Chapitre 13-3
Secouée par cette expérience effrayante, ma tête resonnait encore. Je regardais depuis le perron, Cyliane et son ami ranger le matériel dans le van tout en échangeant sur les différentes possibilités de montage des scènes filmées. Elle était vraiment différente de ses sœurs, mais habitée par la même passion dans ses projets professionnels. Je cherchai mon téléphone dans ma poche, puis m'assis sur les marches de la maison. Toujours aucune nouvelle de Yeraz. J'étais déçue, contrariée et je me détestai de ressentir ces sentiments. Le fait qu'il me manquait me dérangeait profondément. Je tapotai quelques mots sur le clavier avant de lui envoyer :
Aucune nouvelle de toi depuis des jours. J'espère que tout va bien.
— Ronney, tu viens ? On te ramène.
Cyliane au loin me faisait signe de venir. Je décidai de rentrer chez moi, auprès d'Alistair et de Bergamote. Rester seule dans l'immense demeure vide de Yeraz ne me disait rien cette nuit, surtout après ce que j'avais vécu ici. J'avais une folle envie de me doucher, de me débarrasser de ces odeurs de poussières et de moisi qui avaient imprégné mes vêtements.
Le van se gara devant l'immeuble. Je sortis du véhicule en souhaitant une bonne nuit à Cyliane et Joseph qui me remercièrent encore une fois, puis je me dirigeai vers l'entrée du bâtiment.
Après une longue douche bien chaude, je m'allongeai sur mon lit qui me paraissait si petit depuis que je ne dormais plus ici. Il n'avait pas répondu à mon dernier message. Les yeux rivés au plafond, je me sentais vide sans savoir pourquoi. Il y avait quelque chose en moi qui me poussais à le rejoindre. D'où venaient nos sentiments ? Jusqu'où prenaient-ils racine ? Ces réflexions me torturaient avec une telle insistance. Épuisée, la fatigue me submergea.
Je dormis mal cette nuit-là. Je tournai et me retournai dans mon lit. Les rires de Bryan et de ses amis dansaient dans ma tête. Des images horribles s'imposaient à moi. Je sentais leurs mains sur mon corps et toujours cette odeur de javel écœurante. Des pièces de puzzle s'échappaient de leur bouche à la place des mots. J'avais peur. C'est là que je remarquai que je tenais dans mes mains, le pistolet.
— Ne te sens-tu pas plus forte, maintenant ? me murmura la voix de Yeraz.
Le bruit du coup de feu me réveilla en sursaut. J'étais en sueur. Je m'assis au bord de mon lit pour me calmer et ne pas fondre en pleurs. Bryan et ses amis, ne m'héritaient pas que je verse une seule larme pour eux.
Logan m'accompagna jusqu'à la voiture qui m'attendait devant les studios Red Chanel. Isaac me tenait la porte ouverte. Je me retournai vers mon collègue, le sourire aux lèvres. Il observait la berline, l'air surpris puis me regarda de haut en bas. C'était la première fois que je portais une robe en public. Intrigué, tout le personnel m'avait observé bizarrement du coin de l'œil toute la matinée. Bien qu'elle soit longue et sans décolleté, je me sentais nue tellement que cette robe, d'un bleu pâle, attirait les regards sur moi. Les gens paraissaient découvrir que Ronney était un être humain.
— Je vois que ton second boulot t'offre quelques avantages malgré que ton patron soit une peau de vache avec toi.
Gênée par cette remarque, je détournai mon regard de Logan et haussai les épaules.
— J'avoue que nous arrivons mieux à communiquer tous les deux depuis quelque temps.
Mes joues se mirent à rougir. Logan claqua dans ses mains et changea de sujet :
— C'était sympa de fêter aujourd'hui le dernier épisode de la première saison des aventures de "Minnie la petite souris". Je suis vraiment heureux de t'avoir comme partenaire.
— Je trouve que Popo l'Hippo et elle, forment une bonne équipe. Ça va me manquer de ne pas venir au studio pendant trois mois, en attendant la saison deux.
Soudain mal à l'aise, Logan prit une profonde respiration avant de bredouiller maladroitement :
— Euh...justement, je me disais que l'on pourrait peut-être se voir de temps en temps...aller boire un verre.
Mon sourire se fana. Où voulait-il en venir ? Je l'interrogeai du regard tout en le fuyant aussi. Ses yeux pleins d'espoir me firent comprendre ce que jamais je n'aurais imaginé un seul instant. Choquée, le front plissé, je n'arrivai pas à articuler quoi que ce soit. Derrière moi, Isaac s'éclaircit la voix comme pour me rappeler que nous n'étions pas seuls.
— Je...euh...Logan, je t'apprécie beaucoup. Tu es quelqu'un de bien, mais ma vie en ce moment est un véritable chantier. Je n'ai pas le temps pour sortir un peu.
— C'est une manière polie de m'éconduire, répondit Logan, déçu.
Il enfouit ses mains dans les poches et recula. Je tentai de me rattraper gauchement :
— Tu m'as prise de court. Je n'ai pas l'habitude de me faire inviter.
Déstabilisée, je me grattai nerveusement l'arrière de mon crâne.
— Tu peux y réfléchir.
Je fis oui de la tête pour ne pas le blesser davantage. Satisfait, Logan tourna les talons et repartit en direction du studio.
— Miss Jimenez ? Où souhaitez-vous aller maintenant ?
Je regardais Isaac sans le voir et bégayai :
— J'ai rendez-vous chez mon orthodontiste.
Avant de m'installer dans la voiture je lui demandai d'une voix presque désespérée :
— Pas de nouvelles de...
Isaac haussa les épaules, l'air désolé.
— Non, miss Jimenez. Monsieur Khan ne nous donne aucune nouvelle lorsqu'il est en déplacement.
Il voulut rajouter quelque chose, mais se ravisa. Je m'assis dans la berline, l'âme en peine. L'angoisse me prenait au trip.
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