Chapitre 13
C'était dingue comme marcher en portant une couche était étrange. Elle avait beau être bien moins épaisse que la première qu'on lui avait mise, Stiles la considérait comme étant de trop. Lui, il avait l'habitude de ne rien porter de plus qu'un caleçon en dessous de son pantalon, quelque chose de léger, pas... Cette chose immonde qui s'occupait actuellement d'absorber son sang comme le ferait une serviette hygiénique chez les femmes. Alors voilà, le simple fait de poser un pied devant l'autre et de les enchaîner prenait une toute autre dimension.
Comment était-il censé avoir l'air naturel ? On va cramer que quelque chose cloche chez moi, c'est sûr, se dit-il en se mordant la lèvre. Déjà qu'il avait mal... Autant dire qu'on pourrait lui coller un post-it avec marqué « NE ME REGARDEZ PAS, J'AI UN PROBLEME », que cela ne serait presque pas de trop. Et pourtant, il essaya de se donner l'air normal, presque désinvolte. Il repensa alors à ses... Semblables ? Consœurs ? Personnes menstruées ? Stiles ne savait même pas comment les appeler tellement il était perdu. C'était comme s'il ne les considérait plus de la même façon maintenant qu'il... Partageait ça avec elles. Il y avait de la compréhension, de la confusion... Et bien des choses qui rendaient sa réflexion plus ardue à ce sujet.
Enfin, le fait est que marcher avec ça était un enfer, d'autant plus que ses douleurs allaient et venaient en lui de façon aléatoire. Il redoubla donc d'efforts et garda la tête alors que la honte s'ajoutait lentement à ce sentiment de ridicule qui l'habitait.
Finalement, il n'était pas si mal dans sa chambre, seul, à ruminer une soirée dont il ne comprenait toujours pas les tenants et les aboutissants. Le seul hic, c'était son père, en particulier cette peur qu'il avait de le déranger. Enfin c'était toujours moins gênant que d'être ici. Son paternel ne le jugerait jamais, au contraire de ses amis qu'il... Adorait, mais qu'il se mit soudainement à craindre. Jamais il n'avait eu à se présenter à eux de cette façon, prisonnier d'une situation aussi particulière et honteuse. Elle ne l'était en réalité pas du tout, mais Stiles voyait les choses d'une façon... A la fois sombre et pessimiste. Dire qu'il était de mauvaise humeur ne sonnerait, au final, pas si faux que cela.
Il en vint alors à prendre une décision des plus simples – et des plus faciles : ne rien dire tant que l'on ne devinerait pas. Hors de question qu'il leur annonce de but en blanc qu'il avait ses règles à cause... D'un sorcier à qui il n'avait pas pu donner de bonbons pour la simple et bonne raison qu'il n'en avait pas.
La fameuse question, laquelle était en quelque sorte devenue le slogan d'Halloween, prenait tout son sens.
Un bonbon ou un sort ?
Stiles nota mentalement de ne plus jamais oublier d'en acheter. A ce stade-là, il s'agissait presque d'une question de vie ou de mort – de sa dignité, si l'on désirait se montrer précis. Et il maugréa des choses incompréhensibles pour les rares lycéens à côté desquels il passait mais qu'un loup-garou aurait parfaitement pu comprendre. Sa bouche fleurit de noms d'oiseaux parfaitement inventés, mais étrangement compréhensibles. S'il lui arrivait un jour de croiser le chemin de ce putain de sorcier de merde, il lui ferait passer un sale quart d'heure. A défaut de pouvoir le mettre au sol par la seule force de ses mains, il pourrait au moins parler, l'agacer, le faire mourir de fatigue mentale. On disait parfois à Stiles que sa parole pourrait tuer un mort : autant mettre son « talent » à profit pour se venger, si cela était possible. De façon générale, il ne manquait pas d'idées du fait de son imagination sans limites – la chose se révélait d'autant plus vraie lorsqu'il avait des envies de meurtre, ou une colère à satisfaire.
Stiles s'arrêta devant une salle, leva brièvement la tête pour noter les visages : aucun qu'il connaissait. Pas la bonne classe, donc pas la bonne salle, se dit-il tout de suite. Il sortit son téléphone et regarda son emploi du temps, qu'il avait pris en photo au début de l'année. Effectivement, il s'était trompé... Et grimaça lorsqu'il se rendit compte qu'il avait rendez-vous non pas au rez-de-chaussée, mais au premier étage.
- Fait chier, maugréa-t-il en reprenant sa marche honteuse.
Pourvu que sa couche soit efficace, pourvu qu'aucune tache de sang ne la traverse. De toute façon ces trucs... C'était fait pour absorber, non ? Stiles se dit que oui et, pour ne pas s'angoisser plus que de raison, il choisit de tout faire pour se persuader qu'aucune tâche n'apparaîtrait sur son pantalon. Il préférait... Ne pas envisager que le contraire puisse arriver – le cas échéant, sa honte ne s'en retrouverait que plus violente encore. Elle prendrait le pas sur tout le reste. Le pousserait à rentrer chez lui en courant et à se terrer dans son lit jusqu'à ce que mort s'ensuive.
Stiles supportait réellement difficilement la honte.
Elle égalait presque, à ses yeux, l'effet que pouvait lui faire une crise de panique. Il s'agissait pour lui d'une chose trop grande, trop forte, qui le paralysait toujours avec une aisance terrifiante. Aussi, il faisait en sorte de l'éviter le plus possible, de se protéger de sa présence potentielle. Au cas-où, il tira sur le bas de son haut, dans l'espoir qu'il recouvre un peu plus ses fesses. Précaution inutile, mais rassurante– suffisamment en tout cas pour qu'il le fasse.
La montée des escaliers lui fit un peu regretter le fait d'avoir voulu faire l'effort de venir, de faire acte de présence, de... Sortir de son lit. Marcher était une chose : s'engager dans une cage d'escalier en était une autre surtout que cette fichue douleur fluctuait mais continuait de s'étendre jusqu'à ses cuisses. Pour lui, c'était assez étrange puisqu'il lui semblait que les douleurs de règles ciblaient uniquement le ventre, mais... Force était de constater qu'il avait des lacunes à ce sujet. Puis la situation en elle-même avait de quoi le désarçonner. S'il savait qu'il était condamné à avoir ses règles – sans doute jusqu'à ce que celles-ci passent, d'ici quelques jours –, il ne l'acceptait toujours pas. C'était là, mais il continuait de se dire que c'était foutrement incompréhensible. Son sorcier ne connaissait-il pas d'autre sort ou avait-il ressenti l'envie – le besoin – d'humilier le premier humain à ne pas avoir de bonbons à donner ? Dans tous les cas, Stiles le haïssait. Je lui ferai la peau, à cet enfoiré. Enfin, fallait-il encore qu'il le retrouve et qu'il ait autre chose que son pauvre sarcasme pour l'attaquer. Quoiqu'il gardait toujours sa batte de baseball dans sa voiture.
Mais même ça, ça lui paraissait ridicule.
- Salut... Stiles ?
Le susnommé releva les yeux, parcourut les alentours du regard. Finalement, il était arrivé. Trop occupé qu'il était à ruminer, il avait avancé par automatisme, jusqu'à arriver à la hauteur de ses amis. Si Scott le regardait d'un air étonné, Lydia paraissait quelque peu inquiète. C'était elle qui avait parlé, et qui n'avait pu s'empêcher de laisser son salut en suspens tant sa mine l'avait surprise.
Stiles avait toujours eu la peau très claire, mais jamais elle n'avait arboré un teint aussi... Maladif. Du genre qu'elle n'avait vu et qui donnait à son ami un air familier avec ces très chers morts-vivants.
- Salut, souffla-t-il simplement en détournant rapidement le regard.
Ses joues, il les sentait déjà chauffer parce que dans un sens, il avait déjà honte. Un peu, pas suffisamment pour se laisser submerger, fort heureusement. Alors oui, sans doute rougissait-il légèrement. Comment ne pas être gêné en se sachant si peu en forme et... Avec du sang coulant entre ses jambes, dans une couche qu'il avait l'impression de sentir davantage depuis qu'il savait les regards sur lui ?
Tuez-moi.
Cette situation n'avait aucun sens.
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