Chapitre 64

J'ai l'impression d'être assise dans cette salle d'attente depuis une éternité pourtant ça ne fait qu'une heure que nous sommes arrivées dans cet hôpital à l'arrière d'une ambulance, Candys installée sur un lit presqu'inconsciente, et moi toute apeurée, la suppliant de garder les yeux ouverts.

Je n'arrive vraiment pas à tenir en place, tout défile devant moi, des infirmières trop pressées qui n'arrêtent pas de faire des allers et retours d'une pièce à une autre à la recherche de je ne sais quoi, des personnes mal en point qui ne font qu'arriver, remplissant ainsi la salle d'attente et les allers de l'hôpital, des petites alarmes qui sonnent à gauche et à droite signalant l'arrivée des nouveaux cas, des enfants jouant et pleurant de partout, on dirait que je suis dans un mauvais film, qui n'est pas prêt de s'arrêter aussitôt.

Toute en gardant un œil bienveillant sur l'horloge juste en face de moi, je n'arrête pas de fixer la porte qui mène au bloc opératoire, impatiente de voir enfin quelqu'un sortir de là me donner des nouvelles de Candys. La tête lourde et les mains encore pleines de sang, j'essaye tant bien que mal de calmer mes tremblements. J'ai peur, très peur qu'elle ne s'en sorte pas, je ne veux même pas y penser. Instinctivement, je lève les yeux vers le plafond, implorant le ciel de ne pas me la prendre.

– S'il te plaît Candys, ne me laisse pas... Murmure-je à moi-même, les yeux pleins de larmes.

J'aimerais tant que tout ceci ne soit qu'un mauvais rêve et que je vais bientôt me réveiller, constatant que rien n'a changé. Je préfère mille fois qu'elle soit en santé, loin de moi, au lieu d'être dans cette pièce, entre la vie et la mort. C'est de ma faute.

– C'est bon, je la vois ! Entends-je crier ma mère à l'accueil.

Je me lève brusquement quand je la vois venir vers moi suivis de près de Sam et Jackson, elle me prend dans ses bras et je me laisse enfin aller.

– Ne me refais plus jamais une telle frayeur... Murmure-t-elle en me serrant très fort contre elle.

– Je suis désolée maman... Marmonne-je à peine dans un sanglot, les larmes ruisselant sur mon visage.

Elle interrompt notre étreinte pour m'examiner rapidement de la tête jusqu'aux pieds.

– Tu vas bien ? Tu as mal quelque part ? D'où est-ce qu'il vient tout ce sang ? Panique-t-elle.

– Je vais bien maman ne t'inquiète pas. Ce n'est pas mon sang, c'est celui de... De Candys. Lâche-je la gorge serrée.

– Comment est-ce qu'elle va ? Et où est-elle ? S'empresse de demander Sam, la voix tremblante.

Je ne sais pas quoi lui répondre, elle est aussi apeurée que moi et sur le point de fondre en larmes. Jackson lui caresse le dos pour qu'elle essaye de se détendre, mais ça n'a pas l'air de marcher.

– Elle est au bloc opératoire, ils s'occupent d'elle...

– Depuis quand elle y est ?

– Presqu'une heure...

Je la vois fondre enfin en larmes dans les bras de mon frère et ça me fais mal au cœur. Ma mère se rapproche d'elle pour essayer de la rassurer pendant que moi, je me laisse à nouveau tomber sur la chaise qui m'a accueillie dès mon arrivée.

Candys, tu as intérêt à t'en sortir sinon, tu causeras beaucoup de chagrin à bon nombre de personnes ici.

– Qu'est-ce qui s'est passé ? Demande Jackson en resserrant son étreinte sur Sam.
                              
               
                         *****

*

                                  Cinq heures plus tôt
                                                                                                                                           
Après avoir raccroché ma mère dans la précipitation, je me suis relancée à la poursuite de cette voiture mystérieuse qui détenait Candys. J'ai voulu relever sa plaque d'immatriculation pour l'envoyer à ma mère afin qu'elle fasse des recherches sur le propriétaire mais malheureusement, elle était trop flou, presque illisible pour que je puisse relever quoi que ce soit.

Toutes les vitres étaient fumées, je n'arrivais pas à distinguer le nombre de personnes qui s'y trouvaient à l'intérieur, ni la personne derrière toutes ces magouilles, mais je me doutais bien que c'était le psychopathe qui n'arrêtait pas de l'harceler depuis le début qui était derrière tout ça. Il ne fallait pas que je le perde de vue, cette fois ci.

Tout en les suivant discrètement, du moins c'est ce que je pensais, je priais que Candys soit encore en vie. J'avais beau réfléchir à tous les scénarios possibles pour essayer de comprendre ses réelles intentions, mais je n'y arrivais pas vraiment. Pour un rien, il a commencé à s'en prendre à elle au point de gâcher notre relation et au moment où elle semblait déjà avoir retrouvé le bonheur auprès d'une autre personne, il est revenu à la charge, cette fois ci, pour lui faire encore plus de mal. Je n'allais pas le laisser gagner cette fois-ci, il en était hors de question.

Toujours en restant discrète pour ne pas qu'il me repère et disparaisse comme par magie dans la nature avec elle, j'ai continué à le suivre jusqu'à ce qu'il emprunte une route menant à des propriétés privées. Nous étions désormais hors de la ville, retirée de tout. Je ne savais pas où il la conduisait, mais j'avais comme une vague impression d'être déjà passée par cette route, comment ça se pouvait ?

La route était presque desserte, pas de stationnement ni de postes de police en vue, seule la végétation dense dominait les alentours. Une fois à destination, je me suis garée un peu plus loin, hors de la propriété avant de me faufiler à l'intérieur, me cachant derrière les grands arbres qui s'y trouvaient. Sa voiture était juste garée là, à quelques mètres de moi, devant un grand chalet en piteux état. Il était vraiment très vieux, délabré et inhabité depuis des années vue l'état des alentours.

À qui appartenait ce domaine ? C'était la première question qui m'est venue à l'esprit, j'étais curieuse de le découvrir. C'était vraiment très grand et très discret.

Au moment où je voulais me rapprocher de la voiture pour vérifier à l'intérieur, la portière côté conducteur s'est ouverte, je suis restée cachée attendant impatiemment que le responsable de toute cette mascarade montre enfin son visage et je suis tombée de haut en le découvrant, on aurait dit une mauvaise blague.

– Non, c'est pas possible... Murmurais-je à moi-même, très surprise.

J'avais comme l'impression de vivre un cauchemar en plein éveil. Je n'arrivais pas à croire ce que je voyais, que la personne derrière tout ça était tout simplement Tyler. Ce Tyler avec qui nous avons grandi, le meilleur ami de mon grand frère, celui-là qui a toujours été proche de nous, toujours prêt à faire plaisir aux autres et de surcroît, avec un visage d'ange. C'est sûr, j'étais dans un vrai cauchemar, il fallait que je me réveille.

Si l'on m'avait demandé de désigner un potentiel coupable parmi nos proches, je n'allais jamais penser à lui, au grand jamais. Il cachait tellement bien son jeu. Et dire qu'il était avec nous hier soir, rien qu'à y penser, j'ai des frissons.

Encore sur le choc de cette découverte, j'ai bien failli me faire prendre quand j'ai marché sur une branche d'arbre morte.

– Oh, non... Paniquais-je en me cachant dans une touffe d'herbes sèches.

Il s'est rapproché un court instant pour inspecter les lieux, puis il est retourné à sa voiture chercher Candys. Elle était inconsciente comme je le craignais. Une colère inexplicable m'a envahi, j'ai sorti mon téléphone de ma poche avec l'intention d'appeler les secours mais je me suis rendue compte que le réseau était très instable dans ce lieu et en plus, je n'avais presque plus de batterie.

– Mince, il ne manquait plus que ça ! Rouspétais-je en rangeant mon téléphone dans la poche arrière de mon pantalon.

Je n'avais plus le choix que d'aller la chercher moi-même seulement, il fallait que je réfléchisse à un bon plan pour le faire. Par chance pour moi Tyler est ressorti de la maison peu de temps après tout en furie et est remonté dans sa voiture pour aller je ne sais où. J'ai profité de cette occasion pour me rapprocher du chalet, puis je suis entrer discrètement par la porte de derrière, donnant directement dans la cuisine, une grande pièce ouverte de partout mais presque vide. Au bout de celle-ci se trouvait deux grands couloirs opposés, j'hésitais lequel prendre mais j'ai fini par aller à gauche avec l'espoir de tomber directement sur Candys.

C'était vraiment immense, un chalet fait en bois de chêne dont l'éclat naturel se dissipait déjà sous une couche épaisse de moisissure qui dégageait une forte odeur. Cet endroit avait vraiment besoin d'aération.

Je m'avancais à pas lents, le cœur battant et les mains moites dans un couloir inconnu. Tout était si calme, ce qui m'inquiétais un peu. J'avais l'impression qu'à tout moment j'allais tomber sur Tyler ou quelqu'un d'autre de mal intentionné, ce qui allait vraiment compliquer les choses. Je n'arrêtais pas de contrôler mes arrières. Je me suis retrouvée à la fin dans une grande salle de séjour dont les meubles étaient entièrement recouverts de tissus blanc très poussiéreux. La faible luminosité qu'il y avait ne me permettait pas de distinguer grand chose mais je savais que je me rapprochais d'elle, je sentais qu'elle était là, quelque part.

– Candys ? Murmurais-je en continuant d'avancer.

J'ai suivi des petits gémissements venant de la pièce d'à côté, je me suis dépêchée d'aller voir et je l'ai retrouvée étalée à même le sol, presqu'inconsciente.

– Oh non, Candys je suis là... Me précipitais-je vers elle.

J'ai réussi à la retourner et à maintenir sa tête soulevée sur mes cuisses. Les rayons de soleil qui l'éclairaient m'ont permis de voir qu'elle était vraiment mal en point. Elle saignait beaucoup de la tête et avait du mal à garder les yeux ouverts.

– Lyndsay... Soufflait-elle à peine en essayant de se relever.

– Oui, je suis là. Doucement, ne fais pas de gestes brusques s'il te plaît.

– C'est... C'est Tyler le responsable. C'est... C'est lui qui m'a fait sortir de, de la route. Balbutiait-elle en me serrant la main.

– Je sais, je l'ai suivie jusqu'ici. Ne t'inquiète pas je vais trouver un moyen de nous sortir d'ici. Essayais-je de la rassurer.

– Je savais bien que quelqu'un me suivait en douce seulement, j'étais loin de m'imaginer que c'était toi ! Résonnait la voix de Tyler derrière moi.

Le son de sa voix m'a fait sursauter et me retourner brusquement. J'ai cru que mon cœur allait s'arrêter quand je l'ai vue braquer une arme sur nous. Il avait l'air tout épuisé, le visage  luisant de sueur et le regard sombre.

– Tyler qu'est-ce que tu fais ? Paniquais-je en me levant doucement.

Je me suis placée de telle manière que l'arme était désormais braquée sur moi seule.

– C'est à moi de te demander ce que tu fous ici ! Tu n'étais pas sensée prendre un avion cet après-midi ? 

– C'est à cause de toi que je suis ici ! Tu n'aurais jamais dû utiliser mon téléphone pour lui envoyer un message en te faisant passer pour moi et ensuite la mettre dans cet état !

– C'est pour toi que j'ai fait tout ça ma belle, tu devrais plutôt me remercier ! Ricannait-il.

– Quoi ?

– Tu voulais qu'elle disparaisse de ta vie n'est-ce pas ? Alors, je vais t'aider.

– Je ne t'ai jamais demandé de l'éliminer qu'est-ce que tu racontes ?

– Pas directement c'est vrai, mais j'ai suivi votre conversation hier soir, où tu disais à Kate que ta vie aurait été mieux si vos chemins ne s'étaient jamais croisés. Je dois avouer que tu as raison, ta vie aurait été bien mieux. Mais comme je ne peux pas remonter le temps pour effacer votre rencontre, l'éliminer de ta vie dès maintenant est la meilleure chose à faire alors, pousse toi ! Lâchait-il en se rapprochant de nous, cherchant à tout prix à braquer son arme sur Candys.

– Non ! Je ne peux pas te laisser faire ça ! Si tu veux la tuer, tu devras d'abord commencer par moi !

J'avais peur, très peur même, mais je ne pouvais pas le laisser faire plus de mal à Candys. Il avait l'air perdu et n'arrêtait pas de faire les cents pas devant moi.

– Pousse toi Lyndsay, je ne me répéterai pas ! Me menaçait-il en braquant son arme sur moi.

– Non je ne le ferai pas ! Pourquoi fais-tu ça ? Comment en est-on arrivé là ?

– Tout ça c'est de ta faute ! Criait-il en agitant son arme. Tu m'as transformé en monstre.

– Mais, de quoi parles-tu ?

– Lyndsay...

La faible voix de Candys me fait me retourner vers elle, elle avait de plus en plus du mal à respirer correctement et à garder les yeux ouverts et ça commençait déjà à m'inquiéter. J'ai voulu la rassurer une nouvelle fois mais Tyler m'a empêché de le faire.

– Ne la touche pas ! Laisse là où elle est ! Criait-il.

– Mais, tu ne vois pas qu'elle se sent mal ? Si on ne fait rien elle va mourir !

– Je m'en fous ! Laisse là.

Il n'arrêtait pas de faire les cents pas, réfléchissant peut-être à une autre solution. J'ai eu l'idée de mettre mon téléphone en mode enregistrement quand il avait le dos tourné.

– Dis moi, pourquoi fais-tu tout ça ? Tentais-je une nouvelle fois en me rapprochant un peu de lui.

– Tu ne t'en souviens vraiment pas ?

– Me souvenir de quoi au juste ? Demandais-je perplexe.

Un rire jaune l'echappait. J'avais beau chercher dans ma mémoire mais je n'arrivais pas à savoir ce qu'il voulait vraiment.

– Tu te souviens au moins de cet endroit ?

Je voulais bien, mais je n'arrivais pas.

– C'est ici que nous avons échangé notre premier et seul baiser !

– Quoi ???

– Eh oui, c'est étonnant hein ! Rigolait-il. À l'époque nous n'étions que des adolescents en quête de nouvelles sensations. Tu en voulais presque au monde entier pour la mort de ta mère et moi, tout ce que je voulais c'était te soutenir, être avec toi pour que tu ne fasses pas de bêtises.

Je me suis assise près de Candys pour mieux assimiler tout ce qu'il racontait.

– Après une fête totalement dingue chez Charlie, tu n'as pas voulu rentrer à la maison parce que tu étais bien saoule et tu ne voulais pas avoir à faire à ton père ni à ta belle mère alors, je t'ai proposé de t'amener dans un endroit où nous serons en sécurité le temps pour toi de désaouler en douceur. Nous sommes venus ici, dans ce chalet !

– Et c'est là où tu as profité de moi ?

– Je n'ai jamais profité de toi ! Tu étais bien consentente et d'ailleurs, c'est toi qui m'a embrassé cette nuit là !

– Je ne te crois pas ! Je n'étais pas moi même ce jour-là et tu pouvais bien m'arrêter, mais au lieu de ça, tu en as profité. Lâchais-je tellement dégoutée.

– Oui, et alors ? Tu savais très bien que je t'aimais, mais tu t'en foutais de moi ! Criait-il. Tu as joué avec mes sentiments. Cette nuit là, j'étais tellement heureux que tu m'aies enfin accordé de l'importance, mais le lendemain, je suis redescendu de mon petit nuage. Tu as fait comme ci rien ne s'était passé entre nous et j'ai été obligé d'en faire pareil pour ne pas que tu t'éloignes de moi. Lâchait-il dans un sanglot.

Je n'arrivais pas à croire que tout ceci s'était réellement passé. Comment avons-nous pu en arriver là ? Il était tellement en colère contre moi alors que je n'avais pas fait exprès de tout oublier. Et dire qu'il avait des sentiments pour moi tout ce temps alors que moi je le voyais juste comme un ami, une sorte de grand frère.

– Je suis vraiment désolée Tyler d'avoir tout oublié, de t'avoir fais du mal inconsciemment, mais ça ne te donne pas le droit de lui en faire autant aujourd'hui. Elle n'y est pour rien à ce que je sache. Essayais-je de le calmer.

– Si, elle y est pour beaucoup aussi....

                             *****

Ça fait une heure de plus que nous attendons toujours que le docteur ou n'importe qui du corps médical sorte enfin de ce bloc opératoire pour venir nous donner les nouvelles de Candys. La tension continue à grimper et le silence est vraiment insupportable. Les parents de Sam se sont joints à nous entre temps et ils essayent de rassurer leur fille du mieux qu'ils peuvent tout en restant en prière. Ils ont informé la mère de Candys et apparemment, elle est déjà en route pour ici.

Ma mère quant à elle est au téléphone avec le responsable du poste de police où est détenu Tyler pour le moment. Ils essayent de l'interroger mais il ne veut rien dire, préférant aller en prison.

Quant à moi, j'ai arrêté de faire les cents pas dans la salle d'attente, fatiguée de tourner en rond pour rien. Je regarde l'horloge et j'ai l'impression qu'elle trotte en ralenti.

– Tu devrais allée te débarbouiller un peu ... Résonne la douce voix de mon frère derrière moi. Ce n'est pas bon pour toi de rester avec tout ce sang sur les mains.

Je regarde enfin mes mains et mes yeux se remplissent de nouveau de larmes. Tout ce temps je n'ai pas pensé à les laver peut-être par peur de me séparer de quelque chose qui me fait penser à elle, qui me rattache directement à elle. Il me prend dans ses bras voyant que je suis sur le point de fondre en larmes et je me laisse aller sur son épaule.

– J'ai tellement peur Jackson. Pourquoi ça prend autant de temps ? Marmonne-je à peine.

– Ne t'inquiète pas, elle va s'en sortir...

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