8.

 La semaine est passé à un rythme insoutenable. J'ai eu l'impression que six mois sont passés, en sept jours. D'autant plus que les parents de chacun d'entre nous ont accepté le voyage, sans qu'on ait besoin d'insister. Autant dire qu'on a vraiment fait qu'attendre. Mais aujourd'hui, on est ENFIN vendredi. Je me suis réveillée, un immense sourire aux lèvres, et des petits papillons dans le ventre. La journée m'a paru encore plus longue que la semaine, mais lorsque enfin la sonnerie annonçant la fin des cours retentit, j'ai l'impression que je vais pleurer de joie.

Je sors à la vitesse de la lumière, sans même attendre Yuki, qui devait de toute façon demander un truc à notre prof. Je suis la première arrivée au portail blanc, notre lieu de rendez-vous. Cette fois-ci, il ne neige pas, même si les arbres et le sol en sont toujours recouverts d'une fine couche. Le vent glacé me fouette par contre de plein fouet, même ayant revêtu l'uniforme d'hiver, et ayant mit par dessus un gros manteau. Je les attend une dizaine de minutes, appuyée contre le même mur où nous attendait Isuzu la dernière fois.


Lorsque je les vois enfin arriver, j'ai l'impression de m'être transformée en glaçon. Yuki me lance son écharpe sur la tête, et m'intime l'ordre de la mettre. Je baisse la tête, gênée, et m'exécute. Je ne vais pas refuser un si beau cadeau.

C'est chez Keiji que nous avons décider de faire nos devoir avant de partir demain matin.

Sa maison est la plus éloignée d'entre nous, et il nous faut vingt bonnes minutes pour y arriver à pieds. J'ai un nombre incalculables de bons souvenirs qui me viennent à l'esprit quand je pense à sa maison. On y traînait souvent, au collège, et ça fait un bon moment qu'on y est pas retourné tous ensembles. Keiji a toujours été un élève studieux, et presque à chaque fois qu'on allait chez lui, il finissait par nous forcer à faire nos devoirs. Isuzu était déjà probablement amoureuse de lui, à cette époque là.


Sa maison m'a toujours fait pensé à une maison européenne, de par son architecture moderne extérieur. Bien que n'en ayant jamais vu, c'est exactement comme ça que je les imagine. Sa façade blanche, et le toit plat n'y sont pas pour rien, car ils tranchent avec les maisons traditionnelles japonaises. Chaque année à Noël sa mère, française, décore l'extérieur de la maison, et la rend presque féerique. Elle brille alors de mille feux. Je suis contente de constater, en arrivant, qu'elle n'a pas encore enlevé les décorations.


Keiji nous fait entrer, et alors qu'on enlève nos chaussures dans l'entrée, c'est justement sa mère, une magnifique femme blonde aux yeux clairs , qui vient nous accueillir.

-Bienvenus les enfants ! La journée a dû être longue, alors j'ai préparé des gâteaux... ça vous dit de venir goûter avant d'aller travailler ?

-C'est gentil maman, mais je crois qu'on est tous d'accord pour dire qu'on peut s'en passer. répond Keiji, sans même vérifier auprès de nous.

-Moi je suis pas contre, si ça ne te dérange pas Charlotte-san ! dit Yuki, en sauvant par la même occasion l'estomac d'Isuzu et le mien, habitués à goûter.

-Si ça me dérangeais, je ne proposerais pas ! Allez vous mettre dans le salon, je vous apporte ça !


Keiji lance un regard énervé à Yuki, qui me fait pouffer. Qu'est-ce qu'ils peuvent être débiles parfois, ces deux là. Mais sans un mot, probablement parce qu'il voit bien qu'il est le seul à ne pas vouloir manger, Keiji se dirige vers le salon et s'assoit sous le kotatsu. On fait comme lui, et cette table chauffante, une invention relevant du génie suprême, me charme instantanément.

Nous mangeons rapidement ce que Charlotte nous amène, non sans la remercier chaleureusement, ayant bien conscience que Keiji risque de nous tuer si en plus on fat traîner le goûter. Les pâtisseries de sa mère sont en tout cas toujours un vrai délice.


C'est génial de faire nos devoirs tous les trois, parce que chacun peut aider l'autre. On partage nos idées, et ça m'aide à mieux comprendre certains trucs. En plus, voir Isuzu gênée à chaque fois que Keiji tente de lui expliquer un truc est beaucoup trop drôle à voir. Je n'aurai raté ça pour rien au monde. Je fais à plusieurs reprises la remarque à Yuki, avant d'enfin savoir pourquoi ça me fait autant rire : ses réactions ressemblent à une héroïne de shojo... Je me met à rire seule avant de partager ma découverte, et les deux garçons se mettent à rire avec moi. Isuzu, est quant à elle plus rouge que jamais.

Une fois nos devoirs finis, et ne voulant pas trop déranger le petit couple, on décide avec Yuki de partir. On a à la base tous prévu de dormir chez Keiji, mais c'est devenu marrant quand on a appris que la famille de Keiji sortait ce soir. On s'est donc donné rendez-vous le lendemain matin à six heures à la gare. Il faut deux heures pour aller à Tokyo en train depuis Kanao, et notre train est à 6 h 20.

-Tu veux venir dormir à la maison ?

Yuki me surprend en me demandant ça, alors que nous venons tout juste de sortir de chez Keiji. J'hésite. J'en ai envie, mais en même temps toutes mes affaires sont chez moi... Je met du temps pour répondre, si bien qu'il continue sur sa lancée.

-T'as qu'à appeler tes parents pour qu'ils viennent déposer tes affaires chez moi au lieu de chez Keiji... Ça va pas changer grand-chose.

-Ah, oui pas bête... En plus ce sera plus simple demain matin, on sera déjà ensemble.

Il hoche vigoureusement la tête, puis se met en marche. Je le laisse me dépasser, pensant encore à demain. Qu'est-ce que j'ai hâte d'y être... Mon regard dérive sur le dos de Yuki, devant moi. J'ai l'impression qu'à chaque fois que je le vois, il est plus grand que la fois précédente. Je souris, et secoue la tête. Puis d'un coup, j'écarquille les yeux. J'ai vraiment accepté de dormir chez Yukihito sans penser à tout ce que ça peut signifier ? Les images que je me suis obligée à effacer de mon esprit refont surface, et je sens mes joues se mettre à chauffer.

Bon, pas besoin de paniquer pour rien, dormir chez lui ne veut pas dire qu'on va de nouveau coucher ensemble. Cela signifie simplement que notre relation est redevenue ce qu'elle était avant... Je soupire, étrangement mal à l'aise avec cette idée, mais néanmoins calmée. Au moins mes joues ne sont plus rouges.


Rien n'a changé chez Yuki, et ses parents, quoi que étranges sont toujours aussi gentils. Akira-kun et Masashi-kun semblent toujours s'entendre aussi bien, et sont vraiment adorables. D'autant plus qu'en nous voyant arriver ensemble, ils viennent nous féliciter de s'être enfin réconciliés. Comme quoi, même eux ça les rend heureux de nous voir de nouveau proches. On discute tous les trois pendant un bon moment, avant que mon père arrive enfin pour me rapporter mes affaires, et que l'heure d'ouvrir le restaurant arrive.

Yuki ne montre aucun signe ostensible de gêne, ou de quoi que ce soit d'autre, une fois dans sa chambre. Et je dois dire que ça me rassure au plus haut point.

-J'y vais d'abord, ou t'y vas ? me demande Yuki.

-Mais je sais pas moi ! On est chez toi, alors c'est comme tu veux ! dis-je, à moitié en rigolant à sa question.

-Oui mais si je te demande, c'est que je sais pas choisir, abrutie ! dit-il, faussement énervé.

-Bon, disons que j'y vais, puis que t'y vas, on est d'accord ? répondis-je, en riant cette-fois-ci.

-Ah, c'est bien toi qui a décidé, du coup ! lance-t-il, tout sourire.

-T'as conscience qu'on se demande depuis 15 minutes, qui ira en premier à la douche ? C'est un peu ridicule...

-J'avoue que j'avais remarqué. Bon du coup t'y vas ? demande-t-il, probablement fier de sa répartie, et de m'avoir fait rire.


Je vais donc me laver en première. Une fois propre et séchée, je me rend compte que j'ai bêtement oublié mon pyjama dans la chambre de Yuki. Je suis débile ou ?... Je soupire, et réfléchit à une solution. Mais j'imagine que la plus logique est de remettre mon uniforme puis de me changer quand Yuki me remplacera à la douche... C'est donc ce que je fais, non sans me plaindre mentalement.

Je traverse rapidement le couloir, puis découvre dans sa chambre Yuki en train de jouer à un de ses jeux vidéo. Il rit en me voyant porter mon uniforme, mais se lève sans un mot pour aller prendre sa douche, n'oubliant pas, contrairement à moi, ses vêtements de rechanges.

Une fois qu'il est sorti, je me met en pyjama rapidement, puis attache mes cheveux encore humides. En me regardant dans le miroir de sa penderie, je regrette d'avoir prit qu'un short, et non pas un leggings. Et ce n'est par pour le froid que je regrette ce choix. Je chasse rapidement cette idée de mon esprit, et mon regard dérive vers la télévision. Je m'assois par terre, à l'endroit où était Yuki seulement quelques minutes plus tôt, et tente de jouer à sa place. Kuro, son chat vient rapidement me déconcentrer en se glissant par l'entrebâillement de la porte. Il vient se frotter à mes jambes, avant de finalement aller se coucher sur le lit derrière moi. J'en profite pour le caresser, avant de retourner essayer de comprendre ce foutu jeu.

Je commence tout juste à manier les touches, quand Yuki entre dans la chambre, me faisant sursauter. Il est beaucoup plus rapide que moi pour se laver, ça c'est indéniable. Je tourne la tête vers lui pour l'accueillir en souriant. Mais la façon dont il me regarde me fait simplement détourner les yeux. Merde, j'aurais vraiment dû prendre un leggins.


-Kuro est encore venu te voir, je vais finir par penser qu'il te préfère à moi ! dit Yuki, en riant, brisant par la même occasion le silence gênant qui s'était installé.

-Oui... C'est vrai qu'à chaque fois que je suis là il vient dans ta chambre... dis-je, gênée.

-Ouais... T'arrives à y jouer ?

-Plus où moins... je ne suis pas vraiment douée pour ce genre de jeux, je crois.

Il s'assoit à côté de moi, et m'explique comment jouer, en faisant bien attention à ne pas me toucher. Mais je n'arrive pas vraiment à me concentrer. Je suis obligée d'empêcher mon regard d'aller vers lui. Mon cœur bat à tout vitesse dans ma poitrine, tandis que je me rend compte peu à peu qu'il ne me laisse vraiment pas indifférente... Ces dernières semaines, j'ai vraiment essayer d'oublier ce qu'il s'est passé entre nous. Pourtant, plus le temps passe, moins j'y arrive.


Plongée dans mes pensées, et peu intéressée par ce que je fais et ce que me dit Yuki, je ne me rend pas tout de suite compte qu'il s'est rapproché de moi. Mais quand sa jambe touche la mienne, et qu'une décharge électrifie mon corps, je ne peux plus ignorer sa présence. Il continue nonchalamment à m'expliquer, avant de finalement se rendre compte que je ne l'écoute plus depuis un moment. L'habitude reprenant vite son chemin, il commence à m'embêter.

-Eeh, écoute quand je t'explique des trucs Saya ! Sinon je te confisque la manette ! commence-t-il, et tendant la main vers celle-ci.

-Mais j'écoute ! répondis-je, n'ayant pas envie me chamailler avec lui.

-Ok. Qu'est-ce que j'ai dit du coup ?

-...

-C'est bien ce que je pensais. dit-t-il, avant d'essayer de me prendre la manette des mains. Mais donne là moi si tu joues pas vraiment ! Laisses l'homme te montrer comment faire !

-Comment ça, "l'homme" ? Tu te crois supérieur peut-être ? dis-je, rentrant finalement dans son jeu, et écartant la manette de lui, vers la gauche.

-J'ai pas dit ça, je l'ai seulement insinué ! Bref, passes-la moi, ou je te la prend de force.

-Même pas cap !

-Tu l'auras voulu ! dit-il, lui aussi en souriant, avant de se jeter sur mon bras gauche.


Puis, pour ne pas changer, on se met à se battre. Je m'écarte rapidement alors qu'il saute sur moi, et tombe pitoyablement sur le sol. Je pouffe, mais m'arrête bien vite, voyant que ça ne lui suffit pas. Je finis par réussir à l'éloigner sur le lit en le poussant avec mes pied, mais la manette me glisse des mains. Je rampe rapidement pour aller la récupérer, quand il attrape ma jambe, et tire dessus. J'ai bien la manette en main, mais je ne pense pas aller dans la bonne direction...

Je secoue ma jambe, et tente tant bien que mal de me débattre. Je parviens à le faire lâcher prise, à me mettre sur le dos pour pouvoir plus facilement me relever, mais il me saute de nouveau dessus, avec toute la délicatesse dont il est capable de faire preuve. Étant beaucoup plus grand que moi, se met à ma hauteur en un temps record, et réussi presque à attraper la manette. Presque ! Je parviens à la cacher derrière mon dos rapidement.

Mais quand je le vois se pencher sur moi, je réalise soudainement ma débilité. J'aurais pas pu simplement abandonner et lui donner la manette ? Des flots d'images me reviennent à l'esprit, et sens mes joues rougir. La position dans laquelle on est n'est pas sans me rappeler des souvenirs. Il rapproche son visage du mien, beaucoup trop pour que ce ne soit pas intentionnel, et mon cœur s'affole.


- À quoi tu penses, petite perverse ? demande-t-il le sourire aux lèvre.

-Je pense à rien du tout !

-Vraiment ? Et même quand je fais ça ? dit-il en se rapprochant de mon oreille, susurrant les derniers mots.

Il glisse ses mains sous mon T-shirt, avant de les poser sur mes hanches. Mon cœur s'emballe de plus belle, et je sens des frissons agiter ma chair. Je sors rapidement mes mains de mon dos, pose la manette sur son torse -en évitant de le toucher- et le pousse doucement, en veillant à ne pas lui faire mal. J'ai l'impression de manquer d'air. Il le remarque probablement, et il s'écarte légèrement, avant de m'enlever la manette des mains. Il la pose sur le sol, à côté de moi, avant de fixer son regard dans le mien.

Son regard est presque doux, et j'ai l'impression qu'il ressent la même chose que moi. Lui non plus, il n'arrive pas à oublier le fait que nous ayons couché ensemble. Il se penche doucement vers moi, jusqu'à ce que ses lèvres finissent par frôler les miennes.

Et avant qu'il ne puisse faire quoi que ce soit de plus, quelqu'un toque à la porte, nous faisant sursauter. C'est à une vitesse incroyable qu'on se relève et qu'on remet en ordre nos vêtements et nos coiffures. Masashi-kun apparaît à la porte, pour nous dire qu'on peut aller manger. On acquiesce, le visage rougit, avant de sortir de la chambre et de descendre. 

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