CHAPITRE 16
La matinée a été lourde de questions curieuses de la part de mes collègues de travail. Honnêtement, je n'avais pas du tout envie de répondre à leurs questions quant à notre « escapade » avec le prince, comme elles me l'ont dit, alors qu'en réalité c'était une horreur, c'était effroyable. Aucune des servantes n'a voulu le croire, pensant que deux jours et deux nuits seule avec le prince Aaron, ça doit être « dément ». J'arrive après maintes reprises à me frayer un passage jusqu'à Anne qui m'a énormément manqué. Lorsque j'arrive enfin à son niveau, elle n'hésite pas et me prend dans ses bras, me laissant légèrement tendue de surprise. En effet, Anne n'est pas très tactile et ne montre pas forcément de l'affection. En fait, elle est un peu comme moi. Après quelques secondes, je lui rend son étreinte malgré ma difficulté avec les béquilles puis elle me lâche.
- Evelyn, tu nous a fait vraiment peur, me dit elle en lissant mon pull de ses mains.
- Je suis désolée, je lui rétorque sous les yeux encore larmoyants de Kate.
La matinée se passe ainsi. Le personnel a montré de la joie en me voyant saine et sauve et je dois admettre que j'en suis plutôt émue. Je n'ai pas eu le temps de raconter en détails ce qu'il s'est passé à Kate puisque nous avons été entourées sans relâche. Elle m'en a d'ailleurs montré le fait que ça l'énerve beaucoup. La semaine prochaine commencent les fêtes de fin d'année et donc les membres du personnel ont quelques jours de vacances, je suis une des seules à rester malgré les demandes insistantes de ma meilleure amie pour y aller avec elle, chez ses parents et son petit frère. D'habitude, pour les deux autres périodes de vacances de l'année puisque on en a une par trimestre, j'y vais sans hésiter. Mais quand il s'agit des fêtes, je préfère ne pas me mettre en travers de sa famille bien que je les aime énormément. Kate doit beaucoup leur manquer au cours de l'année, j'ai envie qu'ils profitent totalement de sa personne. D'ailleurs, en pensant à ça je remarque tardivement que le château est pratiquement décoré entièrement. Des banderoles se hissent sur les murs et de jolis sapins prennent place à pratiquement toutes les pièces, du moins celles que j'ai pu voir. Je n'ai pas vraiment pu aider pendant ma semaine à l'hôpital...
- Evelyn, commence Anne en me prenant de côté de manière à ce que nous soyons seules. Il faudrait que tu ailles voir le prince, je n'ai pas voulu le dire devant les autres mais il est venu voir si tu étais sortie très tôt ce matin.
Mon cœur fait un bon en entendant ce que me dit Anne mais je me retiens de lui montrer mon agitation. Aaron est venu de lui-même me chercher dans le bâtiment du personnel? Très tôt le matin, de surplus? Impossible. Son double angélique peut-être, mais pas Aaron.
- Vraiment? Je demande à Anne naturellement. Je vais aller le voir alors, de toute manière j'y comptais bien. Je suis toujours sa servante après tout, je rajoute en rigolant.
Je préviens rapidement Kate que je dois aller voir le prince puis sors du bâtiment sous le froid de décembre. Bon sang, il faudra que je pense à m'acheter un nouveau manteau puisque je n'en ai plus. Un rouge, je songe en pensant à la remarque que m'a faite le prince sur cette couleur. C'est devenue ma couleur préférée après tout! Il faudra d'ailleurs que j'en avertisse Kate ce soir, quand nous nous retrouverons seules. Je sens déjà les questions sortir de sa bouche comme des balles d'une mitraillette, bon dieu. D'ailleurs, il faudra que j'aille faire mes cadeaux, pour Kate et Anne surtout. Je suppose que les autres ont eu le temps de les faire durant cette dernière semaine.
Une fois arrivée dans dans le bâtiment royal, je me dirige vers les ascenseurs en espérant croiser personne et monte au quatrième étage, appartements du prince. Je ne pensais pas qu'un jour ça serait possible, mais ces bâtiments m'ont légèrement manqué durant ces dix derniers jours! En passant la porte après que les deux gardes l'ai ouverte, je sens mon cœur battre à une telle vitesse! Ça m'afflige rien que d'y penser. J'entre difficilement à cause de mes béquilles et me dirige directement dans la chambre du prince. Sans surprise, c'est dans son lit que je le retrouve, habillé d'un jean et d'un pull noir, le nez dans le cellulaire et une attelle au bras. Je me retiens presque de lui rire au nez tellement que c'est inattendu, lui qui semblait si puissant. Malgré tout, il est toujours aussi irrésistible que d'habitude, avec ses cheveux noirs qui retombent sur son front et sa barbe de quelques jours. Rester calme, surtout rester calme.
- Prince Aaron, je commence en m'éclaircissant la voix et en m'approchant de son lit après avoir fermé la porte. Dire qu'il ne m'a même pas entendu entrée!
- Ev', enfin, s'exclame le prince en se levant de son lit. C'était horrible sans toi!
- Oh, je... Vraiment? Je demande en devenant toute rouge et brûlante et en perdant mes mots. Alors là, je m'y attendais vraiment pas, je lui ai tant manqué que ça?
- Mais oui, tu ne sais pas à quel point c'est difficile de porter une attelle tous les jours! Me répond t'il avant d'être mort de rire en voyant sûrement ma rougeur qui se transforme d'ailleurs en rougeur de colère. Quel abrutit! Il est toujours le même en tout cas, même après avoir été deux jours entiers perdu dans une forêt!
- Je viens de sortir de l'hôpital, je lui dis sèchement tandis qu'il s'approche de moi. Vous m'avez cherché pour me dire ça? Je ne peux m'empêcher de demander d'un ton las.
- Tu croyais que c'était pour quoi ma petite Evy, hein? Me questionne t'il d'un sourire en coin et en levant mon menton de sa main pour que je puisse le regarder dans les yeux, chose qui m'agace d'autant plus.
- Rien, je lui rétorque en dégageant mon visage de sa main.
Parce que vous étiez inquiet pour moi, peut-être?
Bien sûr que non, pourquoi il serait inquiet pour toi, pauvre cruche! Il m'énerve, certes, mais je m'énerve moi-même encore plus.
- Evelyn, dit Aaron après quelques minutes et s'être raclé la gorge.
Ok, je sais qu'il est à présent sérieux. Il s'assoit sur son lit et me fait signe de le rejoindre, ce que je fais après avoir un peu hésité. Je me pose à ses côtés et attend qu'il parle.
- Tu n'as parlé à personne de tes... visions? Me demande le prince en me regardant droit dans les yeux, et pour dire vrai j'avais totalement oublié cette histoire de vision.
- Non, bien sûr que non, je lui affirme en repensant à ces phénomènes qui me dépassent largement.
- Très bien. Le roi devrait te convoquer ce soir, je ne sais pas si quelqu'un t'as prévenu.
- Non, pourquoi veut-il me voir? Je demande en imaginant la cause et en sentant la panique m'envahir.
- Ev', c'est plutôt grave en fait. Tu pourrai perdre ta carrière de servante. C'est à cause de ce que tu as dit dans l'hélicoptère, quand tu as prédis ce qui allait se passer j'étais au téléphone avec le roi, je ne sais pas si tu t'en souviens.
- Oh, je m'exclame en voyant très bien où il veut en venir. Il doit penser que j'y suis pour quelque chose, n'est-ce pas?
- Il est méfiant, en effet. Tu dois lui dire la même chose que je lui ai raconté. Tu lui raconteras que le pilote était déjà en réalité assoupi au moment où j'étais au téléphone avec lui et que tu sentais l'hélicoptère s'agitait. Je lui ai dit que je ne m'en était pas rendu compte sur le moment, heureusement que le pilote n'a pas parlé à ce moment précis.
- Je tacherai de lui dire la même chose dans ce cas, je lui répond en me demandant pourquoi Anne ne m'a rien dit puisque elle doit certainement être la seule au courant.
- Ev', il faut vraiment que tu fasses attention à ce que tu dis, ça déterminera ce que le roi fera de toi et je peux te dire que je suis impuissant face à son dernier verdict, me dit Aaron d'un ton rauque et posé ce qui m'inspire une certaine forme de confiance malgré la situation qui elle me fait très peur. Aussi, rajoute t'il, je ne t'ai pas tout dit par rapport à tes visions.
- Comment ça? Je l'interroge, très curieuse de sa dernière remarque.
- En fait, ce n'est pas la première fois que j'entends parler de vision, c'est pour ça que je n'ai pas eu du mal à y croire, et le roi non plus. Il déteste ça. Il faut dire que la dernière fois que quelqu'un lui a parlé de voir l'avenir, ça ne s'est pas très bien terminé, me raconte Aaron et je décèle une certaine tristesse dans sa voix, bien que camouflée.
- Est-ce que quelqu'un a prédit votre avenir? Je demande d'une petite voix.
- Pas le notre, mais celui de ma mère, la reine. Un homme était venu autrefois et avait demandé une conférence au roi disant que c'était de la plus haute importance. Je ne devais pas avoir plus de deux ans. Il avait alors prédis que quelqu'un allait assassiner la reine, et le roi aussi buté et obstiné qu'il a toujours été ne l'a pas cru et l'a jeté hors du palais, pensant que le vieil homme ne cherchait que des problèmes au sein de la monarchie. Une fois que le malheur est arrivé, le roi n'a plus jamais eu envie de reparler de cet homme, de vision ou même de magie. Il a interdit à ce que cette affaire sorte du palais, même parmi le personnel seuls très peu le savent, les plus anciens en fait. En bref, tout ce qui touche de près ou de loin à l'impossible et l'inexplicable, le roi déteste, termine Aaron en détournant ses yeux des miens et me laissant la bouche grande ouverte de stupeur.
- Je... Je ne sais pas quoi vous dire, je réussi à cracher bien qu'en réalité j'aimerai sortir tous les mots de réconfort qui circulent dans ma tête.
- Ne dis rien, justement. Il ne faut absolument pas que le roi entende le fait que tu as eu des visions, que tu as pu voir l'avenir. Et personne d'autre, même pas ta meilleure amie. Les murs ont des oreilles, surtout ici. Je n'imagine même pas ce que le roi pourrait faire de toi. Sérieusement, Ev', est-ce que c'est compris? Me demande autoritairement le prince, et j'ai l'impression de deviner un peu de protection dans son intonation, bien que je dois me faire des films, comme à mon habitude.
- J'ai compris, je lui dis d'un ton qui se veut crédible et rassurant, bien qu'en vérité c'est plutôt moi qui ai besoin d'être rassurée vu comment tous mes membres tremblent de peur.
Je ne veux même pas imagine ce que le roi pourrait faire si il apprenait quelque chose qu'il n'aime pas. Il pourrait me faire licencier, et ce serait la plus gentille des sanctions. Il pourrait carrément me faire incarcérer à perpétuité, j'en suis certaine! Si il y avait encore la peine de mort, je suis sûre qu'il n'hésiterai pas. Juste d'y penser j'en ai des frissons dans tout mon corps.
- Bien, n'y pensons plus maintenant, je dis au prince d'une voix plus claire, autant pour décompresser un peu que pour que mes tremblements s'arrêtent. Vous avez l'attelle pour combien de temps? Je rajoute en désignant du menton son bras droit.
- Encore deux semaines il me semble, mais je compte bien l'enlever avant, me répond t'il. C'est un vrai casse tête.
- Vous ne devez pas! Je dis, un peu trop fort, ce qui le fait sourire, enfin. Vous devez le garder pour être bien soigné.
- Compris, maman, dit-il en rigolant. Et toi, ces béquilles alors? Ta jambe va mieux?
- Oui, je vais mieux, je n'ai plus aussi mal. Encore quatre ou cinq jours tout au plus avec ces béquilles, je rétorque en remarquant que j'aurai sûrement le temps d'aller faire mes achats sans mes béquilles, et heureusement. D'ailleurs, est-ce que vous avez fait vos cadeaux durant cette dernière semaine? Je ne peux m'empêcher de lui demander curieusement.
- Non, j'ai été trop pris par les affaires administratives en rentrant, et puis il fallait faire un discours sur ce qu'il s'est passé devant le peuple, puis j'ai eu des interrogatoires avec la Nacional Crime Agency. En bref, ma semaine a été plutôt prise. Je suppose que tu n'as pas pu aussi de ton lit d'hôpital?
- Non, vous avez raison, je lui répond en rigolant.
- Je vais sûrement y aller demain avec Henry, tu veux te joindre à nous? Me demande le prince en me prenant ma surprise. Revoir Henry! Il faut avouer que je l'avais totalement oublié ces derniers jours!
- Oh, non, ne vous inquiétez pas pour moi, je dis en secouant mes mains devant moi comme une écervelée.
- Ev', ça va tu peux venir. Avec tes béquilles, c'est mieux que tu y ailles avec nous en voiture.
- Vraiment, prince c'est gentil mais je ne crois pas en avoir le droit. Je veux dire, je suis votre servante, je rajoute avoir un rire nerveux malgré moi.
Le prince me regarde, perplexe avant de reprendre la parole.
- Je pense que vu ce qu'on a vécu, venir faire les courses de fêtes ce ne sera pas de trop. Et puis je te dois bien ça, c'est par ma faute que tu t'es retrouvée en plein cœur de la forêt amazonienne, et qu'aujourd'hui tu t'es faite opérée. Et si c'est des gens du palais ou de tes supérieurs que tu as peur, fais passer ça pour un ordre de ma part, d'accord? Me demande le prince d'une voix tellement gentille et bienfaisante que je ne lui connais pas vraiment que ça m'en laisse sans mots.
- Je... D'accord. Merci, je lui dis sincèrement.
La journée passe plutôt rapidement après ça. Je n'ai pas vraiment pu faire le ménage dans les appartements du prince ou encore les taches que je fais quotidiennement, une autre servante a sûrement été désignée en attendant que je reprenne mon poste dans quelques jours, enfin si je le fais. Je suis tout de même resté une ou deux heures en la compagnie du prince durant lesquelles il s'est plus plain de son attelle qu'autre chose. Il m'a beaucoup agacée, comme à son habitude, mais j'ai aussi rigolé et ça m'a aidé à ne pas penser à ce soir, mon entrevu avec le roi. Pendant ces moments avec Aaron, j'ai vraiment l'impression que nous nous entendons bien et que nous pourrions être considérés comme... des amis. Je ne sais même pas si j'ai le droit d'avoir ce genre de pensées mais honnêtement je n'en ai rien à faire.
Après ça, j'ai rejoins le bâtiment du personnel où je n'ai pas pu plus aider pour autant après avoir déjeuné avec les autres. En gros, je n'ai pas fait grand chose de ma journée puisque toutes les servantes étaient à leurs tâches, dont Kate qui était avec Blair toute la journée, je me suis par conséquences un peu ennuyée. Il faudra d'ailleurs que je m'achète un nouveau téléphone demain. Demain... Mon cœur manque un battement rien que d'y penser. Je vais encore me retrouver avec Henry Abe, le meilleur ami du prince depuis toujours et la personne sur laquelle j'ai un léger crush depuis longtemps. J'ai vraiment hâte d'y être. Il faudra que je prévienne Anne et Kate au préalable. D'ailleurs, en voyant rapidement Anne ce midi pendant du déjeuner, elle m'a prévenu tout bas pour ne pas que les autres entendent que elle n'a pas voulu me dire pour le roi pour ne pas m'affoler, d'autant plus qu'elle pensait que le prince le ferait pour elle, et elle n'a pas eu tort. En y pensant, je constate à la pendule de la salle commune du personnel où je me trouve qu'il est bientôt 19 heures et c'est l'heure à laquelle je suis conviée devant le roi, d'après ce que m'a informé Anne. Je suppose qu'à l'heure actuelle, Kate et les autres servantes ont sûrement dû être informées que je vais passer devant le roi. Kate va s'inquiéter, je le sais. Honnêtement, je m'inquiète beaucoup moi-même, j'ai peur de ne pas dire ce qu'il faut au roi, d'être maladroite comme j'en ai le don. Il faut dire que en plus de ça, la déclaration du prince m'a totalement bouleversée! Cela ne m'aide pas vraiment. Un homme qui aurait prédit la mort de la reine? Et puis quoi encore! Et pourtant, je les fais bien moi-même ces fichues visions...
Qui peut bien être cet homme?
Bon sang, je me demande bien où tout cela va me conduire.
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