Chapitre 16-4
Yeraz monta dans la voiture, le visage impassible.
— Isaac, déposez-nous chez ma mère !
— Chez Camilia ? balbutiai-je, mais ce n'était pas prévu.
Il ne répondit pas. La voiture démarra. J'étais soulagée de quitter cet endroit.
— Comment s'est fini le rendez-vous avec Hamza ? osai-je demander au bout d'un moment.
— Tout est arrangé.
Yeraz m'avait répondu un peu trop rapidement. Quelque chose continuait de le tracasser, mais je n'insistai pas malgré l'envie d'avoir des réponses à mes questions. Il se perdit dans ses pensées, la situation semblait complètement lui échapper.
Le trajet se déroula dans le plus grand silence. Comment avait-il convaincu Hamza de revoir les termes du contrat sans me mêler à tout ça ?
Lorsque nous arrivâmes à destination, je suivis Yeraz, l'esprit toujours engourdi, jusqu'à la porte de la résidence. Avant qu'elle s'ouvre, je pris une grande inspiration et me tournai vers lui.
— Viens avec moi voir le spectacle de Daphné, samedi soir.
Surpris par ma demande inattendue, il me fixa un moment puis se gratta un sourcil avec son doigt avant d'enfouir ses mains dans les poches.
— Impossible. Il y a le gala. Estime-toi heureuse que je t'aie accordé ta soirée en ce jour si important pour notre famille.
— Tu peux bien t'éclipser une heure ou deux ?
Je marquai une pause avant d'avouer d'une voix timide :
— Je t'avais pris une place, il y a déjà un moment. Je ne sais pas pourquoi. C'était avant toute cette histoire.
Yeraz soupira. Cette attention semblait l'avoir touché.
— J'aurais préféré voir Belinda sur scène, crois-moi.
— Belinda ?
Yeraz haussa les épaules d'une façon théâtrale.
— C'est son prénom. Tu as cette fâcheuse habitude de donner des noms d'emprunt aux gens. Moi, au contraire, j'aime tout savoir d'eux.
Au moment où j'allais répliquer, la porte s'ouvrit. Yeraz remit aussitôt son masque en place sur son visage. Un léger sourire apparut sur les lèvres d'Abigaëlle quand elle posa son regard sur moi. En effet, elle me considérait depuis plusieurs semaines d'un œil moins sévère et pour cause : je faisais partie du paysage des Khan, maintenant. Yeraz murmura une vague salutation et entra comme s'il était chez lui.
— Votre mère vous attend dans le petit salon, monsieur Khan. Miss Jimenez, voulez-vous déjeuner en attendant ?
Je fronçai les sourcils et interrogeai Yeraz du regard.
— Écoute, je dois parler à ma mère seul à seul. Abigaëlle va s'occuper de toi.
Je battis des paupières en cherchant mes mots :
— Pourquoi je ne peux pas venir avec toi ? Qu'y a-t-il que tu ne me dis pas ?
Yeraz leva les yeux sur Abigaëlle.
— Préparez le repas de miss Jimenez, je vous prie.
Cette dernière baissa la tête avant de se retirer. Enfin seule, dans le hall, Yeraz s'adressa à moi d'une voix plus douce :
— Fais-moi confiance. Je t'ai dit que j'avais tout arrangé. Pour être honnête, c'est ma mère qui peut nous sortir de ce pétrin. Je n'aurais jamais pensé qu'un jour, je puisse avoir besoin d'elle.
Je hochai la tête et soufflai un merci. Aujourd'hui, Yeraz m'avait choisie et plus rien ne serait comme avant.
Je le regardai s'éloigner sans tenter de le retenir.
La voix de Peter me parvint soudain d'en haut. Il était en train de réprimander des employés. Je décidai d'aller à sa rencontre pour le plaisir de le voir lever les yeux au ciel quand il m'apercevrait. L'assistant de Camilia ne m'impressionnait plus du tout.
Je longeai le couloir qui sentait bon le parfum frais. Cette maison était plus chaleureuse que celle de Yeraz, je m'y sentais bien.
— Je ne comprends pas que les valises n'ont pas été vérifiées à la sortie même de l'aéroport. Camilia vient de perdre presque des dizaines de milliers de dollars de bijoux. Comment est-ce possible ? Vous êtes vraiment des bons à rien ! Des enfants qui...
En me voyant apparaitre, Peter s'arrêta de parler et fit exactement ce que j'avais prédit.
— Je n'ai pas le temps pour votre séance de coaching, Ronney. Vous pensez que le monde tourne autour de vous ? Samedi c'est le gala et tout le monde est très occupé, hormis vous bien sûr, qui êtes là à vous promener sans aucune raison.
Je rentrai dans la chambre et adressai un regard compatissant aux deux hommes semblables à des armoires à glace et qui faisaient deux fois ma taille.
— Yeraz est en bas, il s'entretient avec Camilia.
Soudain intéressé, Peter porta son poing fermé à ses lèvres. Je venais d'éveiller son intérêt.
— Ah oui ?
Son regard se porta ensuite sur les deux hommes. Peter leva son menton dans leur direction pour les prendre de haut.
— Vous ne voyez pas que je suis en pleine conversation avec ma Cendrillon du ghetto ? Allez, oust !
Sa main virevolta dans les airs pour chasser ces deux employés qui paraissaient se contenir pour ne pas le réduire en pièces. L'assistant de Camilia les accompagna à la porte et attendit qu'ils soient suffisamment loin pour se tourner vers moi, une étincelle dans les yeux.
— Racontez-moi tout !
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