La beauté des éclipses
C'est bon. J'ai la stricte interdiction de sortir du manoir tant que la situation dans laquelle je me trouve ne s'améliore pas un peu. Mais je n'ai plus besoin de rester au lit toute la journée, ce qui est pour ma part un bon point car je ne tiens jamais en place. Donc me voilà en train de vagabonder, comme à mon habitude, dans les vastes couloirs de la demeure, à la recherche de mon petit ami, qui est comme par hasard introuvable. Je soupire après avoir vérifié au moins cinq fois chaque recoins mais je n'ai trouvé nul trace de lui. Je décide d'abandonner.
Je reviens sur mes pas, la pièce que je viens de passer ayant attiré mon regard. J'ai cru apercevoir une silhouette pendant une demi seconde par la porte entrebâillée. Bien évidemment, la salle est vide quand j'entre dedans. Par contre, un superbe piano à queue se tient majestueusement à côté des grandes baies vitrées dont les lourds tissus des rideaux sont tirés, laissant la vue ouverte sur les bois alentour et laissant la lune, étonnamment brillante et ronde me baigner de ses pâles rayons. Mes doigts se posent d'instinct sur le clavier. Etant férue de musique dès mon plus jeune âge, mes parents ont eu envie de me faire plaisir en m'initiant au piano. Cet instrument m'a bien plu mais je ne pratique plus pourtant le magnifique meuble qui se tient devant moi m'attire, m'appelle. Je cède à l'envie et m'installe sur le siège qui me fait remonter pleins de souvenirs. Je teste les touches et me surprend à écarquiller les yeux d'émerveillement quand un son harmonieux s'en échappe. Je cherche une mélodie à jouer et en trouve une presque aussitôt. Je me rappelle du moment où mon père me l'a apprise, je l'ai trouvé tellement belle que j'en ai pleuré pendant des semaines. Je sais juste que les chanteurs sont japonais. J'inspire profondément, ferme les yeux puis commence à jouer. On va voir si j'ai tout perdu.
( Midnight pleasure en média version piano)
* Alors que j'entame les premières notes, une sorte de courant d'air vient me caresser la joue mais je n'y fais pas attention, me concentrant sur les mouvements de mes doigts sur le clavier*
Doko wo miteru
Où regarde tu?
Mono hoshigeni machi juu furafura
Le vertige des étoiles de la ville entière
* J'ouvre les yeux, reconnaissant cette voix entre mille mais je ne m'arrête pas de jouer pour autant, je jette un regard en coin pour apercevoir Ayato, ayant pris place sur la surface lisse de l'imposant instrument à corde*
Utsuroname wa marude Ghoul
Avec les yeux vides d'une ghoul
Sou konoyo wa fukusatsu kaikina reiya
Cette vie est pleine de meurtres complexes et mystérieux
* Mon regard converge bientôt vers le mur près de la porte où je peux apercevoir le plus jeune de la fratrie, adossé à celui ci et posant ses iris rouge sang sur moi*
Omae ga obieteru no wa jibun jishin no Saga
Consternée par ta propre saga
* Mes yeux se posent soudainement sur le sofa, envahissant le fond de la pièce et où l'ainé blond est apparu comme par magie. Je ferme de nouveaux les paupières tout en continuant de laisser mes doigts effleurer les touches et les trois garçons chantant chacun à leur tours*
Shita ga yakedo suru gurai
Sauf si tu utilises des épices
Supaisu wo kakete mo nan no ji mo shinai no
Qui n'ont pas de saveurs sur la langue
Shuen no hono
Les flammes de la mort
Tameiki tsuita
Avec un soupir
Isso ( 3fois)
Plus près
* Les trois vampires se mettent soudainement à chanter ensemble, leurs voix à l'unisson rendant le résultat merveilleux. Papa, tu ne me croiras jamais mais je vis avec les auteurs de la chanson qui a illuminé ma vie*
Saa tobikome Midnight Pleasure
Maintenant, nous allons simplement sauter dans le minuit de plaisir
Mezameta shin no sugata
Sache que ceci est la vraie forme
Koko wa risei no Graveyard
Du cimetière de la raison
Hitsugi no naka de
Dans un cercueil,
Crazy Deep Kiss
Avec un profond et fou baiser
Abakareta jibun no kao
Ton visage révèle ta vraie nature
Tsuki ga wareru hodo no Scream
Avec un cri qui brise la lune
Tobikiri no itami wo ataete yaru
Je donnerai cette fraude extraordinaire qu'on appelle amour
Je finis les notes restantes avant de faire face au regard vert de mon copain et de ses frères. Ils ne commentent pas mais me fixent pendant un long moment. Je peux lire dans leurs iris que cette musique ne leur est pas indifférente surtout pour le rouquin qui semble plongé dans ses pensées. Ou bien, est ce le lieu qui donne cet impression d'atmosphère pesante? En tout cas, le temps que je me pose cette question, le blond et le plus jeune se sont éclipsés laissant le plus âgé des triplet avec ma seule compagnie.
- Tu pourrais mieux jouer que ça.
Je relève la tête. Voici ce que j'appelle un " compliment" de sa part.
- Alors pourquoi es tu venu dans ce cas? Essayant d'employer un ton assez doux malgré tout.
- Cette pièce est remplie de souvenirs de cette personne.....
" Cette personne"? Se peut-il que ce soit ......
- Oui, Cordelia. Ma mère......Finit-il sur un ton plutôt froid.
Il saute soudainement du piano et se réceptionne agilement sur le sol.
- Je crois que je peux te confier ça maintenant.
- Que......De quoi parles-tu Ayato? Lui demandais-je, un peu confuse.
- Tais toi et laisse toi faire......
Ses paroles ont le don de m'angoisser plus qu'elles ne me rassurent mais je lui fais confiance car je l'aime et c'est réciproque. Mes paupières se ferment d'elles même quand la paume glacée d'une de ses main vient se poser sur mon front. Brusquement, un flux d'énergie puissant se déverse dans mon cerveau. J'ai le réflexe de crisper les lèvres en sentant une légère douleur germer dans mon crâne mais bizarrement, je n'ai pas peur. Le lien que j'entretiens avec lui est devenu si fort que je sais qu'il ne me fera jamais de mal.
- Je sais que c'est un peu dur à encaisser mais résiste.........Tu es la première à qui je vais montrer cela.
J'esquisse un sourire sans vraiment m'en rendre compte, trop occupée à maintenir la puissance en place. Je résiste encore un petit moment avant que tout s'arrête d'un coup.
Plus tard
Je me réveille hors de ma chambre. Je suis dehors, étalée sur l'allée centrale menant aux portes du manoir. Je me redresse et remarque de suite que le soleil est haut dans le ciel. Je trouve cela assez......étrange mais bon. Des voix retentissent soudainement, j'aperçois bientôt trois enfants, Ayato et ses frères, plus jeunes, s'amusant et riant dans le jardin. Mon sourire s'élargit à la pensée qu'il est très mignon quand il était encore un gosse mais je me fais tirée de mes rêves par une voix un peu trop familière à mon goût. Je tourne la tête dans cette direction et ne suis pas étonnée de voir la belle femme aux cheveux mauves s'avancer vers les gamins. Celle ci interpelle Ayato qui rapplique aussitôt.
- Pourquoi n'es tu pas dans ta chambre en train d'étudier?
- Mais, Mère. Je viens juste de finir.
- Retourne y de suite alors. Lance la femme aux yeux émeraudes à l'enfant sur un ton autoritaire.
- Non, je ne veux pas! Raito et Kanato peuvent s'amuser alors que moi, non. C'est injuste!
- Combien de fois t'ai je dit que c'est toi le prochain chef de famille donc tu te doit d'être le plus fort. Répète moi ce que tu dois faire.
Le jeune vampire baisse la tête, presque les larmes aux yeux.
- Je dois......Je dois être le meilleur en tout, surpasser tout le monde ou........ou je ne serais plus ton enfant .......et je me noierais dans le lac.....
- Très bien! Si tu as compris ça alors remonte dans ta chambre! Lui dit-elle sans ménagement.
Le petit s'efforce de ne pas montrer ses larmes et s'enfuit en courant en direction de l'entrée du manoir. Je le regarde partir, peinant à assimiler la scène offerte à mes yeux. Cette femme est juste trop sévère. Je commence à comprendre pourquoi mon vampire se comporte ainsi....
Me voilà dans un autre décor alors que je profitais de ce moment pour admirer le vieux bâtiment sous l'éclat des rayons du soleil. En effet, je fais maintenant face au lac bordant la propriété Sakamaki. Le spectacle auquel j'assiste et une pure torture mentale. Cordelia gifle violemment le garçon aux cheveux rouges puis le balance délibérément dans l'eau glaciale et à ce que je peux voir profonde car le gosse supplie sa mère de l'aider tout en essayant de garder la tête à l'air libre mais semble boire la tasse puis finit par disparaître dans le lagon. Je ne peux m'empêcher d'attirer mes mains sur ma bouche, incapable de bouger en voyant une horreur pareille. Comment ce monstre peut faire ça à son propre fils? Mes yeux se dirigent sur la mégère qui n'a pas bougé d'un cil et qui arbore même un sourire satisfait. C'est que ça l'amuse en plus! Un bref mouvement attire mon attention. Un homme vient d'apparaitre, il a des cheveux de couleur verte tirant sur le foncé et des yeux d'un rouge également foncé. Je me doute bien que ce mystérieux personnage à aussi suivi la scène des yeux sans manifester un quelconque intérêt pour le jeune garçon en détresse. Quel bande de salaud!
" Cet homme est mon oncle"
Je ne suis pas sure mais je jurerais que la voix d'Ayato en personne vient de résonner dans ma tête. Oui bon, bref. Ce gars est vraiment flippant, je préfère ne jamais le rencontrer. Alors que cette pensée dérive dans mon esprit, ma vision se trouble, je vacille puis tombe évanouie.
Quelques temps après
Je me réveille de nouveau. J'ai l'impression de ne faire que ça ces temps ci. Les draps de mon lit m'accueille une énième fois. Je me redresse tout en m'étirant et ayant encore le cerveau turbinant à fond. Je constate que mon fiancé officiel me tient compagnie. Il s'avance et m'aide à me lever. J'arbore un sourire triste à son attention après l'avoir remercié silencieusement. Je vois bien à son regard que le moment n'est pas propice aux disputes et pics cinglant de d'habitude. Je me contente donc de passer lentement mes bras autour de son cou et de l'étreindre autant que je le peux.
- Cela fait partie du passé alors .......passe à autre chose. Je sais maintenant que tu as vécu des choses pas forcement joyeuses et je peux t'avouer que ma vie n'a pas toujours été rose pour moi aussi.
Je le regarde dans les yeux, plongeant mes iris dans les siennes, celles ci pouvant me faire fondre à tout moment.
- Tu n'es pas seul.......Je suis là et je compte bien rester même si tu es insupportable quand tu t'y met.
Il garde le silence ce qui me met très vite hors de moi malgré tout.
- Me ferais-tu le plaisir de répondre ou on t'as coupé la langue?
Je ne sais pas ce qui lui a remonté le moral dans mes paroles mais ce qui est sure, c'est qu'il est de bonne humeur au point de me faire chier encore une fois.
- Suis-moi, Dit-il en m'empoignant l'avant bras et me tirant à sa suite.
- Ne dois-je pas interpréter cette phrase si poétique par " tu es emmerdante alors viens sans faire d'histoire"?
Il m'ignore de nouveau, ce qui détériore rapidement mon humeur et ce qui fait que je boude, les bras croisés quand on arrive finalement à destination. Mon regard se porte aussitôt sur une lourde porte en bois, nous faisant face et nous surplombant de sa hauteur. Le rouquin pose une main sur la plaque de bois.
- Ferme les yeux.
Je lui lance un regard interrogateur mêlé de méfiance.
- Tu me fais confiance , n'est ce pas? Rajoute t-il.
J'hoche la tête immédiatement puis prend la main qu'il me tend, lui, ayant un petit sourire en coin. Il m'attire contre lui et s'assure que mes paupières ne soient pas ouvertes. Je n'ai le temps de sentir un léger vent qu'il s'immobilise, du moins, je le sens.
La vue est juste magnifique! Devant moi se tiennent de magnifiques fleurs pourpres avec en décor d'arrière plan, un immense château éclairé par je ne sais combien de projecteurs.
- Je......C'est merveilleux......
Je n'ai pas d'autres mots. Je ne peux que le remercier à cet instant.
- Ce sont des fleurs d'éclipses, elles ne fleurissent qu'à la proximité d'une éclipse de lune et ne poussent que dans ce monde, le Makai ou comme tes semblables l'appelle, le monde des démons. M'explique t-il, affichant un sourire en me voyant heureuse.
Alors, c'est à ça que ressemble son habitat d'origine? Eh bien, il est très différent de ce que je m'imaginais.
Il me tire de ma réflexion en m'attirant à lui, arbore un sourire énigmatique puis dépose un baiser fougueux sur mes lèvres auquel je répond en y mêlant ma langue. On reste une bonne partie de la nuit dans cette position, le son doux du vent pour seule compagnie.
-...........Je t'aime, Naoka.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top