Chapitre 2


Trois quarts d'heures étaient passés et Stiles avait complètement oublié sa rencontre avec l'étrange petit garçon. La raison à cela n'était pas surnaturelle : le cerveau de l'hyperactif traitait toujours l'information au fur et à mesure et ne s'encombrait pas de souvenirs inutiles. Celui-ci n'avait pas disparu, il était relégué au second plan car il n'y avait rien d'urgent à s'en rappeler maintenant, d'autant plus qu'il avait des choses à faire.

Stiles avait fini de manger depuis un moment – et quel régal que de se sustenter sur le canapé, en regardant la télévision ! – et il dut finalement se résoudre à faire quelque chose qu'il avait l'habitude de repousser... Comme la plupart des tâches ménagères. Alors il se leva bon gré mal gré et ramena la vaisselle à la cuisine avant de faire couler l'eau du robinet et d'attraper le savon. Son lave-vaisselle ? En panne depuis deux semaines. Stiles et Noah étaient aussi nuls l'un que l'autre, que ce soit en matière de bricolage ou de plomberie. Ainsi, le shérif devait depuis quelques jours déjà contacter un professionnel, mais il n'en avait pas le temps et Stiles... S'en rappelait uniquement dans les moments où il avait justement besoin de laver la vaisselle. Puis il s'exécutait, et il oubliait. La seule façon pour lui d'y penser serait de le noter quelque part, mais la réflexion s'en allait bien avant qu'il n'aie le temps d'attraper un post-it quelconque. C'était toujours comme ça, et son TDAH ne l'aidait pas le moins du monde. Enfin, laver la vaisselle à la main n'était pas quelque chose de très long, donc... Il s'y attela s'en rechigner.

Oui, sauf que vint un moment, plutôt rapide, où il se mit à se sentir... Inconfortable. Au départ, il n'y fit pas attention. Il avait l'impression que son ventre était un peu lourd, mais... Soit. Rien qu'un peu de repos forcé ne pourrait arranger. Était-ce une excuse pour retourner squatter le canapé un peu plus que de raison alors qu'il avait du travail ? Au départ, oui. Parce qu'il fallait être honnête : il n'avait pas envie de se pencher sur le surnaturel pour l'instant. Non, ce qu'il apprécierait vraiment, ce serait juste... De ne rien faire de spécifique. Regarder une série en diagonale, flâner devant un bon ou un mauvais film et même... Se perdre dans des réflexions sans queue ni tête. Si ses pensées se révélaient parfois être son enfer, ce n'était pas toujours le cas. Il y avait des fois où ça allait, tout était léger et Stiles... Réfléchissait à bon nombre de choses sans trop dériver. Disons qu'en ce moment, il se sentait à peu près bien, ce qui était assez rare pour être souligné ! Le seul bémol, c'était son ventre, dont la douleur croissant doucement lui fit accélérer la cadence. Ainsi, il se dépêcha de laver vaisselle et ustensiles de cuisine, qu'il mit à sécher. Soudain, il gémit et prit appui sur le bord de l'évier. Il avait eu... Une sorte de crampe douloureuse au niveau du ventre, du genre bien désagréable. La douleur ayant été aussi forte que soudaine, l'hyperactif prit quelques secondes à rester immobile et à reprendre son souffle coupé sur l'instant. Ok, une crampe. Ça arrivait à tout le monde. Stiles prit sur lui même si l'inconfort le gagnait de plus en plus : il termina la vaisselle et mit le tout à sécher, les traits crispés. Parce que ce qu'il ressentait et qui migrait doucement vers son bas-ventre ne partait pas, au contraire. N'étant pas un féru de médicaments, Stiles n'eut pas tout de suite le réflexe de prendre des antidouleurs. Puis... Ces choses-là, ça coûtait cher, il valait mieux s'en servir quand il n'y avait pas d'autres moyens d'aller mieux. C'était également pour cette raison qu'il ne prenait généralement rien à part ses médicaments pour l'hyperactivité.

Sortir de la cuisine pour se traîner jusqu'au canapé fut une épreuve étonnamment difficile et Stiles ne se rappela pas avoir jamais eu autant de mal à aligner quelques pas. Il avait par contre déjà eu des douleurs au ventre par le passé : mais jamais de cette manière. C'était lourd, insidieux, assez spécial et... Plutôt bien localisé. La douleur, bien vite, se propagea et par chance, il avait finalement atteint le canapé. Elle engloba le haut de ses cuisses et toute la zone autour de son ventre, s'étendant ainsi sans vergogne, mais le pire resta centralisé là où il avait mal depuis le départ. Dans l'optique d'attendre que cela passe, Stiles s'installa tout d'abord sur le dos, sur le canapé, la tête tournée vers la télévision qu'il venait de rallumer. Quitte à patienter et laisser la douleur s'en aller, autant s'occuper d'une certaine manière ou du moins... Nourrir son esprit d'images aussi éloignées que possible de sa situation actuelle.

Et il attendit. Dix minutes. Vingt minutes. Arrivé à la demi-heure, beaucoup de choses avaient changé. Stiles allait-il mieux ? Non, absolument pas. L'on pouvait même dire que son état avait empiré, au point de... L'empêcher de se lever. Tout ce qu'il put faire fut de se tourner et de mettre un coussin sous son ventre, comme le faisait autrefois sa mère lorsqu'elle avait mal à cet endroit. Il agissait par mimétisme sans même s'en rendre compte.

Mais ce que Stiles ne savait pas, c'est que de feu Claudia avait tendance à reproduire ce geste uniquement lorsqu'elle avait ses règles. Il s'agissait d'une technique simple, mais qui tendait parfois à la détendre et à diminuer légèrement ses douleurs, la position l'y aidant grandement. A l'époque, Claudia détestait les médicaments, elle en avait presque une peur bleue tant ce qu'ils contenaient était obscur. Alors, elle agissait au mieux pour éviter d'en prendre. Était-elle atteinte d'une forme de paranoïa avant même de développer sa démence fronto-temporale ? Probablement. Accepter que Stiles puisse prendre un traitement médical contre son hyperactivité avait été une épreuve très difficile à vivre pour elle tant elle ne voulait que son bien et tant ces petits cachetons lui faisaient peur.

Stiles n'était pas atteint par la même terreur. Pour lui, tout était plus une question d'argent qu'autre chose. S'il pouvait se passer d'un traitement en attendant que cela passe, il attendrait sans problème. Oui, sauf que le temps commençait à être long et si la douleur avait arrêté de s'intensifier au sens propre, elle stagnait à un niveau élevé, tant et si bien qu'il avait fermé les yeux avec force. Mais fut un moment où, complètement incapable de se lever, il décida qu'il avait besoin d'aide. Par chance, il avait son téléphone avec lui et il n'hésita pas à s'en servir.

Tout d'abord, il contacta son père. Stiles ne fut pas surpris de constater que son appel sonnait dans le vide. Noah gardait rarement son téléphone près de lui, d'autant plus lorsqu'il était d'astreinte... Scott ? Pourquoi diable chercherait-il à contacter un ami aux abonnés absents ? Et même s'il répondait, l'alpha lui dirait sans aucun doute qu'il était avec sa copine du moment, copine qu'il ferait tout pour séduire sous tous les angles... Il ne fallait réellement pas avoir besoin de lui en cas d'urgence. Lydia ? Elle cherchait à conquérir Peter depuis peu et il était prêt à parier qu'elle s'était débrouillée pour fêter Halloween avec lui. D'où lui venait cette lubie ? Aucune idée, mais la banshee s'était prise de passion pour cet homme qui, déjà, avait essayé de l'avoir par le passé. Stiles désavouait un peu cette relation parce que Peter, en plus de ne pas être des plus fréquentables, était quand même l'oncle de Derek et était par conséquent plus vieux qu'elle de quelques années déjà. Stiles n'était pas contre les relations avec écarts d'âge plus ou moins importants, simplement... Il la trouvait encore un peu jeune pour cela. Cependant, Lydia n'était pas comme tout le monde et trouvait la plupart des garçons de son âge ou stupides, ou complètement idiots – ce qui revenait finalement au même. Les membres de la meute ? Elle les considérait comme des frères, tous autant qu'ils étaient.

Sauf Peter.

Stiles crolla difficilement parmi sa liste de contacts. Il avait réellement mal et fronçait les sourcils. Appeler à l'aide n'était pas son genre, mais il y avait des fois où... Merde, lui aussi avait le droit de faire appel à ses amis en cas de besoin ! Il n'y avait pas que l'inverse qui était vrai, fort heureusement... Maintenant, restait à voir si on pouvait lui rendre la pareille. Encore fallait-il qu'il trouve quelqu'un qui n'était pas occupé en ce soir de la fête de l'horreur. Quelqu'un de disponible pour l'aider, lui, l'humain mis à terre par des maux de ventre infernaux. Fut un moment où il s'enfonça la tête dans un coussin et hurla sa douleur et sa frustration à l'intérieur : ce qu'il avait mal ! C'étaient comme des coups de poignard assénés sans vergogne dans sa chair tendre, des coups de poignards qui s'enchaînaient, s'enchaînaient, s'enchaînaient. De sa vie, Stiles n'avait jamais ressenti cela. Il avait déjà connu plus fort, mais jamais de cette manière-là. Ses cris, étouffés, durèrent, jusqu'à ce qu'il se calme. Parce que l'air de rien, ça l'énervait. Ça l'énervait d'autant plus qu'il n'arrivait réellement pas à se redresser. Il en était capable, il le pouvait, mais... Il avait mal. Il préféra alors rester allongé, le ventre sur le coussin qu'il réchauffait doucement à l'aide de la chaleur de son corps d'humain. Si seulement on pouvait lui préparer une bouillotte... Le chaud, c'était toujours agréable et très souvent efficace ! Oui, mais cela ne réglait pas son problème. Sans plus réfléchir ni trier mentalement ses contacts, Stiles tenta de joindre Isaac. Derek. Liam. Malia. Kira. Mason. Il jura. N'y avait-il pas une personne qui ne fêtait pas Halloween ce soir ? Bordel, même Derek avait prévu de le passer en compagnie de son petit frère de cœur, Isaac et sa véritable sœur, Cora ! N'y avait-il que lui, le pauvre humain de bas étage, qui se trouvait seul en cette nuit ? En désespoir de cause, il composa un dernier numéro, sans se bercer de plus d'illusions que cela. Jackson faisait partie des populaires, que ce soit dans la meute ou au lycée. Il était forcément occupé, comme les autres. Mais parce que Stiles n'avait plus rien à perdre... Il enclencha l'appel tout en enfouissant à nouveau son visage dans le coussin. La douleur ? Elle ne partait pas, bien au contraire et Stiles commençait doucement à avoir la nausée... Frustré au possible car il ne comprenait absolument pas ce qui lui arrivait, il hurla à nouveau dans son coussin. Dans son état, il ne pouvait rien faire, pas même se lever pour aller se faire chauffer une bouillote ou même faire le sacrilège de prendre un antidouleur ! Il en était réduit à attendre comme un idiot, attendre que cette chose passe.

- Attendre quoi ?

Stiles sursauta et se redressa brusquement, mais cela fut si brutal qu'il ne put retenir un gémissement de douleur.

- Stilinski ? Qu'est-ce qui t'arrive ? Stilinski ?!

Ok, ok, ok. Stiles devait assimiler plusieurs choses en même temps. Les yeux fortement fermés à cause de ces coups de poignards incessants, il mit de côté son aversion habituelle pour le kanima dont l'arrogance lui avait toujours donné envie de gerber... Sans même qu'il ne se rende compte que ledit kanima lui avait parlé d'un air tout d'abord surpris, puis inquiet. Ah, parce qu'il ne répondait pas, peut-être. Les dents serrées, l'hyperactif se réinstalla aussi confortablement que possible et encaissa la douleur comme il le put. Il avait l'impression que son bas-ventre lui-même était chaud, mais qu'importe.

- Que la divinité de mon cul soit louée ! Ne put-il s'empêcher de s'exclamer, soulagé.

Parce que l'air de rien, on lui avait répondu. Et même s'il s'agissait de Jackson... Peu importe. Il était le seul à avoir décroché. Alors, il était heureux, un peu trop, peut-être, tant et si bien que son exclamation provoqua un long silence, qu'il brisa aussi vite que possible :

- Ok, je pensais pas que répondrais mais... Bordel, j'ai... J'ai besoin d'aide.

Dans d'autres circonstances, il aurait eu du mal à l'avouer, tant et si bien qu'il aurait sans doute gardé cela pour lui un temps tant sa fierté pouvait être mal placée, mais pas cette fois. Pas alors qu'il était incapable de se lever.

- C'est urgent ?

- Oh putain oui ! S'exclama-t-il, la respiration commençant à être légèrement laborieuse.

Elle le serait d'autant plus s'il avait remarqué ce qui était en train de lui arriver.

- Bon, qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Lui demanda le kanima d'un air qui se voulut mécontent.

Qui l'était.

Mais à moitié seulement.

- Que tu viennes à la maison, tout de suite, souffla Stiles en serrant les dents, faisant face à une nouvelle vague de poignards dans le ventre.

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