2
Lava était couchée sur le sol. Un sol dur, froid et noir, comme toutes les choses qui l'entouraient.
Une grosse pierre lui rentrait dans le dos. Mais elle ne voulait pas se lever malgré la douleur. Parce qu'au fond d'elle, elle savait qu'elle ne pourrait plus jamais faire cela, se coucher sur le sol à découvert, fermer les yeux et dormir.
Elle aurait aussi pu rester là, sans bouger, aussi longtemps qu'elle l'aurait voulu, mais elle savait aussi que le destin qui l'attendait si elle ne se levait pas était bien pire que tous ce qu'elle pouvait imaginer.
Alors elle se tourna sur le ventre, ramena ses pieds à la hauteur de ses mains, puis se redressa, et enfin, elle ouvrit les yeux.
Autour d'elle s'étendaient de longues plaines de roches dans différentes nuances allant du gris souris au noir d'encre. Sur sa gauche, au loin, des montagnes de la même teinte et aux sommets enneigés se dressaient menaçantes vers le ciel, parcouru de volutes couleur cendre et veinées de rouge sanglant.
Du noir, du rouge, du gris, et des pierres.
Elle se tourna vers sa droite. De ce côté les plaines de roches laissaient petit à petit place à du sable, formant un désert sombre dont le vent modifiait sans cesse la forme.
Derrière elle, une bande irrégulière plus noire que tout ce qu'elle avait pu voir jusqu'ici se découpait à l'horizon.
Au bout de quelques instants elle finit par l'identifier. Il s' agissait d'une forêt.
Lava baissa les yeux sur elle-même. Elle était vêtue d'une tunique rouge sombre qui lui arrivait à mi-cuisse, et aux manches qui lui tombaient un peu en dessous des coudes. Elle portait aussi une sorte de bermuda dans un tissu épais brun foncé. Ses pieds était nus. Elle porta sa main à sa tête et elle fit trois découvertes.
Premièrement, elle avait les cheveux très courts. Juste un fin duvet de cheveux doux et dorés.
Deuxièmement, à l'intérieur son poignet gauche était tatoué un pendu. Le corps était à l'encre rouge et la potence en noire.
Troisièmement, sur sa tempe, il y avait un trou. Le trou d'une balle de pistolet. Le trou ne saignait pas et ne lui faisait pas mal non plus, mais vu de l'extérieur cela devait certainement être dérangeant à voir.
Peu importe, elle aurait pu être défigurée qu'elle s'en fichait.
Elle réfléchit un instant. Le désert n'était même pas un itinéraire envisageable. Elle se serait perdue en quelques minutes et il n'y avait nulle part dans ce lieu où elle aurait pu fuir ou se cacher.
Cela la surpris. Pourquoi voulait-elle se cacher ? Se cacher de quoi ? Elle n'en savait rien mais ce même instinct qui l'avait poussé à se lever lui hurlait de ne pas rester à découvert, de se faire discrète et silencieuse, et de se cacher.
Il lui restait la montagne ou la forêt. Elle hésita un instant et prit la direction de la forêt. Bien que la montagne réservait certainement de nombreuses cachettes, il lui semblait que la forêt serait un terrain sur lequel elle pourrait évoluer plus facilement. Et pourquoi pas fuir plus rapidement.
Alors, pas après pas, elle avança, malgré les pierres tranchantes qui lui entaillait les pieds, ses jambes qui tremblaient, et cette impression de danger qui lui pesait comme une chape de plomb sur les épaules, elle ne ressentait aucune peur.
Lava arriva devant les premiers arbres avec les pieds poisseux de sang et les jambes en bouillie.
Elle pénétra sous la voûte des arbres comme on entre dans une maison inconnue dont les propriétaires sont absents et la porte ouverte. Avec beaucoup d'hésitations, elle continua son chemin à travers les troncs. Les arbres étaient beaucoup plus haut que ce qu'elle imaginait et les branches, bien que dénudées de feuilles, obstruaient presque totalement la lumière émanant du ciel tant elles étaient épaisses et nombreuses, et s'entrecroisaient comme de longs doigts crochus.
Elle leva la tête, et dans les petits espaces de ciel qu'elle pouvait apercevoir, elle pu constater que la lumière du jour semblait plus faible que lorsqu'elle était encore en chemin. Je ne pensais pas que le temps passait en enfer.
Soudain des doigts gelés étranglèrent sa gorge. Un voix masculine l'interpella :
- Tu vas me montrer ton poignet tatoué, tu ne diras pas un mot, puis tu te mettras à genoux, les main sur la tête, et tu répondras à toutes mes questions... Sinon, je te jure que je t'arrache ta gemme. Si tu as bien, compris hoche de la tête.
Lava était toujours très sereine, attitude plutôt curieuse étant donné sa situation. Elle commençait à manquer d'air et, bien qu'elle n'eut pas du tout idée de ce que pouvait être sa gemme, il avait prononcé sa dernière menace sur un tel ton plein d'horreur et d'effroi qu'elle se dit qu'il s'agissait sûrement d'une importance vitale.
Vitale, elle était déjà morte ! Son propre jeu de mot la fit pouffer. L'homme, qui attendait toujours son hochement de tête, resserra sa prise sur sa gorge :
- Tu crois que j'oserais pas ! Tu me prend pas au sérieux ! Hoche la tête si t'as compris ce que je t'ai dis de faire !
Maintenant, elle manquait vraiment d'air. Elle saisit les poignets de son agresseur et tenta de les écarter tout en hochant aussi énergiquement que possible la tête. Il attrapa violemment sa main gauche et examina son poignet :
- Une suicidée, je l'aurai parié.
Il l'a lâcha d'un coup et elle s'effondra à quatre pattes sur le sol de poussière grise pâle et de chardons rouges de la forêt. Elle se dépêcha de mettre ses mains sur son crâne presque rasé. L'homme inconnu lui demanda
- Ton nom !
- Lava. Ton nom ?
Il ne répondit pas tout de suite, puis au bout de quelques secondes, il lui prit la main, la redressa et lui dit :
- Zac. Bienvenue en enfer.
PDV : Zac.
Zac marchait depuis plusieurs jours. Le démon auquel son ancien groupe l'avait livré l'avait relâché il y a cinq jours, et depuis, il essayait de mettre le plus de distance entre ces derniers et lui. C'était pour cela qu'il devait sortir de la forêt.
Il ne devait plus tarder à l'atteindre maintenant. Il irait vers la montagne. Il resterait à basse altitude mais ce serait déjà bien suffisant pour éviter les démons. Zac courrait en regardant ses pieds. Il ne voulait pas trébucher à cause d'une racine.
Alors qu'il relevait la tête pour se repérer, il aperçut une âme, qui il lui tournait le dos à moins de dix mètres.
Il s'agissait d'une jeune fille. Elle devait avoir une vingtaine d'années. Bien que ses cheveux soient très courts, son physique était clairement celui d'une fille.
Elle avait l'air maigre, pas très grande, quelque chose comme un mètre soixante-cinq, peut-être un petit plus, mais pas beaucoup. Elle scrutait le ciel sans bouger. En enfer, une attitude comme celle-ci n'est pas vraiment habituelle. Elle ne semblait absolument pas sur ses gardes.
Zac s'approcha un peu et alla légèrement sur la gauche pour essayer de voir un morceau de son profil.
Il ne pu pas vraiment voir son visage, mais il pu aperçu un trou circulaire sur sa tempe. C'était clairement une blessure d'arme à feu.
Zac se dit qu'elle devait être une suicidée. C'était ce qu'il y avait de plus logique. Et elle venait visiblement tout juste d'arrivé. Si ça se trouve elle sait même pas où elle est la pauvre gamine.
Mais il fallait toujours être prudent. Sinon il lui arriverait encore le même cauchemar entre les griffes des démons.
Il se rapprocha encore, puis enserra ses mains autour de sa gorge :
- Tu vas me montrer ton poignet tatoué, tu ne diras pas un mot, puis tu te mettras à genoux, les main sur la tête, et tu répondras à toutes mes questions... Sinon, je te jure que je t'arrache ta gemme. Si tu as bien compris, hoche de la tête.
Elle ne bougea pas, elle ne paraissait même pas un peu stressée. Elle doit être complètement paumée.
Soudain, elle lâcha un petit rire. Je retire ce que j'ai dit, en fait c'est juste une folle furieuse.
Il serra un peu plus le cou de la jeune fille.
- Tu crois que j'oserais pas ! Tu me prend pas au sérieux ! Hoche la tête si t'as compris ce que je t'ai dis de faire !
Elle essaya sans succès d'écarter ses mains tout en hochant énergiquement la tête. Il lui attrapa le poignet et y vit le signe du pendu.
- Une suicidée, je l'aurai parié.
Il la lâcha et elle tomba à genou. Elle mit les mains sur sa tête.
- Ton nom !
- Lava. Ton nom ?
Il réfléchit un instant. Une suicidée. Elle ne semblait pas vraiment dangereuse. Elle lui tiendrait compagnie jusqu'à ce qu'un démon les trouve. À ce moment là, il l'assommerait, la laisserait sur place à l'intention du démon qui le laisserait tranquille pendant qu'il s'occuperait de Lava. En plus elle avait un joli visage, même si sa blessure, mise en valeur par ses cheveux, était assez gênante à voir. Il la redressa et lui dit :
- Zac. Bienvenue en Enfer.
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