Meng.

Dix minutes plus tard, c'est fait. Issam et moi avons une nouvelle clé. Nous passons ensuite l'après-midi à déménager nos affaires et décorer un peu la chambre. Le coin utilisé par Dao est très propre et très rangé, peu personnalisé, on devine qu'il n'est pas souvent ici. Néanmoins le peu de décoration qu'il est pour le moins... Original. Nous collons des posters de nos groupes préférés sur les murs, quelques photos de famille pour moi en face de mon lit, en particulier de mes petites sœurs de neuf et treize ans qui vont beaucoup me manquer.

La chambre est vraiment sympa, Issam se vante d'avoir été « surclassé ». Nous avons chacun notre espace bien défini. Mon lit est dans un petit renfoncement, en face de celui de Dao, je peux donc l'observer à ma guise. Nous avons un petit balcon, plutôt étroit mais c'est déjà ça, la salle de bain est aussi petite et toute en longueur mais il y a tout le nécessaire. Il n'y a pas de cuisine mais un petit réfrigérateur, un micro-onde et un placard avec des couverts.

J'aime beaucoup cuisiner alors c'est sûrement le mauvais point mais tant pis. Il n'y a pas non plus de table haute, juste une table basse devant la baie vitrée avec trois poufs verts pour s'asseoir. Les rideaux sont aussi verts ainsi que nos lampes de chevet accordées, cela donne une bonne ambiance.

Le bois domine, nos armoires, nos lits, nos tables de chevet et nos bureaux en sont fait. C'est propre, c'est clair mais grâce à nos décorations, nos bazars déjà empilés sur les étagères, cela ne fait pas impersonnel. Vraiment, je m'attendais à bien pire pour une chambre dans un dortoir universitaire.

Dao a pris le meilleur lit, celui face à la baie vitrée, premier arrivé, premier servi. Issam a choisi au contraire celui près de l'entrée, peu éclairé car caché de la lumière du jour par deux armoires. Il est très sensible à la lumière et les rideaux n'ont pas l'air parfaitement occultants, cela évitera qu'il se réveille au premier rayon de soleil. Je ne peux donc pas le voir depuis mon lit, petite déception car je nous imaginais déjà papoter depuis nos lits tard le soir mais je me console par le fait que nos deux bureaux sont collés.

Le temps file à toute vitesse et lorsque nos amis partent, après avoir un peu bu pour fêter l'évènement, il fait déjà nuit. Et toujours pas de trace de Dao. Nous nous décidons à préparer le repas, nous avons acheté de quoi faire une salade en espérant pouvoir manger avec lui pour cette première soirée.

Dao.

Je quitte l'agence bien plus tôt que d'habitude, il n'est même pas vingt et une heure, c'est moi qui ai demandé à écourter avec comme excuse que mes nouveaux colocataires emménagent aujourd'hui. Je n'irai donc pas non plus à la salle de sport aujourd'hui, tant pis. Je me réjouis beaucoup de cette nouvelle, c'est comme l'espoir que ma solitude prenne fin. Meng a l'air d'être quelqu'un d'amical, en plus d'être mignon, et il s'annonce peut-être comme mon premier ami de l'université.

Une fois devant l'appartement, je galère quelques secondes à chercher mes clés parmi mes trois sacs. Où est-ce que je les aies encore fichu ? Avant qu'un visage n'apparaisse dans l'embrasure.

« Je t'avais dit que c'était lui ! s'exclame Issam à l'attention de Meng avant de m'ouvrir la porte avec un sourire en voyant que j'ai les bras pris.

Je me glisse à l'intérieur et laisse tomber mes bagages sur le lit.

- Wow, pourquoi autant de sacs ?

- Un pour l'université, un pour le boulot et un pour le sport, je m'amuse.

Je jette un coup d'œil à la chambre, appréciant la nouvelle décoration qui donne un peu de vie. Leurs parures de couette aux couleurs vives font un peu bien, à côté de la mienne couleur crème unie. Ils ont collés des photos, des posters un peu partout.

- Joli, la déco'.

- Tu aimes ? Désolés, on ne t'a pas demandé du coup.

- C'est chez vous aussi, peu importe si je suis arrivé plus tôt. Et en plus j'aime bien ce groupe aussi, j'avoue en montrant du doigt le poster au-dessus de l'un des lits.

- Vraiment ? C'est mon préféré, avoue Meng.

Je me félicite aussitôt intérieurement de mon commentaire.

- Tu as mangé ? Oh, si tu reviens du sport, tu veux peut-être aller te doucher ? s'inquiète Issam en commençant à sortir de la nourriture.

- Je n'ai pas mangé, et non, du coup je n'y suis pas allé, je ne voulais pas rentrer trop tard.

- Oh, fallait pas ! Tu rentres à quelle heure normalement ?

- C'est différent tous les jours mais rarement avant minuit, je finis souvent vers vingt-deux heures et après je vais au sport mais parfois, c'est bien plus tard.

- Wow, et tu fais comment pour les cours ?

- Je bosse en rentrant et je suis attentif en cours pour avoir le minimum à faire à la maison. »

On s'installe à table en continuant de discuter nos emplois du temps respectifs, je m'attendais à un plat préparé mais ils ont réellement cuisiné. Une salade composée avec du saumon, du riz froid, des tomates et des herbes. Ils m'avouent qu'ils ont appris à cuisiner ensemble, depuis tout petits.

« Nous avons quasiment vécu ensemble pendant notre primaire, collège et nos deux premières années de lycée, c'est limite si nos parents s'inquiétaient dès qu'on passait une soirée sans l'un ou l'autre.

- Du coup, on a toujours tout fait ensemble et mon père nous a appris à cuisiner tous les deux, explique Meng.

- Tout ça pour dire, n'hésite pas à te servir dans le frigo même si on n'est pas là ou si on dort, si on fait un truc c'est pour tout le monde.

- Merci, c'est sûr que ce n'est pas moi qui irais cuisiner. Ce serait un massacre.

- Chacun ses talents ! plaisante Issam.

- Après c'est dommage, du coup, qu'il n'y ait pas de cuisine dans la chambre, vous êtes limités.

- C'est sûr.

- Il y a une cuisine commune en bas, non ? Elle est toujours déserte mais on a le droit de l'utiliser, j'explique.

- Vraiment ? Je ne le savais même pas, avoue Issam.

- C'est un bon tuyau ! On ira explorer. »

Je profite de la soirée avec bonheur. Cela fait si longtemps que je ne m'étais pas posé comme ça, à manger avec d'autres personnes. Je veux dire, je fais des sorties au restaurant avec l'équipe de tournage, les autres acteurs, régulièrement mais ce n'est pas la même chose. Puis, bien que j'aie travaillé avec de nombreuses personnes, ils sont toujours pour rester des connaissances, des collègues ou des « potes » mais je n'ai jamais vraiment trouvé d'amis ici non plus. Je dois être assez compliqué à approcher ou je n'ose peut-être pas assez m'approcher des autres aussi.

« Cependant, il y a une question que je me pose, raille Issam en observant d'un œil mauvais mon coin de la chambre.

-Hm ?

- Pourquoi tu as un mannequin grandeur nature à côté de ton lit ? Comment tu fais pour dormir ?! Et pourquoi tu as les trois mêmes nounours ? Un ne suffit pas ? lâche-t-il d'un même souffle, les sourcils froncés.

Je ne peux m'empêcher de rire devant son air incompréhensif.

- Le mannequin, je l'ai récupéré d'un shooting photo, j'aime bien moi.

- Pas moi, réplique-t-il en mimant des frissons, heureusement que je ne le vois pas de mon lit, Meng, tu vas faire des cauchemars !

- J'avoue que c'est flippant, renchérit celui-ci.

- Je ne vois pas en quoi, ça me faisait un peu de compagnie, il est sympa, Robert.

- Il a même un nom... Définitivement, ça fait peur, frémit de plus belle Issam.

- Et pour les nounours ? rappelle Meng.

- J'ai participé à une petite émission où je devais aller faire les magasins, j'étais passé devant et j'avais dit que je le trouvais mignon, le surlendemain j'avais une rencontre avec des fans et trois d'entre elles me l'ont offert.

- Moi aussi, je veux des cadeaux gratuits par de jolis filles, se plaint Issam ».

Nous rions de sa remarque avant de reprendre nos occupations. La soirée s'écoule tranquillement, après manger, nous nous installons à nos bureaux pour travailler et nous nous douchons chacun notre tour. Je tourne des scènes très importantes en ce moment, je profite donc d'être rentré plus tôt pour réviser mes scripts jusqu'à minuit environ. Je décide ensuite, en voyant que je suis le dernier debout, de me coucher tôt, pour une fois. Enfin, ce que j'appelle tôt. Le week-end qui arrive va être très éprouvant alors se reposer pendant que je le peux, c'est le mieux à faire.