Chapitre 17
« Ça te va bien, » dit Harry, sifflant tel un loup et haussant ses sourcils.
« Mm. Je sais pas. J'pense pas que ce soit très...moi. J'veux dire, ne le prends pas mal, j'aime beaucoup sur toi, mais j'sais pas, il y a quelque chose qui est un petit peu... » Luttant pour mettre des mots sur ses pensées, Louis fronça des sourcils à son reflet dans le miroir et passa une main sous la pagaille de chaînes pendant autour de son cou pour toucher le chapelet en dessous. « Sombre ? On peut pas enlever un peu d'eyeliner ? »
Ils étaient assis sur un tabouret en face du miroir de la chambre de Harry, mordant sa lèvre alors qu'il fixait son reflet. Ils sortaient ce soir, dans une boîte de nuit, quelque part où Louis pourrait avoir sa première vraie expérience avec l'alcool sans supervision parentale et qui n'était pas du vin d'église infâme ou du punch coupé à l'eau, et Louis avait avec méfiance accepté de laisser Harry choisir ses habits et le maquiller, après qu'il ait admis son désir secret de voir Louis habillé comme un punk. Voulant le rendre heureux, Louis avait consenti. Maintenant il n'était plus aussi sûr.
Harry avait teint une mèche bleue foncée dans ses cheveux – « ça part à l'eau, promis, c'est seulement pour une nuit ! » « Il vaut mieux ! » – et avait insisté pour les laisser naturels, pas relever comme habituellement, parce qu'il disait aimer la frange de Louis. Apparemment, il ne mentait pas ; il n'arrêtait pas de faire distraitement courir ses doigts à travers, ce que Louis appréciait beaucoup plus qu'il ne voulait le laisser entendre. Il continuait de ressentir l'envie bizarre de faire une sorte de ronronnement de contentement qu'il était déterminé à ne jamais laisser passer ses lèvres.
Ils avaient tous les deux essayé de faire délicatement pénétrer différents anneaux ou autres piercings, de différentes tailles, à la lèvre de Louis en espérant que le trou ne se soit pas refermé. Mais il l'était presque à présent, définitivement trop petit pour faire glisser quoi que ce soit à travers, alors cette idée devait être abandonnée. Harry semblait un peu triste.
Louis portait un chinos noir raisonnablement anodin ; Harry avait un goût prononcé pour les jeans tellement serrés qu'ils semblaient être en train d'essayer d'étouffer ses jambes, et bien que celles de Louis soient plus courtes que celles de Harry, elles n'étaient pas plus maigres, et la légère courbe de son ventre signifiait qu'il avait lutté en vain de se glisser dans un des jeans de Harry et qu'il avait misérablement échoué. Ça avait été extrêmement humiliant pour lui, et il avait presque tenté d'annuler toute cette chose alors qu'il était enfermé dans la salle de bain et fixait son ventre, se demandant où avait bien pu passer ses abdominaux, avant que Harry n'entre brusquement à l'intérieur – « Hé ! T'aurais pu toquer, j'aurais pu être en train de pisser ou autre ! » « Et alors ? J'ai déjà vu ta queue – merde, je l'ai déjà eu dans ma bouche » – et il s'était laissé tomber à genoux, l'embrassant de son cou jusqu'à sa petite raie du bonheur, sa bouche s'attardant sur la légère couche de poil émergeant du haut de son boxer, et il lui assura aimer son ventre.
Il fallut un certain temps à Harry pour honorer son ventre comme il se devait, avant que Louis soupire et accepte de sortir avec lui, parce que peut-être que ce n'était pas si mal (et peut-être qu'il ferait semblant d'être un peu plus en colère à propos de tout ça qu'il ne l'était réellement, parce qu'il appréciait assez que Harry l'embrasse avec tant de dévotion.) Il portait également, après tout un tas de contrainte et de corruption sous la forme de promesses de faveurs sexuelles de la part de Harry, un tee-shirt noir cintré couvert de crânes argentés et avec de petites chaînes en argent pendant des manches et du col. Les mains expertes de Harry avaient souligné ses yeux avec un noir profond, et l'appliquant artistiquement afin de moins ressembler à raton-laveur et plus à quelqu'un plein de confiance, quelqu'un sans peur. Quelqu'un qui pourrait se tenir aux côtés de Harry, qui semblait en permanence imperturbable à ce que quiconque pouvait dire, et semblait être là où il était supposé être.
Pourtant, Louis ne pouvait s'empêcher d'avoir l'impression que c'était peut-être un peu trop.
« N'ose pas y toucher ! T'es parfait. Tu fais quelle pointure de chaussures, au fait ? Où est-ce que j'ai bien pu mettre mes Doc Martens ? » Fronçant des sourcils, Harry retourna dans son armoire et commença à fouiller, et Louis observa avec amusement trois paires de Converse noirs, quatre hauts et une seule tong solitaire voler par-dessus sa tête.
« A peine parfait, je pense. Et t'es vraiment sûr que je dois changer mes chaussures ? Qu'est-ce qui ne va pas avec celles que je porte ? » Il pointa, avec une indignation feinte, ses Converse blanches et sales.
Sautillant en s'éloignant du placard, Harry haussa un sourcil, feignant le dégoût. « S'il te plaît, chéri – ces chaussures, avec ce haut ? Ne jamais mélanger le noir et le blanc, t'auras l'air d'un zèbre. Sauf si c'est ton haut qui est blanc. Ça fonctionne toujours. Allez, on est tous les deux des homosexuels flamboyants, tu t'souviens ? Tu devrais déjà savoir ça. »
Soupirant, Louis se leva et s'affala dramatiquement sur le lit de Harry. « Je sais, je sais. Je suis une honte pour la communauté homo ! Je devrais simplement me terrer dans un trou pour cacher ma honte à jamais et ne plus jamais montrer mon visage ! »
Souriant, Harry se dirigea vers lui et laissa tomber une paire d'énormes bottes noires sur le sol à côté du lit. « Ça serait une honte terrible. J'ai en quelque sorte un faible pour ton visage, tu sais. Bouge un peu. » Enfonçant ses doigts des les côtes de Louis, il attendit qu'il se tortille pour se décaler assez afin qu'il puisse se pelotonner à côté de lui sur le lit, puis il posa sa tête sur le torse de Louis, jouant distraitement avec l'assortiment de bracelets qu'il avait glissé à son poignet. L'un d'eux était celui en caoutchouc aux couleurs vives de l'arc-en-ciel que Louis avait remarqué la première fois qu'il avait vu Harry.
Glissant ses doigts dans les cheveux de Harry, Louis massa son cuir chevelu pendant un moment, laissant les épaisses boucles brunes se faufiler entre ses doigts comme des vagues de soie, faisant courir ses mains à travers le désordre sombre de cheveux pendant que Harry soupirait de contentement, poussant sa tête contre les mains de Louis. Satisfait par la réaction qu'il reçut, Louis continua de masser la tête de Harry jusqu'à ce qu'il remarque que ce dernier se léchait les lèvres et resserra sa prise sur les bracelets autour du poignet de Louis, le regard rivé sur les yeux bleus soulignés par le maquillage, et ce fut à ce moment qu'il comprit quelque chose.
« Est-ce que t'aimes bien ça ? » demanda-t-il, amusé.
« Quoi, le truc au crâne ? Bien sûr. J'ai une sorte de truc à propos de mes cheveux. Tu peux continuer si tu veux. » Harry s'arrêta. « En fait, je m'en fous de si tu veux pas ; s'il te plaît, n'arrête pas. »
Gloussant, Louis continua de tirer doucement sur ses cheveux, essayant de lisser ses boucles indisciplinées en quelque chose d'à peu près net, même s'il savait très bien qu'il menait une bataille perdue d'avance. « En fait, je parlais de l'eyeliner. Et des vêtements de punk. Et de moi les portant. »
« Oh, ouais. C'est sympa, c'est vraiment sympa... mm... » Se tortillant de plaisir sous la pression des mains de Louis, Harry admit, « Ouais, je suppose que j'aime. Je t'ai dit comment je me sentais face à cette idée, hein ? J'aime encore plus que c'que j'aurais pensé. »
« Je ne pense pas que je vais en faire une habitude, pour être honnête. Ce n'est pas vraiment moi. Peut-être que je le ferai pour ton anniversaire. Ou à Noël, ou pour les anniversaires de notre rencontre, ou quand tu seras en colère contre moi. Mais je suis sérieux, ça te plaît vraiment ? »
Rougissant, Harry acquiesça. « Quoi, tu pensais que je voulais que tu t'habilles comme ça pour rire ? »
« J'sais pas, je suppose que je pensais en quelque sorte que... peut-être que tu allais te moquer de moi. »
Choqué, Harry se redressa ; Louis dut précipitamment démêler ses doigts pour éviter d'arracher la moitié de ses cheveux. « Quoi ? »
Mal à l'aise, Louis se tortilla et détourna le regard.
Attrapant son menton, Harry lui fit tourner la tête pour pouvoir le regarder dans les yeux. « Tu pensais que j'allais me moquer de toi ? »
« Oui. Non. Peut-être. Je sais pas. »
« Pourquoi je ferais ça ? Pourquoi je me moquerais de toi, surtout pour être habillé de la même façon dont je le suis tous les jours ? »
« Parce que j'ai l'air stupide ! » cria Louis de frustration, tirant sur le chapelet autour de son cou. « Regarde ! » Mettant Harry sur ses pieds, il le tira vers l'armoire, où il y avait un grand miroir à l'intérieur de la porte, et il pointa leurs reflets, debout main dans la main, le visage de Louis contrarié et celui de Harry confus. Se tenant côte à côte, la différence entre eux était encore plus apparente. Dans un haut noir uni et un jeans, portant une seule grosse chaîne autour de son cou et encore plus à ses poignets, ses tatouages vifs et visibles sur ses bras pâles, en dessous de ses cheveux violets et pieds nus, Harry avait complètement l'air d'un punk. Ce n'était pas seulement dans les vêtements, mais également dans la confiance avec laquelle il se fixait dans le miroir, la façon dont il respirait le calme et la confiance de soi et était si clairement à l'aise avec son corps. A côté de lui, Louis se tortillait d'embarras, ayant l'impression qu'il faisait simplement semblant – la mèche bleue royale et éclatante dans ses cheveux semblait trop évidente, comme s'il criait 'REGARDEZ-MOI !' à plein poumon. Il y avait trop de collier autour de son cou, semblant ridicules en contraste avec la croix, et les bracelets à ses poignets n'arrêtaient pas de glisser bizarrement les uns sur les autres ; il devait constamment les remonter pour les empêcher de tomber, puisque ses mains nettement plus petites n'étaient pas assez larges pour les retenir comme le faisait celles de Harry. Le pantalon que ce dernier lui avait prêté était ample autour de ses chevilles et il avait dû le retrousser parce qu'il était trop petit. Le haut était légèrement tendu sur la courbe de son ventre. Le visage rouge et énervé, il avait l'air ridicule. « Regarde-moi ! J'ai l'air pathétique. » Il se détourna misérablement de son reflet.
Le bras de Harry s'enroula autour de sa taille et il l'étreignit, ses lèvres effleurant sa clavicule. « D'accord, » dit-il doucement. « Tu veux que je te dise quelque chose ? Je trouve que t'es sexy. Aucune once de mensonge, c'est vraiment – te voir comme ça, c'est tellement sexy, ça m'excite plus que tu ne pourrais le croire. Genre – putain, Louis, qu'est-ce que je donnerais pour que tu me jettes sur lit tout de suite et – » Se coupant tout seul, il prit plusieurs profondes respirations. « Eh bien, t'as compris l'essentiel. Mais je suis désolé. Je suis aussi nul que ta mère, en essayant de te faire ressembler à moi, quand t'es clairement pas à l'aise comme ça, et ce n'est pas juste. Je vais pas te forcer à faire quelque chose qui te rend malheureux. Je vais chercher le démaquillant. Ne le prends pas mal, je trouve vraiment que t'es magnifique, mais si tu n'aimes pas ça, alors ce n'est pas grave. »
Louis le regarda fixement. « Tu n'es pas fâché ? »
Harry le fixa également. « Bon sang, » dit-il doucement, « tu n'écoutes jamais un mot de ce que je dis, hein ? Bien sûr que je ne suis pas fâché contre toi ! C'était seulement une sorte d'expérience, pour voir comment tu te sentirais comme ça. J'étais pas sûr d'à quel point tu voulais me ressembler. Maintenant je sais. T'es toi. » Il embrassa la joue de Louis avec ce qui semblait étonnamment être proche du soulagement. « J'étais un peu inquiet. J'étais pas sûr de si t'étais juste... je sais pas, en quelque sorte en train de m'imiter, parce que tu pensais que ça allait te rendre heureux, et confiant, et tout ça. Je ne veux pas que tu sois la copie de quiconque. Je veux que tu sois toi. »
« Ouais, mais quand t'y penses, tout le monde est une copie. Regarde autour de toi. Tout ce que tout le monde fait est quelque chose qu'ils ont piqué sur quelqu'un d'autre – les coiffures, les goûts musicaux, la nourriture préférée, les émissions télé, tout ce que tu aimes est quelque chose que quelqu'un d'autre a aimé en premier. On est dans un monde de copies. L'individualité est juste une combinaison différente de l'imitation d'autres personnes. »
Souriant, Harry dit, « Wow. Ecoute qui c'est qui débarque maintenant avec tous ces discours philosophiques profonds. Je pense que tu auras réduit en miette toute ma théorie du tableau blanc d'ici la fin de la semaine prochaine. » Il posa sa tête sur l'épaule de Louis. « Je trouve que t'es la copie la plus unique que j'ai jamais rencontré, » murmura-t-il, « si ça peut te consoler. »
Louis lui répondit en se retournant, attrapant son visage et l'embrassant. Surpris, Harry le saisit par la taille et le rapprocha de lui, répondant avec enthousiasme à l'engouement derrière le baiser, et très rapidement leurs doigts furent dans les cheveux de l'autre et leurs respirations devenaient précipitées et haletantes. Louis recula vers le lit, faisant courir ses mains à travers les cheveux de Harry et le long de son dos tandis que Harry l'embrassait presque désespérément, ses mains agrippant suffisamment fort les hanches de Louis pour pouvoir lui laisser des marques.
« Peut-être que je vais pas enlever l'eyeliner tout de suite, » chuchota Louis, et il tira le haut de Harry par-dessus sa tête.
**
« Vous êtes en retard, les gars, » cria Niall, agitant la main vers eux de l'autre côté de la rue.
Souriant, Harry tira Louis par la main à travers la route, et ils coururent jusqu'à l'endroit où le blond et Zayn se tenaient l'un à côté de l'autre. Zayn regardait ostensiblement son poignet, où sa montre aurait été s'il en portait une ; Niall, tout en agitant toujours sa main avec enthousiasme, faisait également semblant de dormir avec sa joue appuyée contre son autre main, imitant des ronflements. Ses yeux étaient fermés et Harry voulut vraiment s'approcher tout près de lui pour qu'ils soient nez à nez lorsqu'il les ouvrirait à nouveau, lui foutant la peur de sa vie, mais il pensa que Louis pourrait peut-être être un peu jaloux. Il avait admis être du genre jaloux.
« Ouais, bref. Désolé, » s'excusa-t-il sans vraiment le penser, « on a eu des, euh, choses de dernières minutes à régler. » C'est-à-dire retirer à l'eau la plupart de la teinture bleue des cheveux de Louis et changer leurs vêtements, puisqu'ils avaient froissé ceux qu'ils portaient au départ. Louis avait trouvé un pantalon beige et un pull en laine épais avec un assortiment de couleurs à travers les mailles, et avec ses cheveux toujours pas totalement secs, tombant de façon souple et brillante sur son front, ses converses sales aux pieds, il semblait tellement heureux que ça fit louper un battement au cœur de Harry. Voir Louis enfin libre, pouvoir être lui-même après avoir, pendant si longtemps, fait croire à tout le monde et à lui-même qu'il était quelqu'un d'autre – il était tellement heureux qu'il rayonnait.
Là encore, ça aurait pu être à cause du colossal orgasme qu'il avait eu moins d'une demi-heure auparavant. Harry s'attendait à avoir l'air tout aussi heureux.
Niall se dirigea vers eux, haussant un sourcil, puis il enfouit son nez dans les cheveux de Harry et inspira profondément. Il grogna puis renifla l'épaule de Louis, faisant s'échanger un regard perplexe entre les deux garçons concernés, puis Niall annonça, « Ouais, c'est bien ce que je pensais. C'est pas difficile à dire pourquoi vous êtes en retard tous les deux. Vous puez le sexe. »
Louis rougit et Harry sourit.
« Ça se peut bien, mais tu sens l'odeur de Zayn. Quelque chose que tu voudrais me dire, hein ? »
Feignant la nonchalance, Niall dit, « C'est quoi un peu de câlins entre potes ? Surtout des potes qui sont sortis ensemble dans le passé. »
« Et peut-être sur le point de recommencer ? » taquina Harry.
« J'sais pas. Peut-être. On verra comment ça se passe. Maintenant, aussi sympa que c'est de rester ici à parler de la vie amoureuse de tout le monde comme un groupe de filles, on a des choses à faire, des endroits où être. Il est temps de faire la fê-teuh, j'ai raison ou j'ai raison ? »
« Fê-teuh ? » demanda Louis avec un sourire en coin.
« Fê-teuh. Surtout l'accent sur le teuh, ou ça fonctionne pas. » Ebouriffant les cheveux fraîchement lavés de Louis, Niall cria, « Allons peindre la ville en rouge, mes homos préférés ! Si la fê-teuh ne démarre pas tant qu'on est pas dedans, alors toute la ville est cruellement en manque d'action, alors allons-y et exerçons un service d'intérêt public pour faire démarrer la soirée ! » Puis il sauta en l'air, chantant du Ke$ha dans sa barbe, étonnamment mélodieusement.
« Il est déjà bourré ? » demanda Louis avec amusement.
Zayn renifla. « Malheureusement non. Au moins de cette façon on pourrait lui pardonner. Mais non, c'est juste un con. Niall, reviens, espèce d'imbécile ! » cria-t-il, « le pote de Louis est pas encore là ! »
S'arrêtant dans son élan, Niall laissa échapper un gros soupir de déception et revint parmi eux, les mains enfoncées dans ses poches et boudant.
« Tout le monde est en retard aujourd'hui, » dit-il tristement.
Comme en réponse, une voix cria depuis l'autre côté de la rue, « Désolé je suis en retard ! »
« Liam ! » s'exclama Louis, se dégageant du flanc de Harry pour courir vers son ami.
Les cheveux rasés de Liam repoussaient en un mignon petit duvet sur le sommet de sa tête. Il portait un haut blanc, un jeans délavé, des baskets ASDA et un truc gris et lâche qui ressemblait suspicieusement à une sorte de gilet, mais de toute façon tout lui allait bien. Il avait une croix pendant autour de son cou, pas très différente de celle que Louis avait l'habitude de porter, ce qui enfonça un coup de poignard rempli de nostalgie en plein milieu du ventre de Louis, qu'il finit par rapidement ignorer pour envelopper Liam dans ses bras. Respirant l'odeur familière de la lessive de Liam, la marque Lynx qu'il portait depuis ses douze ans, et une odeur que Louis n'arrivait jamais à replacer mais qui lui avait toujours un peu rappelé celle d'un vieil ours en peluche, Louis tapota le dos de Liam et savourait le fait d'avoir un petit bout de son ancienne vie qui restait constant et sur sui il pouvait compter – et qui ne le détestait clairement pas. Ce fut plus soulageant qu'il ne l'aurait jamais imaginé quand il avait appelé Liam et lui avait supplié de sortir avec eux ce soir. Louis était toujours en quelque sorte en train de chercher sa place dans le groupe de Harry, bien qu'ils lui aient donné l'impression d'être à peu près autant le bienvenu qu'ils auraient pu le faire, et c'était agréable de ne pas être le seul qui soit toujours peu sûr de lui.
« Whoa, prenez une chambre, les gars, » commenta Niall en sifflant.
« J'commence à devenir un peu jaloux, Lou, » dit Harry ; il plaisantait mais il y avait un léger tranchant dans sa voix qui laissait suggérer que, peut-être, il était également un peu sérieux, alors Louis se défit de l'étreinte et glissa à nouveau sa main dans celle de Harry, entrelaçant leurs doigts et se rendant seulement compte à cet instant que le contact lui avait manqué. Il sentit une oppression étrange dans sa poitrine se disloquant lorsque le pouce de Harry caressa le dos de sa main, effleurant ses jointures, et il se rendit compte qu'il avait vraiment été un peu inquiet que Liam ne vienne seulement que pour lui crier dessus, même s'il avait semblé assez amical au téléphone. La seule personne contre qui Louis pouvait dire qu'il avait été en colère était Jay – et c'était assez bizarre de voir Liam en colère, en premier lieu, tandis qu'il était habituellement tellement calme et imperturbable.
Profitant de la position de Liam, un peu à l'écart du reste du groupe, Niall se précipita derrière lui, jetant un coup d'œil à son cul, et il ne sembla pas entièrement déçu. Il lança quelques regards entre le derrière de Louis et celui de Liam, comme s'il les comparait, et hocha pensivement de la tête. Puis il se mit sur la pointe des pieds pour regarder Liam dans les yeux, tourna tout autour de lui pour l'examiner sous chaque angle, puis recula, sembla assez satisfait de ce qu'il voyait.
« Il est assez mignon aussi, » dit-il, faisant un signe de la tête vers Liam. « Franchement, Harry, où les trouves-tu ? J'suis supposé être hétéro, tu sais, mais il y a beaucoup trop de jolis culs par ici pour me faire réfléchir correctement. De plus d'une façon, » finit-il en rigolant.
Imperturbable par le fait que lui et Niall venaient seulement de poser les yeux l'un sur l'autre et que déjà le blond le draguait, Liam lui sourit et le regarda de haut en bas de façon pas du tout subtile, comme s'il avait des pensées similaires, bien qu'il le faisait de façon bien assez débile pour montrer qu'il ne faisait que plaisanter, puis il fit un signe de la main à Harry, tira sa langue à Zayn, et tapota Louis dans le dos avec un grand enthousiasme.
« Comment tu t'appelles, étranger ? » dit Niall avec une voix traînante et un pseudo accent américain, détachant chaque mot avec un accent texan exagéré. Louis se sentit incroyablement tenté de sentir son haleine pour voir si Zayn avait tort et qu'il était, en fait, bourré, mais il soupçonnait qu'il aurait quand même pu flirter avec Liam sans l'être. Dans ce cas, il avait une définition bien étranger de flirter.
« Euh... Liam ? » répondit ce dernier perplexe, comme s'il n'était pas sûr que ce soit la bonne réponse. Louis pourrait compatir. Niall avait ce genre d'effet sur tout le monde.
« Super, » dit Niall vivement, laissant immédiatement tomber l'accent comme s'il venait soudainement d'en avoir marre – ce qui, en toute impartialité, était probablement le cas. « Eh bien, maintenant qu'on a tous été présenté, on devrait se mettre en route pour cette fê-teuh, non ? »
Sifflant joyeusement pour lui-même, Niall s'éloigna d'eux en sautillant, ignorant apparemment complètement l'étrangeté de la vision d'un punk blond galopant à toute vitesse dans la rue, ou peut-être qu'il s'en fichait, ce qui était beaucoup plus probable. Déconcerté, Liam le fixa, passant une main dans ses cheveux courts, et demanda, « Il est, euh. Il est déjà bourré ? »
« Non, c'est juste un con, » dirent Zayn et Louis à l'unisson, et se souriant.
Ils commencèrent tous à marcher, suivant Niall dans un silence agréable. Louis était confortablement niché sous l'un des longs bras remplis d'encre de Harry, ses doigts fins et bronzés liés à ceux élégants, blancs et osseux de Harry qui pendaient par-dessus son épaule, reposant contre son torse. Zayn était silencieux, peut-être un peu timide à cause du nouvel arrivant dans leur groupe, trainant légèrement en retrait derrière avec son regard brun rivé sur le sol comme s'il avait perdu quelque chose et le cherchait, les mains enfoncées dans ses poches. En tête, Niall était aussi exubérant qu'à son habitude, les cheveux tout blonds et la voix élevée, avançant nonchalamment et alternant entre les rires et les jurons à chaque fois qu'il trébuchait sur ses bottes légèrement trop grandes. Liam, pas tout à fait à l'aise, déambulait à mi-chemin entre Niall, qui s'était aventuré à l'avant, et Harry et Louis, qui suivaient tranquillement. Ils ne s'accordaient pas encore tout à fait correctement, tous les cinq. La dynamique du groupe était répartie de façon trop inégale ; Harry et ses amis avait une amitié désinvolte, en quelque sorte facile, provoquée par le lien forgé au cours des années de loyale camaraderie à l'école, renforcée par la façon dont ils s'étaient résolument accrochés à lui lorsque les autres lui avaient tourné le dos. Louis, en tant qu'ami de Harry – puis petit-ami – avait été accueilli dans leur groupe, puisque ça avait été décidé que Harry était excellent pour juger les personnes et s'il croyait que Louis était quelqu'un de bien, alors il devait l'être. Après l'avoir rencontré plusieurs fois dans le passé, et à différents stades de l'ivresse, Zayn et Niall étaient, à présent, assez à l'aise avec lui.
Le problème était d'essayer de trouver une place à Liam dans le groupe. Liam et Louis étaient amis depuis la maternelle et peut-être même avant ; plusieurs des souvenirs les plus flous datant de son enfance étaient avec Liam dans les parages, et le genre de coexistence simple qu'ils avaient, une relation qui avait si longtemps été en formation qu'il ne pouvait même pas s'imaginer un jour avoir du mal à être simplement avec Liam. Leur amitié leur avait demandé tellement peu d'efforts pendant si longtemps qu'elle était encore plus simple que ABC. Il connaissait Liam depuis plus longtemps que son alphabet.
Sa relation avec Harry, aussi courte qu'elle puisse être, était tout autant... facile n'était pas le bon mot ; il y avait eu un trop grand nombre de bosses sur la route pour la décrire comme telle. Mais Harry le connaissait tout aussi bien, si ce n'était mieux que Liam. Il le connaissait certainement plus intimement. Cependant, c'était peut-être plus un obstacle qu'une aide. Pendant que lui et Harry étaient confortablement blottis l'un contre l'autre, ayant tout l'air d'un couple heureux, ils étaient détournés du reste du groupe et ne pouvait aider à briser la glace.
Pourtant, Zayn, bien que timide au début et méfiant envers les personnes qu'il ne connaissait pas, ne fut pas foncièrement hostile, et Niall était comme un labrador tout fou et avançant maladroitement, pressé à la fois d'aimer et d'être aimé. Quant à Harry, il était pressé de prouver qu'il pouvait faire partie de la vie de Louis, qu'il y avait une place (pour un garçon qui refusait si obstinément de se fondre dans la masse, c'était surprenant à quel point il était désespéré de se faire une place) et dans la mesure où il s'en préoccupait, se lier d'amitié avec autant d'amis de Louis que possible impliquait que la rencontre constituerait tout une partie du processus. Jusqu'ici, lui et Liam s'entendait à merveille. Pour Liam et Louis, cette merveille resplendissait depuis si longtemps qu'elle avait éclaté en des étoiles de confort ; pour Liam et Harry, c'était tout juste un petit éclat.
« Alors on va où ? » demanda doucement Louis.
« Eh bien, tu sais Niall est un peu une bête de fê-teuh, comme il l'a si bien exprimé, » dit Harry avec un sourire, « alors je pensais qu'on pourrait aller en boîte. Rien de sauvage, » promit-il quand Louis le regarda avec crainte, « j'y vais depuis que j'ai quatorze ans, tout est très calme. Il y a des videurs à chaque coin pour garder un œil sur tout – et ils censurent même les jurons dans les chansons. » Puis il lança à Louis un sourire arrogant qui aurait valu une claque à quiconque, mais c'était stupidement mignon et niais sur le visage de Harry. Son piercing au labret et ses angel bites brillaient sous la lumière, au ton d'un couché de soleil orangé, des lampadaires de la ville.
« Il y aura une piste de danse ? J'suis un peu un danseur de merde. »
« Ne t'en fais pas, moi aussi. Je saute juste en quelque sorte partout, agite mes cheveux dans tous les sens et ai l'air d'un imbécile, et personne n'ose rire parce que je suis trop intimidant, et tout ça. »
Il avait parlé relativement doucement, mais Niall l'entendit quand même et ricana bruyamment.
« On est pas obligé de danser si on n'en a pas envie. On peut simplement prendre quelques verres et regarder Niall se ridiculiser. »
« Hé ! »
« Il va se ridiculiser, » lui assura Harry. « C'est un fait. »
« Je peux entendre chacun des mots que tu dis ! »
« C'est exactement la raison pour laquelle je les dis. Bref. Je pense que tu vas t'amuser, Lou. C'est pas comme une rave, ou quelque chose comme ça. Pas que j'aimerais pas te jeter dans un pogo et te voir tout en sueur et sexy... » Se coupant, Harry sourit d'un air penaud, léchant ses lèvres rouges. « T'as compris l'idée. Mais je pense qu'on va peut-être garder ça pour une autre fois. Mon anniversaire est dans quelques mois. » Tapotant joyeusement Louis sur les fesses, il retira son bras d'autour de ses épaules et courut pour rejoindre Niall.
Louis n'avait jamais vraiment été en boîte de nuit avant. Pourquoi le devrait-il ? Il avait toujours été le genre à rester chez lui, étudiant pour essayer de continuer à rendre ses parents heureux, jouant avec ses sœurs, aidant aux tâches de la maison. Maintenant, il n'avait plus à faire aucune de ces choses, et malgré les frissons que la liberté envoyait violemment dans sa colonne vertébrale, il pensait que ça finirait peut-être par lui manquer. Peut-être même que c'était déjà un tout petit peu le cas.
Mais. Il était le petit-ami de Harry à présent. Harry n'était pas cool ; il n'avait jamais été cool, et il ne le serait jamais. Harry était un bel abruti maladroit, et il n'avait pas du tout honte de le montrer. Ce que Harry était, c'était confiant, du moins en apparence. C'était un fêtard. Il aimait bien les soirées tranquilles avec Louis, des DVDs et un grand bol de popcorn, mais il aimait aussi sortir, danser même s'il était ouvertement catastrophique à ça et que la musique était pour les préadolescentes, totalement pas son genre. Louis ne voulait pas l'enfermer, et il était curieux. Il avait vu Harry calme, Harry heureux, Harry en colère, Harry triste, Harry nerveux, Harry dormant, Harry vulnérable, Harry arrogant, Harry gémissant en plein orgasme, Harry joueur, Harry dragueur – mais il n'avait pas encore vu Harry bourré ou même sur la piste de danse d'une boîte de nuit, et il voulait connaître chaque aspect de Harry, chacune de ses nuances, des morceaux que tout le monde voyait à ceux que seuls lui et Harry pourraient voir, et il voulait savoir que Harry lui faisait implicitement assez confiance pour ne pas seulement le laisser gravir ses remparts, mais comprendre pourquoi il les avait érigé en premier lieu. Pour lui montrer ses fissures et croire au-delà du doute que Louis n'utiliserait jamais ces faiblesses contre lui. Louis était convaincu que Harry le comprenait. Peut-être qu'il ne le connaissait pas encore complètement. Ils n'étaient pas ensemble depuis assez longtemps pour ça. Mais Harry comprenait terriblement bien les rouages de l'esprit de Louis, il aurait probablement pu prévoir ses mouvements en une centaine de scenarios différents, alors que Harry était toujours un élément solitaire, imprévisible, comme un personnage dans un roman d'assassinat mystérieux qui avait commencé à s'écrire de lui-même – et Louis voulait le connaître assez bien pour comprendre les spoilers.
Il était plutôt nerveux à l'idée de savoir s'il serait autorisé à entrer à l'intérieur, cependant. Maintenant qu'ils étaient en train de faire la queue, il avait eu plein de temps pour examiner toutes les autres personnes essayant d'entrer dans la boîte de nuit, et au grand dam de Louis, ils semblaient tous beaucoup plus cool que lui. Hormis le petit groupe de punks marginaux et excités de Harry, il y avait plusieurs groupes de filles en jupes courtes et avec des coiffures élaborées, haussant leurs sourcils épilés à quiconque posant ses yeux sur elles. Il y avait un groupe de garçons avec de longs cheveux et des biceps effrayants qui n'arrêtaient pas de se frapper les uns et autres pour essayer d'impressionner les filles, qui semblèrent cependant encore moins impressionnées à la seconde où la parade commença. C'était plutôt comme regarder des animaux se battre pour gagner une femelle, sauf que chacune des filles donnaient l'air que le premier garçon qui s'approcherait d'elles, après avoir cogné tous ces amis, finirait avec un talon aiguille enfoncé dans l'œil. Il y avait pas mal de couples ; des filles blotties contre leurs petits-amis, gloussant, mâchant du chewing-gum, flirtant comme si c'était un match de tennis de table et échangeant rapidement des plaisanteries entre eux, comme une balle de ping-pong. Louis vit un couple lesbien également, main dans la main avec la tête de l'une des filles posée sur l'épaule de sa petite-amie dans une position qu'il reconnaissait très bien, et il trouva ça rassurant que lui et Harry ne soient pas le seul couple du même sexe dans la pièce.
« Harry, ils ne me laisseront jamais entrer, » murmura-t-il. Les perles du chapelet autour de son cou semblaient volumineuses et lourdes, une déclaration criée au monde à propos de sa dévotion à la religion – quelque chose qui ne l'aurait habituellement pas dérangé ; il était fier de sa foi, mais il détestait l'idée que ces filles boudeuses avec leurs cheveux bien coiffés se moquent de lui pour ça, et il détestait encore plus l'idée qu'il pourrait être tourné en ridicule et que l'entrée lui soit refusée, parce que avouons-le ; ce n'était pas exactement une activité religieuse. Il ne pensait pas qu'un seul de ses camarades d'école ait déjà été vu ici de son vivant.
Harry lui sourit en signe d'encouragement. « Bien sûr que si. Suis simplement mes pas. »
La file d'attente fit un bond en avant tout d'un coup ; Louis recula automatiquement mais Harry saisit son poignet et le tira en avant, sa prise ferme mais rassurante, le gardant près de lui, puis ils se précipitèrent vers l'entrée et s'arrêtèrent net devant un énorme videur qui était tellement grand qu'il dominait même largement Harry, dont le nez arrivait environ au niveau du torse musclé. Imperturbable, Harry leva sa tête, la penchant légèrement sur le côté gauche, et lui et le videur se scrutèrent pendant un moment. Un sourire narquois ornait tout le visage de Harry, et Louis s'attendit à moitié à ce qu'il soit frappé à cause de l'insolence même de son expression.
Puis, Harry fit à l'homme un petit clin d'œil impertinent, et Louis fut à cent pourcent sûr qu'il était sur le point de se faire frapper. Il se prépara à tirer Harry en arrière, ce qui était de loin plus susceptible de fonctionner plutôt qu'essayer de bloquer le coup, car il se sentait encore plus petit que d'habitude à côté de ce géant.
A la surprise totale de Louis, l'homme laissa apparaître un sourire qui grandit jusqu'à en devenir un à part entière, comme s'il avait seulement eu l'intention de contracter ses lèvres mais l'humeur joviale de Harry était en quelque sorte contagieuse. Secouant sa tête, l'homme roula des yeux vers Harry comme s'ils étaient amis et qu'il était habitué à sa stupidité, puis il leur fit signe à tous d'entrer, souriant toujours grandement.
Louis n'eut pas le temps d'être encore plus choqué ; Harry le tira à l'intérieur et, tout d'un coup, il fut dans sa toute première boîte de nuit.
C'était à peu près comme dans les films, mais moins intimidant qu'il ne l'avoir imaginé. La musique était assez forte, de sorte que ce soit difficile d'écouter la conversion des autres personnes, ou même d'entendre tout à fait bien ce que disaient les personnes qui se tenaient assez près de vous, mais elle n'était pas forte au point de faire mal aux oreilles. Personne n'était déjà bourré ou ne pleurait. Il ne pensait pas non plus que quiconque soit déjà défoncé. Et maintenant qu'il était réellement à l'intérieur et pas terrifié par le fait de faire honte à Harry et lui-même en se voyant refuser l'accès à la boîte de nuit, où Harry arrivait à entrer sans problème depuis ses quatorze ans, Louis se sentit beaucoup plus à sa place. Il ne fallut pas longtemps pour se rendre compte qu'il n'avait, au moins, rien à craindre sur le fait d'être plus cool que ces crétins se bousculant les uns les autres à l'extérieur.
Au bar, Niall leur faisait vivement signe, faisant presque tomber le verre de la main d'une fille qui se trouvait à côté de lui, et qui avait une coiffure mignonne et des lunettes trop grandes pour son visage. Elle lui lança un regard méchant, puis elle lui lança un second regard, restant bouche bée devant lui, soit parce qu'elle était attirée par lui soit parce qu'il était définitivement un spectacle intéressant à lui tout seul, habillé de la tête aux pieds en noir et portant un débardeur qui tombait pour montrer son pentagramme tatoué, et sautant de haut en bas comme un gamin de six ans surexcité. Ils se dirigèrent vers lui, puis Niall commença à parler, les mots sortant de sa bouche tellement rapidement que Louis aurait eu du mal de les entendre même sans la musique.
« Bon, quel est votre poison, les gars ? Je paye la première tournée. »
« Vodka orange, » dit Zayn d'un air ennuyé, sortant son téléphone de sa poche, « et ne lésine pas sur l'orange. »
« Tu dis ça comme si j'étais derrière le bar. Liam ? »
« Euh, je vais prendre une WKD ? » dit Liam avec hésitation. (ndlt : marque de Vodka)
« Bien sûr. Harry ? Lou ? »
Louis cligna des yeux. Il avait toujours pensé que toute la discussion sur les boissons avait été purement hypothétique. « Mais... vous êtes tous mineur. »
Niall lui fit un clin d'œil très exagéré. « Bien sûr, mais toi non. »
« Ne t'en fais pas, » lui dit Harry, « on vient ici depuis qu'on a quatorze ans, et on boit ici depuis le même âge. Quand on a commencé à venir, ils avaient trop peur de s'opposer à nous. Maintenant, ils nous connaissent très bien et il n'y a aucune raison de nous en empêcher alors qu'on a déjà acheté tellement de verres ici. Ce n'est pas comme si tu étais mineur. » A Niall, il dit, « Je vais prendre comme d'habitude, prends-en juste un grand. Lou peut partager le mien. Tu vas aimer, » promit-il, « c'est bleu et ça a le goût de la framboise. »
« Euh, d'accord, » dit Louis avec prudence.
Niall commença à crier pour appeler le barman qui se retourna, les repérant, et sourit tellement que Louis eut peur qu'il puisse se décrocher la mâchoire. Il s'avança vers eux, rayonnant, puis se pencha par-dessus le bar et regarda droit dans les yeux de Harry, ses avant-bras posés sur le bois vernis. Il était mince de partout, de sa taille à ses épaules, sauf pour son énorme sourire, semblant bizarrement intense sur son visage fin. Il regarda Harry de haut en bas, ses lèvres pincées sur ses dents en un sourire en coin, puis il lécha ces fines lèvres et ce fut à ce moment-là que Louis décida qu'il y avait peu de personnes dans le monde à qui il aimerait autant mettre son poing dans la figure que ce mec.
« Harry ! » cria le gars.
« Tom ! » cria Harry en retour, enthousiaste et amical, comme il l'était toujours quand les gens ne criaient pas des insultes à son égard. C'était agaçant. Louis voulait qu'il soit hargneux et renfrogné ; il avait vu ce côté de Harry auparavant et ça aurait été sympa de le voir faire à nouveau une apparence.
« Je t'ai pas vu depuis un moment. J'pensais que t'étais peut-être trop dur à cuire maintenant pour cette boîte – j'étais assez content, en fait, de penser que je n'aurais plus à voir ta gueule replie de métal bizarre qui effraie les clients. » Tom tendit une main et tapa de façon taquine dans l'anneau à la lèvre de Harry, et qui diable lui avait donné la permission de toucher la bouche de Harry ? Louis se rapprocha un peu plus du flanc de Harry.
« Nan, j'ai pensé à ne plus revenir, j'pensais en avoir peut-être assez de me pourrir les yeux en voyant ta sale gueule, mais je suis là. » Harry le frappa sur le bras d'une façon qui était si visiblement platonique que Louis éclata presque de rire ; il voulut encore plus rire quand il vit le visage du barman se décomposer.
« C'est qui tes potes ? » demanda Tom alors qu'il commençait à préparer leurs boissons, son sourire s'estompa légèrement et il regarda vers Louis qui était écrasé contre le bras de Harry même s'il y avait plein de place autour du bar, et ses yeux se plissèrent fortement pour être aussi fin que tout le reste de son corps.
Il claqua un peu trop fort les verres de Zayn, Liam et Niall juste devant eux, l'alcool ballottant follement contre les parois et se déversant un tout petit peu sur le bar. Liam tressaillit, mais Zayn et Niall acceptèrent leurs boissons en silence et commencèrent à boire.
« Oh, c'est Liam, » répondit Harry, pointant Liam qui était en train de fixer avec appréhension son verre comme s'il avait peur de pouvoir tomber dedans et s'y noyer. Puis Harry mit un de ses longs bras autour des épaules de Louis et l'étreignit, toute la tension s'échappant de Louis en un souffle doux. « Et c'est mon copain, Louis. »
« Oh, » Les yeux déjà plissés de Tom devinrent des fentes, comme si son visage était le masque d'un tueur en série avec des minuscules trous percés dedans pour qu'il puisse tout de même voir. « Tu t'es trouvé un nouvel homme, alors ? Carte d'identité, s'il te plaît, » dit-il brusquement, éloignant le verre d'Harry et Louis.
En total incrédulité, Harry dit, « Quoi ? Depuis quand tu demandes les cartes d'identité de mes amis ? »
Le gars haussa des épaules. « Désolé. Ils ont vraiment raffermi les règles, maintenant. J'dois demander, mon boulot vaut plus la peine que ne pas le faire. Vous, je vous sers depuis trop longtemps pour m'en soucier, mais pour ce mec j'me mouillerais pas. Carte d'identité. » Il lança à Louis un regard avec un sourcil haussé, comme s'il s'attendait à ce qu'il soit gêné et doive faire demi-tour.
Malheureusement pour lui, Louis était déterminé à ne pas être pris au dépourvu ce soir. Il sortit sa carte d'identité de sa poche et la mit d'un air suffisant sous le nez de Tom.
Se renfrognant, le barman claqua son verra tellement fortement sur le comptoir que plus de la moitié de son contenu se répandit dessus, puis il s'éloigna d'eux sans même un au revoir et commença violemment à essuyer les robinets à bière de l'autre côté du bar. Célébrant silencieusement sa petite victoire, Louis tourna son dos à l'homme et se mit sur la pointe des pieds pour se mettre un peu plus à l'hauteur de Harry, seulement pour trouver ce dernier en train de le regarder avec un air amusé.
« Ça va ? »
« Très bien, » dit Louis, puis il tendit la main pour attraper le verre et prit sa première gorgée d'alcool hors contexte religieux. C'était agréablement pétillant, faisant remonter des bulles dans son nez, et très fruité, il lécha les gouttelettes de ses lèvres et décida que Harry avait raison ; il aimait ça. Il but un peu plus.
« C'est juste que j'aurai pu jurer que tu devenais un peu jaloux, là. »
« Moi ? Non. »
« D'accord, peu importe ce que tu dis, » murmura Harry. Il baissa sa tête et embrassa doucement Louis sur les lèvres, puis soupira doucement. « T'as bon goût. Meilleur que d'habitude, j'veux dire. C'est bon ce truc, hein ? Tu aimes ? »
« Oh, oui, » dit Louis, avant de reposer le verre sur le bar et d'enrouler ses bras autour du cou de Harry. « J'aime vraiment. » Il put sentir les yeux de Tom dans son dos, il savait qu'il s'exhibait sans vergogne, et qu'il ne devrait pas le faire ; qu'était-il arrivé à sa jalousie abandonnée ? Pourtant, il savait qu'il pourrait laisser tomber, car la règle disait normalement de ne pas convoiter ce que les autres personnes possédaient, et bien que Louis fût jaloux de voir d'autres personnes flirter avec Harry, il ne pouvait pas être jaloux de quelqu'un possédant Harry. Ce plaisir était sien.
**
Après quelques autres verres de cette boisson bleue, la tête de Louis bourdonnait agréablement. Il se sentait libre et en quelque sorte léger, pas assez pour avoir perdu son contrôle de soi, mais assez pour le détendre. A côté de lui, Harry était lui-même assez éméché, et Louis aimait plutôt ça ; il appréciait la façon dont Harry n'arrêtait pas de se blottir contre lui, d'embrasser son cou, de le chatouiller avec ses cheveux teints en violet, d'être au petit soin pour lui. Apparemment, Harry avait l'alcool câlin. Zayn semblait être déchiré entre l'alcool triste et dépressif, et l'alcool stupidement joyeux ; de temps en temps, il commençait par lancer des blagues cochonnes et éclater de rire avant de soudainement plonger dans un silence morose et morne, fixant le fond de son verre comme s'il essayait de regarder dans son âme. Niall, bien sûr, avait l'alcool plein d'entrain et stupide, courant partout pour embrasser des étrangers sur les joues et pincer les fesses des gens puis s'enfuir avant qu'ils puissent l'attraper, rigolant tout le temps. Il avait pincé le cul de Louis plus d'une fois ce soir, riant joyeusement à la façon dont il était apparemment 'ferme et bombé', tandis que Louis poussait affectueusement un cri lui étant destiné et Harry donnait une tape sur ses mains pour les éloigner en grommelant un « à moi ». Louis aimait la façon dont ça sonnait, il aimait être à Harry. Liam était silencieux, évitant probablement de se mettre la honte, mais l'énorme sourire sur son visage suggérait qu'il avait l'alcool heureux, également. Quant à Louis, il n'était pas sûr de quel genre d'alcool il avait, mais il semblait être assez tactile ; il n'arrivait apparemment pas à s'arrêter de toucher constamment Harry, sans même chercher à avoir une excuser. A chaque fois qu'il repérait le visage du barman lorsqu'il le voyait en train de toucher Harry, il était tenté de le faire encore plus.
Mais alors Tom vint faire irruption et commença à parler à Harry, réquisitionnant son attention, et Louis était un peu ivre et sa langue était trop lourde pour doser ses habituelles paroles acérées, trop maladroit pour être vif. Il s'accrochait partout à Harry, et ce dernier l'étreignit distraitement en retour, frottant son dos par-dessus son haut, caressant sa taille, mais il continuait de laisser échapper un beau rire étourdi à chaque fois que Tom disait quelque chose de légèrement drôle, le genre de rire sans retenu que Louis n'avait pas souvent entendu de sa part mais qui faisait louper des battements à son cœur, avant de le faire battre à la chamade dans sa poitrine. Le genre de rire qu'il voulait provoquer. Sa jalousie le mit en colère, et le fit frissonner, puis de grandes vagues de chaleur vinrent s'écraser sur lui comme un raz de marrée d'eau bouillante, jusqu'à ce qu'il cesse de se soucier d'être poli, cesse de se soucier du fait qu'il était ivre et irrationnel, cesse simplement de s'en faire. Le dessous de la frange de Harry était ce riche violet qui brillait à la lumière. Sa mâchoire était une courbe lisse. Son sourire était si grand et beau et sans retenu, et à chaque fois qu'il rejetait sa tête en arrière pour rire, exposant la colonne laiteuse de son cou, Louis avait envie de marquer sa peau d'un violet profond assorti à ses cheveux. Et Tom regardait Harry comme s'il voulait le plaquer contre un mur, le ravager, faire courir ses doigts osseux partout sur le corps de Harry et à l'intérieur de ses vêtements, l'embrasser avec ses lèvres fines, et Louis savait qu'il ne pourrait jamais le faire parce que c'était à lui de le faire, sauf qu'il avait la vague idée de ce que les rôles seraient probablement échangés. Il était trop petit pour malmener Harry, à moins que Harry se sente d'humeur très gentille et décide de le laisser faire. Tom était grand et filiforme mais il semblait fort, et il était plus âgé, au moins la vingtaine, et il regardait Harry avec des yeux affamés et un sourire narquois. Harry rigola à nouveau à l'une de ses blagues et Louis détesta ça, il voulait Harry pour lui tout seul et ce fut à ce moment-là qu'il se rendit compte qu'en fait, il avait l'alcool coléreux après tout.
Il ne tint pas compte de la merde que Tom vomissait, parlant fort par-dessus comme pour s'enregistrer par-dessus une cassette, et interrompit bruyamment, « Hé, Harry, allons danser. »
Harry se tourna vers lui, surpris. « Désolé, bébé, qu'est-ce que t'as dis ? »
« Toi. Moi. Danser. Maintenant. »
« Euh, d'accord. Bien sûr, » accepta facilement Harry. Il glissa son bras autour de la taille de Louis et ils se dirigèrent sur la piste de danse sans même dire au revoir à Tom. Louis était tellement béat qu'il se sentait comme le chaton légendaire qui attrapait la crème – il pensa même qu'il pourrait ronronner.
« Je sais vraiment pas danser, tu sais, » lui dit Harry alors qu'ils passaient à côté de quelques unes des filles arrogantes qui étaient dans la file avec eux, sautant follement partout avec leurs talons pendant à leurs mains, hurlant de rire comme des folles, du rouge à lèvres étalé partout, clairement bourrées à en perdre la tête. Ils réussirent à trouver un endroit vide sur la piste et restèrent immobiles un moment. Louis pensait qu'il devrait probablement commencer à danser, mais, il se demanda, comment dansait-on ? Il n'avait pas beaucoup d'idée sur la question en étant sobre et c'était encore pire en étant ivre, la dernière fois qu'il avait dansé (autre que sauter en faisant des solos d'air guitare embarrassants et tout seul dans sa chambre) ça avait été à la fête de l'école lorsqu'il avait neuf ans. La fête où il était tombé en essayant de faire le Cha Cha Slide () et avait pleuré, il avait immédiatement juré de ne plus jamais dansé de sa vie.
« Pas grave, moi non plus, » dit-il, « J'voulais juste que tu t'éloignes de cet ordure. J'peux pas le supporter. Connard. » Il n'avait plus aucun sens. Toute tentative d'éloquence l'avait abandonné ; il avait l'impression que cette cohérence était probablement un meilleur but à atteindre pour le moment. Même si elle était assez loin de sa portée.
« Quoi, Tom ? »
Louis grogna. « Ouais. Connard hautain. »
Etouffant un rire, Harry dit, « Tu es jaloux. »
« Non. »
« Tu l'es, hein ? »
« Non, » protesta Louis, puis il cacha son visage contre le torse de Harry, gêné.
Harry rigola dans ses cheveux. « Bon Dieu. Tu n'es absolument rien à craindre, Lou. Il y a seulement un garçon qui m'intéresse, et je suis ici en train de lui parler. Tom n'est pas du tout mon type. Il est un peu trop facile. J'aime les défis. Comme toi. »
« Mais il est plus vieux. Il te fait rire, et il est plus grand que moi. Et il a un travail et probablement une voiture, » marmonna Louis contre le torse de Harry.
« J'aime que tu sois petit. Ça veut dire que je peux faire ça. » Harry posa sa joue contre le sommet de la tête de Louis. « Et tu me fais rire aussi, et qui se soucie que tu n'aies pas de boulot ? Ça veut dire que tu peux passer plus de temps avec moi. Et t'es plus vieux que moi, aussi. Je t'aime. Et ne le prends pas mal, tu es sérieusement mignon quand t'es jaloux, mais je ne veux te voir dans tous tes états, d'accord ? Tom essaye de coucher avec moi depuis que j'ai quatorze ans, et il n'a jamais réussi, et ce ne sera jamais le cas, d'accord ? Maintenant, on danse ? »
Louis devait admettre qu'il était un peu inquiet concernant cette idée même s'il l'avait suggérée, mais Harry le mit immédiatement à l'aise en étant un aussi mauvais danseur qu'il l'avait promis. La première chanson sur laquelle ils dansèrent était une chanson pop ringarde, de la soupe commerciale, et Harry passa la première moitié de la chanson à sauter en l'air et la seconde moitié plié en deux, la respiration sifflante. Puis, il commença à offrir Louis une série de pas de danse les plus flamboyants qu'il n'ait jamais vu ; il était presque sûr que le pas de danse que Harry nommait 'caresse le chien, vise l'ampoule' était la chose la plus gay qu'il n'avait jamais vu Harry faire (hors le sucer). Au moment où la cinquième ou sixième chanson débuta, Harry bougeait sur la danse du diable, autrement connu sous le nom de Cha Cha Slide (Louis avait juré sa rancœur envers cette danse après l'accident) malgré le fait que la chanson en fond n'était en rien ressemblante au Cha Cha Slide. En fait, c'était une douce chanson d'amour niaise sur laquelle ils auraient dû se balancer lentement, alors que Harry marmonnait dans sa barbe, « one hop this time, take it back now y'all! » (ndlt : « un saut cette fois, reculez maintenant tous ensemble ! ») comme si le dire à haute voix était nécessaire pour pouvoir effectuer la danse, remuant avec un énorme sourire collé au visage et trébuchant sur ses grands pieds. Louis ne put s'empêcher de rire et finit même par faire sa propre interprétation de la danse, très prudemment, stupéfait de constater que cette fois-ci il ne tomba pas.
Ils avaient, sans aucun doute, l'air ridicules ; un punk ivre et élancé avec son petit-ami tout aussi ivre et chrétien, s'amusant sur la piste de danse et se moquant l'un de l'autre, deux idiots amoureux qui avaient oublié que la discrimination existait bien. Depuis le bar, Liam les observa avec tendresse, appréciant voir Louis être si léger et ne se retenant pas d'être heureux. D'aussi loin qu'il pouvait se souvenir, il avait toujours vu son ami se stresser et essayer misérablement de rendre sa famille heureuse – maintenant que la priorité de Louis était son propre bonheur, il était comme une toute nouvelle personne. Aucune tension. Aucun souci. Simplement des rires et des baisers paresseux entre lui et Harry alors qu'ils se balançaient bêtement sur une chanson lente et ne bougeant pas en rythme avec la musique. C'était agréable à voir pour Liam.
Louis s'amusait, s'était véritablement déstressé et se sentait merveilleusement détendu. Maintenant, Harry laissait échapper ce profond et magnifique rire pour lui, à cause de lui, et les mains de Louis ne pouvaient s'empêcher de se promener partout sur le corps de Harry et ce dernier les tapait parfois pour les éloigner de façon enfantine, le grondant sur la décence à avoir dans les lieux publics, tandis que d'autres fois il laissait les doigts de Louis passer sous son haut ou s'accrocher à la bouche de sa ceinture ou même, à un moment donné, glisser à l'intérieur de son jeans, bien qu'il soit très serré. Ils étaient bourrés, idiots et amoureux et ça rappela à Louis cette citation dans un film qu'ils avaient regardé ensemble peu de temps auparavant, quelque chose à propos de l'infini, sauf qu'il était douloureusement conscient qu'ils n'étaient pas immortels, que les gens changeaient, vieillissaient et vous tournaient le dos, certains mourraient jeunes et vos grands-parents ne vivaient pas éternellement, la plupart des choses qui étaient bonnes – la drogue, l'alcool, la malbouffe – étaient mauvaises pour vous et tout le monde était abîmé par des choses qui ne devraient pas du tout vous nuire, comme l'amour. Louis et Harry étaient juste deux humains fragiles de plus accrochés à la peau du monde qui semblait tellement énorme mais n'était en réalité pas si grande, et dans le grand schéma de la vie, ils étaient seulement un peu plus que des fourmis – mais pour une fourmi, son propre petit monde était tout ce qui comptait, tout comme pour lui, Harry était tout ce qui importait. Aucun d'eux n'était immortel, mais à cet instant-là, en sueur et en état d'ébriété, leurs corps chauds enlacés, Harry soufflant de l'air à l'odeur de la framboise sur son visage et les mains de Louis dans le bas du dos de Harry, ses pouces caressant ses reins, c'était leur infinité. Et ça ne pourrait pas durer éternellement, mais si c'était le cas, peut-être qu'il ne serait pas aussi enclin à l'apprécier.
Quelqu'un trébucha et tomba, leur fonçant dedans et faisant éclater la petit bulle de Louis – et son éternité de courte durée – beaucoup plus tôt qu'il ne l'aurait voulu. Enervé d'avoir été perturbé, il se retourna pour lancer à la personne une flopée d'injures que, sobre, il aurait tût et échangé contre un commentaire sarcastique, mais bourré il était seulement trop disposé à s'exprimer, seulement il découvrit que la personne qui les avait bousculé était beaucoup plus petite que ce à quoi il s'était attendu. Fronçant des sourcils, il baissa le regard.
C'était une fille – assez jeune, également, bien qu'elle se soit enduite d'un maquille lourd pour essayer de masquer ce fait. Ses longs cheveux bruns avaient été crêpés en une crinière sauvage, frisé et couverte de laque pour maintenir en place, ainsi elle ne se déplaçait même pas légèrement lorsqu'elle bougeait la tête. Il faisait chaud dans la pièce, alors son mascara avait coulé. Il pensait qu'elle avait peut-être aussi pleuré. Portant un chemisier blanc avec des manches bouffantes et des volants sur le devant comme l'écume de la mer, et une jupe trop courte et serrée qui aurait aussi bien pu être un sac en plastique tendu autour d'elle, chancelant sur des talons de plusieurs tailles trop grandes, il n'aurait pas pu la reconnaître si sa voix n'avait pas sonné aussi familière lors qu'elle balbutia, « Oh – d-désolé ! »
Louis la fixa, la regardant attentivement. Il lui fallut quelques secondes de plus pour réellement comprendre qui il était en train de regarder, plissant ses yeux pour stabiliser sa vision trouble à cause de l'alcool et essayant de voir au-delà du fond de teint et du mascara. Mais il la reconnut, quoiqu'avec une certaine difficulté.
« Felicite ? »
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