22 ~ Lost in a daydream

Ashton

Mercredi soir, hôpital

Luke est en retard, ça ne lui ressemble pas.

         Pour passer le temps je m’occupe de mes habituelles patientes, attendant la venue de mon meilleur ami comme pour m’assurer qu’il va bien, sauf qu’il n’arrive pas. Est-ce que Calum lui a fait du mal ? Et Kala ? Je commence à paniquer, des sueurs froides glissent dans ma nuque et rendent moite le col de ma blouse. Si jamais il lui est arrivé quelque chose, c’est de ma faute.

        Mais c’est une heure après qu’il fait irruption à l’hôpital, un lourd sac sur le dos. Je souffle un bon coup et le salue avec bonheur. Pendant quelques instants j’avais vraiment craint que mon meilleur ami n’ait eût des ennuis par ma faute. Je l’observe qui va déposer son sac au vestiaire, un large sourire aux lèvres. Ca faisait longtemps que je ne l’avais pas vu sourire aussi sincèrement.

« Tu étais où ? –Je demande alors qu’il me rejoint pour m’occuper d’un patient-

-Encore chez Kala –Ses yeux s’illuminent de joie et bien que je sois heureux pour lui, je sens comme une boule grossir en mon ventre- On s’est endormi et je n’ai pas vu l’heure

-Oh d’accord –Je souris avant de préparer le lit de Mr Whiptacker- Voilà monsieur on vous a préparé un lit bien propre

-J’ai passé une nuit merveilleuse Ashton –Soupire Luke pour lui-même alors que j’aide seul mon patient-

-Super Luke, vraiment, mais tu veux bien m’aider à porter Mr Whiptacker ? »

        Il sort de sa rêverie et me remarque enfin, soulevant tant bien que mal le corps ankylosé du pauvre homme qui ne peut même pas bouger seul. Automatiquement il vient le soutenir de l’autre côté et à nous deux nous réussissons à coucher Mr Whiptacker. Ce dernier nous remercie, longuement, un peu trop même. Sauf que je le suis bizarrement reconnaissant, car sans ça Luke m’aurait passé en détail sa nuit d’amour avec Kala.

Ma Calamity Jane.

        Je m’arrête un instant, faisant semblant de fixer le registre de l’hôpital. Est-ce que je viens de dire ‘Ma’ Calamity Jane ? Je déglutis et Luke vient se mettre à côté de moi pour jeter un coup d’œil au registre. Sauf que lui il ne fait pas semblant. Je le regarde en coin, son visage fin, palot, de longs cils blonds qui semblent vibrer à chaque clin d’œil, son nez en trompette, ses cheveux impeccablement laqués, rien à redire. Jamais je n’avais vu mon meilleur ami comme un rival mais à cet instant c’est comme si chaque parcelle du visage de Luke était un moyen pour moi de complexer, de me remettre en question. Jusque-là je plaisais à Oriane, alors je ne pouvais qu’être beau. Mais aux yeux d’une autre ?

Je détaille encore un peu mon meilleur ami, remarquant le léger duvet blond sur ses joues creuses. Est-ce que ça plait ? Oriane a horreur des poils alors j’ai l’habitude de me raser. Mais Kala ne m’avait rien dit lorsque j’étais revenu de ma mission.

Encore Kala.

Je n’ai pas d’autre nom en tête.

« J’ai des traces de rouge à lèvres ? – Me coupe Luke-

-Pardon ?

-Je sais pas, tu me fixes, alors je me demandais si Kala n’avait pas étalé son rouge à lèvres sur ma joue.

-Ah euh non, il n’y a rien –Dis-je mal à l’aise, enfouissant mes mains dans mes poches-

-D’accord –Il met le registre dans sa poche de blouse et nous prenons la direction de la cafétéria, il y a peu de monde ce soir- J’ai parlé à Kala

-De quoi ? –Dis-je les joues rouges-

-De ton frère –Je souffle discrètement-

-Ah, très bien mais pourquoi ? –Il se lève et récupère deux grands cups de café-

-Juste pour savoir ce qu’elle pensait, je voulais m’assurer qu’elle n’avait pas fait d’amalgames entre toi et lui

-C’est gentil à toi –Je porte la boisson à mes lèvres et sursaute lorsque le liquide me brûle vivement la langue- Merde je pensais que c’était moins chaud

-Dommage –Il glousse et regarde son cup avec un sourire gigantesque- Tu sais… J’ai fait courir le bruit comme quoi je dormais pour éviter les soucis avec Clarisse, mais ce n’est pas vrai.

-Comment ça ? –Je demande en ouvrant grandement les yeux-

-En fait si je suis arrivé en retard c’est parce qu’on était en train de faire l’amour Kala et moi, on a pas vu l’heure –Dit-il avec un air innocent-

-C’est… Merveilleux –Dis-je en fixant mon propre cup, les joues rouges- Je ne sais pas trop quoi te dire… Félicitations ?

-C’était pas notre première fois hein

-Non non je sais bien –-Je souris en me rappelant le soir de mon retour où j’avais été accueilli par des bruits d’animaux en rut-

-Mais bon, je voulais te le dire à toi, car tu es mon meilleur ami et je ne veux rien te cacher.

-C’est gentil. »

Sauf que j’aurais pu me passer de cette information, mais je préfère me taire. Luke a l’air d’être vraiment heureux et le mieux que je puisse faire, c’est d’être heureux pour lui.

Et ignorer la bête qui languit au fond de moi, prête à se jeter sur mon meilleur ami.

*

        Le café est devenu froid lorsque je prends le tram accompagné d’Oriane. Elle a commencé beaucoup plus tard que moi ce soir mais en contrepartie elle commence tôt demain. Durant tout le trajet je n’ai de cesse de l’embrasser, me prouvant à moi-même que c’est d’elle dont j’ai besoin et que Kala n’est qu’une amie. Il faut que j’y arrive, je ne peux pas gâcher ma relation. Malheureusement cette dernière ne prend pas le tram ce soir, ou bien heureusement, comme ça je n’ai pas à faire jongler mon regard entre les deux.

        La nuit je la passe avec Oriane, profitant de l’absence de Luke pour me lâcher totalement. Et surtout pour oublier que lui-même avait passé une très bonne nuit la veille. A mes yeux, si je continue de désirer Oriane c’est que mon amour pour elle est intact et que notre couple n’est pas en danger. Ca me rassure, car si un jour je ne ressens plus ces papillons dans mon ventre, ce bonheur exquis, cette sensation de légèreté. C’est que tout sera fini et que moi-même je serais fini.

*

        Je suis dégoulinant de sueur, tout comme le corps contre le mien, nous collons, nous nous accrochons l’un à l’autre comme pour fusionner. Ses mains viennent agripper mes cheveux alors que mon nom sort de sa bouche sous différentes tonalités, tantôt un murmure, tantôt un cri aigu. D’ailleurs je ne résiste plus et l’embrasse, avalant ses paroles, aspirant son souffle alors que ses ongles griffent mon dos. Comme un chat. Moi j’ai trop peur de lui faire mal alors je me contente de mordiller son cou, d’y donner des petits coups de langue tel un chaton. J’ai les yeux fermés, j’aime ce que je lui fais, j’aime Oriane.

        J’ouvre mes yeux et découvre enfin son visage. Ses iris verts et ses cheveux rouges cerise. Ce n’est pas Oriane, mais je ne me retire pas pour autant. Elle me serre contre elle et nous nous embrassons encore une fois. Au loin j’entends qu’on tambourine à ma porte. C’est sûrement Luke, il se demande où est Kala, ce que je lui fais. Je m’arrête un court instant et la regarde. Elle sourit en coin, ses iris brillent d’un vert si clair que j’aperçois désormais ses pupilles noires devenues des fentes. Un félin. Quelque chose brûle en moi, la joie d’entendre Luke gratter à la porte comme un pauvre petit chat qu’on empêcherait d’entrer et moi qui suis en train de ne faire qu’un avec ce qui lui appartient. Je souris à mon tour et reprends la cadence. Faisant miauler ma Calamity Jane sous moi.

        Je me jette hors du lit, le visage rouge et les cheveux en désordre tant le choc est rapide. Mon cœur bat la chamade et je mets un moment avant de remarquer le lit vide face à moi. Il faut que je me reprenne. Hier soir j’étais avec Oriane et seulement Oriane, elle a dû repartir ce matin quand je dormais. Je frotte mon visage et vais ouvrir mes volets d’un coup sec, cherchant à me réveiller avec la violence des rayons du soleil.

Qu’est-ce que c’était que ce rêve de fou furieux ?

        L’air frais du matin vient s’échouer sur mon torse dégoulinant de sueur, me provoquant d’innombrables frissons et cette désagréable impression que je suis un rouleau de papier tue-mouche ambulant. J’inspire un grand coup et finis par fermer la fenêtre, ne voulant pas tomber malade.

Non vraiment qu’est-ce qu’il m’a pris de faire un rêve pareil ?

        Je prends quelques affaires et vais sous la douche, remarquant avec fatalité l’imposante érection qui m’incommode. Ca, ça signifie douche à l’eau froide, je n’ai pas le choix. Je prends tout mon temps pour me laver, chantant des chansons diverses pour focaliser mes pensées sur autre chose que sur mon rêve.

        Ce soir c’est mon anniversaire, pourquoi ne pas proposer un dress-code, histoire d’être sûr que tout le monde viendra bien habillé ? Je sors de ma douche et me sèche, enfilant un boxer sans difficultés. Oui je pense que c’est une bonne idée. Je finis de m’habiller et attrape mon téléphone, envoyant un message à tout le monde.

Tous sauf Kala.

        Après le rêve que je viens de faire je me sens terriblement mal à l’aise, pire encore lorsque je sors de ma chambre et croise Luke sur le point d’aller se coucher. Son sourire est encore peint sur ses lèvres fatiguées et je ne peux m’empêcher de me remémorer ses plaintes contre ma porte. Jamais je ne pourrais lui faire un coup pareil.

Pourtant je m’étais senti tellement heureux.

« Bien dormi ? –Me demande-t-il en souriant-

-Oui oui

-J’ai vu qu’Oriane était venu passer la nuit ici.

-Ouais –Il sourit en coin et commence à fermer sa porte- Attends Luke

-Oui ?

-Euh pour ce soir, c’est dresscode noir et blanc avec un masque

-Un masque ?

-Ouais type bal masqué –Je rougis-

-Je n’en ai pas…

-Je vais t’en acheter un cet après-midi si tu veux ?

-Bah… Ouais, je veux bien, merci Ash »

        Il me fait un clin d’œil avant de fermer sa porte et de s’affaler sur son lit. Quelques minutes plus tard alors que je me tâte toujours à envoyer le message à Kala, j’entends des ronflements provenir de sa chambre. Il devait être sacrément épuisé.

*

        Je me pose enfin sur le canapé et fais face à mon écran, toujours ouvert sur l’onglet message. Je l’ai invitée, je ne peux pas faire marche arrière, d’autant plus que ça me fait vraiment plaisir qu’elle ait accepté. Je souffle un bon coup et envoie un message.

A : Calamity Jane

Salut Calamity Jane, ce soir le dress code c’est noir et blanc, amènes un masque pour le bal masqué !

 

De : Calamity Jane

Bal masqué ? C’est une blague Irwin ?

Sinon je n’ai pas de masque , c’est grave ?

 

A : Calamity Jane

J’ai trouvé que c’était un super thème en plus on pourra danser. Et oui, c’est grave, il te faut un masque !

 

De : Calamity Jane

C’est pas un peu ringard ? Au pire je me cacherai derrière une assiette en carton.

        L’espace d’un instant j’imagine Kala danser derrière une assiette en carton dans laquelle ont aurait découpé deux trous pour ses yeux. Quelle idiote. Je glousse avant de regarder l’heure sur mon téléphone. Midi. Et si je passais la prendre pour une virée shopping ? Cela fait plusieurs soirs que nous n’avons pas pris le tram ensemble et de toute façon je dois aller acheter un masque pour Luke. Kala choisira le sien en même temps.

Mais est-ce une bonne idée ?

Quand je repense au discours de mon frère, à Oriane puis à mon rêve de ce matin qui m’a totalement chamboulé, je me dis que je ne devrais pas, que je devrais m’éloigner d’elle.

Mais je crois que je n’en ai pas réellement envie, alors j’enfile des chaussures, laisse un message à Luke avant de quitter l’appartement tout sourire. Le soleil me chauffe doucement la peau si bien que je mets des lunettes de soleil et fais le chemin à pieds.

Cette journée s’annonce très bien.

*

        Arrivé devant sa porte je me mets enfin à cogiter. Kala est la fille la plus asociale que je connaisse, comment lui donner envie d’aller faire les magasins alors que l’attroupement de monde semble être sa phobie ? Il me faut un argument convaincant.

Sauf que je n’en ai pas.

Alors j’utiliserai la manière forte.

Ceci étant dit je frappe à sa  porte, me préparant à la faire sortir sans qu’elle ne puisse s’y opposer. Après tout elle sera avec moi, elle n’a rien à craindre.

« Mets tes chaussures on sort ! –Dis-je précipitamment lorsque la porte s’ouvre sur son visage surpris-

-Ashton ?! –Dis-elle en se reculant-

-On va aller t’acheter un masque et une tenue !

-Comment ça une tenue ? J’ai des vêtements je…

-Montre ? –Je suis curieux de voir sa tenue et extrêmement déçu lorsque je vois son unique chemise sur pantalon noir, me faisant glousser à moitié-

-Quoi ?!

-Kala, c’est un bal, tu vas quand même mettre une robe non ?

-Non !

-Tu peux porter celle que tu avais lors de notre soirée tu sais –Je souris grandement en me rappelant cette robe-

-Il n’y a pas de blanc

-On te trouvera une petite veste blanche –J’enroule nos mains ensemble et la tire avec moi- Allez on y va !

-Ashton attends ! »

Non pas le temps d’attendre. Elle enfile ses chaussures, prend un sac à main et nous descendons enfin, le soleil venant chatouiller nos mains liées.

« Belle journée n’est-ce pas ? –Dis-je en tournant ma tête vers elle-

-Ouais…

-Détends-toi Kala, je suis là, il ne t’arrivera rien.

-Pourquoi tu ne fais pas du shopping avec ta copine hein ?

-Parce qu’elle est au boulot »

        Elle ne dit plus rien et se braque lorsque nous arrivons devant son arrêt, lequel est bondé de personnes, attendant le tram visiblement ralenti. J’ai beau avancer je sens que Kala résiste derrière-moi, ses pupilles, non plus comme dans mon rêve, se dilatent tant la peur commence à l’envahir et ce n’est qu’à ce moment que je me rends compte de son handicap.

« Tu ne prends jamais le tram la journée ? –Elle fait non de la tête comme si le fait d’ouvrir la bouche pouvait la faire vomir- Je vois emh… On peut attendre que le quai se vide si tu veux ? »

        Elle fait oui de la tête et nous restons à l’écart, laissant passer deux trams dans un laps de temps de vingt minutes. Le troisième, nous le prenons et je suis obligé de faire avancer Kala à l’intérieur, laquelle s’est figée sur place lorsque les portes se sont ouvertes sur une foule compacte.

« A…Ashton on ne peut pas attendre le prochain ? Ou y aller à pieds ?

-A ce rythme-là on va passer notre journée shopping sur le quai du tram ! –Dis-je d’un ton légèrement sévère ce qui lui fait baisser sa tête- Kala je t’assure que tout va bien. »

        Elle se mure dans son silence et semble aspirer une grande bouchée d’air lorsqu’enfin les portes se ferment sur nous. C’est dingue d’avoir aussi peur des gens. Ils sont pourtant innofensifs, ils ne vont rien lui faire, je suis même prêt à parier qu’ils ne la voient pas. Elle tremble, son visage est livide et j’ai peur qu’elle ne fasse un malaise alors je me serre doucement contre elle, espérant la rassurer, mais lorsque les portes s’ouvrent et qu’une foule tente de se frayer un chemin pour sortir et pour entrer, je sens que j’ai fait une grave erreur.

        Ses yeux paniqués sont gonflés de larmes et j’ai beau la protéger de mon corps, je suis entrainé par le flot de passager qui rentre bêtement dans la rame déjà bondée. Il n’y a plus de places, on suffoque et bien-sûr il fallait que ce soit le jour où je décide de faire sortir Kala. Je ne la vois plus, je pousse les gens pour aller en contre-sens, ignorant les insultes et les pieds écrasés, tout ce que je veux c’est veiller sur Kala, m’assurer qu’elle n’a pas fait un malaise ou pire encore qu’elle ne s’est pas enfuie de la rame.

        Elle est là, collée à la paroi métallique du tram comme si elle faisait partie de l’habillage, ses yeux presque exorbités de peur que quelqu’un ne la touche, elle me cherche, elle est toute blanche et à peine ai-je réussi à m’extirper de la masse de gens qu’elle me remarque tout de suite.

        Ses larmes se mettent à couler toutes seules et bientôt elle se réfugie dans mes bras, se cachant presque le visage dans ma veste en jean comme un petit animal. Instinctivement j’enroule mes bras autour d’elle, glissant une main dans ses cheveux et l’autre dans son dos humide. La pauvre, ce doit être invivable.

*

        Pour lui éviter de supporter plus longtemps un tel supplice je nous fais descendre un arrêt plus tôt. Surtout que l’arrêt du centre commercial est toujours plus que bondé, nul doute qu’elle se serait évanouie dans mes bras. Ses mains sont tellement froides que je l’oblige à marcher au soleil avant de finalement nous asseoir sur un banc.

« Tout va bien ? –Je demande inquiet-

-Mh –Je la regarde qui semble totalement perdue, son regard fixant nerveusement le sol comme si sa vie en dépendait-

-Je suis désolé, je ne pensais pas que ce tram serait aussi bondé –Elle ne répond pas et je glisse timidement ma main dans ses longs cheveux rouges- ça va aller hein ?

-J’aime pas ça Ashton –Dit-elle d’une voix chevrotante, toujours prête à exploser en sanglots-

-Luke ne t’a jamais faite sortir ?

-Non… Il sait que je n’aime pas ça alors il ne me faisait sortir que le soir. »

        Est-ce un reproche ? En tout cas je le ressens encore une fois comme une sorte de match au-dessus duquel scintillerait ‘Luke : 100000 / Ashton : 0’. C’est vrai que c’est la meilleure chose à faire, sauf que le shopping, de nuit, c’est impossible. Je soupire et attends qu’elle me donne son feu vert pour reprendre la marche jusqu’au centre commercial.

        Mon ventre n’arrête pas de gargouiller et je remarque qu’autour de nous toutes les terrasses sont complètes, assaillies en ce jour de beau temps. Je ne peux pas faire subir ça à Kala, laquelle se cache derrière moi des que nous passons devant plusieurs personnes. Non il lui faut un endroit calme, isolé et végétarien.

«  Tu aimes les restaurants japonais ?

-Oui mais je n’ai pas beaucoup d’argent sur moi je…

-Je t’offre le restaurant. »

        Elle commence à refuser lorsque nous arrivons enfin devant. Comme je m’y attendais il  y a du monde sur la terrasse et je sens Kala se figer coupant court à nos chamailleries. J’enroule nos mains ensemble et m’avance jusqu’à l’entrée, demandant une table pour deux, de préférence à l’écart des gens.

        C’est un repas simple pendant lequel j’apprends à connaitre un peu plus Kala. Jamais Luke ne l’avait amené au restaurant japonais et je ne peux m’empêcher de me sentir fier. Par moment je repense à mon rêve de ce matin et je me mets à rougir. Je l’avais rien que pour moi, un peu comme maintenant. Mais je dois me contrôler, me rappeler où est ma place dans sa vie et où est sa place dans ma vie.

*

        Comme prévu je paye le repas et nous reprenons notre chemin alors qu’elle n’a de cesse de me remercier, nos mains constamment nouées ensemble. Peut-être les gens nous prennent-ils pour un couple, si seulement ils savaient que nous ne sommes qu’amis et que si je tiens sa main c’est pour éviter qu’elle ne tue tout le monde sous un coup de folie. Un sourire prend place sur mon visage et je la regarde.

Ce petit chaton apeuré.

        Nous rentrons dans une première boutique, je sais qu’il y a des masques ici et nous achetons le nécessaire, j’en profite même pour me reprendre une chemise, sous les conseils de Kala. La suivante est pour elle, nous cherchons une veste blanche et je l’attire de force jusqu’aux cabines d’essayage, lui promettant que je resterai derrière son rideau à faire le guet.

« Tu aimes ? –Je me retourne et ouvre doucement le rideau pour voir une petite veste blanche orner ses épaules-

-C’est très joli –Dis-je franchement ravi-

-J’ai du mal avec le blanc…

-Tu peux prendre autre chose en blanc, des collants par exemple ou bien des gants ?

-Oh oui des gants ce serait très joli ! Mais je risque de les enlever à un moment –Dit-elle embêtée-

-Au pire, ton masque est blanc non ?

-Oui

-Alors ça fera l’affaire. »

        Elle se prend malgré tout une paire de gants blancs et je l’accompagne à la caisse, empêchant les clients derrière elle de trop se coller. Je crois qu’elle se sent un peu mieux d’ailleurs, elle a repris des couleurs et accepte même de prendre une glace en terrasse, à condition qu’elle soit du côté où il n’y a personne.

Mais c’est un progrès et je me sens fier, d’elle mais aussi de moi, fier de l’avoir aidée à aller au-delà de ses craintes.

*

        Une fois mes courses d’anniversaire bouclées, nous reprenons le chemin inverse et Kala se fige de nouveau avec horreur face à la foule qui se tasse dans le tram. On dirait de vulgaires wagons à bestiaux où tout s’entasse de façon presque inhumaine et je préfère lui éviter ça. Alors nous marchons, puis nous prenons le tram plus loin, à un arrêt où beaucoup de gens descendent. Ils sont tellement nombreux et fourmillent si vite que je garde Kala contre moi, ne la lâchant sous aucun prétexte. J’aurais trop peur de la perdre.

        Une fois à l’intérieur nous somme poussés vers le fond, si bien que Kala est contre la vitre, écrasée par mon corps que j’essaye de tenir à distance. Elle a peur, elle doit même avoir mal alors je fais de mon mieux pour repousser les gens. Je veux la laisser respirer. Sauf qu’un nouveau flot de personne entre et je suis propulsé contre la rouquine, posant mes mains de part et d’autre de son visage pour me maintenir et éviter de lui tomber dessus. Je sens son corps frêle contre le mien, son cœur qui pulse frénétiquement et son souffle accéléré. Nos corps ne font bientôt plus qu’un, broyés par la masse de gens qui n’ont de cesse d’entrer par dizaine alors que seuls deux passagers sont sortis.

        Kala se met sur la pointe des pieds, elle cherche de l’air et j’aimerais l’aider, mais je ne peux rien faire. Je tente de la rassurer en parlant. Je ne peux même pas la prendre décemment dans mes bras ni même la bercer. Je ne peux pas bouger, juste la regarder paniquer et sentir son souffle s’écraser contre mon visage à mesure qu’elle s’étire.

«  Kala regarde-moi –Elle s’exécute docilement- on descend bientôt c’est promis.

-J…J’ai peur Ashton

-Je suis là. »

        Ses yeux embués de larmes ne quittent pas les miens et ça me brise le cœur. J’aimerais pouvoir l’aider, aussi bien dans ce tram que dans sa vie de tous les jours. J’arrive enfin à porter une main à son visage que je caresse doucement, geste auquel elle me rend un timide sourire.

Et c’est à ce moment que je décide de l’embrasser.

Ignorant mon frère, Oriane, Luke, tout jusqu’au bruit de téléphone qui semble prendre une photo au loin. J’ignore tout.

Sauf elle.

~ Bonsoir :B Les prochains chapitres seront en plusieurs parties ^^ en tout cas j'espère que vous avez aimé le 22 :]

Merci tout le monde !

PS : JE VAIS SÛREMENT ALLER VOIR LES 5SOS A PARIS *______*

Voilà je tenais à vous faire partager ma joie ^^"

PSS : L'édition de BTWS avance bien, le livre fait déjà une centaine de pages donc je vais peut-être opter pour un format de livre plus grand que le livre de poche sinon il fera 500 pages -_-..

Bref, je vous aime :)

Kactus 

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