Chapitre 14

La liberté était agréable, et Louis avait pleinement l'intention d'en profiter.

Il avait une assez bonne idée de l'endroit où Harry serait, là où il avait tendance à aller, et ce fut pourquoi il erra dans les rues, les vérifiant toutes à la recherche du coin de l'œil d'un halo de cheveux bouclés ou un visage parsemé de piercings. Ça lui prit une bonne demi-heure avant de décider de vérifier le quartier près de la boutique où il s'était fait percer la lèvre, et il fut presque choqué lorsqu'il trouva finalement ce qu'il était en train de chercher longtemps après avoir abandonné, en se promenant simplement patiemment sans vraiment s'attendre à trouver quoi que ce soit.

Harry était assis sur le muret en regardant d'un air morose son téléphone lorsque Louis tourna au coin, et il dut s'y reprendre à deux fois pour vérifier qu'il voyait bien ce qu'il pensait être en train de voir. Harry avait à nouveau changé. Il s'était fait percer le septum, et quand Louis le regarda un peu mieux, il put voir une teinte distincte de violet foncé sur le dessus de sa touffe de boucles en vrac qui retombait sur son front.

Léchant ses lèvres, Louis s'approcha et quand il attint Harry, il s'assit sur le mur à côté de lui. Il était assez proche pour pouvoir sentir la chaleur du corps de Harry se déverser sur lui, mais sans le toucher ; assez proche pour voir la colère bouillonnante sous la surface, mais pas assez pour qu'elle se déploie sur lui. Harry vibrait d'énergie, et rien de tout ça ne semblait bon. Ils restèrent silencieux pendant un moment, fixant le sol, et Louis n'était pas entièrement certain de quoi dire. En fin de compte, Harry brisa le silence pour lui.

« Attention, » dit-il brutalement. « Ne me touche pas, ou tu vas directement descendre dans les profondeurs de l'enfer... ou c'est la raison pour laquelle t'es là ? Pour me sauver de mes péchés ? Pour me baptiser, me purifier de tout le mal et m'emmener au catéchisme ? »

Louis ferma ses yeux et pencha sa tête en arrière. Il s'était attendu à une réponse violente, mais il s'était approché un peu trop près de la vérité. « C'était méchant, et tu le sais. »

Il y eut un petit silence puis Harry soupira fortement. « Ouais, » acquiesça-t-il. « Je suppose que ça l'était. »

Tirant d'un air maussade sur un fil lâche de son pull, Louis jeta un coup d'œil à Harry et le trouva en train de le regarder depuis en dessous de ses cheveux nouvellement violets. Ils se sourient malgré eux et Louis ne put se résoudre à regarder ailleurs.

« Ils t'ont laissé sortir quand ? » demanda doucement Harry.

« Ce matin. J'allais t'appeler, mais ils ont effacé ton numéro de mon téléphone quand ils me l'ont confisqué. Désolé. »

« Il n'avait pas de code ? »

Louis secoua sa tête. Sa mère n'approuvé pas qu'il ait des mots de passe sur quoi que ce soit. « Nous n'avons aucun secret dans cette maison, merci beaucoup. »

Eh bien, c'était à peu près parti en fumée.

« T'as changé, » commenta-t-il. « Qu'est-ce que t'as fait avec tes cheveux ? » Il tendit prudemment une main, attrapa une mèche des cheveux de Harry entre ses doigts et la leva pour examiner le violet métallique foncé dessus.

Harry haussa des épaules. « J'avais envie. »

« Et le... ça ? » Louis tapota l'anneau au nez de Harry d'une douceur minutieuse puisque c'était un piercing assez récent.

Nouveau haussement d'épaule saccadé, mais les yeux de Harry semblaient un peu moins circonspects et il paraissait s'être déjà adouci. « J'étais en colère. » Puisque Louis sembla confus, il élabora, « Quand certaines personnes sont en colère, elles hurlent sur quelqu'un, ou crient, ou jettent des choses. Quand je suis en colère, je me fais des piercings. Grâce à eux, je peux penser à autre chose. Et si je suis assez en colère contre quelqu'un, je ne l'enlèverai jamais, comme ça je me souviendrai de ne jamais leur pardonner. S'ils méritent d'être pardonner, alors je le retire, le trou se referme et c'est tout. Un nouveau départ. » Ses yeux se posèrent, avec un peu d'inquiétude, sur le visage de Louis.

« Tu m'as manqué, » dit doucement Louis, et ses doigts glissèrent sur le bras de Harry jusqu'à ce que sa main se rabatte sur la sienne.

« Ça fait plus de trois semaines, tu sais. Et je continuais d'attendre. Tous les messages que je t'ai envoyé, tous ceux que je t'ai laissés, ils ont tous été ignorés et ta famille m'envoyait des regards noirs quand ils me voyaient dans la rue. Je n'ai pas eu une seule nouvelle de ta part, et je pensais que tu avais abandonné pour de bon cette fois, et que tu t'en foutais de moi maintenant. Mais je ne pouvais pas renoncer à toi. On pourrait croire qu'après tout ce temps, j'en aurais marre mais je ne peux pas me résoudre à abandonner. Et dans ce cas, on pourrait également croire que ta famille aurait réussi à comprendre qu'ils ne te mènent plus par le bout du nez, mais je ne pense pas, non plus, qu'ils aient déjà renoncé à ça. Hein ? »

Louis resta silencieux, fixant les longs doigts de Harry qui reposaient sur le mur, les siens n'étant même pas assez larges pour les recouvrir. Dans le passé, il aurait protesté à cette dernière affirmation et à la façon dont elle donnait l'air à sa famille d'être manipulatrice, mais il commençait seulement à se rendre compte à quel point manipulatrice était très exactement le bon mot.

Harry cligna des yeux, et Louis fut surpris de voir que, tout d'un coup, ses yeux verts étaient humides et brillants de larmes à peine contenues. « Tu m'as manqué aussi, » dit-il d'une voix sourde, puis il se jeta dans les bras de Louis et ce dernier eut soudainement la chaleur et le poids de son corps appuyés contre lui, son visage enfoui dans son épaule et ses mains agrippant le tissu de son haut.

Murmurant n'importe quoi dans l'oreille de Harry, Louis se détendit, le tirant un peu vers lui, puis quand Harry fut assis assez près pour qu'ils puissent établir un contact visuel, il essuya prudemment ses yeux, essayant de ne pas étaler l'eyeliner soigneusement appliqué. Une petite traînée noire se dégagea de son doigt mais il n'en avait franchement rien à faire. Puis, lorsque Harry se pencha nerveusement en avant et pencha sa tête comme pour l'embrasser, Louis ne jeta pas de regards anxieux autour d'eux ou ne le poussa pas dans un buisson où ils ne pourraient pas être vu – il ferma la distance entre eux aussi rapidement qu'il put, fondant dans le baiser, puis les mains de Harry dans le bas de son dos furent tout ce qu'il l'empêchait de tomber.

Après tout ce temps, le goût métallique des baisers de Harry était toujours douloureusement familier, et bien qu'il avait dans le passé trouvé ça un peu amer et difficile à supporter, c'était étonnant à quel point la chaleur de la bouche de Harry, entrecoupée par le tintement glacial du métal contre ses dents, lui avait manqué. Des papillons s'envolèrent dans son ventre, parce qu'il avait décidé de ne plus se soucierde ce que ses parents disaient, de toutes les histoires avec lesquelles ils le nourrissaient. Parce que quand ils avaient refusé de lui parler, l'avaient enfermé dans le déshonneur et l'avaient accompagné à l'école, pour l'amour de Dieu, en s'assurant de dire à la directrice de maintenir les garçons à l'allure bizarre bien loin des grillages, Louis avait été seul, et Harry avait attendu. Il voulait presque se faire prendre. Son estomac se retourna et les grandes mains de Harry caressèrent de haut en bas son dos, tandis que celles de Louis passèrent à travers ses cheveux nouvellement violets. Le monde était juste un fouillis de boucles soyeuses, de lèvres chaudes et la sensation de tomber dans un lit chaud en une nuit froide, mais l'étreinte de Harry était beaucoup plus accueillante que son lit ne l'avait jamais été.

Ça le rendit un peu étourdi, l'idée qu'un des membres de sa famille ou un ami de sa famille puisse passer dans le coin à ce moment-là, comme il l'avait lui-même fait seulement quelques minutes auparavant, et le surprenne en train d'embrasser désespérément le garçon le plus mutuellement détesté du quartier, avec ses mains courant frénétiquement à travers ses cheveux. Il pouvait simplement imaginer dans quel genre de rage sa mère se mettrait en découvrant ça. L'idée lui donna envie de rire, et Harry sentit ses lèvres se courber dans le baiser et le rompit, s'éloignant un peu de lui. Il examina d'un œil critique Louis, son propre sourire s'élargissant.

« Qu'est-ce qui est drôle ? » demanda-t-il, puis il enfouit son visage dans le cou de Louis, déposant de légers baisers à l'endroit où son cou et son épaule se rejoignaient.

Puisque Louis ne pensait pas qu'il pouvait vraiment expliquer ce qu'il trouvait si amusant, il éclata de rire à cette autre pensée qui s'était coincée dans son esprit dès l'instant où leurs yeux s'étaient rencontrés plus tôt dans la matinée. « Toi ! On dirait un taureau, » bafouilla-t-il.

Harry se joignit à lui, rigolant également. « Je sais. J'ai compris, presque dès que ça a arrêté de faire mal, que je n'avais pas fait le meilleur choix. C'est juste que genre... quand je suis en colère, je le fais, et quand la douleur s'estompe, ainsi que ma colère... quand mon bon sens commence à me revenir, je me rends compte que ça a l'air un peu stupide... je crois que je vais l'enlever de toute façon. Voilà, j'me suis fait percer et prévoyais de le garder comme signe que je n'allais pas te pardonner, mais il n'y a rien à pardonner... je vais le laisse se reboucher. » Il leva une main à son nez.

Louis l'arrête en attrapant sa main avant qu'elle n'atteigne son visage. Il toussa consciemment, puis éclaircit sa gorge et dit un peu timidement. « Je-je peux...je peux le faire ? »

Surpris, Harry dit, « Bien sûr, si tu veux, mais je pensais que t'étais en quelque sorte dégoûté par ce genre de chose ? »

Un petit sourire apparut sur le visage de Louis. « J'me suis fait percer la lèvre, tu te souviens ? J'ai en quelque sorte changé de point de vue sur ces choses. Tiens-toi tranquille... » Se penchant en avant, il détacha prudemment l'anneau en métal et le retira doucement du nez d'Harry. Puis il le posa dans la main ouverte du plus jeune et il replia les doigts de ce dernier pour qu'ils se referment autour.

Leurs yeux se rencontrèrent, et Louis se demanda comment ses parents pouvaient réellement mépriser un garçon avec de tels yeux. Comment quelqu'un pouvait détester Harry tout simplement.

Il se rendit seulement compte qu'il avait dit une partie à haute voix lorsque Harry lui fit un petit sourire triste et toucha la joue de Louis du bout de ses doigts.

« C'était aussi ton cas, tu sais. J'me souviens la première fois que je t'ai parlé, t'avais l'air totalement consterné... j'ai cru que t'allais aller la police. » Il rigola doucement. « C'est pareil pour ta famille... c'est simplement le genre de réaction que j'attends des gens ces derniers temps. »

« Seulement parce qu'ils ne te connaissent pas. »

« Peut-être. »

« J'en ai marre de tout ça, » dit tout d'un coup Louis, et les yeux de Harry vacillèrent de surprise sur son visage. « J'en ai marre d'eux. Marre de cacher tout ça. J'veux leur dire que c'est qui je suis à présent et que j'en ai pas honte. Si ma famille n'aime pas ça, tant pis pour eux. J'en ai marre d'avoir leur avis plantés dans ma bouche. »

Une main fit son chemin jusque dans le bas de son dos, frottant de façon réconfortante ses reins. « A quel point en savent-ils sur toi et moi ? »

« En ce qui les concerne, on est des amis proches, et ils n'aiment pas ça du tout. Je veux changer ça, et ils ne le prendront pas vraiment bien, mais je ne le cacherai pas plus longtemps. »

Harry siffla doucement. « Wow. Ils t'ont gardé enfermé chez toi pendant presque trois semaines pour t'éloigner d'un ami qu'ils n'approuvent pas ? Ils ne doivent vraiment pas m'aimer. » Puis il essaya de sourire, mais il s'avéra être bancal, et Harry sembla extrêmement blessé.

Mordillant sa lèvre, Louis l'attrapa par le poignet et le serra très fort. « Oh, Harry... »

« Hé, je t'ai interrompu, désolé. On ne parle pas de moi. Qu'est-ce que tu disais sur ta famille ? » Harry se focalisa entièrement sur lui à présent, tout la tristesse ayant disparu de ses yeux, et il sembla avoir complètement oublié le monde autour d'eux. Il tint les poignets de Louis et le fixa attentivement, et Louis se sentit un peu impuissant avec Harry le regardant de cette façon.

« Je veux sortir du placard, » dit Louis. « J'en ai marre d'essayer d'être le fils qu'ils veulent que je sois, parce que je ne le serai pas. Je ne l'ai jamais tout à fait été, pourtant j'ai toujours essayé d'être le gamin parfait qu'ils ont toujours voulu, mais ça n'a jamais vraiment fonctionné, pour moi et pour eux, et je les aime, mais je ne peux plus faire semblant. J'en ai plus envie. Et ils ne l'accepteront pas, je le sais, mais ce n'est pas mon problème, c'est le leur. Harry... » il le regarda d'un air suppliant, « tu m'aideras ? »

« Bien sûr, » répondit-il immédiatement, « n'importe quoi. De quoi as-tu besoin ? »

« Je veux me faire tatouer. »

Harry respira fortement. « Oh. » Il baissa le regard et frotta son poignet, ses bracelets glissant plus bas sur son bras, montrant les premiers mots de la citation de Shakespeare y étant tatoué. Avec les toiles d'araignée sur ses coudes et les divers autres tatouages sur son corps, c'était facile de comprendre pourquoi Louis aurait cherché son aide dans ce domaine, mais il n'aimait pas beaucoup l'idée de voir un tatoueur près de la peau douce et légèrement bronzée de Louis. « Louis... t'es sûr que c'est une bonne idée ? Les tatouages ne sont pas comme les piercings ; tu ne peux pas les retirer si tu ne les aimes pas, ce ne sont pas des trous qui se refermeront après quelques semaines. Soit tu es coincé avec pour toujours, soit tu dois faire face au laser de la mort. T'es vraiment sûr d'en vouloir un ? »

« Oui. J'ai réfléchi à beaucoup de choses pendant les dernières semaines, et c'est... c'est définitivement ce que je veux. Le tatouage leur montrera qu'ils ne peuvent plus me contrôler, parce qu'ils ne pourront pas faire en sorte d'effacer un tatouage – et je crois que j'ai besoin de quelque chose pour me souvenir des dernières semaines, pour me souvenir que je dois commencer à être qui je suis, pas qui ils veulent que je sois... Je dois le faire, Harry, et tu l'as fait tellement de fois que j'ai pensé que tu saurais peut-être où je peux aller m'en faire un sans risquer d'avoir une infection ou quoi. S'il te plaît ? »

Résister à ces yeux bleus suppliants serait toujours une tâche difficile, et avec le désir dans les pupilles de Louis, c'était même encore plus dur que d'habitude. Secouant sa tête, Harry sentit ses lèvres former le prénom de Louis alors qu'il l'embrassait au coin de la bouche, ses lèvres errant de plus en plus vers l'avant jusqu'à ce qu'ils s'embrassent convenablement. Une des mains de Harry trouva l'arrière des cheveux de Louis et il commença à enfoncer ses doigts dans leur chaleur épaisse, les caressant jusqu'à la racine. Louis soupira ; c'était une tactique de diversion maline, mais pas assez pour lui.

Quand Harry s'arrêta pour respira, il essaya à nouveau. « S'il te plaît, » souffla Louis contre sa lèvre inférieur.

« Oh, Lou... »

« S'il te plaît... »

« Louis... »

« S'il te plaît ? »

**

« Sûr à cent pourcent ? »

« Ouais, » dit Louis d'un air sévère. « Certain. »

Le tatoueur de Harry avait une quantité étonnamment faible de tatouages pour quelqu'un de la profession (cependant Harry avait assuré à Louis dans un chuchotement, avec un sourire collé au visage, qu'il en avait plein à d'autres endroits que ses bras remarquablement nus de toute encre) mais Louis constata que ça le rendit un peu moins nerveux à propos de l'homme. Il avait des cheveux hirsutes et un sourire agréable, et Louis ne put s'empêcher de bien l'aimer.

Il s'était installé dans le fauteuil en cuir confortable, il avait bu un verre d'eau et eu le droit à toute la discussion au sujet de 'et-tu-sais-que-c'est-permanent-hein ?', et son ventre noué se délia un peu grâce aux plaisanteries rigolotes dans lesquelles c'étaient lancés Harry et le tatoueur (Mark). A présent, il était couché dans le fauteuil avec son bras gauche tendu, et sa main droite était posée sur le genou de Harry avec la main de ce dernier par-dessus, la tenant légèrement. Pourtant, il ne put s'empêcher de ressentir de l'appréhension, détournant ses yeux de l'aiguille parce ça le rendit un peu nauséeux rien que d'y penser. Mark était en train de préparer la zone de son poignet où il avait demandé le tatouage. La sueur perlait sur le front de Louis ; il ne put s'empêcher de penser à ce qui pourrait se passer s'il vomissait et vacillait vers l'avant en plein milieu de la procédure et faisait se détourner l'aiguille.

Semblant reconnaître sa nervosité, Harry se pencha en avant en même temps que Mark, et alors que le tatoueur levait l'aiguille pour commencer à encrer la première ligne sur la peau de Louis, Harry murmura dans son oreille, « J'arrive toujours pas à croire que tu vas te faire tatouer des paroles de Selena Gomez. Rappelle-moi comment tes parents font pour ne pas encore avoir compris que tu aimais les garçons ? »

Louis émit un éclat de rire à moitié hystérique, tout son corps se secouant, et Mark releva sa tête et envoya un regard noir au bouclé. « Harry... » l'avertit-il.

« Désolé, » dit Harry d'un air contrit, baissant sa tête, puis il sourit avec bienveillance à Louis. « Ne pense pas trop à ce qu'il se passe, » conseilla-t-il. « Si ça fait mal, serre ma main, et n'aies pas peur parce que j'ai tenu les mains de Niall et Zayn un tas de fois ; ma main est habituée à être un peu maltraitée. Vas-y. » Il se pencha en avant et souffla, « Sois courageux, parce que c'est la partie la plus facile. »

« Quelle est la partie la plus difficile ? » ne put s'empêcher de demander Louis alors que l'aiguille toucha légèrement sa peau ; la question lui permit d'être distrait de l'inévitable frisson provoqué par la sensation de froid.

Harry sourit. « Le dire à tes parents. »

Louis fit un petit grognement à cet aveu puis il ferma ses yeux lorsque l'aiguille commença à vrombir et que Mark commença à tatouer les mots I won't apologise for who I am (je ne m'excuserai pas d'être qui je suis) à l'intérieur de son poignet gauche, où ils resteraient vraisemblablement pour le reste de sa vie.

Harry regarda avec fascination le tatouage prendre forme ; il aimait toujours regarder les autres être tatoués, cependant il devait détourner le regard quand Mark travaillait sur lui. Alors qu'il observait l'élégante écriture noir être soigneusement gravée dans la peau de Louis, il sentit à peine la douleur des ongles de Louis s'enfonçant avec acharnement dans sa main ; il était trop distrait par le fait que ses yeux étaient fermement plissés de douleur, par la sueur perlant sur son front et le faible pleurnichement bizarre qui s'échappait d'entre ses dents, il semblait à la fois vulnérable et magnifique, et une étrange sorte d'élan protecteur s'agita dans le creux de son ventre.

Il se donna sans vergogne dedans, embrassant Louis sur le front, caressant sa main, lui murmurant à l'oreille et regardant occasionnellement les lettres qui étaient soigneusement encrées pour toujours. Il était vraiment impressionné ; quand il avait fait son premier tatouage, il avait été dans un sacré état, pleurant à chaudes larmes, sanglotant comme un bébé pendant qu'on lui faisait – peut-être parce qu'il y avait été tout seul et n'avait pu tenir la main de personne. Mais Louis restait silencieux, réservé, luttant pour réussir à se contenir.

De temps en temps, ses yeux bleus s'ouvraient, assombris par la douleur, et ils rencontraient ceux de Harry pendant quelques instants, clignant pour retenir ses larmes, puis ils se fermaient à nouveau parce qu'il ne pouvait pas supporter de les garder ouvert sans jeter un coup d'œil, et il n'osait pas regarder au cas où il paniquerait et retirerait brusquement sa main. Mais chaque bref coup d'œil s'accompagnait d'une prise légèrement plus ferme sur la main de Harry, et ce fut à ce moment-là que ce dernier sut que sa présence était appréciée. Son ventre se retourna avec tendresse, et il se demanda presque s'il ne devrait pas lui aussi se faire un nouveau tatouage, comme ça Louis pourrait expérimenter la sensation d'être celui qui tient la main, d'être celui qui est présent. C'était incroyable, pensa Harry, avoir quelqu'un d'autre à qui s'accrocher pour chercher du réconfort, d'être celui désiré comme une diversion à la douleur. Mais peut-être que deux tatouages en un jour serait un peu trop pour Louis.

Personnellement, après ses premiers tatouages, il n'avait pas été capable de sortir de chez le tatoueur assez rapidement. L'odeur du désinfectant, du déodorant et celle qu'il associait toujours aux tatouages et à l'encre, ainsi que la gêne d'avoir eu une aiguille encrant sa peau avaient retourné son estomac ; après les avoir bandé et accepté les crèmes dont il avait besoin pour s'assurer qu'ils cicatrisent correctement, il s'était directement dirigé dehors et avait chancelé jusqu'à une bouche d'égout où il avait vomi dans le caniveau. Puis il était parti et avait erré sans but parce qu'il pensait que c'était une décision stupide de l'avoir fait et qu'il était un idiot fini, et bon dieu, que diable avait-il inscrit de façon permanente sur sa peau ?

Le lendemain, ayant la gueule de bois et se sentant incroyablement désolé pour lui-même, il avait retiré les bandages et avait jeté un coup d'œil, se rendant compte avec joie qu'en fait, il les aimait plutôt bien après tout. Surtout à cause de la signification personnelle qu'elles avaient pour lui.

L'aiguille fut reposée, le tatouage sécha à sec puis fut bandé, et pendant tout ce temps, Louis resta immobile en semblant faible, étourdi et un peu abasourdi. Harry voulut être au petit soin pour lui, lui demander s'il allait bien, lui proposer une tasse de thé, s'inquiéter et le couver comme une mère poule, mais il ne pensait pas que Louis aurait très envie de ça, alors il se concentra pour essayer d'avoir l'air à peu près solidaire pendant que Mark sermonnait Louis sur la bonne façon de prendre soin d'un tatouage et sur comment le faire cicatriser correctement et cetera.

Finalement, avec hochement de tête amical, l'homme disparut à l'arrière de sa boutique, leur donnant un peu d'intimité, et Louis le fixa d'un air absent comme s'il n'arrivait pas à croire que c'était fini. Harry se laissa tomber à genoux à côté de lui, tenant toujours sa main valide dont les doigts s'étaient agrippés aux siens pendant si longtemps et avec une telle fermeté douloureuse qu'il ne pouvait toujours pas les sentir. Repoussant les cheveux en sueur du front de Louis, il essaya d'évaluer l'expression sur le visage de Louis avec peu de succès. Ces derniers temps, Louis était devenu bien meilleur pour cacher ses émotions – même si Harry pensait qu'il pouvait simplement ne pas vraiment être au top de sa forme pour avoir des sentiments en ce moment.

« Hé, bébé, » murmura Harry. « Je suis là, tout va bien. T'es avec moi ? »

« La pièce tourne, » déclara Louis d'un air trouble, regardant partout autour de lui avec les yeux dans le vague. « C'bizarre. »

« Tu n'as pas la phobie des aiguilles, hein ? Honnêtement, qu'est-ce je vais faire de toi ? Je te rattraperai si tu t'évanouis, mais je veux que tu saches que se faire un tatouage quand on a peur des aiguilles est une idée vraiment stupide – »

« Non, j'en ai pas peur. J'vais bien. J'ai juste besoin de sortir d'ici. D'air frais et tout. Aide-moi à me lever. » Il commença à lutter pour se mettre sur ses pieds, et Harry lui tint son bras valide et le tira doucement dans une position debout, tout en se faisant du souci et le couvant comme une mère poule.

On aurait pu penser que Louis était un invalide à en juger par la façon dont Harry l'aida à sortir de la boutique, essayant de supporter tout son poids comme si Louis ne pouvait pas marcher tout seul, même en essayant de le convaincre de mettre un bras autour des épaules de Harry comme soutien. Alors qu'il était encore étourdi, Louis se maintint comme ça, mais une fois qu'il retrouva un peu de clarté et que le monde ne fut plus en train de tourbillonner autour de lui comme s'il était la seule chose stationnaire coincée au milieu d'un énorme carrousel, il commença à se tortiller et à s'agiter, se plaignant excessivement. Harry s'accrocha obstinément à lui pendant quelques rues, mais ensuite les pleurnichements de Louis atteignirent un degré tellement irritant qu'il ne put pas le supporter plus longtemps, et il le lâcha, permettant à Louis de se tenir debout sans support. Il recula un peu pour évaluer s'il était assez en forme pour rester debout sans aide.

Louis rougissait d'un rose délicat, la couleur de la barbe à papa, des roses roses et du gloss à la fraise. Ses cheveux étaient en sueur et collant de façon désordonnée à l'arrière, à l'endroit où sa tête avait été appuyée contre le fauteuil pendant le tatouage. Ses yeux semblaient plus grands que d'habitude, ses pupilles éjectées en d'énormes trous noirs à l'intérieur des anneaux bleus ciel. Alors que Harry l'observait, un sourire se répandit sur son visage, s'agrandissant jusqu'à être presque hystérique. Quelque chose avait changé en Louis pendant qu'il se faisait tatouer ; quelque chose en lui s'était brisé, ou peut-être que quelque chose s'était assemblé. Il semblait plus. Plus quoi, Harry n'était pas sûr – mais il était définitivement plus.

En silence, Harry tendit une main et la fit courir sur le bras nu et sans bandage de Louis, sa bouche s'ouvrant légèrement avec crainte. Quand le sourire en coin de Louis l'alerta sur ce qu'il faisait, sa bouche se referma brusquement et il baissa le regard au sol, rougissant. Il se racla la gorge et dansa d'un pied à l'autre, embarrassé.

Souriant, Louis attrapa sa main et entrelaça ses petits doigts fins avec ceux longs de Harry. L'embarras disparaissant, Harry releva ses yeux et lui fit un petit sourire en retour, et après de longues secondes il commença à démêler leurs doigts. Cependant, Louis avait une autre idée derrière la tête ; il le tint résolument. Sa prise n'était pas assez forte pour faire mal, mais elle était trop ferme pour s'en débarrasser facilement, et le regard de Harry se remplit de confusion alors qu'il le regardait, puis il commença à jeter un coup d'œil autour d'eux, purement par habitude.

Louis attrapa son menton, grimaçant lorsque le mouvement s'étendit dans son poignet douloureux. Instantanément, Harry se figea, ne voulant pas lui faire plus mal, et Louis lâcha son visage mais garda leurs doigts entremêlés. Le front de Harry se fronça de confusion.

« Plus maintenant, » dit doucement Louis. « On ne se cache plus. Et je le pense vraiment. Pourquoi le devrions-nous ? T'es fier de qui tu es, j'en ai marre d'avoir honte de qui je suis – quand j'ai dit que j'en avais fini avec tout ça, je le pensais réellement. Je t'aime, et je suis fier de toi, fier de nous. »

« T'es sûr ? »

« A cent pourcent. Tu veux savoir à quel point j'en suis sûr ? Je suis partie à la chasse aux appartements – et au boulot, Liam m'a aidé, je ne pouvais pas faire grand-chose depuis ma chambre. Je vais déménager. Si je pouvais venir dormir sur ton sol pendant quelques jours pour que je puisse m'installer, je ne devrai pas être dans tes pattes plus d'une semaine, quand j'aurai trouvé mon propre chez moi. Je pense que j'ai eu une révélation pendant qu'on me gribouillait dessus avec cette aiguille, Harry. » Il ne pensait pas que Louis avait déjà eu l'air aussi excité. « Je sais ce que je veux faire, et tout implique le fait de laisser ma mère et sa stupidité aussi loin derrière moi que possible. » Il embrassa Harry sur le front. « C'est là que tout change – plus de jeu, plus de connerie pour voir à quel point elle va gérer un peu de rébellion. »

« Louis... je ne pense pas que tu comprennes. Ce n'est pas juste ta famille qui va s'opposer à ça, tu le sais, hein ? Comme si être associé avec moi et être vu avec moi n'était pas assez pour que tu aies le droit à un aller simple pour la liste des personnes Les Plus Indésirables de la ville, être ouvertement mon petit-ami va être encore pire. T'as entendu le genre de choses qu'ils crient dans mon dos quand je marche dans la rue. La façon dont ils me regardent, la façon dont ils traversent la rue pour être loin de moi. Je sais que tu ne t'habilles pas comme moi, ni n'écoutes pas la même musique que moi, ni ne rends tout à fait évident le fait que t'es différent des autres et en es fier, mais si tu marches dans la rue en me tenant la main, ils vont quand même scander les mêmes choses. As-tu déjà regardé quelqu'un dans les yeux pendant qu'il te dit le mot 'pd', ou qu'il te crache dessus comme si t'étais ignoble et dégoûtant, et puis qu'il s'enfuit ? Ce sont les choses les plus horribles au monde. »

« Non, je ne peux pas dire que ça m'est déjà arrivé. Mais si c'est le prix à payer pour que je sois moi-même, alors très bien, allons-y. Tu n'auras plus à faire face à ça tout seul, Harry. Je suis qui je suis. C'est ce que nous sommes. J'en ai marre de le cacher. »

Un long silence se prolongea entre eux, la prise de Harry sur la main de Louis se resserrant en réponse à ses mots – puis le rire qu'il avait retenu éclata, et il fit un petit gloussement qu'il étouffa derrière sa main.

« Quoi ? » Louis rougit encore plus, apparemment embarrassé par l'amusement de Harry bien qu'il n'en connaisse pas la cause.

Harry toussa pour cacher un autre petit son d'amusement, puis il dit en haussant ses sourcils, « Vraiment ? Exprimer tes nouvelles opinions et perspective sur la vie avec des paroles de chanson ? Très original, Lou. C'est ma chanson préférée, tu pensais vraiment que je ne remarquerais pas ? »

Le rose sur les joues de Louis devint un rouge fraise, et il se détourna de lui.

Harry le rapprocha de lui, l'embrassa sur le nez et dit, « Très mignon, cependant. »

Ils se remirent à marcher, main dans la main. Louis était silencieux, toujours rouge et un peu timide, songeur aussi avec ses dents mordillant sa lèvre inférieure. A côté de lui, Harry était content de simplement se promener, de tenir sa main et de lui lancer occasionnellement un regard, permettant au rougissement de disparaître du visage de Louis pendant qu'ils avançaient. L'idée que quelqu'un qu'il connait puisse également marcher dans cette rue et le voit fit battre le cœur de Louis douloureusement vite, comme des coups de poing pleuvant sur ses côtes depuis l'intérieur, mais en même temps il se sentait étrangement à l'aise. Tenir simplement la main de Harry et ne pas lutter pour cacher les regards en coin qu'ils continuaient de se lancer, ne pas essayer de déguiser son désir et ce qu'ils étaient aux autres et ne pas constamment paniquer qu'il puisse ne pas réussir, eh bien, c'était étrangement réconfortant. Tout comme le fut la douce caresse du pouce de Harry sur ses jointures à chaque fois qu'ils passaient à côté de quelqu'un dans la rue.

Cependant, ils ne croisèrent pas beaucoup de personnes. Deux personnes les fixèrent, et pour une étrange raison, Louis aima ça, aima savoir que ces personnes pouvaient voir que Harry était à lui. Il aimait l'idée qu'ils pourraient être jaloux, et même s'ils ne l'étaient pas, le simple fait que lui et Harry étaient de toute évidence ensemble et que tout le monde pouvait le voir était assez pour faire apparaître un sourire sur son visage. Une petite fille les pointa du doigt et posa à ses parents une question d'une petite voix haut-perchée, ce qu'ils répondirent semblant particulièrement la perturber : « Maman, Papa, pourquoi le garçon avec les vêtements drôles et le garçon avec le collier de l'église se donnent la main ?» « Parce qu'ils s'aiment, ma chérie, tout comme nous. »

Louis pensa également avoir entendu quelqu'un jurer de dégoût, dirigeant vraisemblablement le blasphème vers eux, mais il n'y prêta pas attention. Il trouva que Harry semblait un peu plus en colère que d'habitude face à la réaction méchante, et il savait que c'était parce qu'il avait peur que ça bouleverse Louis plus qu'autre chose, mais ce dernier ne flancha même pas. Harry fut impressionné.

Après avoir marché pendant quelques minutes en se dirigeant vers chez Harry, Louis commença à espérer qu'il y aurait du paracétamol dans son armoire à pharmacie parce que son poignet commençait à le brûler un peu. Harry le regarda et demanda, « Lou, je peux te poser une question ? »

« Quoi, encore une ? Tu en as plein aujourd'hui, » le taquina Louis. Quand Harry sembla confus, il secoua sa tête avec tendresse et dit, « Tu ne viens pas de le faire ? Vas-y alors, qu'as-tu en tête ? »

« Crois-tu toujours en Dieu ? »

Bien qu'il fût un peu surpris que Harry n'ose même poser la question, Louis dit, « Ouais, bien sûr que oui. Pourquoi ? »

Le plus grand haussa des épaules, cependant il semblait satisfait par la réponse de Louis, un air heureux, qui aurait tout aussi bien pu être un haut et fort 'bien', apparaissant sur son visage. Le silence retomba et après environ une minute, Louis renonça à attendre une réponse ; ils continuèrent de marcher, et il avait presque oublié ce qu'il avait demandé quand, plusieurs minutes plus tard, Harry répondit doucement, « Pendant une minute, je me suis demandé si je ne t'avais peut-être pas trop changé. »

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