Chapitre 4

Meng. 

Puisque nous n'avons pas cours de l'après-midi, nous avons prévu de déménager mes affaires tous ensemble dans mon nouveau dortoir. C'est le même que Issam et normalement, je vais même partager la même chambre que lui. Son colocataire est désagréable et encore moins organisé que lui (et il faut être doué pour ça) alors il a demandé à échanger. J'ai dormi à l'hôtel cette nuit et mes affaires sont stockées dans un local dédié car tout c'est passé au dernier moment.

Il y a un peu moins de deux ans, j'ai déménagé assez loin d'ici et j'ai été séparé de Issam et mes autres amis du lycée pour ma dernière année. J'ai passé mon diplôme dans cet autre lycée mais j'ai toujours vécu ici et même si j'ai rencontré des gens sympas dans ma nouvelle ville, je ne me suis pas senti chez moi. J'ai donc demandé à mes parents de revenir là pour l'université, en sachant que je pourrais obtenir une chambre universitaire pour très peu cher avec les bourses. Mes parents ont accepté mais j'ai envoyé mon dossier un peu tard et la faculté l'a pris pour une erreur car mes notes étaient suffisantes pour rentrer dans un établissement bien plus prestigieux d'après eux et ils n'ont pas cru que mon premier choix était ici.

La situation a mis du temps à s'éclaircir et le temps que ce soit fait, c'était trop tard, toutes les places dans la filière souhaitée était prise. J'ai donc dû me résigner à faire ma rentrée ailleurs, avec des options qui me plaisaient moins. Finalement, on m'a contacté il y a deux semaines pour me dire qu'une place s'était libéré et qu'il n'était pas encore trop tard pour venir ici. Le temps de régler les papiers et me voici.

Cela a été plus éprouvant et je suis vraiment soulagé que ce soit enfin fini. Faire sa rentrée plusieurs semaines après les autres, c'est plutôt compliqué mais la direction m'a assuré qu'avec mon dossier et mes compétences, je n'aurais aucun mal à rattraper mon retard. Je compte bien travailler sérieusement pour ça, ça ne m'effraie pas, j'ai pas mal de facilités.

Nous arrivons au dortoir, on nous a assuré qu'il restait quelques places et que le changement de chambres serait donc possible. Je me dirige vers l'accueil avec Issam, les autres ont eu l'amabilité d'aller chercher mes affaires au local et ils nous rejoindront ensuite. Un homme d'une quarantaine d'années nous accueille, tatoué et aux muscles débordant du tee-shirt, il est plutôt effrayant. Mais son visage se transforme en un immense sourire lorsqu'il reconnaît mon ami.

« Issam, tu vas bien, mec ?

- Super bien ! Et toi, Arnaud ?

- De même, de même. Qu'est-ce qui t'amènes ? s'enquiert-il en levant son regard sur moi.

- Mon ami emménage ici aujourd'hui, nous avions demandé à être dans la même chambre vu que je ne m'entends pas avec mon colocataire et nous avez dit que c'était ok.

- Oh, je vais regarder ça de suite, comment tu t'appelles ?

- Meng Hachirat.

- Meng, Meng, Meng, répète-t-il en faisant défiler l'écran de son ordinateur à toute vitesse.

Nous patientons tranquillement le temps qu'il réunisse tous les papiers et en imprime quelques autres.

- Alors toute la paperasse c'est surtout pour les assurances, le payement et ce genre de chose. Je vois que tes parents sont les garants alors je te conseille plutôt de leur envoyer ou de leur donner tout ça, ça leur sera plus utile à eux. En revanche, j'ai un petit problème pour la chambre.

- Comment ça ?

J'échange un regard inquiet avec Issam, nous espérions vraiment pouvoir être ensemble. On se connaît depuis tout petits et devenir colocataire était plus ou moins un rêve.

- Il ne reste plus que deux places dans tout le dortoir. Elles sont dans une chambre pour trois. La logique voudrait que je place ton ancien colocataire, Maxime, dans cette chambre pour que vous puissiez garder la chambre de Issam, vous suivez ?

- On suit !

- Mais la direction est contre car le statut du garçon de cette chambre est un peu spécial et ils ne veulent pas le déranger, surtout avec un colocataire réputé de la mauvaise façon comme Maxime.

- Pourquoi ? Il est malade ?

- Je ne sais pas, ce n'est pas précisé.

Nous poussons un long soupir et Issam se tourne vers moi.

- Au pire, on prend la chambre de trois ? Peu importe qu'il y'ait une autre personne, tant qu'on peut être tous les deux.

- Bonne idée, on n'est pas trop chiants en plus, ça sera toujours mieux que Maxime.

- C'est bon si on fait comme ça ? demande Issam à Arnaud.

Celui réfléchit et appelle finalement ses supérieurs, nous confiant que la vice-directrice semble vraiment apprécier ce jeune homme et qu'il ne veut pas la mettre en colère. Au bout de quelques minutes, il raccroche.

- Elle aimerait que vous lui demandiez son avis d'abord.

- Ok, c'est quoi son nom ? On va monter voir à sa chambre s'il est là, propose Issam.

- Dao Greshun.

- Dao, Dao ? Le Dao ? j'interroge mon meilleur pote.

- Ouais, le fameux !

- Vous le connaissez ?

- Oui, pas la peine de monter à sa chambre, il n'est pas là mais j'ai son numéro de téléphone, on va voir pour l'appeler et on revient vers toi après. »

Nous nous éloignons pour rejoindre les fauteuils de l'entrée où nos amis patientent, arrivés depuis peu. On leur explique la situation en détail.

« C'est le destin ! s'amuse Hansa.

- Ne commencez pas, je grommelle.

- En vrai, ça tombe bien, tu l'as dit toi-même, il a l'air sympa mais personne ne l'approche à cause de son job. Si on devient son colocataire, on ne pourra rien nous reprocher, affirme Issam.

- Encore faut-il qu'il accepte ! Il a l'air plutôt solitaire, réplique Julian, peu convaincu.

- On ne saura pas tant qu'on n'aura pas demander, heureusement que tu as pris son numéro, Meng. »

J'opine et dégaine mon téléphone. Je clique sur le petit contact affichant le prénom Dao et porte l'appareil à mon oreille, priant pour qu'il décroche, tant que nous n'avons pas son accord, nous ne pouvons pas emménager et je n'ai pas envie d'y passer la journée. Trois sonneries s'enchaînent sans que rien ne se passe et je m'apprête à raccrocher lorsque que quelqu'un me répond enfin.

« Allô bonjour ?

- Bonjour, je suis bien sur le téléphone de Dao ?

- Oui, je suis son manager, qui êtes-vous ?

Ah ouais, genre le gars ne décroche même pas lui-même le téléphone.

- Je m'appelle Meng, je suis dans sa promo, j'ai besoin de lui parler d'un truc urgent, c'est possible de l'avoir ?

- Attendez cinq secondes, il vient juste de finir une scène, je vais lui demander.

- D'accord.

On me met en stand-by, cela sonne tellement formel que je m'attends limite à entendre une petite musique d'attente se mettre en route. Je me tourne vers mes amis.

- C'est le manager de monsieur qui a décroché, j'attends de savoir si monsieur accepte de prendre mon appel, j'informe moqueusement.

Ils éclatent de rire et échangent quelques blagues alors que je me reconcentre sur le téléphone. La voix de Dao ne tarde pas à arriver à mes oreilles.

- Meng ?

- C'est bien toi cette fois ?

- Ouais, désolé, je ne pouvais pas décrocher alors Jérôme l'a fait pour moi.

- Pas de problème, désolé de te déranger mais c'est assez urgent.

- Qu'est-ce qui se passe ? C'est pour les cours ?

- Le dortoir. De base, je devais emménager avec Issam dans une chambre à deux et plus ou moins virer son colocataire qui est bordélique mais les seules places restantes sont dans ta chambre alors ça voudrait dire que tu te coltinerais le bordel.

- Aïe. Pas cool.

- Je sais et la direction est contre de toute façon donc on a essayé de trouver une autre solution.

- Et ça donne quoi ?

- On voulait te demander si on pouvait emménager avec toi ? On sait se tenir et ça soulage tout le monde. Je me doute que t'as peut-être pas envie d'être envahi mais on ne voit pas comment faire sinon.

Je croise les doigts et tout le monde fait de même à côté de moi. Je passe le téléphone en haut-parleur pour que tout le monde puisse entendre la réponse.

- Bien sûr, il n'y a pas de problème, ce n'est pas moi qui aie choisi de ne pas avoir de colocataires mais la direction, je préfère même, ça fera de l'animation.

- Sérieux ? Tu nous sauves la vie, mec !

- Vraiment, pas de problème, de toute façon, je suis souvent absent.

On entend crier derrière lui.

- Je vais devoir y aller, tu veux que j'envoie un message au dortoir pour les prévenir ?

- Ouais, ça serait génial, qu'on puisse emménager direct.

- Je m'en occupe direct, je raccroche, salut ! »

Je n'ai pas le temps de répondre qu'un clic se fait entendre, il a raccroché, visiblement pressé. On est déjà plutôt chanceux d'avoir réussi à l'avoir alors qu'il est au travail. Nous retournons voir Arnaud pour l'informer, il nous encourage à commencer à monter les boîtes devant la porte en attendant le feu vert pour qu'il nous donne les clés. 

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