Chapitre 7

Dao.

Je ne peux pas m'empêcher de sourire en voyant qu'ils ont choisi de s'asseoir à côté de moi, les autres élèves semblent étonnés que l'on ose m'approcher. Peut-être que cela va aussi les faire changer d'avis sur moi ? Il suffisait peut-être juste d'un déclic comme il a suffi d'une publication pour qu'ils s'enfuient.

A la fin du cours, plusieurs garçons viennent s'attrouper autour de mes deux nouveaux colocataires en me jetant des regards en coin. Les gens ont vraiment du temps à perdre, ce genre de petites histoires inutiles, ils en sont accros.

« 'Sam, depuis quand tu traînes avec Dao ?

- On est coloc' depuis hier, j'ai déménagé dans la même chambre que lui avec Meng.

- Sérieux ? Genre il habite dans un dortoir aussi ?

- Tu croyais qu'il avait une villa avec piscine ? s'amuse Meng.

- Non, non mais je le pensais assez riche pour avoir son propre appart'. C'était les dernières places de libre ?

- Ouais mais ce n'est pas dérangeant, il est cool, répond Issam sur un ton déconcerné.

Je fais semblant d'écouter de la musique avec mes écouteurs mais je savoure la conversation.

- Mais gay, pas trop effrayant de dormir près de lui ? raille l'un d'eux.

Je ne peux m'empêcher de tourner brusquement la tête à ses mots, remonté. Il croise mon regard et se mord la langue de ses paroles tandis que ses potes lui donnent des coups de coude, l'air de lui faire comprendre qu'il a fait une connerie.

- Et alors ? Mon meilleur pote est bi' et j'ai dormi plein de fois dans le même lit, riposte durement Issam en désignant Meng du menton.

Donc Meng est bisexuel ? Il n'en fallait pas plus pour refaire ma journée.

- Sérieux, Meng t'aime les mecs ? s'étonne la petite bande, comme si c'était une chose impensable.

- Peu importe le sexe. Fin, bref, évite juste de dire des trucs aussi débiles Dorian, à part blesser des gens ou te faire passer pour un homophobe, c'est inutile. Ce n'est pas parce-que je m'intéresse aux mecs que je vais vous sauter dessus et ça m'étonnerait que Dao en ait envie aussi.

J'hoche la tête avec un petit ricanement, vu les dégaines peu soignées, le look voulu « cool » et masculin au possible du fameux Dorian et ses compères, je m'en passerai bien. J'aime les personnes avec de la classe et du charisme, pas des gamins pareils.

- Ouais, ouais, désolé. Je ne pensais pas que t'étais de ce bord.

- Bah il l'est, maintenant dégage, je ne supporte pas les gens qui parlent mal de mes amis, crache Issam à son visage.

Il recule de quelques pas et ses amis s'empressent de prendre sa défense.

- Oh, doucement, il ne pensait pas à mal.

- Vous feriez mieux de partir, laissez-le se calmer, incite Meng. »

Ils obéissent et quittent les lieux tout en lançant des regards incompréhensifs en arrière. Une fois qu'ils ont enfin déserté les lieux, Issam semble reprendre son souffle et se laisse tomber sur son siège en fermant les yeux. Meng lui masse les épaules en lui murmurant de se calmer. J'observe la scène sans rien dire, assez inquiet, le garçon avait vraiment l'air d'être hors de lui. Meng finit par se rappeler de ma présence et se tourne vers moi.

« Désolé pour ça, Dorian et sa bande étaient au lycée avec nous, ils se croient tout permis.

- Pas de problème, je m'en fiche totalement de ce qu'ils peuvent penser...mais Issam ? Il va bien ?

- Ne t'inquiète pas, il est juste très impulsif.

- Je vais bien, je vais bien, me rassure le concerné en entrouvrant les paupières et esquissant un début de sourire.

- Si tu vas mieux, on ferait bien d'y aller, le prochain cours va commencer. »

Nous prenons donc nos affaires, descendons les marches et sortons de la salle dans le silence. Meng a le regard fixe sur Issam comme s'il le surveillait. Ils ne sont pas ensemble mais, Meng serait amoureux de lui ? Je ne sais pas. Une chose est sûre, il y a quelque chose de bizarre entre eux, même des meilleurs amis, aussi proches soient-ils, n'agissent pas ainsi. Ou en tout cas, je n'avais encore jamais observé ce genre d'amitié.

La journée passe plus rapidement que d'habitude bien que le jeudi soit souvent une de nos journées les plus chargées niveau cours. Peut-être est-ce parce-que j'ai un peu de compagnie ? Les publications nous mettant en scène tous les trois ont filé sur les réseaux dans la matinée mais se sont estompés après mon post du midi, « moi qui me plaignais d'être seul dans ma chambre, j'ai désormais deux colocataires » où j'ai identifié les deux garçons. Une fois la vérité mise au grand jour, cela s'est calmé malgré les nombreux commentaires de mes fans vantant la « chance » des garçons de vivre avec moi.

Ils seraient plutôt à plaindre d'avoir un colocataire toujours absent, paria et aux horaires décalés.

Les garçons m'ont invité à manger avec eux le midi et j'ai fais connaissance avec leurs amis, enfin ils ont plutôt l'air d'être ceux de Issam. Je n'ai pas beaucoup parlé mais manger entouré m'a fait du bien. Je suis ensuite parti de l'université pour faire un petit tour à l'agence et j'ai eu la surprise, à mon retour, de voir qu'ils avaient réservés une place pour moi dans la salle de cours.

C'est peut-être peu de choses mais je me sentais si seul ces derniers temps que toutes ses petites attentions me réchauffent le cœur et me font sourire beaucoup plus qu'à l'accoutumée.

« Tu bosses ce soir ?

- Non mais j'irai sûrement à la salle de sport après les cours, je pense rentrer vers dix-neuf heures trente.

- Tu y es allé ce matin ?

- Hm, mais j'ai un cours personnel ce soir.

- Ok, moi je bosse, il n'y aura que Meng dans la chambre.

Il a expliqué hier qu'il avait un petit boulot sans préciser lequel. Meng a dit qu'il l'aidait aussi parfois ou allait travailler avec lui.

- Au fait, c'est quoi comme boulot ?

- Hmmm, secret. On te le dira un peu plus tard, il y a trop d'oreilles indiscrètes ici. »

Je me contente de cette réponse, un peu étonné. Pourquoi un job étudiant doit-il être si secret ? Je suppose que j'en saurai plus tard mais cela me trotte dans la tête. Je suis une personne de nature curieuse et avec une imagination débordante. Quelles sont les raisons pour lesquelles ils souhaiteraient le cacher ? C'est illégal ? Je ne pense quand même pas qu'ils soient de ce genre-là. Cela doit juste être un métier peu brillant ou avec une mauvaise réputation et ils ne veulent pas que les gens le sachent. Quelque chose du genre, homme de ménage ou mascotte publicitaire ? Ce n'est pas tant la honte que ça, beaucoup d'étudiants le font. Je n'arrive vraiment pas à deviner.

Le dernier cours terminé, ou plutôt le long monologue du professeur sur le mode de vie des populations dans l'antiquité orientale enfin fini, pour notre plus grand bonheur, nous sortons enfin de cours. Je vais à ma voiture pour prendre le chemin de la salle de sport.

Une fois que mon coach se dit satisfait de moi, je file sous la douche, pressé de rentrer. Encore plus, en sachant que Meng est seul dans la chambre. J'enfile une tenue détente après m'être lavé et prend le chemin du dortoir. Tous ces allers-retours sont sûrement la chose la plus éprouvante dans mon mode de vie, j'aimerai pouvoir trouver une alternative à la voiture.

Lorsque j'arrive sur le palier, Meng ouvre la porte, me faisant sursauter.

« Désolé, je ne voulais pas te faire peur, je t'ai vu arriver depuis le balcon.

- Wow, bah moi je ne t'ai pas vu arriver pour le coup. »

On rit avant de rentrer à l'intérieur. Il était en train de finir de ranger ses dernières affaires dont il n'a pas eu le temps de s'occuper la veille.

« Oh, tu as un jeu d'échecs ?

- Oui, je joue pas mal aux jeux de société.

- Avec Issam ?

- Quand j'arrive à le forcer, oui.

Il est vrai que Issam a l'air très branché technologie, plus qu'autre chose.

- J'aime beaucoup ça aussi donc si tu veux faire des parties, hésite-pas à me proposer.

- Vraiment ? C'est génial ! Tu veux en faire une ce soir ?

- Je n'ai rien à faire alors pourquoi pas.

Je l'aide à finir de positionner des bougies sur ses étagères et un cadre coloré au-dessus de son lit puis nous nous installons pour une partie d'échecs avec des snacks et une bière chacun à côté. Alors que j'avance mon troisième pion, je me décide à poser la question qui me trotte en tête.

- Il fait quoi comme boulot, Issam ? Il n'a pas voulu me dire tout à l'heure car il y avait du monde autour.

- C'était une excuse bidon, s'amuse Meng, mais il semble mystérieusement se crisper à ma question.

Bizarre.

- Je peux savoir alors ?

- Hm, je préférerai qu'il soit là. Désolé de la jouer secret.

- Vous m'avez l'air quand même bien mystérieux.

- Comment ça ?

- Vous dormez collés l'un à l'autre sans être un couple, et vous n'êtes plus des enfants, vous semblez vraiment très proches même pour des meilleurs amis, il y a aussi le boulot d'Issam, et si j'ai bien retenu tu l'aides régulièrement avec, qui est secret. Suspect, non ?

Il rit, reconnaissant les faits.

- C'est vrai que l'on ne fait pas tout comme tout le monde. Ne t'inquiète pas, si on doit vivre avec toi pour la durée de nos études, on ne va pas te maintenir à part, on compte tout te dire dès qu'on aura le bon moment.

- Donc tu avoues quand même qu'il y a quelque chose.

- Je ne l'ai pas nié, en effet. Prépare-toi, ce n'est pas forcément un joli récit.

- Tu sais que je vais m'imaginer pleins de scénarios maintenant ?

- Roh, pire qu'une personne amoureuse ! Ne t'inquiète pas, Issam rentre vers vingt-deux heures, si il n'est pas trop fatigué, on en parlera tout à l'heure.

- Ok, ok.

- Mais avant tout, échec et mat ! »

Je râle en m'apercevant qu'il m'a vraiment battu et en très peu de coups. Est-ce que je suis nul ou est-ce lui qui est beaucoup trop doué ? Vu son air fier, je me déciderai pour la seconde solution. Il range le plateau pendant que je fais réchauffer notre repas, des nouilles dans de la soupe chaude. 

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