Chapitre 4 : La famille méprisante

Les mains enfouies sous l'un des oreillers du canapé, je peinais à me retourner difficilement sur ce dernier. L'inconfort de ma position m'obligeait à bouger sans cesse jusqu'à me blaser.

Mon souffle d'agacement me réveilla et tandis que je relevai mon corps habillé du long manteau d'hier, une question s'immisça dans ma tête :


« Qu'est-ce que je faisais dans le salon ? » 


Puis, tout en traînant mes pieds hors du sofa luxueux qui avait pris ma forme, j'ignorai la réflexion pensée et rejoignis la cuisine, une couverture posée sur mes larges épaules.

Mes yeux à moitié clos, j'allumai la pièce blanchâtre, m'obligeant à assumer mon éveil.

L'horloge indiquait sept heures quarante-neuf du matin.

Je levai les yeux en bâillant et me posai sur la banquette qui avait inauguré mon premier chocolat chaud. J'attendais que le temps passe, les bras posés sur mes jambes écartées.

Mais seulement deux minutes s'accumulaient au compteur.

Alors, je me levai en soufflant et reproduit ce bruit las, lorsque la chaleur de l'eau qui s'écoula du robinet forgé, déforma la peau de mes mains sous la pression.

Mon regard se perdit derrière la fenêtre qui encadrait un paysage tout aussi blanc que l'intérieur. Deux petits enfants couraient dans la neige poudreuse, arrachant des rires aux parents.

Un sourire crispé m'étira la joue droite. Les pensées envahissantes que je redoutais commençaient à jaillir.

Comment allait mon père ?

Quand est-ce qu'il pourrait sortir ?

Une multitude de questions m'angoissaient à son sujet, mais cessèrent quand des feux de route m'aveuglèrent.

Ma vue se brouilla et une silhouette se dessina à quelques mètres de moi.

L'amusement des enfants se stoppa, et une voiture inconnue se gara dans la propriété privée.

L'eau bouillante coulant à flots, la chaleur de ma chair se mélangea au froid de mes paupières quand je frottai furtivement celles-ci en tournant sur moi.

Puis, je fermai la manivelle suivie de l'interrupteur et quelques secondes plus tard, l'obscurité revint dans la cuisine.

Mais aucun bruit de moteur ne grondait.

L'individu était-il toujours arrêté devant ma maison ?

Alors, je me rapprochai du lavabo en m'accroupissant.

La voiture n'avait pas bougé. Mais personne n'était posté dans les alentours.

Mon pouls ralentit, mais à l'instant même où je pensais pouvoir retourner dans le canapé, une personne lâcha des râles depuis l'extérieur.

Mes yeux s'écarquillèrent. Mon souffle s'accéléra.

Un inconnu rôdait autour de chez nous et claqua le coffre de sa voiture.

La personne ne pouvait pas voir ma forme, mais je le perçus avec le jour qui se levait.

Je n'avais aucun doute sur le fait que c'était un homme.

Il sortit un énorme sac de l'arrière de sa voiture.

Il parlait tout seul...

Quand il disparut du paysage laissant ses affaires traîner au sol, j'ouvris à peine la fenêtre pour capter sa voix lorsqu'il reviendrait. L'air glacial me fouetta le visage, me faisant grelotter sur le coup.

Puis, il réapparut.

Cette fois-ci, tournant sur lui-même et insultant un téléphone :


« C'est fermé, je te dis ! Et ils sont bien dedans. Ça ne faisait pas partie du plan ! »


Mon angoisse s'intensifia. Mon nez et mes joues picotaient.

Est-ce que je devais monter pour prévenir ma mère ?

Appeler la police ?

Est-ce que je devais rester à écouter le plan de cet inconnu ?

J'étais complètement paralysée.

Mes pieds cloués au sol, je ne parvenais plus à bouger. Je n'osais même pas expirer par peur qu'il le perçoive.


« Oui, j'ai essayé de forcer la porte. Je te le répète : tout est fermé ! »


Hors de sa vue, je pressai mes doigts sur le cadre pour baisser un peu plus la fenêtre. Je plongeai ma tête dans la moumoute qui me recouvrait et produit une grande expiration de chaleur pour me réchauffer. Mais la peur de cette intrusion réveillait mes hormones.

Je commençai à transpirer.

Ma vue s'adaptait à l'ambiance de l'aurore.

Ma respiration s'entrecoupa plusieurs fois.


« Non, je ne sais pas pour leurs voitures. Il n'y en a qu'une seule. »


Et l'inconnu gronda.

Il se baissa et traîna un sac sur son dos, en avançant doucement. Mes joues s'humidifièrent et j'eus du mal à respirer.

Est-ce qu'on s'apprêtait à nous cambrioler, le lendemain de Noël ?

Est-ce qu'on allait me tuer ?

J'essayais de me calmer avec beaucoup de difficultés. Mon corps tremblait, mes jambes me brûlaient, je salivais de détresse.

J'entendis certains volets grincer, des coups de là et d'autres, des grincements...

Une personne était présente mais j'avais l'impression que toute la maison était encerclée.

Après tout, ils étaient peut-être plusieurs à différents endroits...

C'était peut-être ça leur stratégie ?

Ma couverture tomba quand je grimpai l'escalier. Ma chaleur corporelle m'empêchait de bouger convenablement, lorsqu'à mi-marche, je sentis une intrusion.

Le cambrioleur parlait doucement.

Je le sentis proche.

Je pleurai à chaudes larmes. Mon pied buta le rebord d'une marche et je plaquai ma main contre ma bouche pour stopper ma psychose et ma douleur furtive.

Intérieurement, je criai à cause de la douleur de mes orteils contre la marche en marbre. Les lèvres pincées, j'inspirai entre mes dents en serrant la mâchoire ; histoire de me concentrer sur les paroles de l'homme.


— ... Salon ? ... Coffre ? ... Voleur !


Je m'aidai de mes mains pour gravir le froid de la pierre et le bruit s'étouffa.

Je haletai, impuissante et pleurnicharde dans le couloir moderne et ouvris la première porte en manquant d'air.

Je pressai mes deux mains sur mon visage et étouffai mes pleurs, mon angoisse, mon incapacité à réagir, une fois barricadée à l'intérieur.

Puis une lumière s'alluma et un visage choqué aux cheveux bruns se releva de son oreiller.

Je perdais la tête !

Mon corps bouillonnait, la morve s'écoula de mon nez et des glaires m'obstruaient ma gorge.

Je voulais tousser, je le voulais !

Je n'avais plus prêté attention au rez-de-chaussée, ma panique avait gagné depuis longtemps !


— Qu'est-ce que tu fous là, Yu ? s'impatienta Amaël, sorti de sa couette.


Je ne répondis rien.

Les sanglots déferlaient toujours quand je me recroquevillai sur moi, assise dos à la porte.

Le jumeau d'Elias s'avança vers moi en bâillant puis se baissa. Il ne me touchait pas. Il m'observait silencieusement avant de me tourner le dos et me glisser une boîte de mouchoir jusqu'à moi.

J'attrapai un papier en tremblotant et me mouchai de façon nonchalante devant le futur avocat.

Je l'entendis rouspéter de dégoût quand je reniflai pour désengorger ma trachée.


— Tu vas me dire pourquoi tu es ici ?

— Je...


Mais les larmes perlèrent de plus belle. Je fermai les yeux pour lui dicter ma scène :


— Je me suis réveillée et j'ai vu que quelqu'un rôdait autour de la maison... et il est...


Amaël resta silencieux et marcha confiant en ouvrant la porte.

Il ne prêta pas attention au fait que je la bloquais, puis me poussa quand je le retins par le bras, les genoux contre terre :


— Non ! Il rôde toujours dans la maison !

— Arh ! Ne me touche pas ! cracha-t-il en défaisant mon emprise de lui, tout en plissant son visage.


Il ouvrit en grand la porte et marcha doucement en ignorant mes avertissements et mon angoisse.

Je le vis disparaître dans l'escalier marbré, depuis que je me cachai peureuse, derrière la porte.

Il réapparut dans la pièce en me toisant, mimant un doigt contre ses lèvres devenues fines et attrapa son téléphone.


— Bonjour, une infraction est en cours dans notre maison. L'individu est au rez-de-chaussée.


Amaël me chuchota de lui donner les détails qu'il transmit à l'officier.


— Parfait, je ne bougerai pas.


Et il s'allongea sur son matelas, le téléphone déposé sur l'épaule en m'ignorant avec un livre qu'il avait chopé sur son étagère.


— Dégage de la porte, et assieds-toi sur la chaise de bureau.


J'obéis.

Pour une personne à qui on annonçait un cambriolage, il paraissait plutôt calme.

Le temps passait, et alors que je me reprenais de mes émotions la tête dans les bras sur le bureau parfaitement rangé, une sirène grandissait de plus en plus, englobant le quartier du bruit sonore.

Je sursautai et vis Amaël fermer tranquillement son livre et parler à l'agent toujours en ligne :


— Parfait. Merci de votre intervention.


Il se leva, et je le suivis avec la boule au ventre. Le couloir était rempli des membres de la famille qui venaient d'être surpris par les bruits autour de la maison.

Loann traîna des pieds, marqué de son air grincheux.

Elias silencieux ne semblait pas inquiet.

Quant à Arman, son regard poché m'intrigua.

Quant aux trois femmes toutes vêtues de pyjamas en soie pastel, elles étaient partagées entre un sentiment de peur et d'incompréhension.

La sonnette résonna en écho jusqu'en haut de la cage d'escalier et je vis, tout en descendant d'un pas tremblant, Amaël ouvrir la porte en accueillant l'agent.

Personne ne comprenait la situation.


— Nous venons d'arrêter le suspect, monsieur Troblain.


Amaël lâcha une longue inspiration :


— J'ai compris. Vous pouvez le faire entrer ?


Je restai en retrait derrière ma mère qui m'enlaçait depuis le contact avec la policière.

Cette dernière acquiesça et disparut.

En attendant, ma pseudo-grand-mère, sa fille et ses fils ainsi que ma mère et moi restions pleins d'interrogations.

La boule à mon ventre ne voulait pas me quitter. J'étais terrorisée par ce qui se passait et ce qui pouvait arriver. Amaël donna des détails de façon négligée :


— Yu l'a vu et m'a prévenu, expliqua-t-il en gardant toujours le contact visuel avec sa mère qui commença à s'impatienter.


Et alors que la policière revint avec le cambrioleur, Loann lâcha des insultes et monta deux à deux les marches avant de claquer une porte.

Un grand homme aux cheveux roux et à l'allure soignée fit son entrée dans le hall, les mains menottées dans le dos.

Il portait un costard bleu marine sans cravate qui se cachait sous un long manteau noir et, baissait ses yeux encadrés d'une monture écaille, vers les pantoufles roses en fourrures d'Isis.

Cette dernière s'avança vers lui, l'air sérieux et les lèvres pincées et le toisa de haut en bas.

La blonde coiffée d'une charlotte lâcha un rire méprisant et le gifla d'un coup sec.

La claque me fit sursauter, les garçons encerclaient leurs mères et l'inconnu tandis que ma mère m'entraîna vers la cuisine.

De ce côté, je vis la peau blanchâtre de l'homme rougir dû à la marque de la femme.

Quand il s'apprêta à parler, elle le coupa :


— N'ose même plus approcher cette famille, Alain !

— J'ai apporté des cadeaux à mes fils, dicta-t-il rapidement, la tête toujours baissée quand il reçut une deuxième gifle, plus puissante que la première.


Il tourna la tête vers la direction du coup et laissa ses yeux traîner jusqu'à la cuisine.

Je croisai son regard rempli de tristesse et de honte.


_______________________________

Si j'étais à la place de Yu, je pense qu'Alain serait empalé à l'heure qu'il est... Je ne sais pas comment elle a fait pour voir ça se passer sous ses yeux. Et enfin ! Vous avez rencontré Amaël !!! Le beau Amaël... Rrrrr.


Vous le trouvez comment ?

Il est bien froid, bien distant, mais est-ce que c'est un badboy pour autant selon vous ?

Qu'est-ce qui le rendrait comme ça ? Et surtout, pourquoi ce calme face au cambriolage ? Comme s'il avait l'habitude...


En attendant, je vous laisse sur cette fin en vous retrouvant bien fou au prochain chapitre. Bon courage !


⚠️ PAS. DE. FANTASMES. SUR. LES. PERSONNAGES.

L'avancée des chapitres et des histoires est sur...

Instagram : allynnalf

04/01/23

(corrigée le 20/06/23)

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