17 - Planer pour oublier

Mélanie séchait ses larmes d'un revers de la main. Elle n'avait pas envie de pleurer, encore une fois. C'était déjà beaucoup trop dur pour elle en ce moment et sa mère venait rajouter une nouvelle couche à toute cette immondice qui la dépassait de partout. Elle soupira et se dirigea dans la salle d'eau pour se regarder dans la glace mais c'est en voyant le vide qu'il y avait à la place du miroir qu'elle se souvint du sort qu'elle avait jeté sur ce pauvre objet.

Mélanie était à la fois ravie et détestable envers elle-même à cause de ce qui restait du miroir. Parce qu'au moins elle ne pouvait pas voir son visage qu'elle était ravie mais en même temps, c'était aussi pour cette raison et le fait qu'elle allait devoir en racheter un qui faisait qu'elle se détestait elle-même. Elle soupira et passa sa main dans ses cheveux. Elle était à la masse, assèche. Elle sentait qu'elle ne pourrait plus rien supporter et qu'elle craquerait de nouveau parce que c'était beaucoup plus fort qu'elle. C'était déjà de trop pour elle et pourtant, les choses ne cessaient pas de s'accumuler de plus en plus comme si ce n'était pas déjà assez suffisant, comme si elle était encore capable de supporter quoique se soit mais qu'elle n'en était point consciente.

Mélanie sortit de la salle d'eau aussi rapidement qu'elle était arrivée, se retenant de pleurer de nouveau. C'était un véritable surplus qu'elle était en train de subir et pourtant, elle n'avait pas vraiment le choix. Elle était bien obligée de le supporter, de le subir, ce surplus qu'elle détestait par-dessus-tout parce qu'il fallait forcément qu'il arrive avec un tel enchaînement de situation. Elle se doutait bien qu'elle serait rapidement dépassée par les événements mais elle ne se douterait pas que ce serait si rapidement mais aussi, avec de telles successions d'événements. Elle avait l'impression de se retrouver en pleine forêt amazonienne lors des plus grosses précipitations.

Mélanie se servit un verre de jus de pomme, le rinça dès qu'elle le but entièrement et le mit ensuite dans le lave-vaisselle. Elle repartit dans sa chambre pour enfiler des chaussures, qu'elle mit à la hâte et sortit de la pièce. Elle mit ses clés de maison et de voiture dans ses poches de veste, dont elle referma la tirette. Elle mit son cellulaire dans la poche avant de son jean. Elle mit sa carte d'identité avec son téléphone ainsi que son beurre de cacao en cas de nécessité absolue. Elle ne savait pas vraiment où elle se rendait, mais elle sortit de son appartement, ses talons claquant dans les escaliers. Elle continua comme ça jusqu'à sortir de la bâtisse sans savoir où aller.

Mélanie n'avait pas envie de voir quiconque, préférant rester seule. L'air frais et le vent puissant faisait virevolter ses cheveux détachés dans tous les sens et lui procura quelques frissons de froid. Cela lui faisait du bien et apaisait le tourment de ses pensées défectueuses et chevronnées, toutes aussi névrosées et noires. Elle était mal en point et ces pensées ne l'aidaient en rien du tout. Même, cela l'enfonçait plus que tout. Le vent lui apportait une sorte de soutient consistant. Elle sourit du bout des lèvres et s'élança dans la cohue de la foule de Pittsburg. Elle habitait peut-être l'autre côté de la ville maintenant, mais elle vivait encore dans un endroit où la foule était sous ses pieds et qu'elle pouvait les voir depuis son balcon, depuis l'une des grandes baies-vitrées qu'elle avait dans son grand appartement tellement vide depuis le départ de Joe.

Mélanie marchait dans la cohue de la fin de journée. Elle avait le cœur lourd qui battait la chamade dans sa poitrine. Elle avait les mains dans les poches de sa veste et pour ne pas avoir trop froid, elle rentrait sa tête dans son cou, soulevant légèrement ses épaules. Elle ne regardait même pas autour d'elle, mais ses pieds pour vérifier là où elle marche. Puis, elle n'avait point le courage de lever les yeux et d'affronter le regard d'autrui alors que ses yeux étaient encore légèrement injectés de sang à cause des lacrymales qui avaient arrêté de couler de ses yeux sur ses joues il y a peu de temps.

Mélanie continua sa route, s'enfonçant de plus en plus dans les banlieues de Pittsburg, allant même dans les plus malfamées. Mais elle n'avait pas peur, parce qu'elle avait presque vécu dans ces quartiers une majeure partie de sa vie, si bien qu'elle connaissait quelques personnes qui y vivaient et y faisaient des affaires pas toujours les plus saines. Elle n'avait sûrement pas la carrure et l'attitude des individus qui y résidaient mais elle connaissait l'aptitude à avoir avec ce genre de personnes et puis, elle en connaissait quelques-uns et saurait faire valoir ses quelques relations. Elle ne savait même plus si ces connaissances ou très bons amis habitaient encore là puisqu'ils s'étaient éloignés d'elle avec le temps pour ne pas l'embarquer dans leur merdier même, si quelques fois, elle les avait accompagnés.

Mélanie n'avait pas toujours été la gentille adolescente toute sage qui s'occupait de ses frères et sœurs parce que sa mère n'en était pas capable. Elle n'était pas cette personne tout le temps et avait quelques fois tournés un peu maladroitement et n'avait pas toujours eu les bonnes fréquentations mais malgré cela, elle avait réussit à ne pas trop s'enfoncer dans ce merdier qui l'avait quand même fait légèrement sombrer. Elle était tombée de milieu, pour s'échapper du sien qui l'étouffait déjà. Elle avait l'impression qu'en revenant ainsi, la même chose se passerait. Elle espérait du moins, puisque l'espoir était presque tout ce qui lui restait encore.

***

Joe inspira une taffe de son joint, l'expirant ensuite. Il regardait tout le monde qui se trouvait autour de lui et peinait encore à reconnaître des visages, même les plus familiers. Il ne savait plus vraiment où il se trouvait non plus, mais le bonheur et l'apaisement que lui procurait ce cylindre remplit de feuilles de cannabis faisait en sorte à ce que cela n'ait pas vraiment d'importance. Il prit une nouvelle latte de son joint et l'expira les paupières closes. Ces yeux étaient déjà injectés de sang et il se demandait s'il saurait encore tenir debout. Il était « ailleurs ». Il n'était ni dans le passé, ni dans l'instant présent et encore moins dans une projection de l'instant futur. Il se sentait bien, la trachée enfin libérée d'un poids qui le dérangeait plus que tout ; Mélanie.

La jeune femme n'était pas véritablement un poids pour lui, mais il avait tellement peur pour elle mais détestait tout autant le fait qu'elle le rejette sans cesse. Il l'aimait plus que tout, mais il avait l'impression d'avoir dégarnit et fait faillir l'amour qu'elle lui portait en se cassant et cela ; il ne l'acceptait pas. C'était de trop pour lui, parce qu'il était prit dans un piège, dans un dilemme. Il avait le choix entre mettre celle qu'il aimait en danger parce qu'il lui dirait les raisons de ces cinq longs mois d'absence où elle lui avait manqué et où il n'avait pas cessé de penser à elle et entre le fait de ne rien lui dire mais de la laisser lui filer entre les doigts ; il ne savait pas du tout lequel de ces deux alternatives étaient la plus judicieuses.

Joe s'était fourré dans un sale pétrin et il essayait de s'en défaire tout seul sans que cela ne paraisse suspect. Mais quand le danger devient bien plus qu'évident, il s'éloigna de la jeune femme et de toutes les personnes qui formaient son entourage autant de loin que de près pour ne pas les mettre en danger et en péril. Il avait prit soin d'eux, d'une certaine manière, mais en leur faisait tout aussi mal au passage et il doutait d'avoir fait le bon choix. Il doutait fortement qu'il avait encore prit la bonne alternative dans ce dilemme qui s'était posé à lui à cet instant-là, alors c'était pourquoi il hésitait véritablement pour ce nouveau dilemme. Il hésitait et il aurait tellement préféré que Mélanie le prenne dans ses bras et l'accepte à nouveau sans lui poser de questions.

-Mélanie, Mélanie, Mélanie..., murmura-t-il, plongé dans ses pensées.

Joe se mordit la lèvre inférieure. Il n'était ni heureux ni triste. Il était simplement en train de planer et il revoyait le visage de celle qu'il aimait en train de lui sourire. Il revoyait les courbes de son corps, autant vêtus que nus. Il revoyait son dos se courber sous ses coups de reins il y a quelques nuits seulement. Il repensait à cette femme qu'il n'arrivait pas à sortir de son crâne depuis la première fois qu'il l'avait vu dans ce club de strip-tease, le « Fire Club », dans lequel il travaillait à ce moment-là. Il préférait tellement le boulot qu'il avait fait là-bas, notamment parce qu'il y avait rencontré la brunette, plutôt que celui qu'il avait fait pendant cinq mois et qui le rongeait encore. Il y repensait souvent mais essayait de faire comme si de rien n'était. Il était marqué par les gestes qu'il avait accomplit pour le compte et l'intérêt de quelqu'un d'autre lui.

-Ô si tu savais comme je t'aime, chuchota-t-il comme s'il lui susurrait les mots au creux de son oreille.

« Il faut vouloir vivre et savoir vivre.
-Napoléon »

***

Musique ; Distance - Jack And Jack


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