24 - Vérité

Mélanie se mordit la lèvre inférieure alors qu'elle voyait la gêne sur le visage de Joe. Elle voyait à quel point il se sentait mal. Elle voyait à quel point son cœur devait se compresser dans sa poitrine. Elle devinait facilement son état parce qu'elle en était dans un à peu près similaire. Elle était, elle aussi, gênée, mal en point et sur le bord de la crise de nerfs. Elle ne savait même plus où elle pourrait très bien se placer. Elle ne savait même plus où elle pourrait se sentir à l'aise sur cette putain de planète.

Ils étaient extrêmement mal à l'aise parce que si Mélanie avait dit ses quatre vérités, ils restaient dans l'attente des vérités de Joe qui n'avait pas vraiment l'air décider à parler. Il avait même plus l'air absent, ailleurs, à mille lieux de là. Il semblait complètement perdu dans ses pensées, pesant les « pour » et les « contre » de ses paroles, de ce qu'il aimerait bien dire à la jeune femme. Non qu'il soit quelqu'un de mauvais mais il avait envie de dire clairement ce qu'il pensait mais il ne s'en sentait pas capable. Joe était septique face à cette situation qui le dérangeait, qui lui déplaisait.

Joe et Mélanie étaient encore des humains et il arrive un bon nombre de fois dans une vie où l'on aimerait se trouver ailleurs, où aimerait se tailler et tout laisser tomber pour ne jamais revenir, ou encore on aimerait que la situation soit meilleure et beaucoup moins complexe. Ils restaient des humains et ils vivaient une situation de la dernière option ; souhaiter que la situation soit moins complexe et bien plus belle. Mais la vie n'était pas comme ça à accorder tous les souhaits de tout le monde en un claquement de doigts et tout le temps sinon elle ne serait plus se mettre dans ce monde et devrait se diviser en plusieurs exemplaires d'elle-même et puis la vie serait bien trop belle et bien trop ennuyante aussi.

-Je tiens tout d'abord à m'excuser pour tout ce que je t'ai fais enduré, s'enquit Joe.

Mélanie releva la tête et le regarda en fronçant les sourcils. Pourquoi s'excusait-il encore ? Ce n'était pas déjà assez suffisant de le faire deux fois ? Fallait-il vraiment encore remuer le couteau dans la plaie ? Fallait-il vraiment encore s'excuser alors que cela ne servait pas à grand-chose ? Ce n'était pas qu'elle n'avait pas envie de ses excuses, mais au bout de deux fois c'était suffisant surtout quand ce n'était pas ce qui lui convenait. Elle s'en foutait à présent des excuses, ce qu'elle désirait, c'était des explications et rien de plus sauf que celui qu'elle aimait n'avait pas l'air déterminé à les lui donner ses explications et ses réponses. Fallait-il vraiment qu'elle le booste et lui indiquer la voie à suivre ou allait-il comprendre tout seul qu'il continuait de merder ?

-C'est bon Joe, arrête de tourner autour du pot et abrège, viens-en aux explications, s'exclama la jeune femme avec une certaine autorité.

Mélanie était sur le point d'exploser tellement que l'attente se montrait longue et pesante. Elle voulait absolument qu'il abrège et en vienne aux faits. Elle avait assez et cela se voyait sur les traits de son visage. Sa patience avait des limites et celle-ci était sûrement sur le point d'atteindre cette limite. Elle sentit son cœur se comprimer dans sa poitrine alors que Joe se mordit la lèvre inférieure et qu'il baissa la tête pour ne pas affronter son regard glacial comme un vent polaire et dur comme du béton. Elle voulait qu'il parle enfin et sa patience en prenait un coup dans la gueule.

-Je... Je... Je m'en veux..., peina-t-il à dire. Si seulement tu pouvais savoir à quel point... Je tiens encore à m'excuser, au moins une dernière fois..., articula-t-il avec difficulté avant de relever la tête. Je te préviens que ce que tu vas entendre ne va sûrement pas te plaire et que je comprendrais si tu ne voulais plus de moi après cela..., commença-t-il.

-Abrège putain, le coupa-t-elle d'un ton neutre.

Joe ne comprenait pas pourquoi elle avait une telle réaction. Pourquoi était-elle aussi directe ? Pourquoi manquait-elle tellement de patience ? Pourquoi était-elle aussi agressive ? Pourquoi se comportait-elle comme un mur de glace ? Pourquoi avait-elle l'air si exaspérée et désespérée ? Pourquoi était-elle si froide et si distante ? Il avait envie décider de s'ouvrir et de redevenir le « Joe d'avant » mais elle semblait s'éloigner de plus en plus sûrement que l'attente de son retour était bien trop longue et qu'il aurait dû, fatalement, ramener son cul plutôt. Il se demandait si elle ne lui en voulait pas d'être revenue aussi tard alors qu'il n'avait vraiment d'autre choix non plus. Déjà parce qu'il n'avait pas eu les couilles d'y revenir plutôt mais qu'il s'était lancé à corps perdu quand il avait vu de gars plaqué ses lèvres sur celle de la femme qu'il aimait plus que sa propre vie.

-Mélanie... Je ne suis plus le même. Je ne serais plus jamais l'homme que tu aimais avant après tout ce que j'ai vu. Je ne serais sûrement plus jamais le même après tout ce que j'ai enduré. Je ne serais sûrement plus jamais le même après tout ce que j'ai encaissé. J'en ai vu, enduré et encaissé des choses qui sont inhumaines ou du moins, pas faite pour moi. J'aurais tellement préféré rester avec toi que de voir quelqu'un se faire abattre ou encore battre à mort juste sous mes yeux, à même pas un mètre de moi, avoua-t-il d'une demi-voix.

Mélanie opina de la tête pour inciter Joe à continuer son « monologue ». Elle fronça les sourcils quand elle vit qu'il baissa la tête. Elle réalisa seulement l'ampleur des paroles du brun. Il avait vu des personnes mourir devant lui, sous ses yeux et la distance entre eux importaient peu. Elle écarquilla les yeux, parce que des journées comme celle qu'ils venaient de vivre avait fait son « quotidien » pendant presque cinq mois.

Elle n'arrivait pas à y croire, si bien qu'elle mit ses deux mains sur sa bouche. Elle n'arrivait pas à croire qu'il ait pu assister à des scènes pareilles, comme celles que l'on voit dans les films. Elle en eut le souffle coupée et elle espérait vraiment qu'il n'ait tué personne et n'ait enfreint aucune loi, parce qu'elle ne savait pas qu'une chose pareille, elle pourrait lui pardonner. Elle ne savait pas si elle pourrait encaisser une telle chose, si elle pourrait réaliser qu'il ait pu faire une chose pareille.

Elle ne l'accepterait pas pendant un petit moment, elle en était sûre et certaine sur ce point-là au moins. Elle passa sa main dans ses cheveux, après avoir déposé le pinceau qu'elle avait encore dans les mains. Elle se pinça l'arrête du nez, ne sachant pas quoi faire alors que le dos de Joe était en train de se relever et de descendre comme s'il sanglotait, comme s'il était prit de tremblements. Elle se dirigea vers lui, sentant qu'elle le regretterait dans quelques minutes mais elle le prit dans ses bras tout de même. Il avait besoin d'elle, alors elle pouvait bien être là pour lui, même si elle sentait que cela ne servait strictement à rien.

-J'ai tué trois hommes, une femme, une femme enceinte et deux enfants, Mélanie..., murmura-t-il entre deux sanglots.

Mélanie sentit son monde tombé en miette. Elle ne savait même plus où se mettre. Ses muscles se tendirent, ses articulations se crispèrent. Elle était tendue comme un piquet et assez brusquement, elle se releva laissant Joe dans ses sanglots et ses larmes qui perlaient sur ses joues. Son cauchemar était en train de prendre forme et elle ne savait clairement pas comment le gérer. Elle ne savait pas comment réagir et son corps en prenait un choc alors que ses pensées se brouillaient, devenaient confuses et partaient dans tous les sens. Elle ne savait pas quoi faire, son cœur menaçant d'exploser dans sa poitrine alors que son corps était prit de soubresauts. Il venait de tuer sa confiance.

« Certaines choses ne durent pas éternellement.
-Harry Styles »


***

Musique ; Green Roses - We Are The Empty



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