chapitre quatre, a man's world




your girl is a soldier and her mouth tastes
like fear and blood, dust, fire : home and battlefield

















Troisième jour de la deuxième lune de l'an 129

DES SERVITEURS
devaient encore dormir lorsque Lyssa émergea de ses appartements, déjà apprêtée, mais si cela ne tenait que de sa volonté, la lady dormirait jusqu'à ce que son corps devienne poussière. Pourtant, la jeune Strong avançait, se détournant de son chemin habituel vers le bois sacré pour marcher jusqu'aux grands jardins du Donjon. Si ses prières étaient entendues, elle ne croiserait personne.

Elle ré-ajusta le chale sur ses épaules à la rencontre d'une ouverture vers l'extérieur, le temps était encore doux mais la fraîcheur de l'aurore menaçait tout de même ses bras dévêtus. Même seule, Lyssa se retenu de bailler, l'effort fut important compte tenu du peu d'heures où elle était parvenue à trouver le sommeil.

La veille, une réception avait eu lieu en pour l'anniversaire des jumeaux d'Aegon et Helaena : Jaehaerys et Jaehaera. Cela avait alors été la parfaite occasion d'annoncer ses fiançailles avec Aemond, et marqué désormais le compte à rebours d'ici son mariage qui se tiendrait dans deux semaines. Lyssa ne savait vraiment décrire tout ce qui se passait dans sa tête depuis que la reine avait pris la parole et annonçait leur union.

C'était ancré dans le réel, et dans les regards de tous sur elle.

La principale réaction avait été le choc et cela avait donné lieu aux murmures. Très vite, Lyssa s'était sentie galvanisée par tous ses regards, Aemond n'avait pas eu le même traitement, il était le prince et était vu et observé chaque jour depuis sa naissance. Pour la cour, elle était une nouveauté, qui plus est une nouveauté Strong. Mais Lyssa avait fini par revenir dans sa chambre, et tout était brusquement retombé et c'était la panique qui l'avait saisi au vol.

Tous ces regards, rivés vers elle, ils gravaient le danger sur sa peau. Comme on avait tant épié Harwin avant qu'il ne meure, condamné par le fait que le monde l'avait vu, et pourchassé. Bientôt, elle rejoindrait la famille royale, et Lyssa savait qu'elle n'aurait la chance de l'erreur. Tout le monde attendrait qu'elle échoue pour la dépecer.

Mais cela ne servait à rien de se questionner et se tourmenter au beau milieu des couloirs. Lyssa chassa tout cela, qui devait lui faire froncer les sourcils depuis tout ce temps et même cela ne lui était plus permis. On ne pouvait la voir inquiète ou préoccupée. Ses fiançailles avec le deuxième fils du roi venaient d'être annoncé : elle devait rayonnée et n'être uniquement préoccupée par l'impatience de l'épouser. Cette réflexion manqua de la faire rire.

Elle approchait enfin de l'entrée des jardins et elle fut surprise par une légère révérence de la part des gardes présents. Elle n'avait plus connu ce respect depuis qu'elle avait quitté Harrenhal si tant est qu'elle s'en souvienne réellement. Lyssa avait surtout gravé le souvenir de toutes ses révérences qu'Harwin lui accordait dès qu'il lui rendait visite.

Cette once de reconnaissance lui fit étrangement du bien mais étrange puisqu'elle la savait teintée de la déception qu'on la lui gratifiait de par le nom qui serait bientôt le sien et non pour elle. Cela changerait bientôt, se promit-elle.

Elle dépassa rapidement l'entrée pour s'avancer dans les jardins qui dénotaient encore plus que le bois sacré de l'aspect lugubre du Donjon rouge. Elle se croirait presque à Haut-Jardin comme cela, et dans cette pensée, elle s'imagina enfin un peu seule, invisible de tous à un autre endroit que dans l'obscurité de sa chambre. Après quelques minutes à déambuler, Lyssa finit par s'approcher d'un banc suffisamment ensoleillé avant de percevoir non loin des gémissements plaintifs.

Il n'était pas difficile de reconnaître le timbre de la voix, son futur roi, pensa-t-elle.

Aegon ne fut pas dur à trouver, posé contre une haie, presque enfoncé dedans. Si on en croyait les vêtements entassés sur le sol, il avait sûrement passé la nuit après avoir laissé partir ses compagnes. Lyssa n'était pas surprise au vu de la quantité d'alcool qu'elle l'avait vu ingurgité la veille.

- Je ne crois que ce soit vos appartements, votre majesté, prononça-t-elle distinctement pour faciliter la tâcher à l'ivrogne devant elle.

Il papillonna des yeux, puisque placée au soleil, Aegon la voyait difficilement. C'était assez satisfaisant de le voir aussi démuni, et ridicule. Les Targaryen comme des dieux, disait-on.

- Strong ? grogna-t-il, en se tournant de tous les côtés, comme s'il cherchait à échapper à l'inconfort du sol.

Après quelques secondes, Lyssa finit par s'abaisser pour attraper le haut de sa tenue qu'il semblait chercher en tâtonnant tout en confirmant les dires du prince. Elle lui tendit son vêtement tandis qu'il énumérait dans sa barbe une multitude de prénom :

- Elissa ? finit-il par prononcer, presque sûr de lui.

- Lyssa.

Son ton avait été plus froid que voulu mais pouvait-il seulement le remarquer ?

Il répéta son prénom en laissant glissant la double consonne plus longtemps. Les yeux à nouveau fermés, avachi comme un moins que rien sur le sol, Lyssa n'avait jamais autant méprisé quelqu'un.

Mais Lyssa n'était pas de ceux qui avaient le choix de servir l'un ou un autre. Peut-être que la princesse considérerait cela comme de la traîtrise mais il y avait bien un gouffre entre elles deux que même un mariage royal ne pouvait combler. Elle devait se trouver une place dans ce monde lorsqu'on avait servi la sienne à Rhaenyra, toutes deux n'avaient à blâmer l'autre. C'était un monde d'hommes et le chemin vers le sommet avait été fait pour eux, elles devaient trouver n'importe quel moyen de gravir.

Alors, Lyssa sourit au prince lorsqu'il se décida finalement à entrouvrir ses paupières et à la scruter.

- Aide-moi à me relever, Lyssa, dit-il simplement en appuyer toujours désagréablement sur les consonnes de son nom.

Elle le fit, agrippant ses poignets comme il le fit avec les siens. Et c'est une fois debout qu'il se décida à se revêtir sans, bien sûr, la remercier. Elle était d'un an son aîné et cela se voyait bien plus que les quatre ans d'écart avec son jeune frère. Aegon et elle faisaient la même taille, mais les traits de son visage respiraient l'insouciance. Évidemment, jamais il n'avait été confronté au mal de ce monde, même celui de ses propres actions.

- Tu dois être impatiente d'épouser mon frère, j'imagine.

Elle hocha simplement la tête, ce qui déclencha un léger rire d'Aegon. Lyssa ne voulut perdre son temps à l'interroger et alors qu'elle s'apprêtait à partir, il posa un doigt vers son ventre en murmurant :

- J'espère que ceux-là sortiront blond.

Elle retenu sa haine de le voir si hilare, sa rage de sentir son corps damné avoir le moindre contact avec elle.

- Si ce n'est pas le cas, je n'aurais qu'à vous demander d'en pondre un énième dans les rues de Port Réal et le prendre comme remplacement, ajouta-t-elle, laissant alors échapper assez d'animosité pour en retenir le reste.

Elle crut avoir déjà dépassé les bornes mais il attendit simplement un moment avant de rire ce qui fit redescendre toute sa pression. La jeune Strong avait bien fait de parier sur l'impertinence pour s'attirer les sympathies d'Aegon.

- Tu m'es bien plus agréable que tes frères.

Son cœur loupa un battement, et elle fit de son mieux pour ne pas que son regard transmette sa volonté de lui arracher le visage. Elle garda des yeux rieurs vers lui. Il était bien plus manipulable que son frère mais Aemond ne semblait rien avoir en commun avec cet être abjecte.

Il finit par partir et en l'observant s'éloigner, Lyssa ne peut s'empêcher de se dire qu'il n'avait aucune idée de ce qu'il représentait réellement. Au-delà de l'homme monstrueux qu'il était mais qui ne changeait pas de beaucoup d'autres, Aegon n'avait aucune idée qu'il représentait autant un avenir pour certains qu'une menace pour d'autres. Depuis sa naissance, le monde s'agitait et les têtes tournaient sans arrêt songeant, alors que le cœur de Viserys battait toujours, devant qu'ils devraient ployer le genou.

Aegon poursuivrait sa misérable existence sans se soucier de rien.

Et Lyssa mentirait si elle disait ne pas vouloir finir les jours du jeune prince plus tôt. Pourtant, sans Aegon, l'avenir serait trop incertain. Puisque si aisément manipulable, une fois roi, il ferait ce que la voix la plus envoûtante lui dirait de faire, et Lyssa s'assurerait qu'elle serait celle-ci.

Elle aussi avait voulu que Rhaenyra soit reine, mais cela signifierait renoncer à sa propre grandeur puisque la princesse ne pourrait jamais lui offrir ce qu'elle voulait. Celle-ci avait déjà trop fauté auprès de sa famille et élever Lyssa au sein de son cercle paraîtrait une très mauvaise manœuvre et elle aurait raison. Alors que pour les verts, l'élever au point même de la faire devenir une Targaryen, c'était tenté de l'instrumentaliser, sans savoir qu'ils lui servaient tout ce qu'elle avait toujours voulu.

Alicent, Larys, et même Aemond, se servaient d'elle pour punir Rhaenyra, c'était comme lui prendre encore plus que seulement Harwin. Mais à elle aussi, on lui avait pris son grand frère et elle ne l'avait jamais oublié.

Détournée pendant tout ce temps de sa volonté première, Lyssa finit par aller lire dans les jardins. Cela dura quasiment jusqu'à l'heure du déjeuner où elle rentra donc, poussée par sa faim. Prête à rejoindre ses appartements, un serviteur vint vers elle, lui indiquant que la reine la demandait pour le déjeuner.

Lyssa ne fut pas surprise de ne pas trouver le reine seule mais bien avec son fils. Elle s'avança et appliqua une parfaite révérence à chacun.

- Bonjour, Lyssa, j'espère que tu n'as pas encore déjeuner !

La jeune fille jeta un œil à la table déjà dressée à sa droite et assura que non, et que ce serait un plaisir de se joindre à eux. Alors que la reine s'avançait déjà vers sa place, Aemond lui lança un coup d'œil intrigué, peut-être avait-il eu vent de sa rencontre avec Aegon. En tout cas, elle pouvait être sûre qu'il ne la voulait pas ici.

Une fois tous installés, le déjeuner ne resta pas silencieux bien longtemps, Alicent pris la parole :

- Puisque vos fiançailles sont annoncées, je pense qu'il est temps d'aborder des questions d'ordre intime.

Les deux futurs mariés étaient en face, et comme si une singulière complicité existait entre eux, ils relevèrent la tête l'un vers l'autre. Allait-elle vraiment aborder ce sujet alors qu'ils mangeaient ?

- J'espère ne surprendre personne en insistant sur le fait que la fidélité et la loyauté à son époux est, au-delà d'une nécessité, une obligation, assura-t-elle, sans regarder Lyssa directement mais en inclinant la tête vers elle.

À ce moment, Aemond commença à sourire, et la jeune Strong devait se retenir de lui planter la fourchette dans son œil restant. Elle n'était pas étonnée de cette remarque, bien qu'elle la trouvât inutile compte tenu du fait qu'une erreur telle de sa part provoquerait sans doute sa mort, si ce n'est réelle, du moins sociale.

- Nous serons loyales l'un à l'autre, votre majesté. Telle la foi des sept nous l'ordonne, ajouta Lyssa, contentant alors leur psychorigide religiosité.

Elle hocha la tête et esquissa même un sourire à sa réponse.

- Cette union et cette loyauté a pour but la production d'héritiers, commença-t-elle à énoncer.

À cet instant, Lyssa eut le loisir de voir le sourire d'Aemond s'éteindre. Le si cher fils à sa maman qui doit subir le fait que sa mère lui dise qu'il devra avoir des rapports avec elle. Il la fusilla alors qu'elle ne pouvait contenir son air rieur à son tour.

- Certes, c'est le devoir de Lyssa mais Aemond, tu as un rôle important dans le bien faisant de cela et surtout dans le bien portant de ta femme et future mère de tes enfants.

Cela devint véritablement difficile de retenir son rire alors qu'Aemond fuyait leurs regards à toutes les deux. Elle remercie particulièrement la reine de cette attention envers elle. Puisque Lyssa ne pouvait ignorer que ce qu'Alicent essayait véritablement de faire : c'est guérir une blessure en elle en ne le reproduisant pas chez elle et Aemond. Et elle ne pourrait jamais blâmer la reine, ni tout autre femme, d'essayer ou même d'échouer dans tout ce qu'elles entreprendraient. Alicent ré essayait ce qu'elle n'avait pu faire avec Aegon et sa propre fille, lui ne connaissait de faite que l'alcool et la violence.

Ce monde n'était pas le leur, et chacun devait se ménager de cet inconfort de leurs propres moyens.

- Je vous assure que je connais mon rôle en tant qu'épouse mais tout autant les obligations de mon mari à mon égard.

Pour la reine, cette conversation touchait à sa fin et elle discuta alors de leurs souhaits respectifs pour le mariage. Pourtant un échange visuel s'était recrée entre les futurs époux, puisque les paroles de Lyssa était une affirmation mais presque une menace. Son titre royal pouvait donner à Aemond autant qu'il pouvait, mais ce contrat qui les lierait les placerait au même niveau.

Elle avait attendu les chaînes du mariage toute sa vie, et Lyssa s'apprêtait enfin à agir.



bonjour, j'essaie d'être le plus régulière possible, j'espère que l'attente n'a pas été trop longue !!

alors, avez-vous aimé ce chapitre ? qu'avez-vous pensé de la rencontre fortuite entre Aegon et Lyssa ? et sinon du petit moment de la fin ?
Le prochain chapitre sera le mariage!!!

merci d'avoir lu, à la prochaine !!

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