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Ils avaient fini par ranger le restaurant ensemble, Jeongguk avait passé le dernier coup de serpillère tandis que Park s'agitait derrière le bar. Ils discutaient à mi-voix et Jeongguk le faisait rire plus fort, si fort qu'il avait cette tendance à s'accroupir ou à faire céder les liens de son corps comme un pantin et disparaissait derrière le comptoir dans un couinement propre à ses éclats.

Et puis le chef Park leur servit une infusion, ils s'assirent près du bar et discutèrent comme si la nuit n'existait pas. C'était comme s'ils se complétaient encore une fois. Alors que Park Jimin riait se cachant derrière sa main et en se couchant pratiquement sur Jeongguk, ce dernier riait avec force, la tête jetée en arrière et la bouche grande ouverte. Alors que le chef le charmait de fausse naïveté, Jeongguk jouait le contrôle derrière ses mordillements de lèvres. Pourtant, il ne maîtrisait rien du tout, mais s'aimait à le prétendre.

"Comment va votre genoux ? Le gel fonctionne bien ?"

Park Jimin savait parfaitement ce qu'il faisait lorsque sa paume chaude se posa sur le jean du jeune homme.

Jeongguk eut envie de sourire, se retint, souffla : Ça va en nageant dans l'intention de Park. Ce dernier ne retira pas sa main, joua avec les fils de la matière trouée en caressant malencontreusement la peau du jeune homme.

C'était dur de savoir où poser ses yeux alors que sa veste blanche avait pris du lâche et dévoilait un peu plus son haut près du corps. Ses lèvres avaient gonflé avec la chaleur de la tasse et de l'eau. Alors il les laissait papillonner un peu partout et scintiller.

"Alors vous croyez à la destinée ?", lança Park une fois que Jeongguk eut fini de lui parler de Rena et de leur première rencontre hors du commun. Ils avaient glissé sur le verglas de Tsukiji au même moment, de la même manière, à quelques mètres l'un de l'autre et sans personne autour. À ce moment-là, tous les sens de Jeongguk avaient pétillés et il avait cru à cette destinée. D'autant plus qu'après s'être réconforté d'un chocolat chaud au Layla's, ils s'étaient entendus comme des frères et sœurs. Après avoir raconté cela, Park avait envie de rire mais attendait patiemment la réponse du noiraud.

"Pour être- pour être sincère, je pense que la vie des gens est déjà écrite."

Park Jimin haussa un sourcil, les joues rebondies par l'amusement.

"OK, alors ne vous moquez pas OK ? Mais- Mais j'ai déjà eu des rêves de déjà-vu ? Et j'ai vu des trucs vraiment super clairs que je re-voyais après dans la vie, la vraie vie. Ne riez pas, c'est la vérité ! Ça m'est arrivé plusieurs fois !"

"OK, OK, je me moque pas, c'est juste que j'y crois pas vraiment."

"Vous avez aucune magie, aucun romantisme en vous.", râla Jeongguk.

"Car en plus vous croyez aux âmes sœurs ?"

Le noiraud s'offusqua :

"Evidemment ?"

"Vous pensez que dans le monde, il y ait une personne faite pour vous où vous vous complétez l'une et l'autre ?"

"Non... pas vraiment, je pense qu'on en rencontre plusieurs dans notre vie, parce qu'on change tellement, on est jamais le même, alors on rencontre plusieurs âmes sœurs, qu'elles soient amicales ou romantiques."

Park hocha la tête, il piquait un peu du nez depuis quelques minutes.

C'était plutôt ironique que Jimin ne soit pas un grand romantique. Jeongguk, de son côté, derrière le son des scies, le flot des mots, les lacérations dans la tendresse avait entendu le carillon lorsque leurs yeux s'étaient croisés pour la première fois. Il avait peut-être toujours idéalisé l'amour dans les livres et ses personnages animés, mais croire en sa moitié n'importe où, nul part, ça faisait palpiter son cœur plus fort.

Il frissonnait parfois, quand Park Jimin lui parlait, soufflait quelque chose, riait de lui et pour lui. Il pense que ce qu'il aimait le plus et ce qu'il l'embarrassait tout autant, c'était lorsque le chef parlait de lui. Lorsqu'il lui avait demandé un deuxième makimono, à la bouchée de son caprice puis une fois que le chef avait sondé l'appréciation de son âme, ce dernier lui avait dit "Vous savez, je pensais que c'était dû à toutes les lumières à Toyosu, mais en réalité, vous avez vraiment la Voie Lactée dans vos yeux.". Alors, il aurait trouvé ça sirupeux et presque lourd si c'était venu de Haru, mais une réelle sincérité s'était mêlée à ces mots, et Jeongguk avait fondu comme l'umami sur sa langue.

"On devrait probablement aller se coucher.", murmura le noiraud comme s'il avait peur de réveiller la tendre somnolence du chef.

Ce dernier hocha la tête.

"Probablement. C'est mon jour de repos demain mais je crois que je peux pas tenir plus longtemps."

Ils enfilèrent leur manteau et le restaurant s'éteignit définitivement pour la nuit. Jimin le conduisit jusqu'au distributeur et remboursa les crevettes sous les protestations de Jeongguk.

"Aaah, arrêtez, arrêtez, vous méritiez ce repas !", il fourra les billets dans la poche de sa veste et appuya sur le bouton pression pour que Jeongguk n'aille pas les rechercher. "Nah, voilà, à vous. Vous allez dans quelle direction ?"

"Je suis en repos demain matin aussi, je vais appeler un taxi ou marcher un peu jusqu'à chez moi.", finit par dire Jeongguk après un soupir, la poche boursouflée.

"Shin-Koiwa c'est ça ?"

"C'est ça.", il avait alors une mémoire du détail. Ou bien, tout comme le noiraud, il attrapait toutes ces petites informations qui concernait l'autre pour mieux construire son homonyme onirique.

"Je vais pas vous faire marcher jusqu'à Shin-Koiwa, je vous dépose."

"Il y a vraiment aucun problème, j'ai l'habitude, et puis si je fatigue, je prendrais un taxi."

"Jeon-san, j'ai une voiture avec siège chauffant qui nous attend paisiblement, laissez-moi vous déposer."

Même si les températures ne justifiaient pas l'appât du gadget, Jeongguk finit par accepter. Park Jimin suffisait à le charmer comme un serpent, et les bonne nuit échangés sous la lumière d'une Porsche étaient l'essence même de ses rêves.

Jeongguk n'aurait jamais osé, mais Jimin lui avait demandé son identifiant Line en le déposant devant son immeuble. Depuis, les jours où ils ne se croisaient pas au marché, attirés à des pôles opposés, l'un ou l'autre envoyait un court message.

Néanmoins, Jeongguk ne laissait aucun espoir s'infiltrer dans ce début de quelque chose. Peut-être qu'il avait un peu peur, de ne pas être sur la même longueur d'onde, où de n'être qu'un jeu, un amuse bouche pour le glouton qu'était Park Jimin. Car le noiraud le remarquait bien au marché : après les avoir charmés, Monsieur Park avait dévoré tous les poissonniers en y laissant aucune miette. Toyosu était enroulé autour de son petit doigt et Jeongguk était loin d'en être l'exception. C'était peut-être ce qui le terrorisait d'ailleurs, il n'était qu'un regard parmi d'autres. Il n'était qu'un contact de plus dans un océan de messages. Qu'un poissonnier de Toyosu.

Mais en réalité, les matins de marché qui étaient tristes de mots, où ils s'échappaient à l'un l'autre sans le vouloir, se faisaient de plus en plus rares. Jimin traversait cette distance que leurs deux univers creusaient ; il ne manquait jamais de venir le voir lorsque Jeongguk n'était pas au rendez-vous pour le servir. Il se permettait de traverser quelques stands, braver un raccourci bordant ce ballet de machines que le noiraud eut connu à Tsukiji, tout pour retrouver le plan de travail oublié où Jeongguk nettoyait d'autres poissons.

Il montrait le bout de son nez dans une fausse timidité, enveloppé dans davantage de tissu à mesure que les matins passaient. Pourtant ses mains étaient toujours chaudes quand elles trouvaient perchoir sur le corps de Jeongguk.

Le noiraud était même retourné au restaurant, pas pour un nouveau repas, mais parce que Jimin expérimentait, voulait lui faire goûter un autre riz, un autre mélange martelé par le tribunal de ses papilles. Jeongguk était honoré d'avoir intégré le barreau du gustatif et peut-être que grâce à cette nouvelle étiquette, de nouvelles portes cédaient.

Par exemple, les phrases perdaient de leurs nœuds à mesure que les deux hommes se voyaient, s'envoyaient des messages. Jimin faisait tomber petit à petit les marques qui n'étaient que distance à ses yeux, Jeongguk s'y accrochait par grand respect mais aussi par peur de s'illusionner. Et les yeux de Park Jimin s'adoucissent.

Ce dernier faisait une pause entre le service du midi et celui du soir alors, une porte s'était ouverte lorsqu'il avait emmené Jeongguk faire une courte balade, une excuse pour pouvoir défaire ces valises de mots frustrés par Toyosu. C'était la fin de journée pour le noiraud, l'idéal d'une sieste pour le chef, mais chacun sacrifiait un peu de carnation pour se voir. Le doux message "Balade ?" s'affichait de plus en plus sur l'écran fissuré de son téléphone, et, dans une même vague, il n'était lui-même qu'un écran d'affection.

Il se demandait si Jimin savait tout ce qui tourbillonnait dans son ventre.

S'il savait que ses remarques faussement dragueuses ne l'étaient pas vraiment.

Que ses accès de masculinité cachaient l'envie de se prouver.

Que ces moments où il faisait le clown pour le faire rire, la chaleur faisait bouillir son ventre et picotait la peau de son cou.

Et si les sourires amusés de Jimin voulaient dire quoi que ce soit, c'était bien qu'il en savait un peu.





Park Jimin

[https://tabelog.com/tokyo/A1307/A130703/13155232/]

je veux t'emmener là

jeudi midi ?

si tu as envie

ça me ferait très plaisir

Vous

oh

ça aurait été avec plaisir mais ils ont besoin de moi jeudi alors ma journée de repos saute :/

Park Jimin

(・'ω'・)

comment tu es censé te reposer si tu as aucune journée de repos.............

et juste une fois que tu es sorti ?

je viendrais te prendre à toyosu et on file directement

Vous

à qui le dites vous :p

je sais pas... il faudrait que j'aille me changer chez moi d'abord histoire de sauver nos capacité olfactives

Park Jimin

tu sais bien que je m'en fiche

Vous

parce que vous êtes trop poli pour dire quelque chose

Park Jimin

si ça t'arrange (눈_눈)

je peux venir te chercher, je te dépose chez toi, tu prends une douche fissa et hop tu remontes et on va manger ?

Vous

vous êtes prêt à tout

Park Jimin

oui.

Vous

...

ok

j'accepte le plan avec douche

Park Jimin

YES

et Jeongguk

Vous

hm ?

Park Jimin

si tu me tutoies pas pendant le repas je te scalpe.

Peut-être que dans ces moments-là, il se sentait un peu spécial.



Il avait forcé Jimin a ouvrir toutes les fenêtres de la voiture pour que l'odeur ne s'imprègne dans son luxe et alors, Jimin avait râlé, affirmant qu'il s'était coiffé pendant une heure et que tous ses efforts pour être beau (pour lui ?) allaient être ruinés. Jeongguk avait murmuré une excuse derrière son sourire et Jimin en avait retenu un pour rester dans le personnage.

Jimin était différent les jours de repos. L'histoire d'un jeudi, les bijoux qu'il effeuillait retrouvaient leur joyau. L'homme s'ornait de larges anneaux aux oreilles, de bracelets bruyants autour des poignets et d'épaisses bagues qui frottaient le cuir du volant à chaque manœuvre. Il scintillait comme la plus belle des pierres.

"Comment ça s'est passé ce matin ?"

"Bien bien, comme d'habitude."

"Tu as faim ?"

Jeongguk hocha la tête avec un petit sourire lorsque Jimin lui lança un regard.

"Parfait. J'espère que tu vas aimer, une amie m'y a emmené la dernière fois et j'ai vraiment trouvé ça magnifique, y'a une ambiance super posée et féérique."

"Ah oui ?"

"Hmm, tu verras. Je prends à droite ici où c'est après ?"

"Ici, c'est plus rapide."

Alors, il avait installé Jimin sur le canapé avec un verre d'eau et s'était enfui prendre une douche. Lorsqu'il avait émergé dans une entrée de théâtre, sa fumée et son spectateur, Park Jimin l'avait longtemps observé, ses propres bijoux qui se reflétaient dans les siens, ses cheveux humides qu'il avait détaché pour cette fois, son rictus plus confiant qu'il y a 5 ans, 3 mois, quelques jours. Dans une niaiserie, ses doigts nerveux mais amoureux avaient coincé une mèche derrière son oreille, Jimin avait rit, lui avait dit qu'il était beau, tout avait implosé dans sa poitrine.

Le café-restaurant était comme perché dans les arbres. Les plantes, l'écorce et le bois commençaient dans les tables et finissaient dans le plafond. Les feuilles et bourgeons accordait au tout une touche de couleur. Jimin semblait si content de l'emmener ici qu'il vérifiait sa réaction à chaque nouvelle plante découverte et peut-être que sans s'en rendre compte, Jeongguk offrait la meilleure des réponses puisque le chef se léchait les lèvres dans un rictus satisfait.

"Comment sont tes pâtes ?" Jimin demanda avec un coup de menton curieux vers l'assiette du garçon.

"Trop bon."

"Hm. Tu me fais goûter ?"

Si au lieu de prendre sa fourchette, Jimin entrouvrit ses lèvres, ça ne fit absolument pas vibrer le noiraud, pas le moins du monde.

"Hm. Effectivement, je prendrai ça la prochaine fois."

"Tu veux échanger ?"

"Non, t'en fais pas."

"Sûr ? Ça me dérange pas.", Jeongguk commença déjà à soulever son assiette mais Jimin agita sa main devant lui.

"Non, non, c'est parfait comme ça, les miennes sont très bonnes aussi. Tiens, goûte."

Et peut-être qu'il se sentait pousser des ailes mais, il ne fit qu'entrouvrir les lèvres lui aussi et Jimin avait la plus belle des expressions. Ils avaient pu se mettre en terrasse à l'ombre d'un large chêne et il n'y avait presque que des couples autour d'eux. Il y avait quelques regards qui glissaient sur leurs attentions, Jeongguk se demandait si eux aussi, ils pensaient être entourés que de couple. Jimin et lui étaient les imposteurs dans le jardin de romance, ou peut-être pas encore, pas tout de suite, il ne savait pas, mais Jimin parlait et sa voix nasale l'ensorcelait.

Il tirait Jeongguk hors de sa zone de confort, comme tous ses sucres de cœur l'avaient fait, appelait à cette folle capacité de ne plus douter autant de ses rires, de ses mots et même si une fois rentré il s'endormait mortifié, sur le moment, c'était un sentiment si grisant.

Peut-être pas aussi grisant néanmoins, que la main de Jimin posée contre la chute de ses reins lorsqu'il le suivit hors du restaurant. Mais légèrement plus grisant que la vrombissement de la Porsche que Jimin lui laissa conduire jusqu'à chez lui.

Jeongguk, une fois garé devant l'immeuble, lui avait partagé ses sensations des étoiles dans les yeux, ce qu'il avait ressenti avec tous ces chevaux sous la pédale, et Jimin l'avait écouté puis avait soufflé : "Tu sais que tu as un léger cheveu sur la langue quand tu es excité ? C'est mimi." Le noiraud avait eu envie de l'embrasser.

Mais Jimin avait dû reprendre sa place de conducteur et Jeongguk gagner de précieuses heures de sommeil, alors, ils s'étaient enlacés sur le trottoir avec un peu plus de corps que la fois d'avant. 

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