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« Beau gosse et toi ça commence à devenir vraiment sérieux huhu. » Il sursauta et leva ses yeux vers la voix qui l'avait interpellé sans en avoir l'air pour ne voir que le haut de la tête de son collègue derrière le comptoir, ses yeux étant l'unique chose qu'il montrait de son visage pour faire jouer ses sourcils avec un air malin et taquin. Il leva ses yeux vers le ciel, tellement fort qu'il crut presque les retourner dans leur orbite à un instant. « Vous êtes encore arrivés ensemble ce matin... je sais que vous vous êtes vus hier soir aussi... »

« Arrête tes conneries et assieds-toi, non ? » Lui demanda-t-il en soufflant un rire.

« Écoute Louis, il faut que tu me racontes un peu, je ne peux pas survivre avec le peu d'infos que tu me donnes ! » S'exclama-t-il en venant s'asseoir sur sa chaise, avec tellement de force que la chaise roula sur quelques centimètres.

« Je ne crois pas que je sois sous contrat avec toi pour te parler de ma vie privée. » Rétorqua Louis en appuyant sur le pont de ses lunettes pour les remettre en place alors qu'il se tournait vers son écran d'ordinateur.

« En plus vous ne vous êtes pas envoyé d'avion hier... » Il ne se tourna même pas vers lui mais le vit pivoter comiquement vers le vide en attrapant son menton. « Ça veut vraiment dire que quelque chose est arrivé hum ? »

« Tu sais que tu es terrifiant quand tu t'y mets. » Fit-il savoir en secouant sa tête. C'était vrai que lui et Harry ne s'étaient pas envoyé d'avion la veille, il ne savait pas si c'était bien ou mal, si ça voulait dire quelque chose ou même si ça lui faisait quoi que ce soit. Il ne pensait pas que ce soit grave, s'il fallait en refaire il en referait. Il avait simplement passé une nuit dans le même lit que Harry et les avions n'avaient pas semblé nécessaires ce jour-là, après ça. Ce n'était pas très grave alors, décida-t-il.

Il y eut des pas derrière lui et il jeta un regard au-dessus de son épaule pour voir Harry venir vers lui. Il allait sûrement à la salle d'attente, mais son regard était évidemment attaché à lui. Ils se sourirent et Harry dévia sa route pour venir vers lui et s'arrêter là un instant. « Ce soir ? Pour la tasse ? » Il pouffa rapidement en hochant la tête et Harry lui fit un clin d'œil avant de partir vers la salle d'attente pour récupérer son nouveau patient. Les voilà qui avaient apparemment un nouveau rendez-vous, pour une tasse. Ça sembla presque marrant d'y penser de la sorte mais en même temps assez touchant, c'était leur petit truc. Il savait que Harry faisait ça pour tenter de faire comme s'il lui montrait l'exemple, laisser dans le passé sa tasse favorite pour en avoir une nouvelle, neuve, c'était un peu comme une métaphore, comme celle de l'avion, ça faisait partie de leurs petits codes secrets, leurs petits trucs rien qu'à eux.

Il put voir la confusion sur le visage de son collègue et ça l'aida encore un peu plus à trouver ça amusant. Il aimait ça, avoir un langage secret avec quelqu'un, avoir un délire, une blague privée, un truc avec quelqu'un qu'il n'avait avec personne d'autre et que Harry non plus n'avait avec personne d'autre. Ça rendait leur relation davantage unique. « Oh ! » Son jeune camarade pris une inspiration de surprise soudain et tendit son index vers là où Harry s'était tenu juste plus tôt, et quand il suivit de son regard ce qu'il lui montrait, ses yeux tombèrent sur un avion en papier de couleur verte. Un sourire grimpa sur ses joues sans qu'il ne puisse se retenir et il regarda la porte du bureau de Harry où celui-ci venait de disparaître à nouveau et il secoua doucement sa tête, attendri, avant d'attraper le papier plié pour le tirer sous ses yeux, sans même hésiter.

ne pas réussir à t'aimer comme tu en aurais besoin.

Il poussa un soupir touché, alors que le sourire sur ses lèvres refusait de le laisser. Il était sûrement bien plus attendri qu'il ne le devrait, parce que c'était quand même une confession triste, mais ça montrait aussi la quantité d'affection qu'il y avait en Harry pour lui, combien il comptait pour lui et c'était si touchant et aussi si rassurant. Il n'était pas tout seul en train de s'engouffrer dans cette chute sans fin, Harry était avec lui. Ensemble, ils tombaient. Et il voulait rassurer Harry, il n'y avait qu'une seule chose qu'il pourrait lui faire et qui lui ferait mal, qui irait à l'encontre de ce dont Louis avait besoin. Et cet avion serait son messager, alors il attrapa rapidement un stylo pour écrire une réponse et sourit en regardant ses mots en quinconce sous ceux de Harry.

ne pas réussir à t'aimer comme tu en aurais besoin.
être abandonné.

Puis il replia et observa la porte dans son dos. Il ne pouvait pas le lui renvoyer maintenant, alors à la place il posa l'avion devant lui sur le comptoir et attendit qu'il finisse avec son patient.

Ça ne dura pas spécialement longtemps, juste le temps pour son collègue d'essayer de lui voler l'avion quatre fois pour en lire son contenu, sans succès évidemment, et aussi juste assez pour qu'il encaisse trois autres patients et en accueille un autre. Puis, enfin, le patient de Harry sortit pour venir se présenter à lui et il put donc lui faire payer le rendez-vous. Quand il regarda le bureau de Harry par-dessus son épaule, il put le voir se tenir dans l'encadrement de la porte. Sans le quitter des yeux, il attrapa l'avion pour le placer là où Harry l'avait posé juste avant.

Sans attendre, Harry fit de rapides enjambées vers la salle d'attente, attrapant l'avion au passage sans le regarder et appelant son patient suivant. Louis fit un sourire et se tourna vers son collègue, sentant sûrement son regard. Et pour cause. Celui-ci était assis-là, sur sa chaise, et l'observait avec ses yeux froissés en deux minuscules fentes, le jaugeant avec méfiance alors que ses lèvres se pincèrent en moue. Il le considéra en tenant sa joue dans sa paume et il pencha sa tête sur le côté. « Tu es vraiment terrifiant. » Il hocha de la tête en disant cela et se tourna à nouveau vers son ordinateur.

Finalement le reste de la journée se passa aisément, son camarade fut légèrement agaçant à essayer d'insister à propos des avions, mais il avait un peu fini par abandonner. Harry n'avait pas répondu, mais il l'avait embrassé comme un fou quand ils s'étaient vus le midi, comme s'il avait eu envie de lui prouver quelque chose. Puis, l'après-midi avait été calme. Harry avait été déposé Livio auprès de Liv et ils s'étaient aussi vite retrouvés dans les galeries du centre commercial, et plus spécifiquement ensuite dans un joli petit magasin où on trouvait un peu de tout et aussi de la vaisselle. Louis marchait en silence le long de l'allée, laissant ses doigts caresser la porcelaine froide des tasses sous ses yeux alors que Harry était derrière lui, tenant, entre ses doigts, son autre main. Il attrapait parfois une tasse pour en voir le poids et Louis le laissait faire en souriant. Il avait pensé que Harry trouverait une tasse similaire, mais apparemment non, il voulait juste avoir un nouveau coup de cœur.

D'un regard extérieur, ça aurait pu avoir l'air ennuyeux et pourtant ça ne l'était pas. Louis était très loin de se faire chier, même alors qu'il ne faisait pas grand-chose, il avait l'impression d'être dans un genre de petit quotidien tranquille, il sortait acheter des trucs avec un garçon qu'il appréciait. Mais l'appréciait-il simplement ? Il se tourna vers lui pour observer son visage, ses yeux verts concentrés sur les tasses, bougeant dans le vide, ses sourcils froncés. Il lui arrivait beaucoup, depuis que Harry était à nouveau, dans sa vie, de se demander si tout ça était réel et si ce n'était pas un rêve. À ce moment-là, il se le demanda encore, parce que ça semblait si irréel, d'être là avec lui, de lui tenir la main, d'être dans leur propre petit monde.

« Elle est sympa elle, non ? » Il fit tomber ses yeux vers la tasse que Harry tendait vers lui. Elle était bleue et représentait des profondeurs sous-marines, dessus il y avait des animaux marins, dont une baleine bleue. Louis hocha la tête en souriant, il savait qu'il avait des goûts assez spécifiques mais le remarquer un peu plus à mesure que leur promenade dans ces rayons se déroulait était presque drôle. Il remarqua aussi que cette nouvelle tasse était complètement à l'opposé de l'autre. L'autre tasse, était à l'opposé coloré du bleu et arborait des fleurs, contre celle-ci, bleue comme la mer. Il saisit ça aussi, ce n'était pas un remplaçant qu'il fallait, c'était une nouvelle tasse à avoir et aimer dans toute sa différence.

« Tu vas prendre celle-ci ? » Il leva à nouveau son regard vers lui et le vit étudier la tasse dans sa paume, les sourcils froncés, comme s'il réfléchissait à dieu seul savait quoi, qu'importe ce qu'il pouvait être en train de se dire. Son sourire mangea d'autant plus ses joues, allant même jusqu'à les faire picoter douloureusement.

« Je pense oui. » Marmonna-t-il finalement, pinçant ses lèvres et hochant la tête ensuite, semblant plutôt content de sa décision. Il raffermit sa main autour de la sienne et le sourire de Louis devint un peu plus grand encore, si c'était vraiment possible. Ils se mirent en mouvement vers la caisse et, après avoir récupéré leur tasse et enveloppée dans du papier bulle, ils sortirent à nouveau. Ils traînèrent encore un peu dans les halls, leur main lâchement attachées l'une à l'autre, pendantes entre eux, leur donnant l'air d'un vieux couple. La pensée fit même sourire Louis encore un peu plus et ça lui donna l'air tellement idiot qu'il en eut presque honte. Seulement presque, parce qu'il était bien trop heureux d'être là, de lui tenir la main, de marcher paresseusement avec lui en observant les vitrines au milieu des gens pressés dans les derniers rushs d'avant Noël.

« Oh ! » S'exclama Harry à un instant en ralentissant devant une boutique. En un regard par-dessus son épaule, il le vit s'extasier sur une charmante table basse d'exposition. Elle avait une belle forme, une belle couleur, et elle criait 'Harry', parce qu'elle semblait vraiment être tout ce que Harry pouvait rechercher en termes de décoration d'intérieur, design et pourtant original. Louis poussa un rire et prit les devant pour entrer dans la petite boutique. « Hein mais- »

« On va se renseigner sur le prix. » Lui dit-il. Harry poussa un rire et entra à sa suite dans le magasin. « Tu as besoin de nouveaux meubles non ? » Harry tira un peu sur son bras pour l'attirer vers lui et embrassa sa joue. « J'ai une idée. » Il se tourna vers lui en serrant sa main un peu plus. « Et si on allait à Ikéa ensemble ? » Proposa-t-il. Harry sembla un peu surpris, à en croire l'expression sur son visage. Il réalisa peut-être un peu tard ce qu'il proposait. Aller à Ikéa, c'était quelque chose de gros, non ? Quelque chose pour les gens en couple depuis longtemps ou de façon sérieuse ? Aller là-bas, même sans vivre ensemble, c'était être sérieusement dans la vie d'une personne, l'aider à choisir ses meubles c'était être impliqué dans sa vie privée.

À l'instant même où il allait dire à Harry de laisser tomber, l'expression de celui-ci changea du tout au tout pour devenir un sourire. « D'accord. » Dit-il. Alors Louis n'eut pas l'impression que c'était bizarre, ça ne changeait pas ce qu'il pensait, mais le fait que Harry accepte ne permit que de le réconforter. « Je regarde pour cette table, allons-y après ? » Il hocha la tête et le vit se tourner à nouveau, tranquillement, comme si tout était normal. Il suivit le mouvement et ils s'approchèrent tous deux de la jolie table basse. Harry l'observa avec attention et lui observa son visage, son profil puis ses lèvres bouger quand il demanda à un responsable quelle autre couleur il y avait de disponible. Louis passa tout son temps ailleurs, ses yeux tournèrent entre le vendeur et Harry, mais surtout sur Harry. Il le regardait quand il parlait, il était beau quand il était concentré comme ça, c'était captivant. Il eut presque envie de pousser un soupir mais se retint pour faire bonne figure. Harry dut réaliser sa drôle d'insistance parce qu'au moment où le vendeur partit pour rejoindre l'arrière-boutique, il se tourna vers lui en riant.

Harry fini par acheter une table avec une couleur en accord avec son intérieur et il ne cacha pas son bonheur quand ils furent en voiture pour rentrer, se mettant d'accord pour aller à Ikéa ensemble samedi, quand le cabinet serait fermé. « C'est déjà Noël dans six jours... » Fit remarquer Louis quand ils sortirent de la ville pour rejoindre leur banlieue de périphérie.

« Ça va vite hein. » Rigola Harry. « Tu fais quoi alors cette année ? » Il se tourna vers lui et se coinça un peu mieux contre la portière pour mieux le voir.

« Eh bien, cette année c'est moi qui organise Noël, donc mes parents viennent, et mon frère aussi. » Dit-il. « Et toi ? »

« La même chose, ma mère ne pouvait passer une seconde de plus là-haut. Ma sœur va sûrement venir aussi. » Il pensa assez fort a une envie évidente, celle de peut-être faire se rencontrer tout ce beau petit monde. C'était idiot, d'abord Ikéa, maintenant cette envie de passer un Noël avec sa famille. Il avait peu de de souvenirs de la famille de Harry, à dire vrai il n'était pas vraiment sûr de pouvoir les reconnaître, ça avait déjà été difficile pour reconnaître Harry. Il avait cependant le sentiment de se souvenir d'une femme très gentille. « Je peux... te demander ce que devient ta sœur ? »

Il rit. « Tu te souviens d'elle ? » Remarqua-t-il en se tournant vers la fenêtre. « Ma sœur est toujours la même. Elle est partie depuis tellement longtemps, elle ne revient jamais. Je crois qu'elle s'est trouvée un mec y'a un petit moment, mais je ne serais pas capable de te dire ce qu'elle devient, ça fait des années qu'on ne la voit plus. » Il haussa une épaule.

« Ça t'attriste ? » Il souffla du nez.

« Évidemment... c'est ma grande sœur. Et un jour elle a mis les voiles à l'autre bout de la terre et depuis j'ai le droit à un ou deux appels par ans, chaque fois elle oublie l'âge de sa nièce, de ses neveux... » Il soupira. « Si je pouvais comprendre pourquoi elle est partie si loin, ce qui l'a motivé à faire ça. » Il secoua sa tête en souriant en coin, un rictus de peine. Il ne savait pas s'il lui en voulait, sûrement pas, il était peut-être un peu en colère mais aussi et surtout attristé.

« Eh bien... puisqu'on a démontré que les vœux de Noël se réalisent. » Il se tourna vers lui et le vit détourner un instant son regard de la route pour se tourner vers lui. « Fais un vœu. » Il souffla du nez.

Pourquoi pas ?

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