57. L'amour nous pousse à faire des choses horribles
NS
L'arme à la main, le bras pendant le long de mon corps immobile, j'observe mon fils avec un regard que je n'ai jamais eu sur lui. J'ai beaucoup de mal à me dire que c'est bien lui, là, devant moi.
Il a les yeux dans le vague, ses mains et ses vêtements sont imprégnés du sang de cette femme morte, encore pendue à l'arbre.
Je n'arrive pas à réaliser ce que je vois, je ne peux l'imaginer. Mais je devine au fond de moi une petite voix qui me dit que c'est peut-être vrai. Peut-être. Je le croirais uniquement quand mon fils me le dira de vive voix.
Je suis sous le choc mais mon cerveau me dit de faire quelque chose, je ne peux pas le laisser là, dans cet état. Jordan pose une main rassurante sur mon épaule et va aider Stiles à se relever.
Je ne peux que les suivre des yeux, incapable de bouger, mon corps ne réagissant toujours pas. Tout mon être est paralysé par la peur, par le choc et l'adrénaline, tout comme mon cerveau.
Mon adjoint vient me demander ce que je veux faire, c'est une bonne question.
Qu'est-ce que je veux faire ?
Ramener mon fils en sécurité dans son foyer est ma priorité, plus rien d'autre ne compte pour l'instant, mais dois-je l'emmener au commissariat avant ?
Jordan me dit que ça peut attendre demain vu son état et me conseil de prendre soin de lui d'ici-là, tout en installant Stiles dans la voiture.
Je prends le volant entre mes mains tremblantes et essaye de rassembler mes idées. Je mets le contact et démarre gentiment.
Stiles assis à l'arrière reste muet comme une carpe, le regard tourné vers la silhouette de Kate. Il me fait un peu peur j'avoue, je ne l'ai jamais vu dans cet état. Il a le regard vide, il est blanc comme un linge, ce qui contraste avec la couleur du sang partout sur lui.
Je me gare en bas de chez lui et l'aide à monter à son appartement. Arrivé en haut des marches, la porte s'ouvre sur Derek, complètement paniqué. J'espère qu'il va se calmer, sinon je vais vite perdre mes moyens moi aussi.
- Comment va-t-il ? Me demande Derek en m'aidant à le soutenir jusqu'à l'installer sur le canapé.
- Il n'a pas dit un mot depuis que tu es parti, au fait désolé d'avoir tiré, je ne voulais pas qu'un officier te blesse par erreur ou par peur.
- Je suis soulagé que vous m'ayez reconnu, m'avoue-t-il.
Je vois dans ses yeux qu'il ne m'en veut pas, je suis rassuré de ce côté-là mais l'état de mon fils m'inquiète vraiment alors je ne perds pas de temps et vais droit au but.
- Qu'est-ce qui s'est passé là-bas ?
Derek s'asseye à côté de Stiles, soupire et se passe la main sur le visage avant de m'annoncer le pire.
- Quand je suis arrivé, Stiles lui avait arraché le cœur, il le tenait dans ses mains en riant nerveusement. Il l'a tuée Noah, me dit-il en plantant son regard perdu dans le mien.
Je tombe assis sur le fauteuil derrière moi en expirant l'air de mes poumons. J'ai soudain du mal à respirer, une profonde douleur s'insinue dans mon torse, comme un coup de poignard, comme si mon fils venait de me transpercer d'un coup de lame brûlante.
- Je suis désolé Noah, mais c'est elle qu'il faut blâmer, je sais par expérience qu'elle est capable de vous retourner le cerveau très facilement. Stiles était fragile et épuisé ces temps-ci, il dormait très mal... je ne comprends pas ce qui lui a traversé l'esprit... mais je peux l'imaginer.
Derek observe Stiles qui s'est endormi à nos côtés, j'essaye tant bien que mal de réfléchir à ce qu'on doit faire, mais j'ai beaucoup de mal à me concentrer, ça doit être de famille.
- Il faut le réveiller, on ne va pas le laisser dormir dans cet état. Je vais l'emmener à la salle de bain. Il y a du café qui vous attend dans la cuisine si vous en voulez, me dit Derek en soulevant délicatement mon fils qui se réveille.
Stiles ouvre les yeux et me dévisage juste un instant puis détourne le regard, honteux. J'ai juste le temps d'y voir de la douleur et de la détresse.
Bon sang je n'avais pas vu mon fils comme ça depuis la mort de sa mère. J'en ai des frissons dans le dos et la nausée. J'ai mal au cœur de le voir comme ça.
Qu'est-ce qui a bien pu lui arriver ?
Cette femme était un démon, une créature venue de l'enfer et elle l'a attiré vers le côté obscur. J'espère qu'elle ne l'a pas détruit car je n'aurai aucun moyen de la faire payer et ça me ronge déjà.
Je vais me servir de café mais je ne peux m'empêcher d'aller m'inquiéter pour mon fils.
J'observe avec reconnaissance Derek qui s'occupe de lui, il lui enlève ses vêtements rougis par le sang et le met sous la douche alors que Stiles se débat et grogne pour ne pas y entrer.
Derek le rassure avec patience mais Stiles n'en fait qu'à sa tête et se met à pleurer, son corps se secouant sous ses sanglots.
Derek lève la tête et plante ses yeux humides dans les miens, je viens l'aider mais Stiles me regarde d'un air froid et me demande de m'en aller. Je comprends alors que je suis de trop, je ferme la porte derrière moi et vais m'asseoir sur le canapé.
Je me sens impuissant, rejeté, bon sang que ça fait mal. Mais je pense que je comprends mon fils.
Je sais qu'être le fils du shérif a toujours été une fierté pour lui mais je sais aussi que ça a été beaucoup de pression à gérer. Aujourd'hui il a honte de lui et je ne pense pas que ma présence à cet instant, l'aide dans son rétablissement.
Cette constatation me fait horreur mais je dois l'accepter, je ne suis plus indispensable dans sa vie, il est adulte maintenant, il prend ses propres décisions, il n'a plus vraiment besoin de moi.
Il a Derek à ses côtés et ma place n'est pas ici en ce moment.
Je retourne à contre cœur vers la salle de bain et prévient Derek que je rentre et que je passerai demain voir Stiles. Il semble étonné mais n'insiste pas pour que je reste, je crois qu'il a compris mon malaise et celui de mon fils.
Je retourne auprès de mon adjoint. Me retrouver sur le lieu du crime me fait horreur, autant que de prononcer ce mot ; crime. Mais j'ai besoin de comprendre, d'analyser la situation aussi horrible soit-elle.
Mon fils est-il un criminel ? Non ! Il a agi sous influence, cette femme lui a retourné le cerveau, j'essaye en tout cas de m'en convaincre.
Je connais mon fils, il est d'une nature douce, il prend toujours soin des autres, au contraire c'est un héros. Il devait avoir une bonne raison de faire ce qu'il a fait et je commence à comprendre son geste sans savoir si je pourrais l'excuser.
C'est horrible de penser ça, c'est mon fils, bien sûr que j'ai envie de l'excuser. Mais le shérif en moi est déjà en train de penser à la suite, car aux yeux de la loi, c'est une autre histoire.
DH
Noah est parti, me laissant seul avec Stiles. Je ne sais pas si je lui suis reconnaissant de m'avoir laissé seul ou si, au contraire, je lui en veux de m'abandonner dans un moment pareil.
Mais je comprends son désarroi, je pense qu'ils ont tous les deux besoin de temps pour digérer ce qu'il s'est passé aujourd'hui, pour mettre des mots sur le geste de Stiles, moi-même j'ai du mal, j'accuse le coup.
J'essaye en vain de mettre mon compagnon sous la douche mais il refuse catégoriquement d'y rester, je vais devoir y aller avec lui, je n'ai pas le choix, il faut que je le rassure.
Je me déshabille et l'accompagne sous le jet d'eau chaude. Il se colle et s'accroche à moi comme si sa vie en dépendait, tout tremblant, il est encore sous le choc, tout comme moi.
Je le savonne de la tête aux pieds avec douceur, sans qu'il n'ait aucune réaction, j'ai l'impression d'avoir un zombie en face de moi.
Je tente de l'apaiser en lui parlant mais ce n'est guère mieux, j'ai peur, peur d'avoir perdu l'homme que j'aime et de ne jamais le retrouver.
- Stiles, parle-moi je t'en supplie, tu peux tout me dire, je te soutiendrai, je ferai tout pour toi, tu le sais ? Jamais je ne t'abandonnerai, je te le promets.
Il lève enfin ses yeux tristes et nos regards se croisent. Je vois tant de détresse dans ses pupilles que les larmes coulent le long de mes joues sans que je ne puisse les retenir.
Je n'ai jamais eu peur de toute ma vie, mais aujourd'hui, la seule chose qui m'effraye c'est de le perdre.
Je le serre fort contre moi, comme si je pouvais par ce geste recoller les morceaux de son âme et le réparer, lui remplir le cœur d'amour et effacer toute cette détresse.
Je veux lui rendre sa joie de vivre et son magnifique sourire. En retour je ne sens que sa colère et sa tristesse.
- Je devais le faire, me dit-il d'une voix à peine audible sans oser me regarder.
Mon cœur se serre une nouvelle fois en entendant ses mots, ses mots d'une froideur qui me glace le sang, durs mais bien réels. Il a l'air complètement abattu, brisé et je ne sais pas si je pourrais le soutenir, je ne sais pas comment faire.
Il commence à sangloter et je sens son corps trembler entre mes bras. Ses jambes ne le portent plus, je m'assois au fond de la douche et le prend sur mes genoux, entre mes bras protecteurs pour le réconforter, le rassurer, lui montrer que je suis là pour lui et que je ne l'abandonnerai pas.
Nous restons quelques minutes sans bouger, l'un contre l'autre, nous rassurant mutuellement, partageant la chaleur et l'amour de l'autre.
Avant qu'il n'ait froid je le sors de là, gentiment, je le sèche et lui enfile des vêtements propres, je l'installe dans notre lit et je me couche à ses côtés.
Avant de s'endormir il me répète encore qu'il devait le faire, il le répète plusieurs fois comme un mantra.
Quand je lui demande pourquoi ? Il me dit :
- Je devais le faire, je ne pouvais pas la laisser nous faire encore du mal.
Ses mots tombent comme une enclume dans mon esprit. La voilà la vérité, il l'a fait pour nous, par amour ! Je ne sais pas comment le prendre, il a voulu me sauver la vie, encore, mais à quel prix ?!
Que va-t-il lui arriver maintenant ? Difficile de plaider la légitime défense dans son cas. Je suis perdu, terrifié, triste et en colère.
Kate a encore réussi à m'atteindre, mais cette fois elle l'a fait de la pire des façons, elle a osé le détruire lui, pour ensuite me détruire.
Le pire est que je n'ai aucun moyen de me venger, mais je n'en ai pas envie à vrai dire, je ne veux plus me battre, je n'en ai plus la force.
Quand je regarde ma moitié, mon âme sœur, mon compagnon, mon fiancé, je ne pense qu'à une seule chose ; notre couple.
Je sais par expérience que nous allons réussir à passer par-dessus cette crise, ensemble, car c'est ce que nous faisons depuis que nous sommes liés.
Nous nous soutenons mutuellement, chacun notre tour quand l'un de nous en à besoin. Aujourd'hui c'est à moi de soutenir ma moitié, c'est à moi d'être fort pour nous deux. J'ai confiance en nous et je pense surtout à notre avenir.
SS
Je me sens mal après ce que j'ai fait, très mal. Je suis bien conscient que j'ai tué Kate, c'est pour cette raison que je devrais me sentir mal. Mais ce n'est pas le cas, mon cœur à mal parce que je me sens mieux maintenant qu'elle est morte, je me sens libre à présent que j'ai vengé mon compagnon.
Cela fait-il de moi un monstre ?
Oui je suis monstrueux de me réjouir de la mort de quelqu'un, même la mort d'une ennemie ne devrait pas me procurer de plaisir.
Et pourtant, c'est ce que je ressens au plus profond de moi, elle a fait de moi un être ignoble. Encore une fois elle a brisé l'homme de ma vie, elle nous a brisés, par ma faute.
Je ne suis qu'un lâche, je me suis laissé entraîner par la folie de cette psychopathe. Malheureusement ce n'est pas elle qui a fait le dernier geste, c'est moi.
C'est moi l'unique responsable, j'ai échoué dans ma mission, dans mon job, je n'avais qu'a simplement la ramener en prison, c'est ce que j'aurais dû faire. Mais je n'ai pas pu.
J'ai été faible et égoïste.
Elle m'a retourné le cerveau, elle savait très bien ce qu'elle faisait mais elle ne savait pas jusqu'où j'étais prêt à aller. Elle m'a sous-estimé, elle a cru pouvoir jouer avec moi mais on ne joue pas avec un renard, tout le monde sait ça.
Je ne sais pas si j'ai été le plus malin, le plus courageux peut-être ?
Le plus déterminé ça c'est sûr.
Maintenant il faut que j'assume mes actes, j'en tremble, rien que d'y penser. Mon père doit me voir comme un monstre, Derek aussi j'en suis sûr, même s'ils me disent le contraire, je suis certain qu'ils me détestent.
Je ressens le mal être de Derek, je ressens sa colère, sa tristesse et son anxiété. Ça fait beaucoup pour un seul homme, même pour un loup garou.
Je me retourne dans le lit, je sais qu'il ne dort pas mais ses yeux sont fermés.
Je lui murmure ce que j'ai sur le cœur, pour le soulager. Pour nous soulager. Pour nous libérer.
- Je m'en sortirai, avec toi, ensemble comme on le fait toujours. Ne t'en fais pas pour moi. Je l'ai fait pour nous, pour que nous soyons libres, par ce que je t'aime plus que ma propre vie.
Au fond de moi je me dis que, parfois, l'amour nous pousse à faire des choses horribles pour les personnes qu'on aime et on se persuade que c'est pour une bonne raison.
C'est une manière d'accepter la situation et de l'affronter.
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Hello,
Chapitre difficile à écrire pour moi, il m'a torturé l'esprit mais j'espère qu'il vous a plu ?
Plus que trois chapitres avant la fin... 😢
Bonne journée à tous et merci pour vos votes qui me motivent tous les jours pour faire de meilleurs chapitres à chaque fois !
Bisous, Mellie 🥰
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