Chapitre 2-7
Un parfait silence se fit dans ma tête. Après plusieurs heures sur le planning et un tas de courriel envoyé, nous avions enfin terminé de plancher là-dessus.
— Monsieur Khan vous a-t-il expliqué en quoi résultait le programme de la journée ?
— Il m'a fait part d'un rendez-vous important, au sud.
— Rien d'autre ?
— Non et malheureusement, je doute que vous puissiez venir avec moi.
— Exact ! Vous serez seule avec lui, mais ça ira.
Ashley tenta de sourire comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes, pourtant je sentais bien qu'elle ne pensait pas ce qu'elle disait.
— Bon, nous avons un peu de temps avant qu'il ne se réveille. Monsieur Khan est quelqu'un qui dort très peu. La nuit, il est au club. Il rentre ensuite se reposer trois heures, puis enchaîne les réunions avec les promoteurs, les partenaires commerciaux, les investisseurs et bien d'autres personnes importantes. En début d'après-midi il a son cours de Krav-Maga avec un prof personnel. Monsieur Khan consulte ensuite dans son bureau ses mails, passe des coups de fil, gère des dossiers puis repart en rendez-vous jusqu'à tard dans la soirée avant de rejoindre de nouveau le club.
L'endroit où il torture les gens. Je frémis de peur rien qu'en repensant à la scène de cette nuit. Mon assistante sortit une tablette numérique de son sac et me la présenta. Elle fit défiler de nombreuses photos des filles Khan.
— Je vais vous présenter la famille. Vous allez devoir retenir toutes les informations que je vais vous dire. Elle, c'est Aaliyah, elle a vingt-trois ans. Ce n'est pas la plus riche des trois. La célébrité la pèse et se plaint sans cesse de son statut. Elle a une fille de quatre ans, Jalen. Le père n'est pas présent dans sa vie. Son rôle de mère passe avant TOUT. Elle est très gentille, très simple et très écolo !
Concentrée sur les paroles d'Ashley, je hochai la tête pour lui montrer que je suivais bien. Pour l'instant, je n'avais pas besoin de prendre de notes, la description était simple.
— Aaliyah est souvent prise en grippe par ses deux autres sœurs qui jugent que cette dernière manque d'ambition. Ghita est la seconde, elle a votre âge. C'est elle, la tête pensante des trois.
Cette révélation ne me surprit pas. Ghita faisait de nombreuses apparitions publiques et participait à beaucoup plus de shows télévisés que ses sœurs. Sa ligne de vêtements et de cosmétique se vendait très bien.
— Ghita est une femme très intelligente, continua Ashley. Nous ne savons jamais ce qu'elle pense. Elle n'est pas méchante, mais très exigeante dans son travail et celui des autres. Elle gère parfaitement sa communication. Rien, JAMAIS rien n'est laissé au hasard avec Ghita.
Mon assistante pointa ensuite la troisième du doigt.
— Cyliane, vingt ans, la cadette de la famille. La petite protégée de ces deux frères. Elle a sa chaîne Youtube...
— Paranormal life ! Elle aime les univers paranormaux. Je regarde de temps en temps.
— Sa chaîne compte des millions d'abonnés. C'est une des personnalités les plus suivies au monde. Elle traque les fantômes, les esprits, tout ça. Je vous avoue que ça a le don d'agacer Camilia qui est la manageuse de ses trois filles. Elle pensait que ce ne serait qu'une passade pour Cyliane, mais il n'en est rien. Même si son train de vie est décalé comparé à ses deux autres sœurs, elle gère son quotidien d'une main de maître. Sa réussite dépasse les frontières. Du haut de ses vingt ans, Cyliane a créé un empire et son nom est devenu une marque mondiale.
Ashley éteignit la tablette et commença à rassembler toutes les feuilles étalées sur la table. De mon côté, j'essayais fiévreusement de retenir toutes ces informations.
— Et Hadriel ?
Elle s'arrêta net et jeta un regard en direction de la porte fermée. Son ton changea subitement. La voix plus dure, elle ajouta :
— Il n'est pas méchant, mais il n'est pas charmant non plus. Il faut éviter de réunir les deux frères dans la même pièce.
Je me levai pour l'aider à ranger tout notre travail de ces dernières heures
— Lui et Yeraz ne s'entendent pas ? me hasardai-je.
— On peut dire ça. Leur relation est très compliquée depuis...
Ashley n'eut pas le temps de finir sa phrase, Yeraz rentra dans le bureau, les mains occupées à fermer ses boutons de manchettes. Il s'était changé et portait encore un costume foncé. Le jeune homme tenait entre ses dents, sa paire de lunettes. Mon assistante baissa immédiatement les yeux, priant sûrement pour qu'il n'ait rien entendu de notre conversation.
— Appelez Isaac. Nous partons.
Sans une attention ni une seule parole pour Ashley, il mit sur son nez ses larges lunettes et tourna les talons. J'allais ouvrir la bouche pour lui poser une question, mais mon assistante secoua vigoureusement la tête pour que je me taise. Quand il disparût de la pièce, elle se précipita vers moi.
— Ronney, aucune question ! Vous allez finir par me faire perdre mon boulot à force de ne pas écouter ce que je vous dis.
— Mais, Isaac, qui est-ce ? Comment veut-il que je l'appelle s'il ne me dit pas de qui il s'agit.
Je chuchotai pour être sûr de ne pas être entendu.
— C'est le chauffeur. Tenez, prenez la tablette. Dedans, il y a toutes les photos des gens qui font partie de la vie de monsieur Khan ainsi que ses collaborateurs les plus proches.
Je pris l'appareil et le rangeai dans mon gros sac à bandoulière. En relevant la tête, je crus voir une lueur d'exaspération dans le regard d'Ashley.
— Qu'y a-t-il ?
— Votre tee-shirt, il est taché. Vous devez vous changer.
Mince ! Je n'avais pas vu la tâche de pistache. Je plaquai la sangle de mon sac dessus et déclarai gênée.
— Je n'en ai pas d'autres. Cette nuit, quand je suis sorti de chez moi, je n'avais pas prévu que ma journée se déroulerait ainsi.
Ashley ferma les yeux et passa ses mains dans ses cheveux en soupirant profondément. Quand elle les rouvrit, elle se mit à fouiller dans son sac à main pour en sortir un joli débardeur blanc avec un gros nœud sur le devant.
— Non, je ne peux pas mettre ça, bafouillai-je.
— Je pense que vous n'avez pas le choix. On ne sort pas avec monsieur Khan dans un état pareil.
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