Chapitre 20-6

(Tuc-Haut, Sud Quercy, 5 septembre 21h45)

Arrivés au Tuc-Haut, Thibaut et ses passagers comprennent que d'affreux combats s'y sont déroulés. Ils montent tout de même jusqu'au château où les attend un étrange comité d'accueil, Sam et Jo. Devant leur hostilité évidente, Thibaut ordonne aux siens de rester à l'intérieur et, en guise de drapeau blanc, sort avec les Haribos que Liam avait gardés pour Jo.  

Joséphine

Ça cogne.

Partout. Dans ma poitrine et dans ma tête.

Je devrais être morte de peur, trembler comme une feuille, sentir mon cœur déborder. Et pourtant, je n'éprouve que de l'exaltation...

— Tu es prête ? me demande mon ex-ex.

J'acquiesce et me retourne vers la porte de la barbacane. Au lieu de m'interdire d'aller au-devant de nos visiteurs, mon macho attitré a juste offert de m'accompagner. Séduite par cette façon anormalement subtile de jouer les mâles protecteurs, j'ai craqué. Joséphine, l'incorrigible amoureuse...

Sam déverrouille, puis tire le lourd battant.

Mon Cromagnon derrière moi, je sors à la rencontre des nouveaux venus. Avec mon casque Impérial sur la tête et mon gilet pare-balles qui me comprime les seins, je me fais l'effet d'une abeille en corset.

— Avance-toi doucement, sans geste brusque. On ne sait pas à qui on va devoir se confronter.

Je m'exécute. Je suis moi et en même temps une autre. Plus forte. Plus courageuse. Une guérillera redoutable et invincible. Une fille qui se la raconte beaucoup trop, oui...

Aveuglée par la lumière crue du projecteur que Jesse vient d'allumer, je cligne intempestivement des yeux. 

— Par la queue du Voyageur ! note mon poète préféré. Ce Glisseur sali et solitaire, ça pue !

J'ajuste ma vision sur le véhicule Impérial. Tout poussiéreux et cabossé, il flotte de l'autre côté des douves à quelques centimètres du sol. Ses vitres fumées empêchent de voir l'intérieur.

— Ton espèce de truc sur les cerveaux, murmure Sam, tu ne pourrais pas l'essayer sur les occupants de cet engin ?

— Mince alors ! ironisé-je. Jamais je n'y aurais pensé toute seule...

Vexé, mon acolyte se tait. Lorsque le Glisseur était sorti du dernier virage, j'avais déjà tenté de pénétrer l'esprit des arrivants, mais l'appareil était encore trop loin.

En revanche maintenant...

Je propulse mon pouvoir dans l'habitacle. Ils sont sept à l'intérieur. Six humains et un animal. Sur le qui-vive et pleins d'espoir. Trois Altérés, deux en devenir, un Neutre et un...

Intriguée par l'étrange signature énergétique de ce cerveau unique, je m'en rapproche quand une puissance colossale jaillie de nulle part me repousse dans mon propre corps.

Je m'ébroue, à moitié sonnée.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? s'affole Sam. On a affaire à des ennemis ?

— Non. Comme nous, ce sont des victimes de l'Empire. Et comme nous, certains semblent avoir subi une mutation...

Cette découverte me remplit d'une telle stupeur que je ne finis pas ma phrase. Avec sa délicatesse habituelle, Sam, lui, pointe immédiatement le problème.

— Comment ils ont fait pour localiser notre planque ?

Bien que j'aie ma petite idée sur la question, je préfère la garder encore un peu pour moi. Toutefois, histoire de bien montrer à mon compagnon que nous ne risquons rien, j'enlève mon casque. Confiant en mon jugement, il m'imite aussitôt. D'un signe, je lui montre la barbacane et il repasse la porte, me laissant seule.

Les secondes s'égrènent et l'atmosphère monte en intensité, épaisse et délétère, déstabilisante, jusqu'au moment où le pont-levis amorce sa descente. Le Voyageur seul sait pourquoi – le vacarme de machinerie rouillée ou la lenteur avec laquelle il se baisse – tout le bordel des souvenirs de mon face-à-face avec Domitien me dégringole dessus. Comment distraire mon esprit ? Je détourne mon regard vers la vallée. Le 4×4 de Copernic, désossé au bord de la route, la rivière en crue comme un nouveau lac dans la plaine, les collines au loin, nues sous l'orage, et plus près, froissé d'ombres au milieu des champs, le hameau où j'ai toujours vécu. Sali par le passage des prétoriens, j'ai vraiment l'impression qu'il a perdu toute son innocence.

Une longue minute s'écoule ainsi, comme au ralenti, temps suspendu. Si Liam était dans l'habitacle, je l'aurais senti, non ? Et puis, il m'aurait reconnue, il serait sorti...

Mais soudain, un bruit fracassant me tire de ma contemplation. Réintégrant la réalité à la manière de quelqu'un qui ne sort d'un cauchemar que pour tomber dans un autre, je me rends compte que le pont-levis a retrouvé sa place. Aussitôt, les garçons planqués dans la tour allument deux nouveaux projecteurs.

Éblouie par la lumière artificielle, je ferme les yeux. Quand je les rouvre, je m'aperçois que le vent a déposé un petit nuage échevelé sur le château, noyant ses abords dans un brouillard cotonneux.

À pas comptés, je m'engage sur le pont. Nos visiteurs y décèlent-ils un signe de bonne foi ? La portière du véhicule Impérial se soulève.

Saisie d'un drôle de vertige – la sensation d'une imminence –, je m'arrête, les oreilles en bourdon et les jambes flageolantes.

Ma vue se grise. Le pont s'obscurcit, le parvis s'enfuit, le Glisseur s'évanouit.

— Mais merde, jure Sam dans mon dos, c'est qui, cet hurluberlu ?

Comme surgi d'un trou dans la nuit, il pose sa main sur mon épaule. Aussitôt, un doux frisson m'électrise la nuque et ma vision se clarifie pour se fixer sur une apparition à faire se damner une sainte. Dans un uniforme BMI qui moule élégamment ses muscles, Brad Pitt s'avance lentement vers nous. Il a les deux mains en l'air et, en guise de drapeau blanc, nous propose des bonbons !

Mon cœur explose sous mon gilet pare-balles.

— L'enfoiré ! lâché-je. Il l'a trouvé avant moi...

— Qui ? Quoi ? s'étonne mon chaperon. Qu'est-ce que tu racontes ?

Ai-je été transportée dans un univers parallèle ? Dans un film américain du siècle dernier ? Abasourdie par ce spectacle inattendu, si différent de celui que je redoutais, je reste plantée là telle une endive, la gorge nouée par un sanglot qui ne veut pas éclater. Si c'est son mec qui m'apporte les Haribo que Liam me destinait, qu'est-il arrivé à mon ami d'enfance ?

— Jo, ça ne va pas ? Putain, pourquoi tu ne bouges plus ? Ne me dis pas que cette enflure t'a trifouillé le cerveau ? 

Pressantes et angoissées, les questions de Sam me sortent de ma torpeur. Entendant le déclic sec et froid d'un fusil que l'on arme, je comprends que mon fou furieux d'amoureux s'apprête à commettre la bavure du siècle. Alors vite ! Je me retourne et couvre le canon de mes paumes.

De peur de m'abattre par erreur, le va-t-en-guerre remet illico la sécurité de son HK418.

— Nom d'une bombe, Jo ! T'es vraiment ravagée, toi. T'aurais pu te faire tuer... 

— Tu parles ! ris-je. Je ne risquais rien. T'as des réflexes de malade. Jamais tu n'aurais tiré !

 Sous ses yeux stupéfaits, je me débarrasse de mon gilet pare-balles, puis pivote sur moi-même. Les bras toujours en l'air, le chéri de Liam a repris sa progression. La lumière brute des projecteurs creuse son visage d'ombres bleues et ses yeux de chat brillent d'un étrange éclat ténébreux. Bien qu'il soit encore assez éloigné, je perçois son énergie. Elle est puissante et redoutable, mais il semble avoir trouvé suffisamment de ressources en lui pour la dompter. Cette combinaison me plaît... Oh oui ! Elle me plaît !

— Stop ! braille Sam, m'arrachant sur-le-champ à mes pensées classées X.

Conscient de la menace que représente le survivaliste, mon nouveau crush se fige. Le brouillard s'est effiloché, formant comme de petites fumerolles que le vent chahute autour de lui.

— C'est quoi, cet uniforme ? grogne mon garde du corps. Et ce véhicule, tu l'as piqué où ?

Ni bonjour ni merde. Ainsi pris à partie, notre visiteur ne peut pas ne pas répondre. Sa voix aux accents hautains de la nobilitas (1) cisaille l'air. Un patricien. Cet enfoiré de Liam se tape un patricien !

— Sans doute à l'endroit où vous avez trouvé vos casques.

Le léger gloussement que je laisse échapper allume un sourire sur le visage de l'inconnu. À la seule vue de ses lèvres rouges entrouvertes, un tas d'émotions contradictoires s'éveille en moi, des chatouilles au niveau de tout mon être.

— Ou pas ! lâche Sam, plus laconique tu meurs.

Témoins de sa fureur croissante, les sourcils de notre visiteur s'offusquent en accent circonflexe. Ça, c'est l'effet Sam. Quelqu'un d'aussi monolithique que lui ne peut provoquer que des sentiments binaires. Soit on l'adore, soit on le déteste. Soit il vous horripile, soit il vous exaspère... 

Tout imperturbable qu'il veuille paraître, le patricien ne fait pas exception à la règle. Subsiste-t-il un vestige de connexion entre lui et moi ? Je ressens précisément le moment où la colère s'empare de chaque cellule de son organisme.  

— Mais putain, enrage-t-il, réfléchis, merde ! Ça se voit, non, que je ne suis pas un prétorien. 

— Bof ! répond Sam, hilare. De nos jours, BMI recrute n'importe qui. Des rupins, des gamins, des crétins...

Quand mon chéri fait sa tête de lard, on ne peut rien en tirer. Heureusement, le copain de Liam a l'intelligence de ne pas surenchérir. Il se contente de se tourner vers moi. 

— Jo, s'impatiente-t-il, qu'est-ce que tu attends pour lui expliquer, à ton pitt-bull, que je n'ai aucune mauvaise intention ! 

Comment cet inconnu connaît-il mon nom ? À côté de moi, Sam sursaute, en alerte rouge. J'aurais pu le rassurer, mais la voix impérieuse de l'Altéré a résonné trop fort. Résultat, dans ma tête gonflée comme un ballon, des billes fluos roulent dans tous les sens, mes pensées devenues folles. Domitien... Je dois me méfier... Sauf que je n'en ai pas envie... Ce garçon connaît Liam... Et puis, j'adore les Fraises Tagada...

Sans que j'en aie vraiment conscience, mon pouvoir file vers lui et il me tend les deux paquets de bonbons. À peine m'en suis-je emparée que Sam pousse un grognement dantesque et qu'une force mystérieuse projette les sachet quelques mètres plus loin sur la passerelle. Galant, le faux prétorien veut se précipiter pour les ramasser, mais de peur que mon rustre de petit ami ne propulse mon nouveau chevalier servant dans les douves, je l'en empêche d'une légère impulsion dans le cerveau.

Le nobilis s'immobilise. L'air paraît se raréfier tandis que des flux magiques ondoient autour de nous. Alors, nous restons là à nous jauger du regard, un sniper jaloux comme un pou, un patricien dégringolé de son Olympe et votre obligée, Barbie Guerrière.

Est-ce un signe du Voyageur ? Nos trois cœurs finissent par battre à l'unisson.

— Et si on arrêtait de jouer à qui a la plus grosse ? suggéré-je.

— Quoi ? proteste Sam sur un ton que la rage transforme en enrouement. Ce sale bâtard de bourge ose te draguer sous mon nez et moi, je ne devrais rien dire ?

— Mon pauvre ! riposté-je avec une parfaite mauvaise foi. T'es vraiment le mec le plus débile qui ait jamais arpenté notre Terre. C'est le chéri de Liam !

— Si c'est le cas, pourquoi ton pote, il est pas là, avec lui ?

— Parce que comme à son habitude, il s'est fourré dans une merde phénoménale...

Interrompant tout net notre algarade, la voix de l'inconnu a tranché l'air moite à la manière d'un coup de tonnerre. Aussitôt, nos deux regards convergent à l'unisson vers le beau blond. 

— Je vois que t'es parfaitement au courant de son péché mignon, constaté-je.

— Je ne te le fais pas dire, répond le patricien. Je ne le connais que depuis trois jours et pourtant, j'ai déjà cerné son problème...

Surprise par le ton qu'il a employé, mi-goguenard mi-désolé, je le dévisage, silencieuse. Est-ce une poussière de cendre ou une larme qui mouille son œil ?

— Que s'est-il passé ? s'enquiert Sam. Que lui est-il arrivé ?

Brad Pitt secoue la tête. Une mèche folle lui tombe sur les yeux, mais il ne fait rien pour la repousser.

— Il s'est sacrifié pour nous permettre de tous nous enfuir. Résultat, il est prisonnier de BMI.

Les mots sont venus mourir sur ses lèvres comme un noyé rejeté par l'océan. Aussitôt pour moi, le monde s'arrête de tourner. Brisée, effondrée, épouvantée, je vacille dans son immobilité. 

— Bordel, lâché-je, il trouve toujours le truc pour se faire remarquer...

Les deux garçons me fixent comme si j'étais devenue folle – ce qui ne doit pas être loin de la réalité. Craint-il que je m'effondre ? Mon chéri enroule son bras autour de mes épaules. Ma tête appuyée contre son torse et la chaleur de son corps enveloppant le mien, je me sens tout de suite mieux. Oh Sam, tu es tellement attentionné quand tu le veux ! Comment ai-je pu me laisser aller à avoir des pensées inavouables pour un autre que toi ?

— La bonne nouvelle, reprend le patricien, c'est que je sais où il est détenu. La mauvaise est qu'il est aux mains du pire fils de pute que l'Empire ait jamais produit.  

Cette dernière info m'achève. Mes jambes se dérobent et je serais tombée si Sam ne m'avait pas retenue. Ce putain d'enfoiré de sadique de tueur dont je n'ose même pas prononcer le nom... Il m'a arraché mes parents et maintenant mon meilleur ami... Je le tuerai, puis je le retuerai et le retuerai encore !

 — Bon Dieu de bois ! s'énerve Sam. Ce chien de Domitien est vraiment partout. Mais si c'est aussi au Castrum de Gourdon que Liam est détenu, ce n'est pas une aussi grande catastrophe que ça en a l'air...

Cette fois, le patricien n'arrive pas à cacher sa perplexité. Pour ma part, c'est la rage, ma plus fidèle compagne depuis ma rencontre avec Sam qui me consume. Je ne suis qu'une idiote, une abrutie, une gourde, juste capable de se laisser tourner la tête par le premier beau gosse balèze qui passe à sa portée ! Comment ce fumier connaît-il l'existence de ce Camp ? Pourquoi est-il si sûr que c'est à cet endroit que mon ami a été transféré ? Qu'est-ce que ce baratineur de mes deux m'a encore dissimulé ?

— Oui, c'est bien là qu'il est, répond le faux prétorien. Mais comment tu as deviné ?

— Oui, répété-je sur des charbons ardents, comment tu as deviné ?

Pas besoin d'être un fin psychologue pour comprendre que je suis vénère ! Me sentant frémir dans ses bras, Sam me presse davantage contre lui avant d'essayer de m'embrasser. Cherche-t-il à marquer son territoire de Mâle Alpha ? Sous les yeux narquois du nouveau venu, je me dégage aussi sec.

S'il est contrarié, le gros cachottier s'explique sans rien laisser paraître. Un homme, ça ne s'abaisse pas à l'émotivité...

— Lorsque j'ai fouillé le 4×4 de Copernic, j'ai trouvé des documents à l'entête du QG de Gourdon. J'en ai déduit que les Impériaux qui nous ont attaqués étaient basés dans cette caserne et que c'est à cet endroit aussi qu'ils avaient déporté nos familles.

Soufflée, je le fixe. L'impassibilité du patricien déteint-elle sur moi ? Découvrir cette dissimulation perfide aurait dû me faire sortir de mes gonds. Et pourtant, je reste plantée là à sourire bêtement. Si Liam et ses parents ont été incarcérés dans la même prison, peut-être se sont-ils déjà retrouvés ? 

— Vous êtes seuls ici ? s'enquiert le nouvel arrivé, l'air déçu.

— Oui, répond Sam. Mais pas sans défense... 

Les deux garçons s'étudiant en chiens de faïence, un silence pesant plombe l'ambiance déjà glaciale. Comment détendre l'atmosphère ? Vite ! Je me lance dans le récit de l'assaut du Tuc-Haut, puis évoque l'appel radio qui a accéléré le départ de Domitien.

— Il a fait embarquer tous les adultes, conclus-je, et a chargé l'un de ses sbires du nettoyage par le vide. Il devait descendre tous les ados qui restaient. Heureusement, j'avais réussi à me glisser dans son cerveau et il nous a épargnés...

L'ami de Liam me harponne littéralement de ses magnifiques yeux bleus. Que voit-il quand il me fixe ainsi ? Une sorcière ? Une gamine qui joue à la guerre ? Ou une jolie fille dont il ferait bien son quatre heures ?

— On craignait que ce soit lui qui revienne, continue Sam. C'est à cause de ça qu'on était sur nos gardes. 

Notre interlocuteur me lâche du regard pour se tourner vers mon ex-ex.

— Je pensais trouver une armée ici, ou du moins une bonne dizaine de vieux briscards impatients d'en découdre avec l'Empire...

Bien que le patricien se soit efforcé de conserver une voix égale, sa déception semble profonde. 

— Moi et Jo, se braque illico Sam, on est pas très âgés, mais on sait se battre. Et il y en a d'autres à l'intérieur, presque aussi balèzes que nous. Tu te l'es dégotté, ton bataillon !  

— Mes amis et moi étions également pleins de fougue. Et pourtant, les Impériaux nous ont laminés. Je ne commettrai pas la même erreur deux fois.  

Le nobilis a haussé le ton et son autorité se déploie sur nous comme une onde de choc. Je sais qu'il a raison, mais ni Sam ni moi ne renoncerons jamais à nous rendre à Gourdon.

— Liam vous a tous aidés, protesté-je, tu l'aimes et tu vas le laisser tomber !

Ai-je enfin réussi à pousser Mister Zéro Émotion dans ses retranchements ? Je vois ses poings se contracter jusqu'à en faire blanchir les jointures.

— Je n'ai jamais dit ça ! crache-t-il. Juste qu'on ne peut pas se lancer à l'aveuglette. Le courage, l'enthousiasme et la conviction d'être dans notre bon droit ne suffiront pas pour triompher des soldats professionnels de l'armée Impériale. Il nous faut du matos ainsi qu'une stratégie qui tienne la route... 

Au-dessus du château, les éclairs feulent et crachent comme des chats enragés. Le sourire qui se dessine sur le visage de Sam me donne un frisson dans le bas du ventre.

— Si ce n'est que ça qui t'arrête, dit-il, ce n'est pas un problème. J'ai beaucoup, beaucoup d'armes à ma disposition. Des traditionnelles et des plus innovantes, dont une qu'il me tarde d'essayer. Rab de rab, le proprio du château détenait les plans détaillés de tous les Castra de l'Empire. J'ai déjà étudié celui de Gourdon...

Bien carré sur ses deux jambes, l'ami de Liam l'écoute avec intérêt. Est-ce un effet de mon pouvoir sur l'esprit ? Il me semble entendre grincer les rouages de son cerveau. 

— J'ai une transfuge de l'Empire à bord de mon Glisseur, continue le patricien, une combattante hors pair. Et vous deux, vous m'avez l'air de pas mal vous débrouiller. J'ai déjà pensé à un certain nombre de stratégies en venant. On va juste devoir en choisir une... 

Tels trois conspirateurs, nous nous sommes rapprochés les uns des autres. La lumière artificielle des projecteurs forment comme un rampart autour de nous.

— Et si on arrive trop tard ? murmuré-je.

— J'ai bon espoir. D'après ce que je sais, Domitien compte lui-même interroger Liam, sauf qu'entre les répercussions du séisme, l'organisation du transfert de César et l'attaque de l'Alliance du Nord, il est débordé. On va peut-être même réussir à libérer vos familles...  

— Bordel de chiotte ! s'exclame Sam. Il s'en est passé des trucs dans le monde alors qu'on poireautait dans notre trou... 

— Eh oui ! riposte le faux prétorien. Il en a des choses à t'apprendre, le sale bâtard de bourge...

L'espace d'un instant, les deux garçons se mesurent du regard. Si le visage du patricien demeure indéchiffrable, celui du survivaliste, lui, est métamorphosé. Bien que ce soit à son corps défendant, la prestance, le sang-froid et la détermination de son interlocuteur l'impressionnent. Son autorité s'impose à lui comme une évidence... 

— Sam Lennox, se présente-t-il.

— Thibaut Hébrard, répond notre nouveau chef.

Est-ce juste une impression ou mon ex-ex a-t-il tiqué en entendant ce nom ? L'espace d'un instant, je crains le pire, que de vieilles rancœurs de caste ne refassent surface ou que sa méfiance pathologique ne finisse par l'emporter. Mais Sam est un type pragmatique, qui sait jauger les gens assez vite, et ce garçon est honnête et sincère, je le lui ai assuré. Il nous fournira l'appui solide et efficace dont nous avons besoin. Alors d'un coup, mon homme se détend et d'elle-même, sa main s'envole vers le patricien qui lui tend la sienne en retour.

Les yeux dans les yeux, les deux combattants secouent leur poignée à la manière dont on scelle un pacte.  

Un pacte de sang. 

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(1) nobilitas : la noblesse

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Enfin une nouvelle rencontre. 🤩 J'espère qu'elle ne vous a pas déçus.🙏 Désolée que Galilée soit restée à bord du Glisseur, mais si elle était intervenue, les pourparlers auraient risqué de tourner court. 😭😂🔫

C'est un peu long, mais je me suis permis des explications et des rappels, utiles pour ceux qui lisent l'histoire depuis très longtemps...

Rendez-vous bientôt avec Liam. Vous vous en souvenez ? César voulait le rencontrer. 😨

Bisous et bonne fin de week-end ! 🥰😘

Merci d'être toujours aussi nombreux pour chaque parution. 💖

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