimaça. Des cernes violacés se dessinaient sous ses yeux, faisant ressortir la pâleur de sa peau et trahissant son état de fatigue. En même temps, comment pouvait-il croire ne serait-ce que quelques secondes que personne ne remarquerait rien ? Cela faisait plusieurs jours qu'il se couchait tard après avoir pleuré pendant au moins une heure ou deux. Il pensait que verser des larmes pourraient le libérer de tout ce qu'il avait en lui mais c'était apparemment totalement inefficace. Il remit un peu de cire dans ses cheveux roux pour qu'ils tiennent en place et vérifia sa tenue. Un jean brut et une chemise noire. Sobre. Comme ça lui correspondait bien... Il laissa échapper un faible rire, plein d'ironie envers lui-même, puis quitta la salle de bain.
Il descendit dans l'entrée pour enfiler son manteau noir et l'écharpe blanche que Sarah lui avait acheté avant de sortir et de rejoindre sa voiture. La température extérieure n'est pas si désagréable, après les dégâts que la tempête avait laissée derrière elle... Mais les nuages qui cachaient la lueur des étoiles et de la Lune ne lui donnaient pas beaucoup envie de rester dehors à regarder le ciel. Il consulta une dernière fois le chemin indiqué sur le papier et monta dans sa voiture. Il démarra et pris la route de la ville, non sans un dernier soupir fatigué.
En arrivant au niveau du bar que l'on lui avait indiqué, Louis fut surpris de ne voir que quelques fumeurs à l'extérieur. Éric avait apparemment bien choisi l'endroit, il n'y avait pas l'air d'y avoir beaucoup de monde même pour un réveillon. Il le cherchait du regard parmi les personnes présentes devant l'entrée mais ne le vit pas. En revanche, l'un des hommes qui fumait s'approcha de lui et demanda :
- Tu es Louis, c'est ça ? L'ami de Éric ?
- Euh... Oui. Et tu es ?
- Ah, excuse-moi, je manque à mes devoirs. Je suis David, un des amis qui l'accompagne ce soir, lui répondit-il en lui tendant la main, comme il faisait froid et que je restais fumer dehors il t'a décrit rapidement pour que je te reconnaisse et te dise qu'il est à l'intérieur.
- Enchanté, souffla l'avocat en serrant sa main.
Il n'aurait pas vraiment dû être surpris que les amis de Éric parle tout autant que l'asiatique. David lui laissait une agréable impression. Ses yeux chocolats brillaient de malice sous la lumière du lampadaire et ses cheveux châtains attachés en queue de cheval sur le bas de sa nuque lui donnait un petit air de rockeur accentué par sa veste en cuir et son jean troué. L'homme, qui avait terminé sa cigarette, lui fit signe de rentrer avec lui avec un sourire révélant de jolies dents blanches bien alignées. Louis sentit son cœur faire une embardée. S'il n'y avait pas eu Éric, serait-il tombé amoureux de David ? Il chassa rapidement ses pensées et le suivit à l'intérieur. Le châtain le guida jusqu'à une table où Éric était installé avec un homme brun. Ils rigolaient ensemble et Louis se sentit aussitôt jaloux de le voir heureux avec un autre. Deux femmes passèrent à côté de lui et posèrent des verres sur la table avant de s'asseoir à côté de son meilleur ami. Il haussa un sourcil. S'agissait-il des petites amies de David et de l'autre homme ?
- J'ai croisé ton ami, Éric, annonça le châtain en s'asseyant.
Quand l'asiatique se tourna vers lui, avec son sourire éblouissant et ses yeux pétillants, Louis sentit son cœur s'arrêter. Cette expression... il aurait voulu la voir tous les jours, toutes les heures, toutes les minutes et toutes les secondes du restant de sa vie. Il aurait voulu en être la source. Non. Ce n'était pas juste un souhait. C'était un besoin. Un besoin qui faisait s'envoler des papillons au creux de son ventre, qui formait une boule dans sa gorge et qui faisait trembler ses jambes. Il n'avait ressenti ça qu'en voyant le sourire d'une seule personne dans sa vie : Sarah. Cela voulait-il donc dire que l'amour qu'il portait au chirurgien était tout aussi fort ? Depuis quand ?
- Louis ! Je suis content que tu sois venu, s'exclama son ami en poussant les deux jeunes femmes pour le rejoindre, attends je vais te présenter !
- Euh... ouais, ok, souffla le roux en peinant à reprendre le cours normal de ses pensées.
- Alors, il y a David, que tu as déjà rencontré dehors, et voici son compagnon, Christophe, annonça-t-il en lui montrant l'homme brun, et ensuite tu as Claire et Anna, qui sortent ensemble elles aussi.
- Je... Enchanté...
- Oh, Éric ! Tu ne l'avais pas prévenu, demanda Anna.
- Prévenu de quoi ? Il n'a pas besoin de me prévenir que vous êtes homosexuels. Ce n'est pas comme si ça me dérangeait.
Louis ne put s'empêcher de se trouver hypocrite. Évidemment que ça ne le dérangeait pas. Il aimait un homme. Il aimait son meilleur ami. Et il ne savait pas ce qu'il devait faire de ce tumulte de sentiment qui avait élu domicile dans son cerveau.
- Je ne parlais pas que de ça, pouffa Anna en passant une main dans ses cheveux bruns bouclés, on est dans un bar gay, ici. Tu es sûr que ça ne te dérange pas ?
- Pourquoi ça devrait être le cas, répondit l'avocat en toisant la jeune femme à la peau noire.
Cette dernière explosa de rire et déclara qu'elle l'aimait bien. Sa petite-amie, Claire, proposa d'aller lui chercher un verre de bière. Il la remercia avec un sourire et s'installa entre Éric, qui avait repris sa place sur la banquette, et Christophe. L'homme était plutôt grand et très fin, les cheveux bruns coupés courts et des yeux verts perpétuellement posés sur son amant. David, qui était à la droite de Christophe, caressait distraitement sa main en parlant avec Anna.
- Tu vas bien, lui demanda Éric en se penchant vers lui, tu as l'air fatigué.
- Je... J'ai beaucoup de mal à dormir ces derniers temps, bafouilla-t-il en essayant de ne pas paraître troublé par leurs épaules qui se touchaient.
- Quelque chose te tracasse ? Tu peux m'en parler, tu sais ?
- Oui, je sais. Mais pour le moment je dois mettre des choses au clair dans mon esprit.
Son meilleur ami pencha légèrement la tête sur le côté mais n'insista pas. La soirée se passa agréablement bien. Louis s'entendait parfaitement avec le groupe d'amis et partager ce moment avec eux lui fit beaucoup de bien. Il ne pensait plus à ses soucis... Et c'était tout ce qui comptait.
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1er janvier 2000
- Cinq... Quatre... Trois... Deux... Un... Bonne année !
Louis leva son verre de vodka et trinqua avec le groupe d'amis, auxquels quelques une de leurs connaissances s'étaient ajoutées. Il avala le shot et grimaça légèrement en sortant le liquide lui brûler la gorge. Il vit que David et Christophe s'embrassait tout comme Anna et Claire. Il se tourna vers Éric et sourit en croisant son regard. Tout l'alcool qu'il avait avalé brouillait sûrement ses sens, mais il le trouvait encore plus beau que d'habitude. Il avait envie de l'embrasser lui aussi pour lui souhaiter la bonne année. Oh Dieu oui, ce qu'il avait envie de l'embrasser. Il se pencha vers lui, vers ses lèvres si attirantes...
Et toucha sa joue. L'asiatique avait tourné la tête, pensant qu'il voulait juste lui faire la bise.
- Bonne année, Louis ,s'exclama-t-il en souriant et en embrassant sa joue à son tour.
- À toi aussi...
Louis venait de se rendre compte qu'il venait de frôler la catastrophe. À peu de choses près, il embrassait son meilleur ami. Il était trop inhibé pour penser correctement. Il devrait peut-être sortir prendre un peu l'air, juste le temps de se reprendre et de ne plus risquer de se trahir ainsi. Il ne pouvait pas faire ça. Pas maintenant alors qu'il ne savait même pas exactement ce qu'il voulait...
Il se tourna pour annoncer à Éric qu'il sortait un peu mais ne le trouva plus près de lui. Il n'était pas non plus auprès de ses amis. Il leva la tête vers la piste de danse aménagée au centre. Et il le vit. Son monde bascula. Non. Ce n'était pas possible. En seulement quelques secondes, alors qu'il était plongé dans ses pensées, comment... ?
Il attrapa sa veste et son écharpe et les enfila rapidement. Claire le remarqua et lui demanda où il allait. Sa gorge se serra. Il voulait sortir, partir, effacer ce qu'il avait vu de sa mémoire, alors pourquoi le retenait-elle ?
- Tu t'en vas, insista la jolie brune alors qu'il ne répondait pas.
- Je... Ouais. Dîtes à Éric que je suis désolé, je me sens pas bien.
- Oh... ok... à la prochaine, alors...
- Ouais...
Il fuyait. Il savait qu'il fuyait. Il était lâche. Mais cette image... Non, il devait oublier. Partir. Il bouscula les quelques personnes le séparant de l'entrée du bar et regagna l'extérieur. Aussitôt, la légère bruine l'accueillit, mouillant ses joues... Non, ce n'était pas les petites gouttes qui pouvait les tremper comme ça. C'était des larmes. Ses larmes. Il s'éloigna du bar, la démarche chancelante. Il était trop ivre pour rentrer en voiture. Il entra dans une cabine téléphonique et entra quelques pièces dans l'appareil. La sœur de Sarah. Elle serait la seule qui pourrait le comprendre. Il fallait qu'il l'appelle...
- Allô ?
- Au-Aurélie... Je... Tu es chez toi ? Je...
- Louis ? Louis, c'est toi ? Tu pleures ?
- Je peux venir do-dormir chez toi ? Je ne peux pas rentrer chez moi, j'ai trop bu... Et... je sais plus quoi faire... Je sais plus...
- Calmes-toi, je viens te chercher. Dis-moi où tu es.
Louis lui expliqua comment venir, la voix entrecoupée de sanglot. Il raccrocha et se laissa tomber dans la cabine. Il ferma les yeux pour tenter de contenir ses larmes. Mais c'était une mauvaise idée... La scène qu'il avait vu se rejouer en boucle dans son esprit.
Éric en train d'embrasser à pleine bouche Yves.
HEEEEEEEEEEEEEYYYYYYYYYYY !!!
Est-ce que j'ai jubilé en écrivant le chapitre ? Oui, totalement, j'ai même tapé dans mes mains et rigolé comme une folle. Avouez vous vous y attendiez pas à celle-là, hein ?? Mouhahahaha ! Vous allez le droit de me frapper un peu dans les commentaires, allez-y.
Je vous fais des bisous et vous dis à la semaine prochaine !
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