Chapitre 13
Les journées de Neal Cassidy suivaient une routine identique. Il travaillait, interrogeait des témoins, puis rentrait chez lui. Il avait un boulot stressant, souhaitant uniquement se détendre lorsqu'il en avait fini. Dès qu'il arrivait dans sa maison, son besoin de boire reprenait le dessus. Son besoin de boire, son besoin de baiser, son besoin d'enfoncer sa queue dans le sexe d'Emma jusqu'à ce qu'il jouisse, jusqu'à ce qu'il soit, enfin, détendu. Il avait besoin d'Emma. Il avait besoin d'elle car elle seule savait l'apaiser. Il avait essayé d'autres femmes, mais seule Emma pouvait le calmer, pouvait lui faire oublier les affres de son métier, un métier dont il était si fier. Un métier qui faisait de lui un héros.
Il avait besoin d'Emma. Pourtant, il avait vraiment sauté des tas d'autres femmes, — car en réalité, les femmes n'étaient là que pour servir les hommes —. Mais toutes s'étaient enfuies après la première nuit, refusant de le revoir. Aussi, lorsqu'il avait rencontré Emma au cours d'une de ses enquêtes, une femme véritablement splendide, — d'ailleurs, il n'en avait jamais vu d'aussi belle, les femmes acceptant de partager sa couche étant plutôt vulgaires —, il avait décidé qu'elle lui appartiendrait définitivement, fantasmant déjà sur ce qu'il lui ferait. Il avait compris en l'observant, savourant l'érection soudaine qui l'avait envahi, que s'il voulait la mettre dans son lit, il lui faudrait agir différemment. Car il ne voulait pas la baiser juste une seule fois, il voulait la baiser des tas d'autres fois.
Jamais, en effet, une femme n'avait déclenché chez lui une telle érection, jamais alors qu'il se contentait simplement de la regarder. Il avait interprété cette érection comme un signe, un signe que cette femme devait lui appartenir le plus rapidement possible. Son pénis, tandis qu'il s'imaginait la posséder totalement, avait immédiatement répondu, ce pénis long et épais dont il était si fier. Il avait éjaculé soudainement, sidéré d'avoir ainsi perdu le contrôle, profondément désarçonné par cette réaction physique inattendue.
À peiné était-il rentré au commissariat qu'il avait lancé une recherche sur la blonde. Elle n'avait aucun casier judiciaire, ce qui lui était apparu de bon augure, bien qu'il en fût étonné. Il avait, en effet, remarqué en elle une certaine fragilité, un désespoir profond, dont il avait cru, à tort, que c'était parce qu'elle avait déjà eu à faire à la police. Il avait donc décidé d'utiliser cette faiblesse et avait monté son plan d'action, un peu contrarié cependant, de n'avoir obtenu aucune information sur elle.
Le lendemain, dans le cadre de son suivi d'enquête, il lui avait annoncé qu'elle risquait d'être accusée de complicité parce qu'en tant que témoin, elle avait tardé à appeler la police, s'assurant d'abord de la santé de son patron en appelant une ambulance et en accompagnant ce dernier à l'hôpital, où celui-ci avait dû d'ailleurs rester quelques jours. C'était un mensonge, bien sûr, mais comme elle n'avait jamais eu à faire aux flics, il lui avait été facile de l'emberlificoter. Il était revenu le surlendemain, disant qu'il avait tout arrangé. Il lui avait ensuite proposé de boire un verre, bien qu'en réalité la loi ne l'autorisât pas à fraterniser avec un témoin. Il avait lu dans ses yeux qu'elle n'osait refuser, convaincue de lui être redevable.
Les choses ensuite n'avaient guère été faciles : cela lui avait demandé presqu'une année, ainsi qu'un immense gaspillage d'argent et de temps. Il lui avait dû lui emmener des fleurs, avait dû l'inviter à quelques reprises, lui faire des cadeaux, bref, toutes ces conneries que les femmes adorent, c'était en tous cas l'opinion de ses collègues. Il avait donc joué le gentil flic, un rôle dont il avait l'habitude parce qu'il avait l'air si avenant.
Le plus curieux était que cette femme avait fini par l'obséder. Il se levait le matin en pensant à elle, le sexe en érection. Malheureusement, elle se refusait à lui constamment, y compris pour un simple baiser. Et plus elle se refusait, plus elle l'obsédait. Elle envahissait toutes ses pensées, y compris ses rêves et il avait l'impression de la voir à chaque coin de rue. Il rentrait alors chez lui dans une colère folle, imaginant tout ce qu'il lui ferait lorsqu'elle lui appartiendrait, la manière dont il la punirait pour s'être ainsi refusée à lui. De surcroît, il ne savait rien sur elle car, à part lui avoir confié qu'elle était orpheline, — il avait vraiment dû lui tirer les vers du nez pour obtenir cette information —, elle ne parlait guère d'elle.
Au début, il l'avait suivie, supposant qu'il avait un rival dont il devrait la libérer. Mais elle n'avait aucun ami, ce qui l'avait bien arrangé. En fait, la seule personne dont elle paraissait proche était son patron, un vieil homme qui s'appelait Marco. Celui-ci, d'ailleurs, était rapidement devenu un obstacle : à chaque fois que Neal venait au magasin pour inviter Emma, le vieillard lui expliquait que la jeune femme était absente alors qu'il était manifeste que celle-ci travaillait à l'arrière-boutique. Le policier avait donc fini par se débarrasser de cet indésirable, une nouvelle agression, mais mortelle cette fois-ci. Il avait pris soin d'être chargé de l'enquête, promettant à la jeune femme qu'il trouverait le coupable. Comme s'il allait s'emprisonner lui-même ! Il l'avait vue se briser intérieurement lorsque les secouristes lui avaient annoncé le décès de Marco. La voir ainsi brisée lui avait procuré un plaisir immense : elle commençait à apprendre ce que cela coûtait de lui avoir résisté. Il fut alors génial, lui emmenant un café et faisant preuve d'une extrême gentillesse. Dans son regard reconnaissant, il avait compris qu'il avait marqué des points.
Il avait logiquement pensé qu'il pourrait profiter du deuil de la blonde pour enfin pouvoir l'inviter à autre chose qu'un expresso. Après tout, cette garce venait de faire de lui un meurtrier. C'était une garce, n'est-ce pas, puisqu'elle se refusait à lui. Malheureusement, elle avait retrouvé un travail à peine deux jours après le décès de son patron, et elle semblait n'avoir jamais de temps libre. Ce fut là qu'il montra tout son savoir de flic. Il prit l'habitude de la guetter, la suivant discrètement, faisant semblant de la rencontrer par hasard et de l'inviter afin de discuter de l'enquête. Elle continuait cependant de se refuser à lui, n'acceptant même pas un baiser sur la joue. Il se mit à jouer les timides, — là encore, écouter discrètement ses collègues lorsqu'ils parlaient de femmes lui avaient été d'une grande aide —. Il déposait des fleurs sur son paillasson, lui apportait des chocolats lorsqu'elle sortait de son boulot. Comment ses confrères appelaient-ils cela ? Ah oui ! Faire la cour. Il lui faisait la cour. Cela d'ailleurs, à son grand étonnement, avait fonctionné. La jeune femme daigna venir au restaurant avec lui.
Ce fut en organisant cette sortie qu'il avait finalement réalisé qu'il pensait à cette fille vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et ce depuis des mois. Il avait un peu plus de trente ans, elle allait sur ses vingt ans, il était donc grand temps pour lui de se marier. N'étant absolument pas certain qu'elle acceptât un nouveau dîner, — trois mois s'étant écoulés depuis la mort de Marco, trois mois à la supplier, trois mois à faire preuve d'une gentillesse gnangnan qui ne lui ressemblait pas —, il avait décidé de faire d'une pierre deux coups : il allait la piéger et, dans la foulée, l'épouser.
Encore une fois, espionner ses collègues l'avait empêché de commettre une bévue. Apparemment, proposer à une femme de l'épouser dès le premier rendez-vous était le meilleur moyen de la faire fuir. Il patienta donc six mois, six mois à devenir fou tant il avait envie de la baiser. Afin d'assouvir ses besoins, il prit l'habitude de libérer les prostituées blondes en échange d'une passe. Ce fut durant cette période qu'il découvrit que Marco avait fait d'Emma son unique héritière. Le vieux cochon cachait bien son jeu car il était pété de tunes. Qu'une ébénisterie puisse rapporter autant d'argent le sidéra. Faire en sorte que sa future femme ne soit pas informée de ce patrimoine inattendu fut relativement aisé. Sans ressource, cette dernière ne risquait pas de s'enfuir. En revanche, Neal ne put toucher un seul sou de ce capital, bien qu'il eût espéré pouvoir le faire. Mais le notaire qui gérait les affaires du vieillard était bien trop retord pour le policier. Il fallait apparemment que l'orpheline se présentât en personne et, même ainsi, les biens étaient protégés afin qu'ils ne puissent être dilapidés, particulièrement dans le cadre d'un mariage. Le détective expliqua que, pour l'instant, celle-ci était sous protection judiciaire et ne pouvait donc se montrer en public. Que cela risquait de durer plusieurs années.
Il avait définitivement clos l'enquête sur le meurtre de l'ébéniste en faisant accuser un toxico. Que ce dernier meure en prison avant le procès fut la cerise sur le gâteau. Il profita de cette occasion pour faire sa demande.
Il emmena à midi la jeune femme dans un grand restaurant, où il s'était mis à genoux en tenant une bague, — un simple zircon, il ne fallait quand même pas trop exagérer. Il avait volontairement choisi un espace public, avec beaucoup de monde assistant à sa demande parce que, — c'était une chose que lui avait apprise son travail —, les gens avaient toujours plus de mal à dire « non » lorsqu'ils étaient entourés d'autres personnes. Il ne fut même pas certain qu'elle ait dit « oui », de toutes manières il s'en fichait car il avait tout organisé pour qu'elle ne puisse lui échapper : à peine sa demande prononcée, il se releva en hurlant « oui », l'entraîna au milieu des applaudissements pour acheter une robe, qu'il paya — encore une dépense dont il eut préféré s'abstenir, raison pour laquelle il avait opté pour une tenue de soirée blanche qui laissait ses bras nus, nettement moins chère qu'une véritable robe de mariée, trouvant inutile d'ajouter une quelconque pelisse. Ne la laissant toujours pas respirer, il la conduisit jusqu'à chez elle afin qu'elle puisse faire une valise pour un soi-disant voyage de noces, un mensonge qu'il avait inventé pour faire plus véridique. Ils filèrent ensuite jusqu'à l'hôtel de ville où devait avoir lieu, avec la complicité involontaire du maire, la cérémonie.
Convaincre ce stupide édile avait été facile puisqu'il s'était débrouillé pour lui retrouver quelques bijoux volés. Il avait, en réalité, payé l'un de ses indics afin qu'il commette le larcin, mais cela, nul n'avait besoin de le savoir. C'était toujours bon, en effet, d'avoir dans sa poche quelques hommes de pouvoir. Lorsqu'il avait ramené les joyaux dérobés, il avait évoqué le fait qu'il souhaitait se marier avec l'amour de sa vie. Le chef de la ville, reconnaissant, lui avait proposé de diriger la cérémonie. Neal avait accepté le premier créneau disponible, qui tombait heureusement vers la fin d'un après-midi, ayant déjà planifié la manière dont il allait contraindre Emma à lui dire « oui », le cambriolage commis constituant la première étape de sa stratégie. Là encore, le fait d'avoir la tête d'un premier communiant lui avait particulièrement bien servi auprès du premier magistrat. La seule mauvaise surprise qu'il avait eue fut que le vieil imbécile crut bon leur offrir, en guise de voyage de noce, une nuit tous frais payés dans un grand hôtel de Boston. Il ne pouvait, malgré sa contrariété, décemment refuser.
Il ne voulut point, bien qu'ils eussent accès une suite nuptiale, faire l'amour avec elle. Il en crevait d'envie, bien sûr. Il ne pensait même qu'à ça, son sexe presque constamment en érection le lui rappelant douloureusement. Mais, comme ils étaient dans ce putain d'hôtel de luxe avec des tonnes de serveurs les espionnant, il aurait fallu qu'il soit tendre et prévenant avec elle, et, s'il y avait bien une chose qui lui faisait horreur, c'était d'être délicat dans les affaires de sexe. Il avait suffisamment dû faire d'effort pour simplement effleurer ses lèvres lors de l'échange de leurs vœux, baiser auquel elle n'avait d'ailleurs pas répondu, ce qui l'avait quelque peu vexé. Il prétexta préférer attendre l'intimité de leur nouvelle maison.
Ils avaient donc uniquement profité du repas gratuit, du casino où ils se promenèrent longuement tant il était fasciné par ces gens puant la fortune et le pouvoir, ces gens qu'il abhorrait parce qu'il rêvait d'être à leur place. Il ne voulut pas jouer, essentiellement pour ne perdre de l'argent, estimant qu'il en avait déjà bien trop dépensé pour arriver à ses fins, mais également pour ne pas être ridicule. Il avait été, de plus, d'une gentillesse à toute épreuve, lui tenant les portes et l'aidant à s'installer sur les chaises, fier de jouer aussi parfaitement son rôle de mari amoureux, fier d'avoir à ses côtés une si belle créature, — une expérience nouvelle pour lui —, fier de se pavaner auprès d'une femme si splendide, fier d'exhiber sa femme à lui. Elle n'avait guère parlé, ce qu'il avait trouvé normal, une femme se devant de laisser son mari s'exprimer à sa place.
Au petit matin, une fois arrivés chez lui, il avait respecté la tradition à la lettre. Il l'avait portée dans ses bras pour franchir le seuil de la maison qu'il avait soi-disant achetée pour elle, — c'était ce qu'il lui avait dit, alors qu'en réalité, il voulait juste un endroit où pouvoir l'enfermer. Il avait même fait poser des grilles aux fenêtres, ainsi qu'une serrure qui fermait automatiquement le verrou de l'entrée. Un simple coup de pied lui avait donc permis d'enclencher cette dernière. Il avait pris soin, auparavant, de cacher les clefs à l'intérieur de sa veste, veillant à ce qu'elle ne sache où celles-ci étaient rangées. Il fallait reconnaître qu'en une année d'attente, il avait vraiment eu le temps de penser à toutes les manières possibles de la protéger, n'hésitant pas à y mettre le prix, un prix que sa présence rembourserait au centime près.
Ils avaient traversé de la sorte toute la maison jusqu'à pénétrer dans la chambre. Il l'avait sentie frissonner de froid dans ses bras, ce dont il s'était délecté car il rêvait de la réchauffer depuis déjà bien trop longtemps. Il admit néanmoins en son fort intérieur que les pièces étaient quelque peu glaciales. Mais il n'y pouvait rien. Il avait, en effet, deux jours avant son mariage, fait placer dans un foyer pour retraités sa vieille nounou. C'était elle qui, jusqu'à présent, s'était occupée de son linge et de la maison acquise par ses parents avant leur décès. Maintenant qu'Emma était mariée avec lui, ce serait à elle de s'en charger. Il avait d'ailleurs posté la veille deux lettres : dans la première, sa femme démissionnait de son travail sous prétexte de vouloir se consacrer à son mari dans la seconde, il avait résilié le bail de l'appartement où celle-ci logeait avant leur union. Bien sûr, l'orpheline n'avait jamais écrit de telles missives puisqu'il avait imité son écriture, utilisant les dépositions manuscrites faites lors des enquêtes sur l'ébénisterie comme modèles. Ces simples échantillons avaient suffi : il était un excellent faussaire.
En entrant dans la chambre, il avait longuement soupiré de joie. Dans un instant, il pourrait tomber le masque, laissant enfin paraître le Neal authentique, celui dont il était si fier. Il n'en pouvait plus de se cacher. Il n'avait cessé, ces dernières vingt-quatre heures, de se forcer à être gentil car, tant qu'ils se trouvaient à l'extérieur de sa maison, tant qu'il y avait des témoins, il était obligé de le faire, sachant que la jeune femme blonde aurait pu s'enfuir en découvrant trop tôt sa véritable personnalité. Et ça, c'était hors de question. Maintenant qu'elle était sa femme, elle lui appartenait et il allait maintenant avoir le bonheur de le lui faire comprendre.
Il lui avait alors annoncé qu'elle n'avait désormais nul besoin de travailler, puisqu'elle devait s'occuper de son mari. Elle avait protesté, mais il l'avait jetée brutalement sur le lit, se retenant de la gifler, préférant à la place déchirer cette robe qui l'affolait depuis qu'elle s'en était vêtue, la maintenant fermement tandis qu'il déboutonnait son pantalon, le faisant glisser d'un mouvement expert, — il s'était refusé à mettre un slip —, laissant enfin jaillir son sexe en érection, son sexe qui souffrait tant d'avoir été si longtemps prisonnier. Il ne l'embrassa pas : il avait horreur de ça. Il aurait peut-être pu prendre un instant pour admirer le corps magnifique de cette femme, — sa femme —, mais il estimait avoir suffisamment attendu : il avait réellement trop envie d'elle.
Là, il l'avait enfin prise comme il en rêvait depuis qu'il l'avait rencontrée des mois auparavant. Il lacéra sa culotte d'un mouvement vif, positionna hâtivement sa bite contre son vagin, força violemment et profondément pour l'engouffrer intégralement, gémissant de satisfaction. Lorsqu'il avait compris qu'elle était vierge, son désir en fut décuplé, le faisant bander encore plus fort. Il s'était renfoncé avec une bestialité et une force qui l'étonnaient encore, exerçant avec vigueur ses talents d'amant, perçant son hymen d'un seul coup.
Il s'était interrompu un instant, fasciné par le sang s'écoulant entre les jambes de son épouse, fasciné par ce sang enrobant son pénis. Grognant de plaisir, il la pénétra à nouveau, brutalement, fier d'être celui qui la déflorait et lui apprenait à être une vraie femme, admirant les larmes qui jaillissaient sur son beau visage tordu par le plaisir qu'il lui offrait, la transperçant de plusieurs va-et-vient puissants, tandis qu'il serrait ses poignets au-dessus de sa chevelure blonde.
Très vite, il ne se contrôla plus, envahi par un désir ardent. Il s'engloutissait en elle, heurtant sans hésiter ses parois trop étroites, toujours ensanglantées, en sortant vivement pour y retourner avec toujours plus de dureté. Il continua ses poussées, utilisant la vitesse pour l'ouvrir plus encore sans pour autant y parvenir. Il ferma les yeux pour mieux sentir son corps bloqué contre le sien, mordant avec passion sa poitrine, alternant d'un sein à l'autre, observant les marques qui indiquaient qu'elle était sienne, sans pour autant cesser de plonger et replonger sauvagement en elle, son étroitesse lui procurant un bonheur extrême.
Il avait joui. Longuement. Observant avec fierté sa semence se mêlant au sang de son épouse. Étonné cependant d'avoir mis si longtemps à éjaculer, plus d'une heure s'il en croyait son réveil lumineux, tout en ne regrettant rien, car c'était la première fois qu'il prenait autant de plaisir avec une femme. Était-ce parce qu'elle était vierge ? Était-ce parce qu'il avait pensé à elle durant chaque instant lors de cette dernière année ? Était-ce parce qu'elle était son épouse et qu'elle lui appartenait totalement ? Il n'en savait rien. Mais il était heureux d'avoir pris ces petites pilules bleues confisquées à l'un de ses indics. Il avait pensé qu'elles lui seraient utiles pour sa nuit de noce, qu'elles lui permettraient d'honorer sa femme comme il le devait. Il ne s'était pas trompé : son pénis tout émoustillé se raidissait à nouveau.
Lorsqu'il avait voulu recommencer, elle avait tenté, comme la première fois, de le repousser. Il n'y avait prêté aucune attention, lui affirmant que c'était ainsi que cela se passait entre mari et femme, que son rôle était de le faire jouir et qu'elle jouirait lorsqu'il jouirait. Lorsqu'elle avait à nouveau pleuré, alors qu'il la pénétrait de toute son âme, il avait su alors qu'elle était la « femme de sa vie ». Il lui fit l'amour avec passion, s'enfonçant et se renfonçant avec fureur dans son vagin si serré, ne pouvant retenir ses cris tant cette exiguïté multipliait ses sensations, refusant de laisser sa jouissance s'exprimer tant il avait besoin de la posséder, effrayé par ce pouvoir qu'elle avait sur lui, effrayé par le fait qu'elle l'obsédait au point d'envahir constamment son esprit et ses rêves.
Il n'avait plus de raison d'avoir peur maintenant. Plus il la transperçait, moins elle l'apeurait, lui procurant un plaisir indicible tant il était gigantesque. Il positionna ses cuisses pour relever les siennes, découvrant qu'il pouvait ainsi mieux s'introduire en elle. Lorsqu'il vit du sang s'écouler à nouveau, il accéléra sans complexe ses mouvements, hurlant sa satisfaction, perdant tout contrôle. Il jouit. Encore une fois. Sans qu'il ait compris à quel moment exactement. Jamais il n'avait autant désiré une femme.
Il l'avait serrée dans ses bras, murmurant qu'il l'aimait comme il n'avait jamais aimé personne. Il s'était endormi ainsi, emprisonnant contre son corps la femme qu'il adorait. Lorsqu'elle avait tenté de s'éloigner de lui durant la nuit, il avait attrapé dans sa table de nuit l'une de ses paires de menottes. Il l'avait attachée au lit, l'avait tenue encore plus fort en lui interdisant de s'agiter tout en lui répétant qu'il l'aimait comme il n'avait jamais aimé personne d'autre. Ce qui était totalement vrai.
En se réveillant le lendemain matin, il constata, preuve de son amour pour elle, qu'il n'avait pas cessé de l'enserrer, l'empêchant de bouger. Celle-ci ne dormait pas. Il embrassa tendrement ses seins, lui fit encore l'amour avec passion. Alors qu'il caressait les larmes de bonheur que la jeune femme avait versé pendant qu'il la pénétrait éperdument, il lui demanda de lui préparer le petit déjeuner. Comme elle refusa, il la tabassa violemment. Il était impératif qu'elle comprît rapidement qu'elle devait lui obéir. Il attrapa donc son flingue avec lequel il la menaça tandis qu'il lui lançait les clefs des menottes afin qu'elle se détachât du lit. Elle mit longtemps à les ouvrir, tant ses mains tremblaient, tandis qu'il admirait les traces de sang sur les draps, preuve que leur nuit avait été pleine de concupiscence, preuve qu'il l'avait dépucelée avec talent.
Il dut la tenir en joue tout en lui donnant ses consignes pour que son breakfast matinal fût parfait. Ils avaient mangé ensemble. Il lui répéta à de nombreuses reprises qu'elle était belle et qu'il l'aimait tout en s'amusant avec son révolver. Il voulut prendre sa douche avec elle, comme n'importe quel couple marié. Elle lui résista mais il sut lui montrer qu'il était le plus fort et qu'elle lui devait obéissance. La voyant nue dans l'étroite cabine, il eut encore envie d'elle et la prit à plusieurs reprises, assez violemment, mais il avait tellement envie d'elle. Comme il le lui avait expliqué, il fallait bien qu'il se rattrapât car cela faisait plus d'un an qu'il attendait pour lui faire l'amour. Il découvrit ainsi la beauté de ses fesses, qu'il n'hésita pas à pénétrer allègrement puisqu'aucune femme ne s'était ainsi offerte à lui. Il n'avait pu s'empêcher de crier lorsqu'il avait joui. Il pensa, pour la énième fois, que jamais une femme ne lui avait procuré une telle jouissance. Ce fut grâce à cela qu'il sut qu'il avait bien choisi son épouse.
Il la regarda pleurer dans la douche, fier d'avoir su la satisfaire. Il s'habilla devant elle, puis lui tendit gentiment son peignoir. Certes, la serviette était mouillée, mais, comme elle contenait son odeur à lui, il était certain de lui faire plaisir. Il lui donna les vêtements qu'il avait achetés pour elle : une jupe courte, un string, un tee-shirt échancré qui laissait voir sa si belle poitrine, des chaussures à talons. Avant lui, elle portait des jeans et des pulls. Dorénavant, elle saurait comment s'habiller. Ce fut en tous cas ce qu'il lui avait signifié tout en la forçant à se vêtir, n'hésitant pas à la tabasser lorsqu'elle lui résista encore une fois. Lui mettre des escarpins l'avait presque fait bander. Voir qu'il l'avait de nouveau fait saigner l'emplit de fierté.
Il était maintenant temps d'édicter à son épouse les règles qu'il avait conçues pour elle : comment devait se comporter une femme mariée, ce qu'elle devait faire pour satisfaire son conjoint, ses tâches quotidiennes : ménage complet, lavages, repas, être toujours à sa disposition pour le sexe et, surtout, l'interdiction de faire quoi que ce soit sans son mari. Elle l'avait traité de « phallocrate », avait essayé, une nouvelle fois, de s'enfuir, pas évident avec des chaussures à talons mais il avait vraiment pensé à tout. Il l'avait violemment giflée, lui interdisant d'utiliser des mots dont il ne connaissait pas le sens.
Lorsqu'elle avait encore pleuré, juste quelques gouttes au coin de ses jolis yeux verts, — il y était peut-être allé un peu fort mais il fallait bien qu'elle apprenne rapidement qui il était —, il avait réutilisé ses menottes, l'avait traînée sur le sol pour l'attacher aux barreaux du lit. La voir ainsi avait ravivé son désir. Il avait rapidement ouvert sa braguette, fier de son sexe à nouveau au garde-à-vous. Il lui avait ôté son string avant de la pénétrer profondément, d'un seul mouvement. Il avait recommencé à plusieurs reprises. Sa femme était vraiment bandante.
Il était parti travailler, la laissant ainsi menottée, lui détachant juste une main afin qu'elle puisse faire ses besoins dans le pot de chambre qu'il lui laissa, lui accordant également du papier toilette et de l'eau chaude afin qu'elle puisse se laver, ainsi que sa trousse de toilette. Après tout, il voulait pouvoir la baiser lorsqu'il rentrerait.
Lors de son retour, il lui avait offert des fleurs, comme le fait tout bon mari. Il avait cependant dû utiliser les menottes pour la lier à lui, l'avait traînée comme la chienne qu'elle était dans toute la maison en lui indiquant comment devait être fait le ménage, comment ses repas devaient être préparés. Une fois qu'elle eut effectué toutes les tâches qu'elle devait faire, — bien sûr, il avait dû la tabasser à plusieurs reprises et la menacer de son arme —, il l'avait rattachée au lit. Il avait enfin pu lui faire l'amour passionnément. Curieusement, elle ne pleura pas cette fois-ci, aussi se demanda-t-il s'il avait été un bon amant. Il lui posa la question. Elle ne répondit pas et il pensa que ses ardeurs l'avaient peut-être épuisée, preuve qu'il avait été performant. La fois prochaine, il lui expliquerait ce qu'elle devait dire afin de lui confirmer qu'il était un bon amant.
À chaque fois qu'il avait tenté d'être gentil, par exemple en décidant de la détacher pour la journée, elle avait essayé de s'enfuir. La première fois, elle avait même appelé les flics, la bonne blague. Il l'avait pourtant prévenue, mais elle n'écoutait jamais rien. Il avait supprimé la ligne fixe, ne lui laissant qu'un téléphone bloqué, où seul son numéro était accessible. Il exigea d'elle qu'elle l'appelât toutes les deux heures afin qu'elle lui racontât comment elle progressait dans les tâches qu'elle devait exécuter. Les premiers temps, il débarqua régulièrement pour lui faire l'amour vite fait bien fait. Il avait dû arrêter car ses collègues ne cessaient de le chambrer et qu'il ne souhaitait pas attirer l'attention sur son couple. Emma n'appartenait qu'à lui.
Finalement, au bout de deux ans de ce traitement, son épouse avait enfin compris quel était son rôle. Il avait donc décidé qu'il était temps d'effectuer leur première sortie. Il fallait dire qu'il en avait vraiment marre de se coltiner les courses et que sa femme devait prendre ses responsabilités à ce sujet. Il n'avait cependant pris aucun risque, gardant constamment son arme à portée d'elle. Oui. Tout était parfait dans leur couple. Aussi ne comprenait-il pas pourquoi Emma s'était enfuie.
Il la cherchait partout depuis maintenant trois ans. Trois ans qu'elle avait disparu et qu'il souffrait le martyre. Au début, il avait envisagé de signaler sa disparition. Il y avait renoncé lorsqu'il avait compris que l'on risquait d'enquêter chez lui, que l'on risquait de découvrir le cagibi glacial où il l'enfermait pour la punir, ainsi que les marques de ligatures sur le lit et sur les radiateurs. Certaines personnes ne concevaient pas qu'un bon mari doive régulièrement corriger sa femme. Surtout avec le métier qu'il avait.
Autrefois, il avait cru pouvoir s'habituer à la vue des victimes de meurtre. En réalité, celles-ci restaient gravées dans sa mémoire, venant même le hanter dans son sommeil. Aussi était-il normal qu'il trouvât en rentrant chez lui une parfaite maison, une parfaite femme prête à le satisfaire et à le servir. Il l'avait maintes fois répété à Emma. Il avait besoin de se détendre après sa journée de travail, de trouver un univers reposant qui lui permettait d'oublier les horreurs qu'il côtoyait tous les jours. Il était normal, également, qu'il eût parfois besoin de se défouler car tous ces coupables qui lui échappaient le rendaient totalement fou.
Peut-être s'était-il parfois un peu trop laissé aller. Comme lorsqu'il lui avait cassé trois doigts, ou les quelques fois où il lui avait déboité l'épaule. Mais il l'avait toujours soignée et il lui apportait des fleurs quotidiennement, sauf le week-end bien sûr. Il lui coupait les cheveux, lui faisait l'amour plusieurs fois par jour, le matin comme le soir. Il l'aimait tant. La voir suffisait à faire grimper son désir. Son seul tort était probablement d'avoir trop joué avec son arme. Il éprouvait un réel plaisir à la pointer sur Emma, à la menacer, à observer la peur s'ancrer dans les yeux de la jeune femme blonde. Ce n'était qu'un jeu évidemment. Mais son épouse n'avait pas l'air de le concevoir ainsi. Aussi petit à petit avait-il accepté de ranger son révolver dans un placard. Tout comme il avait accepté de l'emmener une fois par mois à la bibliothèque. C'était une grossière erreur. Lorsqu'il la retrouverait et la ramènerait chez eux, il lui interdirait toute sortie. Même si pour cela il lui faudrait faire les courses.
Elle aurait de toutes manières bien trop de travail pour remettre la maison en état. La poussière régnait dans toutes les pièces, les boites de pizza s'entassaient à côté des bouteilles de rhum. Il prenait parfois un sac poubelle pour tout vider, mais il n'était vraiment pas doué. De toutes manières, ce n'était pas le rôle d'un homme de s'occuper du ménage. Il avait bien tenté de faire revenir sa nounou, en attendant le retour de sa femme adorée, mais il avait découvert que la vieille dame était décédée quelques années plus tôt, juste après qu'il l'ait placée dans une pension pour vieux.
Neal, dorénavant, n'aimait plus rentrer chez lui. Ce n'était pas seulement parce que la maison était sale, c'était surtout parce que sa jolie femme n'était plus là pour l'accueillir à la porte, avec ses bons petits plats et son vagin disponible. Sans compter que le pressing lui coûtait un fric fou. À présent, il s'achetait de quoi manger sur le trajet et dînait sur le canapé. Il ne prenait même plus la peine de ranger son arme dans le boîtier du placard. Lorsqu'il avait fini de manger, il buvait. L'absence d'Emma le détruisait. Alors qu'il avait l'habitude de boire une demi-bouteille, voire une bouteille entière de rhum en sa présence, il avalait aujourd'hui deux bouteilles, parfois trois. Le plus terrible était qu'il n'avait plus aucun désir. Il avait été si fier de sa queue constamment en érection, fier de satisfaire Emma à la moindre occasion, fier de voir ses larmes tandis qu'il la baisait voluptueusement. Son sexe maintenant ne lui obéissait plus. Même avec les petites pilules bleues qu'il l'avait l'habitude de prendre pour sauter son épouse adorée. Il s'était couvert de honte en essayant la dernière fois de sauter une prostituée. Car l'on ne trompait pas sa femme lorsqu'on se tapait une pute, n'est-ce pas ?
Il se souvenait d'avoir terrifié son épouse la première fois qu'il avait accepté de l'emmener à la bibliothèque. Celle-ci avait osé adresser la parole à quelqu'un d'autre que lui. Cela l'avait, non seulement mis dans une colère noire, mais avait également éveillé son désir avec une violence qu'il n'avait pas vu venir. Lorsqu'ils étaient rentrés chez eux, il l'avait brutalement tabassée, — ce fut là qu'il lui déboita l'épaule pour la première fois —, avant de lui faire l'amour comme il ne l'avait encore jamais fait. Des heures entières il l'avait pénétrée, devant, derrière, devenant fou de désir pour elle. Il lui avait promis d'exécuter de sang-froid toute personne à qui elle parlerait, en dehors de « bonjour, bonsoir ». Ce jour-là, il lui avait enfoncé le canon de son flingue dans la bouche et y avait tiré à vide. Ensuite, il l'avait de nouveau prise tandis qu'elle pleurait de reconnaissance d'être tant aimée.
L'idiote l'avait cru. Certes, il avait déjà commis un meurtre pour elle. Mais il n'était pas près de recommencer. C'était bien trop dangereux. L'essentiel était que son épouse soit convaincue qu'il tuerait quiconque s'approcherait d'elle. Aussi n'avait-il aucun doute : Emma ne s'était pas enfuie pour commettre un adultère. Jamais elle n'aurait mis en danger la vie de quelqu'un d'autre. Pourquoi donc l'avait-elle quittée ? Était-ce parce qu'il la punissait un peu trop souvent ? Mais elle avait tout à apprendre, il le lui avait expliqué maintes fois. S'il la corrigeait, c'était uniquement pour son bien à elle. Parfois, il y allait un peu fort, c'était vrai, mais il n'oubliait jamais de lui offrir des fleurs, de lui emmener les médicaments pour qu'elle se soignât, et surtout, surtout, il n'oubliait pas de lui faire l'amour comme un homme devait le faire à sa femme.
Neal ne comprenait vraiment pas. Tout ce qu'il voulait à présent, c'était prendre la bouteille, s'asseoir sur le canapé et boire. Le rhum lui convenait. Il se remplit un verre, le but, puis le remplit à nouveau, avant d'errer dans la maison vide et sale. Il était malheureux parce que son épouse n'était pas là. Si celle-ci était apparue soudain sur le pas de la porte, il savait qu'il lui demanderait pardon pour l'avoir frappée tant de fois, puis, ils se réconcilieraient et feraient l'amour dans leur chambre. Il la tiendrait dans ses bras, lui murmurerait à l'oreille combien il l'aimait. Ensuite seulement viendrait le châtiment pour l'avoir rendu fou de rage et de douleur. Une femme, de fait, ne pouvait pas fuir le domicile conjugal comme ça. À nouveau, il devrait l'attacher, la punir, la dresser, puisqu'il avait manifestement dû louper quelque chose la première fois. Elle ne se serait jamais enfuie s'il avait bien réussi son éducation. Ce n'était pas pour rien qu'il préférait les très jeunes minettes. Il avait d'ailleurs été très agréablement surpris lorsqu'il avait découvert qu'Emma n'avait pas encore vingt ans lorsqu'il l'avait épousée.
Neal but directement à la bouteille une quatrième, puis une cinquième lampée de rhum. Il observa l'encadrement fendu de la porte de la salle de bain qu'il avait un jour défoncée. Il y avait flanqué des coups de pied parce que son adorée s'y était enfermée à clef afin de lui échapper. Il ne se rappelait même plus pourquoi il lui en avait voulu. Emma ne reviendrait pas. C'était une chose qu'il avait finalement comprise. Emma ne reviendrait pas. C'était donc à lui, son mari, de la retrouver pour la ramener chez eux. Sa femme, de toutes manières, n'était qu'une idiote, une orpheline débile sans aucune instruction. La seule raison pour laquelle elle lui échappait depuis trois ans était que cette garce avait eu de la chance. Il devait reprendre son enquête. Encore une fois. Et cette fois, il la retrouverait, il en était certain.
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Regina resta toute la nuit en compagnie d'Emma après que celle-ci lui eût raconté une partie de son passé. Elle avait pleinement conscience que la jeune femme blonde ne lui avait pas tout dit, qu'il y avait beaucoup de choses que cette dernière ne confierait jamais, autant par honte que par pudeur. L'ancienne militaire n'avait nulle intention d'insister. Elle avait suivi à diverses occasions des séminaires de l'armée sur les psychopathes du type de Neal, soutenu des recrues victimes de telles engeances. Elle imaginait donc parfaitement tout ce que sa dulcinée lui avait caché. Que la barmaid ait pu survivre durant cinq ans à ce dégénéré forçait l'admiration de la jeune veuve. Jamais elle n'avait rencontré une personne aussi courageuse, solide et débrouillarde.
L'unique chose qui lui importait dorénavant était de laisser à Emma le temps de se reconstruire, de l'aider parfois, mais délicatement, afin que la serveuse ne soit pas dépendante de la négociante. L'orpheline devait se réapproprier son corps, sa pensée, sa vie. Aussi Regina encerclait-elle avec le plus de légèreté possible la jeune femme endormie dans ses bras, se contentant de tendres caresses, baisers, paroles, lorsque celle-ci s'agitait dans son sommeil, tentant ainsi d'apaiser les cauchemars de sa bien-aimée.
Elles passèrent de la sorte la majeure partie des semaines suivantes ensemble. Le plus souvent possible, en tous cas. Entre les enfants, les horaires du magasin et du restaurant Chez Granny, elles attendaient toujours avec impatience les moments de se revoir.
Regina laissait toujours Emma esquisser leurs gestes de tendresse, souhaitant absolument que celle-ci puisse reconquérir son désir. La veuve répondait avec amour à chacun d'entre eux, redécouvrant également la joie d'un corps plein d'émois car, depuis Daniel, elle n'avait eu aucune autre histoire. Elles se retrouvaient chez la barmaid, la veuve voulant que son amoureuse se sentît en sécurité. Elles n'allaient jamais au-delà du canapé, ne tentaient jamais de se déshabiller, et cela leur convenait à toutes les deux. Elles savaient qu'un jour il en serait différemment, mais, pour l'instant, ce n'était pas le cas. Elles étaient comme deux infantes, deux très jeunes adolescentes, découvrant, petit à petit, le chemin de leurs corps. Une renaissance.
Parfois, de plus en plus souvent, la négociante emmenait Alice et Henri avec elle, ou bien, invitait l'orpheline à partager leur dîner. Elle savait que les gestes spontanés de sa petite fille étaient bénéfiques dans le combat de la jeune femme blonde pour la réappropriation de son corps. Elle-même en avait fait l'expérience après le décès de son conjoint, lorsqu'elle marchait dans un brouillard sombre où ses seules lumières étaient les câlins récurrents de ses enfants. Retrouver le goût de la vie, le plaisir de la sentir s'écouler à travers soi. C'était une démarche lente, incertaine, dont la commerçante réalisait, avec surprise, qu'ils étaient quatre dans cette aventure : Emma, bien sûr, mais également Alice, Henri, ainsi qu'elle-même.
Regina avait suggéré à l'orpheline de parler au docteur Archibald Hopper. Celui-ci les avait aidés, elle et ses enfants, après la mort de Daniel. Il l'avait également aidée lorsqu'elle était quelquefois revenue démolie par les missions parfois inhumaines que l'armée lui imposait. Aussi avait-elle toute confiance dans le médecin, au point de penser qu'un jour tous deux pourraient peut-être devenir amis. Elle avait suggéré, sans insister, consciente que la décision devait venir de sa bien-aimée. Elle n'avait jamais été aussi heureuse que lorsque celle-ci lui annonça qu'elle avait pris rendez-vous avec Archie.
Emma voyait le psychologue deux fois par semaine, ou plus, occasionnellement. Ces soirs-là, Regina demandait à David de garder ses enfants et se rendait chez la barmaid. Elle préparait un repas léger, attendant son retour. Au début, elle n'était pas certaine que ce soit la chose à faire. Aussi en avait-elle parlé à la serveuse, car elle ne voulait rien faire qui puisse être vécu comme une agression par la jeune femme blonde, ainsi qu'au thérapeute. Ne risquait-elle pas de rendre Emma dépendante ? Mais Archie ne semblait pas craindre que ce soit le cas. Raconter ses souvenirs serait profondément douloureux pour l'orpheline, il était donc essentiel qu'elle ne soit pas seule face à sa souffrance, avait-il expliqué. La veuve l'avait cru car il lui était revenu à l'esprit combien elle-même avait souhaité la présence de Daniel lorsque certaines de ses missions militaires l'avaient traumatisée. C'était d'ailleurs en évoquant ses souvenirs qu'elle avait expliqué à ses enfants pourquoi elle ne pouvait laisser Emma seule à ces moments-là. Elle n'était pas rentrée dans les détails, cela ne les concernait pas. Elle avait, de sus, répété à la barmaid ce qu'elle avait confié à Henri et Alice, la serveuse refusant, au début, que Regina abandonna ses petits.
Lorsque la jeune femme blonde rentrait de ses séances, elle ne parlait jamais de ce qu'elle avait raconté ou vécu. Généralement, elle se blottissait en silence dans les bras de la veuve, se laissant doucement bercer, comme l'on berce un enfant malade. Regina ne disait rien, se contentant d'être là. Elle ne niait pas la dimension presque maternelle qui existait dans cette étreinte. Cela ne la dérangeait pas. Dès qu'elle avait remarqué Emma, elle avait eu ce besoin de la protéger. Lorsqu'elle avait appris que la jeune femme blonde était orpheline, elle avait réalisé qu'il y aurait toujours entre elles quelque chose de cet aspect-là : son désir de protéger répondant à cette blessure intime de la serveuse, ce sentiment d'abandon qu'éprouvait tout orphelin. Aussi restait-elle toute la nuit à la tenir contre elle, à l'apaiser.
En l'observant dormir, tout en l'aidant à lutter contre ses cauchemars, l'ancienne militaire se sentait parfois envahie d'une rage folle envers Neal. Ivre de vengeance. De justice. Elle aurait voulu que le policier connaisse à son tour les affres de l'angoisse et de la terreur, subisse la cruauté et la douleur, autant psychique que physique. Son expérience dans l'armée lui avait appris qu'il existait des moments où la violence était nécessaire pour sauver des vies. Si Cassidy réapparaissait, elle savait qu'elle protégerait la jeune femme blonde coûte que coûte. Elle ne tuerait pas le détective, non. Tuer pendant la guerre était une chose, mais commettre un meurtre, même en défendant autrui, lui semblait inadmissible. Son instinct, de surcroît, lui soufflait qu'Emma n'apprécierait pas que sa bien-aimée s'abaissât de la sorte. Mais si le couard se pointait, la militaire savait qu'elle se débrouillerait pour expédier le violeur dans un fauteuil roulant, là où il ne pourrait plus jamais blesser qui que ce soit.
Tout cela expliquait qu'elles n'aient pas encore fait l'amour, qu'elles ne soient pas prêtes à s'y adonner. Regina, lucide sur le fait qu'elle était plus en avance que la serveuse sur ce domaine-là, notamment parce qu'elle ne devait pas se reconstruire à la suite de viols multiples, imaginait parfois leur première fois, la manière dont Emma la déshabillerait, la manière dont elle lui caresserait les seins avant de les prendre délicatement entre ses lèvres. Car la veuve supposait, — même si elle eût préféré donner du plaisir plutôt que de le recevoir —, que ce serait à elle de s'offrir à la jeune femme blonde, de la laisser diriger l'ensemble de leurs ébats, et ce, aussi longtemps que cela serait nécessaire, jusqu'à ce que l'orpheline soit, à son tour, prête à s'offrir. S'il y avait bien une chose dont la militaire rêvait, c'était de réconcilier l'orpheline avec son corps, de lui en faire découvrir la beauté, de lui faire don de toute la douceur que celle-ci n'avait jamais reçue.
La balle, cependant, n'était pas dans son camp. Seule Emma pourrait décider de leur première fois et de ce qu'elle désirerait ce jour-là. Regina savait seulement qu'elle se soumettrait aux souhaits de la jeune femme blonde : elle s'offrirait si la serveuse le lui demandait, elle lui donnerait toute sa tendresse, tout son amour, si c'était ce que la barmaid attendait d'elle. L'unique certitude qu'elle avait était qu'elle la ne pénétrerait pas. Elle était encore imprégnée, même des années après, des confidences de deux jeunes soldates qui avaient été violées, de leur difficulté à retrouver une sexualité sereine, de leur incapacité à retrouver du plaisir lors de la pénétration.
Il lui suffisait donc, pour l'instant, d'embrasser sa bien-aimée, de sentir ses bras autour d'elle, de glisser les siens autour de ce corps parfois si fragile. Elle adorait le parfum d'Emma, la manière dont sa main s'entrelaçait à merveille avec la sienne, la manière dont elle souriait, ou lorsque, rarement, elle éclatait de rire. Elle se contentait de chaque instant offert par son aimée et prenait plaisir à lui faire rencontrer, peu à peu, autant ses amis que la ville ou la forêt, apprivoisant petit à petit la jeune femme aux cheveux dorés.
Emma, après leur premier repas en tête à tête, n'évoqua pas son passé. Sur le moment, le confier à la négociante lui avait paru juste, telle une libération leur permettant d'avancer plus loin. Lorsqu'elle s'était éveillée le lendemain, au bord de la nausée, paniquée, en proie à ses habituels cauchemars, les doux bras de Regina l'encerclant comme une protection l'avaient apaisée. Ses caresses inconscientes, car la jeune femme brune dormait encore, l'avaient totalement calmée tout en la touchant profondément : la militaire devait réellement tenir à elle, si, même dans son sommeil, elle ressentait les hantises de l'orpheline et trouvait moyen de la consoler. Ce fut sur cette rassurante pensée que la barmaid s'était rendormie, chose qu'elle n'avait jamais réussie à faire lorsque ses cauchemars l'éveillaient de la sorte.
Plus tard, de doux baisers la réveillèrent définitivement. Le regard sombre et pétillant de la militaire lui souriait :
— « Je viens de prendre une douche et j'ai pensé que tu aimerais en faire de même pendant que je m'occuperais du petit déjeuner. Heureusement que j'ai toujours un vieux treillis dans ma voiture, sinon, j'eusse été condamnée à voler tes vêtements. »
Elles passèrent la journée ensemble, Regina ayant affirmé que David, son associé et le parrain des enfants, avait prévu de les emmener en bateau et qu'elle ne leur manquerait pas. La jeune veuve voulut absolument montrer à la serveuse la forêt, ne tarissant pas d'informations sur la faune et la flore, des informations fort différentes de celles que la jeune femme blonde avait apprises. Emma, curieusement, ne pensa pas une seule fois à Neal, trop prise par l'allégresse que provoquait en elle la présence de sa compagne, subjuguée par l'érudition de celle-ci, par son enthousiasme quasi enfantin dans sa manière de transmettre ses connaissances. Elle, qui jusqu'à présent ne connaissait que les plaines et les champs de céréales, découvrit également que les arbres généraient en elle une singulière sérénité, qu'elle ne s'expliquait pas, comprenant pourquoi la veuve avait tenu à lui faire découvrir un tel lieu.
Lorsque celle-ci était partie, en fin d'après-midi, l'orpheline avait trouvé sur la table une carte de visite avec les coordonnées d'un psychologue et une simple note : « Archie m'a beaucoup aidée lors du décès de Daniel. Tout comme mes enfants. Il m'avait également aidée lorsque je revenais de certaines missions particulièrement éprouvantes. J'espère qu'il t'aidera pareillement. Avec tout mon amour. Regina. » À quel moment la commerçante avait-elle trouvé le temps de lui écrire ce mot ? L'attention provoqua en elle un sentiment inconnu, dont elle finit par comprendre qu'il s'agissait d'une sorte de joie étrange, notamment parce que la jeune femme brune la laissait libre de choisir de voir, ou de ne pas voir, le thérapeute en question.
L'orpheline hésita cependant longuement. Les expériences qu'elle avait eues, lors de son enfance, ne l'incitaient pas à faire confiance aux médecins. Mais plus Regina distillait en elle le goût du bonheur, plus Emma prenait conscience que son passé, tout comme les crises d'angoisse qu'il provoquait, ressemblait à une immense prison, une prison dont elle ne pourrait s'échapper sans aide. Elle pensa que si sa bien-aimée avait confiance en cet Hopper, peut-être pourrait-elle de la même manière lui accorder sa confiance. Ou tout au moins tenter de le faire.
Lorsqu'eut lieu la première séance, la seule chose qu'elle trouva à dire fut :
— « C'est compliqué.
— Nous avons tout notre temps. »
Le fait que le psychologue ne la força pas à parler, la laissant se plonger dans ses pensées, tranquillisa la jeune femme blonde. Peut-être avait-elle fait le bon choix en suivant le judicieux conseil de sa compagne.
Lors de la deuxième séance, il lui demanda juste si c'était toujours compliqué. Elle lui répondit : « Oui. ». Il n'insista nullement, respectant toujours le silence de l'orpheline. À la troisième séance, après qu'elle lui eût confirmé que c'était toujours compliqué, il ajouta : « Puis-je vous poser une autre question ? Vous avez le droit de refuser de répondre », continua-t-il en la voyant tergiverser. Elle ne dit rien, laissant encore une fois le silence s'installer, mais les premiers mots qu'elle prononça, alors que débutait leur quatrième séance, furent :
— « Quelle est votre question ?
— Quel est votre lieu préféré ?
— Pourquoi ?
— Pourquoi j'aimerais connaître votre lieu préféré ? Vous avez l'air malheureuse dans ce bureau. Nos séances peuvent se passer n'importe où. Peut-être que si nous étions dans un lieu où vous vous sentez à l'aise, ce sera un tout petit moins... compliqué. »
Aussi la séance suivante se déroula-t-elle au milieu des bouleaux. Rassurée par la douceur des arbres, Emma évoqua les sentiments profonds et confus qui la rapprochaient indubitablement de Regina, le fait qu'elle associait la forêt au bonheur que celle-ci lui offrait, le fait qu'elle-même ne pensait pas être digne de ce bonheur à cause de ce qu'elle avait vécu, à cause de ce passé qui la poursuivait. Ce fut alors qu'elle réalisa qu'elle ne pouvait salir ce lieu par ses douloureux souvenirs. Elle comprit ainsi la nécessité du bureau du docteur Hopper, un endroit où son passé pourrait être verrouillé sans crainte qu'il ne s'en échappât. La thérapie put alors véritablement commencer.
Le psychologue saisit très rapidement que l'angoisse la plus profonde de la jeune femme blonde n'était pas que Neal la retrouve, mais qu'il la retrouve ET s'en prenne à Regina, ou aux enfants, ou aux trois. La terreur qu'elle éprouvait à cette idée la poussa à confier qu'elle préfèrerait retourner avec son conjoint, afin qu'il ne tuât les trois personnes qui comptaient le plus dans sa vie. Le thérapeute se fit doucement la remarque que le policier était un psychopathe sadique et qu'il tuerait sans hésiter la famille Mills, et ce, devant Emma. Non seulement par plaisir de la faire souffrir, mais pour lui ôter tout espoir d'une fin heureuse.
Il se tut car il savait que ce genre de commentaire pousserait immédiatement la barmaid à disparaître de Storybrooke. Il savait également que la jeune femme blonde mettrait très longtemps à repousser cette peur, qu'elle était pour l'instant trop terrifiée pour trouver une solution. Ce fut pourquoi il incita l'orpheline à parler de cette crainte à sa compagne, affirmant que celle-ci était suffisamment solide pour y faire face. Il connaissait de surcroît les compétences de cette dernière, savait que l'amazone, — c'était ainsi qu'il surnommait la veuve —, saurait comment se préparer à ce potentiel danger.
Il se promit que, si sa jeune patiente n'osait le dire à son amante, lui n'hésiterait pas à exiger de la négociante qu'elle se méfia du détective. Il ne trahirait jamais les secrets de la si fragile et paradoxalement si forte barmaid. Pas seulement pour des raisons déontologiques évidentes, mais parce qu'il s'était profondément attaché à la jeune serveuse, comme il s'était, des années auparavant, profondément attaché à la jeune veuve. Toutes deux s'apportaient un bonheur qui leur avait été trop longtemps dénié et il souhaitait que cela continuât de la sorte. Il savait, toutefois, que sa patiente était virtuellement en danger et qu'il était de son devoir de la protéger. À défaut d'avoir l'accord d'Emma pour prévenir le shérif, — d'autant plus que celle-ci n'était pas prête à comprendre que Graham, le marshal de leur ville, croyait sans hésiter Archie si celui-ci lui disait qu'il fallait arrêter un mari maltraitant éconduit, fût-il un policier —, il n'ignorait pas que le seul moyen qu'il avait de protéger la jeune femme blonde était de prévenir la militaire.
Il se heurta à d'autres tourments, notamment l'incertitude de l'orpheline quant à sa relation avec la négociante, incertitude liée au fait que la serveuse souhaitait divorcer tout en étant dans l'incapacité de pouvoir le faire. L'analyste lui montra qu'une autre douleur se cachait sous cette indécision : la souffrance des viols que son mari lui avait imposés, ainsi que des multiples abus qu'elle avait subis durant son enfance. Le fait qu'Emma avait la sensation qu'elle ne pourrait jamais s'en remettre, qu'elle ne pourrait jamais retrouver une vie normale. Qu'elle ne sentît pas digne de vivre sa relation avec Regina. Le fait, également, d'être orpheline, comme si le décès de ses parents, leur abandon, avait transformé la barmaid en un être difforme, anormal, que l'on ne pouvait que maltraiter. Là encore, le praticien lui rappela que sa bien-aimée avait vécu maintes épreuves et que la veuve était parfaitement capable de gérer celles d'Emma. À maintes reprises, comme un leitmotiv, il lui répéta que la militaire ne se liait pas facilement, qu'elle l'avait choisie, un choix qui signifiait que la commerçante considérait la serveuse digne d'être aimée et que le reste n'avait aucune espèce d'importance.
Reconnaître, qu'à chaque fois qu'elle fantasmait sur sa compagne elle finissait par se heurter à Neal, à son visage déformé par l'alcool et la luxure, à ses mains et son sexe la meurtrissant, fut une étape importante dans le processus de reconstruction dans lequel la jeune femme blonde s'était engagée. Ce qu'elle ne réalisait pas était qu'une profonde complicité se forgeait entre elle et Regina. Non seulement elle ne cessait de se rapprocher de la veuve aux cheveux d'ébène, mais elle se rapprochait de la même manière des enfants de cette dernière, dévoilant ainsi un don naturel pour s'occuper de toutes sortes de gamins.
Malgré cette sensation parfois terrifiante d'avancer en terrain miné, Emma sentait ses craintes s'atténuer de jour en jour. Elle savait qu'elle n'aurait jamais dû éprouver de telles impressions. Elle ne séjournait jamais, habituellement, plus de quinze jours dans un lieu, souvent moins. La première année après sa fuite, elle ne s'attardait jamais plus d'une semaine, juste le temps de gagner assez d'argent pour repartir. Mais il y avait plus d'un an qu'elle se trouvait à Storybrooke. Les raisons pour lesquelles elle était, au début, restée, demeuraient diffuses. La fatigue d'être constamment en fuite, constamment sur ses gardes, l'étrange sérénité qui se dégageait de la petite ville, l'isolement de la cité, les gens. Les gens qu'elle y avait rencontrés. Leur gentillesse, leur respect, leur absence de curiosité malsaine lorsqu'elle ne parlait pas. Regina.
Regina la faisait rester.
Il ne s'agissait pas uniquement des sentiments qu'elle éprouvait pour la militaire. C'était ce que la jeune femme brune lui faisait ressentir. Une sorte de sécurité indicible, pleine de liberté, de douceur et de fantaisie. C'était également la manière dont celle-ci se comportait avec elle. Regina agissait comme si les révélations d'Emma n'influaient en rien sur leur existence, sur leur relation. Regina ne la considérait pas comme une victime, lui demandait sans cesse son avis, louait son intelligence et sa culture. Regina la taquinait, l'emmenait faire de longues balades en forêt, lui prenait la main avec douceur. Regina ne forçait jamais le corps d'Emma. Chaque geste qu'elle avait envers l'orpheline était empli de délicatesse, son regard sombre guettant constamment l'accord des yeux émeraude. Regina engendrait en Emma des émotions qu'elle n'avait jamais connues, des émotions qui créaient en elle la sensation que ses veines et son cœur s'étiraient à l'infini.
Regina lui faisait confiance. Elle lui emmenait ses enfants, les lui confiait sans aucune crainte, comme si elle était absolument certaine que rien ne pourrait leur arriver tant qu'ils étaient avec Emma. Cette confiance perturbait l'orpheline plus encore que tous ses autres émois, qui la chamboulaient déjà entièrement. Sans Archie pour lui répéter constamment qu'elle avait droit au bonheur, — c'était ainsi que le thérapeute qualifiait tous ces nouveaux sentiments auxquels l'orpheline ne comprenait rien puisqu'elle ne les avait jamais vécus, sentiments qui parfois la paniquaient —, sans lui, l'orpheline savait qu'elle se serait déjà enfuie, contrainte par sa honte, sa culpabilité et sa peur.
La confiance sans faille de Regina. La confiance des enfants de celle-ci.
De fait, Alice et Henri entraînaient régulièrement dans leurs jeux la jeune femme blonde, parfois même sous l'œil bienveillant de leur mère. Un après-midi, sans qu'elle comprît comment ceux-ci l'avaient menée sur ce chemin, sans doute parce qu'elle ne sentait pas en danger avec ces corps prépubères, ils la chatouillèrent tant et si bien qu'elle éclata d'un rire qu'elle ne put arrêter. Elle ne sut comment les larmes apparurent presqu'ensuite, comment Regina fut instantanément à ses côtés, comment elle avait éloigné sa progéniture. Regina l'enveloppa de sa douceur, tandis qu'Emma, blottie contre sa poitrine, sanglotait spasmodiquement.
Plus tard, beaucoup plus tard, l'orpheline réalisa que si elle-même faisait l'apprentissage de la joie et de la douceur de vivre, la famille qui l'entourait dans cette expérience, redécouvrait, elle, l'insouciance et le bonheur de vivre. Ainsi, tandis que Regina l'accompagnait le long d'émotions et de sensations inconnues, les enfants de la veuve l'initiaient à des jeux, des gestes, des chansons, qu'elle n'avait jamais vécus durant son enfance et dont elle ignorait jusqu'à l'existence. Il lui semblait même, parfois, que la négociante la poussait à jouer, à s'amuser, comme si celle-ci souhaitait qu'Emma, bien qu'adulte, vive cette enfance qu'elle n'avait pas la chance d'avoir eue.
Elles élaborèrent petit à petit des habitudes qui n'appartenaient qu'à elles. Les longues balades en forêt, où elles finissaient par trouver une clairière agréable, dans laquelle elles s'installaient, Regina écrivant tandis qu'Emma dessinait. La militaire avait découvert par hasard le don pour le graphisme de sa compagne. Depuis, elle n'avait eu de cesse de l'inciter à s'y adonner. L'orpheline lui avait alors parlé de Marco, le vieil ébéniste qui l'avait prise sous son aile et pour qui elle crayonnait des schémas ou des décors de meubles divers. Marco, dont l'assassinat l'avait mise sur la route de Neal. Elles aimaient également demeurer des après-midis entiers avec Alice et Henri, restant à jouer dans le jardin de la grande bâtisse de Regina, ou dans le salon, lorsque les jeux de société étaient à l'honneur.
Lentement mais sûrement, les deux jeunes femmes se rapprochaient. Il y avait dorénavant un rituel particulier, qu'elles avaient instauré quelques temps auparavant, un soir où Emma, en sortant de la séance, avait éclaté en larmes sans pouvoir s'arrêter. La militaire l'avait portée dans ses bras jusqu'à la salle de bain, avait empli la baignoire d'une eau chaude, où elle avait jeté des sels parfumés manifestement amenés pour son plaisir personnel, sans cesser de la porter tendrement dans ses bras. Elle avait déshabillé fort lentement, fort délicatement, la barmaid en sanglots, tout en lui murmurant qu'elle ne lui ferait pas de mal, qu'elles allaient juste se glisser dans la baignoire où l'eau l'apaiserait. Simultanément, elle enlevait ses propres vêtements, faisant en sorte de n'être jamais plus vêtue que sa compagne, lui expliquant à chaque fois ce qu'elle s'apprêtait à lui ôter. Elle n'avait pas allumé la lumière, profitant d'un rayon lunaire persistant, permettant à l'obscurité de briller quelque peu. Elle continuait de tenir contre son torse le corps si fin et si doux de sa bien-aimée, s'assit sur le rebord avant de se glisser précautionneusement dans la baignoire. L'eau, chaleureuse, le parfum des pommiers en fleurs, le bercement régulier qu'elle offrait au corps de sa belle, la mélodie qu'elle lui chantonna, apaisèrent son amante, qui s'endormit, abattue par tant de larmes.
Lorsqu'Emma s'était éveillée dans la nuit, épuisée, les yeux douloureux recouverts d'un doux tissu, elle reconnut immédiatement le corps voluptueux de Regina contre lequel elle était blottie. Toutes deux étaient vêtues de survêtements légers, recouvertes d'une douce couverture polaire. Elles étaient allongées sur le lit, mais non dans celui-ci. Sans trop comprendre pourquoi, ce fait rassura la jeune femme blonde, qui sentit un baiser tendre sur son front.
— « Es-tu réveillée ? Tu sembles l'être. Ne bouge pas et surtout, garde les yeux fermés. »
La militaire ôta le tissu posé sur les yeux de l'orpheline, pour le replacer par un autre, humidifié. La fraîcheur apaisa sa souffrance.
— « Que s'est-il passé ?
— Tu t'es endormie. Je t'ai séchée et t'ai passé l'un de mes survêtements légers. J'en avais deux puisque j'avais prévu de les déposer à la salle d'entraînement. Je n'ai pas regardé, Emma. J'ai constamment laissé la lumière éteinte.
— Je suis désolée.
— Pourquoi ? Pour avoir eu une vie merdique ? »
L'orpheline sut instantanément que la guerrière était en colère, car jamais celle-ci n'utilisait de mots familiers. Elle se crispa. La négociante l'embrassa à nouveau, délicatement, tout en lui caressant doucement le dos.
« Je ne suis pas en colère après toi, Emma, lui murmura-t-elle. Je suis en colère parce que je constate combien tu as souffert et que j'aurais souhaité que jamais cela ne t'arrive. Je me sens impuissante, Emma. C'est pourquoi je suis en colère.
— Mais je n'ai pas à te faire subir tout cela.
— Pardon ?!!! Miss Swan, si vous persistez à dire des bêtises plus grosses que vous, je peux vous certifier que c'est après vous, que je serai en colère. Et croyez-moi, vous ne voulez pas que je sois en colère après vous ! »
La serveuse sentait, en effet, vibrer le corps de sa compagne. Elle se resserra contre elle :
— « Je ne veux pas que tu sois en colère après moi. Je préfèrerais juste que mon passé soit... »
Elle hésita, cherchant le mot adéquat.
— « Différent ?, lui proposa la négociante.
— Oui, soupira-t-elle.
— Mais il ne l'est pas. Toi et moi devons faire avec. Je ne sais pas si tu réalises jusqu'à quel point te voir t'en débarrasser, même si parfois c'est trop douloureux, je ne sais pas si tu réalises jusqu'à quel point c'est beau de te voir t'épanouir. C'est beau, jouissif, enivrant. C'est un privilège.
— Un privilège ?
— Oui. Comme si les aurores boréales avaient lieu tous les jours.
— Tu as une curieuse manière de voir les choses.
— N'est-ce pas ? D'ailleurs, je suis certaine que tu n'as vu que les aspects négatifs de notre soirée d'hier, sans penser qu'il y avait des bonus.
— Des bonus ?
— Depuis des mois, je rêve de te déshabiller, de prendre un bain avec toi, crapuleux le bain de préférence, de t'allonger sur ton lit. Il manque encore quelques petits détails, mais j'ai tout mon temps. J'eusse préféré, bien sûr, que tu ne dormisses pas. Je ne désespère pas. Tu remarqueras que je n'ai pas oublié de te rhabiller et que je ne nous ai pas glissées dans ton lit. Je n'aurais jamais osé faire cela, poursuivit-elle très sérieusement.
— Je sais, Regina. Je sais. »
Ce fut ainsi qu'elles décidèrent d'établir le rituel de l'eau. Lorsqu'Emma revenait de sa séance, Regina s'était toujours lavée et portait toujours un léger survêtement. Elles préparaient ensemble la salle d'eau, pour un bain ou pour une douche, selon le bon vouloir de l'orpheline. Lorsqu'elles s'endormaient, toujours dans le respect des desideratas de la jeune femme blonde, c'était tantôt dans le canapé, tantôt sur le lit, la barmaid n'étant pas encore prête à plus d'intimité.
Un samedi matin, elles étaient allongées sous la véranda de la serveuse, enlacées. La veille, la jeune femme blonde avait vu le docteur Hopper. Elle était revenue de cette séance curieusement apaisée, s'était longuement blottie dans le corps chaleureux de sa bien-aimée. Elle s'était endormie dans les tendres bras de Regina. Pour la première fois depuis des années, elle n'avait le souvenir d'aucun cauchemar nocturne. Elle releva la tête, glissa un baiser timide sur les lèvres de la jeune femme brune. Celle-ci sourit, répondit au baiser avec douceur, sans pour autant forcer la porte labiale. Emma soupira de bonheur. Les lèvres pulpeuses de la militaire éveillaient en elle des émois dont elle ne savait pour l'instant quoi faire. Mais le psychologue lui avait dit de ne pas s'en préoccuper, de simplement apprécier ces émotions, lui affirmant qu'un jour elle saurait.
Penser au thérapeute lui rappela l'une de ses demandes, sur laquelle il ne cessait d'insister. Il exigeait peu de choses d'elle, mais celle-ci lui faisait si peur, qu'elle n'avait pas su y répondre. La négociante dut sentir la tension qui s'était installée à l'intérieur de la barmaid, car elle se mit à faire de très doux cercles sur le dos de sa compagne.
— « Qu'est-ce qui te contrarie ?
— Archie.
— Archie ?!! J'avais pourtant l'impression que les séances avec lui te faisaient du bien.
— C'est exact. Mais il veut que je te parle de quelque chose et... »
Les mots se bloquèrent, traduisant l'angoisse qui habitait la serveuse. Sans cesser ses délicates attentions, la commerçante laissa le silence s'installer. Comprenant finalement que l'anxiété de sa compagne ne s'effacerait pas, elle murmura :
— « Il veut que tu me parles de Neal.
— Comment le sais-tu ? »
Emma s'était éloignée brusquement, comme blessée.
— « Tout doux, mon impulsive guerrière, dit Regina qui s'était levée pour l'envelopper d'une tendre étreinte. Laisse-moi d'abord t'expliquer. »
La jeune femme brune se rallongea sur le large transat, faisant signe à l'orpheline de la rejoindre. Celle-ci se rapprocha en grommelant sous le regard facétieux de la négociante, finit par retrouver le corps voluptueux de sa petite amie.
— « Archie m'a appelée il y a quelque temps. Il voulait savoir si tu m'avais parlé de ton passé. Je lui ai répondu que s'il s'agissait du couard qui se prenait pour ton mari, j'étais au courant et que c'était pour cela que je t'avais donné ses coordonnées. Il voulait juste me dire de me tenir sur mes gardes, que ce soit pour mes enfants, pour toi, ou pour moi. Je lui ai rétorqué de ne pas s'inquiéter, que j'avais déjà compris que j'avais à faire à un psychopathe sadique et obsessionnel. Désolée, mon cœur, mais c'est exactement ce qu'est ce policier de pacotille.
— Il ne t'a pas parlé de moi ? Ou de nos séances ?
— Archie ne parlerait jamais de toi ou de tes séances, Emma. À personne, et encore moins à moi. Je ne sais même pas comment tu peux envisager cela un seul instant. Mais il a une responsabilité vis-à-vis de toi et de la communauté de Storybrooke. Tu es peut-être en danger. Tu dois donc être avertie, protégée. Je suis militaire, Emma. Si Daniel n'était pas décédé, je le serai toujours. C'est mon rôle de protéger, et plus encore lorsqu'il s'agit de ma famille. Archie n'a fait que son devoir. Ne lui en veux pas : s'il avait vraiment respecté les règles de sa profession, il aurait dû prévenir le shérif Graham. Mais comme nous savons tous les trois que tu refuses de rencontrer ce charmant garçon, j'étais la seule personne qu'il pouvait prévenir. »
La commerçante sentit la panique envahir le corps de la barmaid. Elle l'enserra un peu plus fermement, restant cependant étonnamment douce.
« Pas de ça avec moi, Emma. Il est hors de question que tu t'enfuies, que tu abandonnes mes enfants, ou que tu m'abandonnes. Tout comme je ne t'abandonnerai jamais. Grace à toi, Alice et Henri redécouvrent tout doucement le goût de la vie. Ils ne sont pas assez solides pour réitérer le deuil d'une personne qu'ils aiment. Quant à moi, inutile de te dire que ton départ me tuerait. Tu vas donc rester avec nous, ici, à Storybrooke, où tant d'autres gens t'aiment. Si Neal débarque, je te protègerai. Nous aviserons alors de ce qu'il convient de faire de ce dégénéré. Et ce n'est un sujet de discussion, Emma.
— Tu as raison, je ne veux pas que tu sois en colère contre moi ! Tu dois être terrifiante quand tu t'y mets. Je... Je ne veux pas m'enfuir, Regina. Même si je pense que ce serait la meilleure chose à faire pour vous, j'ai confiance en toi et en Archie lorsque vous me dites que partir serait la pire des choses. D'autant plus, que je ne veux blesser ni Alice, ni Henri, ni toi. Je ne veux blesser personne, en fait. De toutes manières, je ne pourrais plus être loin de toi, ou des enfants, je crois que cela me tuerait.
— Merci. »
Les corps des deux jeunes femmes se détendirent. Elles se blottirent à nouveau l'une contre l'autre, une sérénité inédite les enveloppant. Preuve de son apaisement, l'orpheline effleurait sensuellement les mains de sa dulcinée.
« Je pourrais t'apprendre, si tu voulais, dit cette dernière à mi-voix.
— M'apprendre ?
— À te défendre. J'y réfléchis depuis un moment, mais je ne voudrais pas que tu penses que je te force à faire quelque chose dont tu n'as pas envie. »
Continuant ses frôlements, la serveuse sembla se perdre dans ses pensées, finit par murmurer :
— « Tu crois que je pourrais ?
— Pourquoi penses-tu que je te surnomme « ma belle guerrière » ? Bien sûr que tu en es capable. J'ai juste besoin de ton accord.
— Est-ce qu'Alice et Henri pourraient apprendre avec moi ?
— Sans aucun problème. Est-ce que cela veut dire « oui » ?
— Oui, répondit Emma, un immense sourire sur les lèvres. Aujourd'hui ?
— Nous pouvons commencer cet après-midi, si tel est ton désir. Il y a un dojo sous la maison, que j'ai fait construire après le décès de Daniel. Quelle impatience, dis-moi !
— Je ne veux pas que Neal puisse faire mal aux enfants.
— Et je ne t'en aime que plus. »
La militaire fut surprise du baiser spontané que lui offrit sa bien-aimée, encore plus étonnée mais néanmoins ravie lorsque celle-ci l'approfondit dans une étreinte plus sensuelle que toutes celles qu'elles avaient jusqu'à présent échangées. Sentir sa compagne s'ouvrir à elle petit à petit lui procura une joie immense, encore plus lorsque la jeune femme blonde se blottit contre son torse sans cet habituel sursaut pour la rejeter, sursaut dont elle avait compris qu'il correspondait au moment où Neal le violeur se glissait dans la tête de sa bien-aimée, tel un cauchemar récurrent.
— « Je suis désolée, murmura celle-ci.
— Pourquoi ?
— Pour ne pas réussir à aller plus loin et d'avoir l'impression de constamment te frustrer.
— La frustration n'est pas un problème pour moi, Emma. Comme je te l'ai déjà dit, il n'y a eu personne depuis Daniel.
— Tu ne m'as jamais expliqué pourquoi.
— Il ne s'est même pas écoulé trois mois entre le diagnostic et le décès de Dan. Je n'avais pas seulement à gérer ma propre peine, je devais également gérer celle des enfants. Henri était... En colère, triste. Alice réclamait continuellement son père. Nous étions tous anéantis. J'avais dû d'abandonner l'armée, qui était une grande partie de ma vie. Ma mère me harcelait pour que je me remarie rapidement, un mariage correct cette fois-ci, ne cessait-elle de répéter. Il fallait de surcroît que je m'occupe du magasin. Sans David et sans Archie, je ne m'en serai jamais sortie. Franchement, il n'y avait de place pour personne. Ensuite, après ce que j'avais vécu avec Daniel, je n'avais aucune envie de revivre une quelconque histoire. Je n'ai même pas cherché. Cela ne m'intéressait pas. L'amour est rare et je ne pensais pas avoir la chance de le rencontrer à nouveau. Jusqu'à toi. La vérité, c'est que si j'avais été en couple avec quelqu'un, c'eût été une aventure sexuelle, et le sexe pour le sexe, à mon âge, c'est très ennuyeux. Je l'aurais largué sans le moindre état d'âme pour être avec toi.
— Ce n'est pas très sympa.
— Je ne suis pas toujours très sympa, Emma. Crois-le ou pas, je suis difficile. Te rencontrer était inespéré. Le fait que tu sois totalement et entièrement sexy, c'est la cerise sur le gâteau.
— Tu me flattes dans l'espoir que j'ôte tes vêtements et que je te laisse ôter les miens ?
— C'est toi qui as envie de parler de sexe. Est-ce efficace ?
— Beaucoup plus que tu ne peux l'imaginer ! »
La jeune femme brune éclata de rire, faisant sourire l'orpheline, qui pensa qu'elle aimait Regina à l'infini.
— « Tu m'en vois ravie, affirma la négociante lorsqu'elle se fut calmée. J'ai tout mon temps simplement parce que le jour où ce sera véritablement efficace, ce n'en sera que plus délicieux. Je suis vraiment heureuse que tu aies atterri à Storybrooke.
— Moi aussi. »
C'était la première fois qu'elles flirtaient délibérément, avec légèreté. Durant l'après-midi, la militaire donna à la barmaid son premier cours de self-défense, emmenant celle-ci sur le chemin qui lui permettrait de reprendre peu à peu le contrôle de son propre corps. Lorsque les enfants, déposés par David, les rejoignirent, la leçon releva plus du jeu pédagogique jusqu'à ce qu'ils décident de finir la soirée par un barbecue sur la plage.
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