Chapitre Second : Mystère

Sarah se réveille. Il est encore tôt en cette matinée maussade de fin d'été. Nous sommes le lundi deux septembre deux mille dix-neuf. Un ciel couvert charge l'atmosphère d'inquiétude et d'appréhension,d'autant plus que le petit Gabriel va connaître sa première rentrée scolaire, en classe de maternelle.

La maman éteint son réveil qui n'a de cesse de l'inciter à se lever, en hurlant un son strident, d'un coup violent sur la tête. Celle-ci s'étire, fixe quelques secondes le plafond en imaginant comment va se dérouler sa journée, puis quitte sa chambre pour gagner la cuisine.

Elle passe d'abord par un petit couloir, où derrière elle se trouve la salle de bain. A gauche ce sont les toilettes, dont la porte entrouverte nous laisse deviner un tableau où des choses sont inscrites à l'aide de craie de différentes couleurs. La jeune femme continue jusqu'au salon, où un grand canapé forme un angle, à gauche, encadrant la porte de la terrasse ainsi que la télévision,mais elle bifurque à droite, pour gagner la cuisine, en contournant l'îlot central. Elle pousse le bouton de mise en marche de la machine à café, et opère le chemin inverse, pour pénétrer dans la chambre, voisine à la sienne, et réveiller le petit Gabriel.

Ce dernier est déjà bien conscient. Il regarde sa mère avec ses grand yeux écarquillés, comme s'il percevait lui aussi que cette journée allait être particulière. Le petit tend les bras vers sa génitrice, en articulant clairement deux mots : « je t'aime ».

Après une étreinte pleine d'amour et de fierté, Sarah allonge Gabriel sur la table à langer, et constate que son garçon a acquis la propreté nocturne depuis un certain temps maintenant. Elle le félicite d'un baiser, puis l'installe pour le petit déjeuner.

Elle prépare un grand bol de lait, qu'elle remplit de céréale, et le donne au tout jeune garçon. Les céréales craquent sous la pression des dents éclatantes de blancheur du petit ange.Elles sont fortes, saines, pleines de vitalité, tandis que la maman dont la silhouette a été épargnée par la grossesse, se fait quelques tartines et apprécie son café.

          « Tu sais que c'est un jour spécial aujourd'hui, Gabi.

          _ Je sais maman.

          _ On en a parlé avec papa, tu te souviens ?

          _ Oui je me souviens. Je sais. Je dois être un grand garçon.

          _ C'est bien.

          _ Il est où papa ? Il vient pas ?

          _ Tu sais bien qu'il est au travail... D'ailleurs maman va devoir reprendre le sien aussi.

          _ Tu vas travailler ? Mais je vais rester tout seul ?

          _ Bien sûr que non. Tu as ton oncle Ethan, et papa rentre toujours vers dix sept heures.

          _ Tonton Ethan...

          _ Qu'est-ce qu'il y a ?

          _ Il revient quand me voir ?

          _ Et bien justement, c'est lui qui va venir te chercher à midi.

          _ Trop bien !

          _ Il va te garder jusqu'à demain matin, et c'est lui qui t'emmènera à l'école !

          _ Trop chouette !

          _ Allez, maintenant file te brosser les dents, maman va débarrasser la table et t'habiller pour aller à l'école. Pour une première journée il faut faire bonne impression.

          _ C'est toute la journée ?

          _ Non, c'est pour ça que tonton vient à midi, aujourd'hui ça ne va durer que le matin. On va nous expliquer comment l'année va se passer, tout ça...

          _ D'accord, je comprends. Mais du coup tu vas rester avec moi ?

          _ Je ne vais pas pouvoir mon cœur. J'ai une occasion pour le travail que je ne peux pas manquer. Mais promis on se reverra demain.

          _ D'accord. »

La mère et l'enfant mettent en ordre leurs affaires,et se rejoignent dans le couloir. Ils procèdent à l'inventaire deleurs objets respectifs.

          « Voyons... clé de voiture ? Elles sont là. Tu as ton cartable ?

          _ Oui maman, il est là.

          _ D'accord... tu as bien mis toutes tes affaires.

          _ Ne t'inquiète pas.

          _ Alors... les clés de l'appartement...

          _ Ici maman.

          _ Ah ! Bien joué Gabi ! Bon je crois qu'on peut y aller. »

Le duo quitte le foyer familial, progresse le long du couloir, ignore l'ascenseur sur la gauche pour emprunter les escaliers et descendre au rez-de-chaussée depuis le premier étage. Un chat les accompagne tout le long du trajet. Une fois sortis de la cage, ils progressent de nouveau dans un petit couloir, poussent la porte, appuient sur le bouton de sécurité de la seconde porte du petit sas, et arrivent au niveau du parking.

La seule chose qui sépare l'école en question du bâtiment où la petite famille vit est un simple grillage, ainsi qu'un petit espace vert. Sarah et Ethan empruntent le portail, à gauche, et gagnent la rue, pour bifurquer à droite. D'autres mamans sont présentes, notamment une amie de la famille, laquelle est saluée chaleureusement par Sarah et son fiston. Quelques brèves paroles sont échangées, et la mère disparaît en lançant un baiser à son fils.

          « Gabi ! Tu as peur ? Lui demande l'amie de sa maman.

          _ Non, pourquoi ?

         _ Parce qu'Ali est tout tremblant lui.

Gabriel regarde l'autre garçon, et sourit.

         _ Je crois qu'il n'aime pas l'école.

          _ Il faudra bien qu'il fasse un effort. »

Tous les parents et les enfants sont invités à renter. La matinée se déroule sans accrocs, en commençant par l'attribution des classes par le corps enseignant. Ensuite le trio gagne une pièce, où l'on leur explique comment va se dérouler l'année, ce qu'ils vont étudier, et l'importance de l'éducation au sein du système scolaire. Quand midi pile arrive, la cloche retentit, et tout le monde ressort de l'école dans le calme pour les adultes, mais dans l'effervescence la plus totale pour les petits.

          « Tu as quelqu'un pour te ramener ? Demande Fati.

          _ Oui, mon oncle. Je crois que je l'entends. »

          Un vrombissement est entendu. D'abord distant, le rugissement du moteur est de plus en plus violent, à mesure qu'un bolide se rapproche de l'école, mais s'estompe finalement à ses abords, avant qu'une Porsche n'apparaisse, toutes les vitres teintées, et qu'un jeune homme n'en sorte, très élégamment vêtu.

Une paire de lunettes aux montants d'argent habille le contour de ses yeux, et ses longs cheveux dansent dans le vent qui souffle en tempête. Un long manteau noir encadre ses épaules,descend jusqu'au niveau des tibias, mais laisse découvrir grâce à l'ouverture devant, une veste plus légère, toujours agrémentée d'une broche en forme de croix divine, mais fermée d'un seul bouton, celui du haut, sur une chemise d'un rouge sévère, et d'une cravate sur laquelle sont dessinés des dragons. La bande de tissu plonge dans un gilet d'un noir aussi intense que le manteau et le pantalon.

Ethan observe la marée de visage devant lui, autant de personnes qui vont et qui viennent, par vagues, mais son regards'accroche immédiatement à celui de son neveu, comme s'il avait pratiqué cette exercice toute sa vie. Ce dernier s'accroupit, en prenant garde à ne pas tâcher ses vêtements, et tend ses bras en direction de l'enfant. Gabriel répond d'une course vers son oncle, lequel le soulève en direction du ciel, en pivotant sur lui-même.

          « Alors bonhomme, ça se passe l'école ?

          _ Je peux pas dire.

          _ Comment ça ?

          _ On a rien fait. La maîtresse a parlé et on a rien fait.

          _ Oui je me souviens que c'était pas cool non plus de mon temps. J'ai jamais aimé les rentrées des classes. »

Fati fait un signe de main à Ethan. Il répond d'une révérence de la tête, en installant Gabriel dans son siège-auto.La femme se rapproche.

          « Alors c'est vous ? C'est vous le tonton ?

          _ Ah ! Oui effectivement. Je suis Ethan, enchanté.

          _ Moi c'est Fati, je le suis aussi.

          _ Bien Fati, j'aurais aimé rester discuter mais je dois nourrir le petit fauve. J'espère avoir le plaisir de vous revoir bientôt.

          _ Ce sera un plaisir partagé. »

          L'oncle monte dans sa voiture, démarre l'engin qui provoque tous les regards, pour la plupart accusateurs, mais il s'en moque. Ethan quitte sa place, accélère délicatement jusqu'au stop,puis passe à droite de l'église. La circulation et la visibilité ne lui permettent pas de se livrer aux frivolités qu'il affectionne tant, mais il s'en contente, d'autant plus qu'il réalise toute la responsabilité qu'il prend en assurant la garde de son neveu.

          « Tu veux manger où ?

          _ Macdonald !

          _ Hum... bon... je te propose un marché. Ce midi je te laisse manger au Mac Do, te gaver te toutes ces cochonneries, mais ce soir je te fais goûter de la vraie cuisine. Marché conclu ?

          _ D'accord tonton, on fait ça.

          _ Bon... Sur place ou à emporter ?

          _ J'aimerais bien aller mange à Anthy...

          _ Bon, ça marche. »

          Le furieux conducteur quitte la ville d'Excenevex, pour arriver sur une route assez peu fréquentée, entourée par des champs et quelques habitations, essentiellement. Il progresse jusqu'à parvenir à Sciez, connu dans tout le Chablais pour l'enclavement excessif de son carrefour giratoire en période estivale, mais parfois aussi aux heures de pointe. Pour ce qui est de l'instant présent, aucune voiture ne l'empreinte, comme si la présence du petit ange dans l'habitacle agissait comme une bénédiction.

          « On va faire deux ou trois courses pour ce soir.

          _ Ici ?

L'enfant pointe une grande surface, voisine au giratoire, où un L est encerclé de bleu.

          _ Hum... non pas ici. Tonton a passé assez de temps dans ce magasin au cours de sa vie. Il n'en accordera plus une seconde.

          _ D'accord.

          _ Tu sais quoi, on va d'abord manger et ensuite on fera les courses.

          _ Tonton ?

          _ Oui mon petit ange ?

          _ Tu travailles toi ?

          _ Et bien oui, pourquoi ?

          _ Non comme ça. Papa travaille donc il n'est pas là. Maman travaille donc elle n'est pas là. Mais toi tu travailles mais tu es là. C'est juste bizarre.

          _ Tu es trop malin pour ton âge Gabi. Mais on en reparlera plus tard, quand tu seras en âge de comprendre certaines choses.

          _ D'accord. »

          Le duo passe une voie rapide, au maximum de la vitesse autorisée, sans dépasser d'un seul kilomètre par heure, pour gagner un autre carrefour, qu'il traverse sans difficulté. Une fois arrivé au second, Ethan s'engage en direction du fast-food, met son clignotant à droite, et s'engage dans la voie du drive. L'enfant énumère les éléments de sa commande à l'adulte, lequel adopte une expression de surprise intense en toisant son neveu de bas en haut.

          « Mais tu mets où tout ça, Gabi ?

         _ Dans mon ventre tonton, tu veux que j'y mette où ? Dans mes poches ?

La gravité du ton du petit arrache un sourire prononcé au plus grand.

          _ Il faudra que je discute de deux ou trois détails de ton éducation avec ta mère. Tu es vraiment trop malin pour ton âge toi.

          _ Tu prends rien toi tonton ?

          _ Non, je mangerai plus tard, ne t'inquiète pas.

          _ Je te laisserai prendre des frits.

          _ C'est trop gentil. »

          Une fois servis, les deux complices reprennent la route. Ethan est forcé de revenir sur la gauche pour reprendre l'axe principal, étant donné que des quilles empêchent de couper au giratoire, depuis plusieurs mois maintenant. Ce n'est pas sans agacer la plupart des automobilistes, le conducteur de la Porsche en premier lieu.

Une fois ce désagrément contourné, ils passent par la grande avenue d'Anthy-sur-Léman, d'ordinaire très fleurie, mais dont les aléas du temps ont récemment gâté tout le charme. Une fois au giratoire en question, ils prennent la quatrième sortie,passent devant le burger king, et s'engagent sur la route qui les mènera, quelques minutes plus tard, à une plage aussi magnifique que désertée en cette période de l'année.

Ethan se stationne, ôte ses lunettes de soleil, et fait le tour de la voiture pour détacher son petit passager. Ils s'emparent des sachets cartonnés et prennent place à l'une des deux seules tables de pique-nique à disposition. Le vent souffle toujours aussi fort, mais il n'est pas frais. Les cheveux d'Ethan dansent dans un ciel courroucé, tandis que la lumière se fait ombre, et que des éclairs jaillissent périodiquement du côté de Lausanne, de l'autre côté du lac Léman.

          « Tonton ?

          _ Mon cœur ?

          _ Oh ! Maman aussi m'appelle comme ça des fois !

          _ Parfois, Gabi.

          _ Hein ? Pourquoi pas des fois ?

          _ Parce que... ça se dit, mais pas là.

          _ D'accord... Donc je disais que maman m'appelle aussi comme ça parfois !

          _ C'est joli, non ?

          _ Oui mais je peux pas être ton cœur. On n'a qu'un cœur et il est dans notre poitrine !

          _ Oui, mais c'est une métaphore.

          _ Une quoi ?

          _ Ecoute Gabi, tu es encore trop petit pour qu'on parle de ça. Quand tu seras un peu plus grand on en rediscutera.

          _ Je comprends, c'est pas grave... Dis tonton, ça t'arrive d'avoir peur ?

          _ Peur ? Peur de quoi par exemple ?

          _ Des éclairs ?

          _ Non. Je n'ai que rarement peur pour moi, mais plutôt pour ceux que j'aime.

          _ D'accord... Tu m'aimes moi ?

          _ Tu es tout en haut de la liste.

          _ Et papa et maman tu les aimes ?

          _ Bien sûr que oui.

          _ Et mamie ? Et papy ?

          _ Bien sûr qu'eux aussi.

          _ Ils me manquent.

          _ Oui je sais, ils habitent loin. Mais on va les revoir bientôt, pour tes prochaines vacances !

          _ Oui ! La maîtresse a parlé de ça ! C'était trop bien ce moment !

          _ Je veux bien te croire. »

Le temps passe, et les deux protagonistes ne disent plus rien pendant un temps. Le petit mange de très bonne volonté les aliments de son menu, et le grand se perd dans ses pensées, en écoutant les grondements dans l'horizon. Il sent alors une main glisser le long de son avant-bras, et dont le doigt qui y est rattaché repasse les lettres inscrites sous sa peau.

          « Tonton c'est quoi tes tatouages ?

          _ Tu ne t'arrêtes jamais de poser des questions toi, hein ?

          _ Tu veux que j'arrête ?

          _ Sûrement pas ! Reste comme tu es, c'est une grande qualité ! Ce sont des phrases écrites en latin.

          _ En latin ? C'est quoi ça ?

          _ C'est un peu l'ancêtre de notre langue. C'est ce qu'on parlait il y a longtemps. Si tu imagines que le Français, l'Italien ou même l'Espagnol sont des maisons, alors le latin serait le béton et nos langues en seraient les murs.

          _ Hum... je comprends. Tu peux la lire celle-là ?

          _ Si... si tu veux... Vulnerant omnes, ultima necat.

          _ Elle veut dire quoi ?

          _ Chaque heure nous meurtrit, la dernière tue.

          _ Hum... tu l'as fait tatouer pour ton accident ?

Ethan ne répond rien, ou du moins pas immédiatement.Ses yeux s'agitent ; il revit un souvenir.

          _ Tu l'as faite, on dit tu l'as faite Gabi.

          _ Pourquoi ça ?

          _ C'est... on parle de la phrase. Tu apprendras ça un peu plus tard.

          _ J'ai l'habitude, tout le monde me dit ça, que j'apprendrai plus tard, qu'on en reparlera plus tard, que je verrai plus tard...

          _ C'est bien normal, tu es encore si jeune petit ange.

          _ Tu n'as pas répondu. C'était pour ton accident ?

          _ Oui... oui c'est exactement ça.

          _ Tu en as d'autres de tatouées ?

          _ Oui, quelques unes. Mais...

          _ On en reparlera plus tard, oui je sais.

Coupe le petit l'air mécontent.

          _ Non, ce n'est pas ce que j'allais dire. Je ne peux pas te les montrer. Je ne peux pas les montrer aux gens que j'aime, les autres.

          _ C'est à cause de ton travail ?

          _ Oui... on peut dire que c'est à cause de ça. Allez finis ton repas, qu'on puisse rentrer avant que l'orage n'arrive sur nous. »

          Le vent soulève l'eau du lac pour la masser en vagues violentes, des rouleaux qui claquent sur les bords rocailleux de la plage, dont les graviers frémissent quelques fois, sous les assauts d'un air décidé à ne pas se calmer.

L'oncle récupère les emballages cartonnés, les place dans une poubelle, en remontant le dénivelé de la pente menant au parking, et prend son neveu par la main. Il l'installe confortablement sur le siège passager, puis se remet au volant. Le moteur se remet à rugir, et les phares s'allument d'une lumière éclatante, quasi divine. Quelques minutes plus tard, le conducteur se gare sur le parking d'une autre grande surface, dont le nom rappelle le giratoire, mais n'en est pas un.

Ethan et Gabriel pénètrent dans la grande surface, parla porte la plus à gauche, à côté de la cafétéria, et s'arrêtent quelques instants à côté d'une boutique où des armes sont exposées.

          « Qu'est-ce que tu regardes tonton ?

          _ Rien du tout, juste s'il y a de la nouveauté.

          _ Tu aimes les armes ?

          _ Je... J'aime les regarder, c'est tout.

          _ D'accord. »

          Quelques secondes passent. Une fois la curiosité de l'observateur satisfaite, le duo se remet en mouvement. Il remonte la très grande ligne de caisse, par la droite, saluent les vigiles, puis s'engage dans le magasin par le poste de garde, à gauche.
Leur progression est d'abord linéaire, aussi jettent-ils un œil aux promotions, parsemant de toutes parts leur traversée. Du vin, des confiseries, des gourmandises ; Ethan est interrompu.

          « Tonton, oh dis tonton, on peut acheter des chips ?

          _ Je... bon rien que cette fois mais un petit paquet. Tonton ne supporte pas bien tout ce qui est gras et salé. Il fait des remontées acides après.

          _ Des remontées acides ? C'est quoi ?

          _ C'est quand de l'acide de l'estomac remonte par le tuyau qui descend de ta gorge à ton ventre.

          _ L'œsophage ?

          _ Mais d'où est-ce que tu connais ça toi ?

          _ C'est maman qui n'arrête pas de rappeler à tout le monde la fois où tu t'es étouffé.

          _ Elle quoi ?

          _ S'il te plaît, raconte pas...

          _ Je vais vraiment avoir une grosse conversation avec ta mère. »

          Une fois arrivés au niveau de la boulangerie, tout au bout du magasin, ils bifurquent sur la gauche, et trouvent la poissonnerie. L'adulte demande deux pavés de saumon bien tendre, qu'on lui emballe et qu'on lui tend. Le paquet bien en main, l'amateur de cuisine fait un détour par les fruits et légumes, s'empare d'un sachet d'échalotes, puis regagne la ligne de caisses. L'attente est modérée, étant donné que presque toutes les machines sont utilisées par des hôtes et des hôtesses, et non délaissées comme dans d'autres magasins, laissées aux bons soins de la solitude et de la poussière.
Une fois ressortis, les deux complices regagnent la voiture.

          « Tonton on va manger quoi ce soir ?

          _ Bah du saumon.

          _ Non mais avec ?

          _ Du riz.

          _ Tu en as chez toi ? On en a pas acheté là.

          _ Bien sûr que j'en ai. Il est même spécial, car il vient d'une région reculée du monde.

          _ Comment ça une région reculée ? Il vient d'un autre pays ?

          _ Exactement.

          _ Tu voyages beaucoup ?

          _ Très souvent.

          _ Pour le travail ?

          _ Pour le travail. On ne peut rien te cacher à toi !

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