Mother hands
Holy
Je l’aime… mais tellement, que j’en ai la poitrine douloureuse, et corps entier malade quand il n’est pas là.
Puis j’ai peur… si peur que j’en deviens tétraplégique.
Comment peut-il en être autrement ? J’ai beau retourner la situation dans tous les sens possibles, les issues restent les mêmes. Je ne serai pas à la hauteur. Il est encore plus bousillé que moi et je ne pourrais pas le réparer. Son mal est si profond, mais il dit qu’il a besoin de moi. Je voudrais y voir une déclaration d’amour, malheureusement ce n’est pas le cas. Mon cœur se compote n’entend que du désespoir. Et je suis en colère parce que moi, je continue de brûler.
Et dire que je pensais qu’il n’y aurait que la mort pour me conduire jusque dans les enfers. Mauvais calcul, j’y suis déjà.
–– Est-ce que ça va Holy !
La voix affolée de ma mère achève de me faire sursauter après m’avoir ramené à l’instant présent, devant les débris de plats qui m’ont glissé des mains. Par chance, la gomme de mes claquettes est épaisse. Je me serai certainement éclopé la plante des pieds, avec tous les morceaux de verre que je ne sais plus éviter.
–– Oui maman, ça va, je suis juste un peu discrète. Je vais ramasser.
Non maman, je meure de seconde en seconde avec le sourire aux lèvres pour ne pas vous décevoir.
Parce qu’entre ces murs, je ne peux pas pleurer pour Sinclair. Je n’en ai ni le droit, ni la permission, avec la disgrâce que ça serait. Alors il me faut attendre la nuit pour fermer les yeux et revivre l’horreur de cette dispute. L’un des plus beaux jours de ma vie, tout en demeurant le pire de tous. J’ai tourné le dos à mon amour.
–– Non, laisse. Une des employées va le faire. Viens plutôt t’asseoir près de ta mère et dis-lui.
Je me laisse traîner comme une poupée sans volonté dans le salon, avant de jouer l’idiote devant le regard scrutateur de Liv.
–– Dire quoi à maman ? Et puis arrête de me regarder avec cet air inquiet tu veux ? m’agacé-je au final.
–– Je ne sais pas, mais je suis curieuse. Holy n’est pas concentré, Holy est malade alors qu’elle a 37 degrés de température, Holy traîne au lit, Holy a annulé son interview de ce matin, Holy n’a pas fêté avec sa famille, Holy pleure sous la douche…
–– Je croyais que tu avais pris ton congé pour profiter de ton petit fils et de ton fils en convalescence. Pas pour m’espionner. Il ne m’arrive rien.
–– Je ne suis peut-être la mère la plus présente du monde Holy, mais je peux le voir, tu ne vas pas bien. C’est Semy ? Tu en es amoureuse ?
Le malaise ! Ma mère et moi n’avons jamais ce genre de conversation. Et pire, je ne peux pas lui dire la vérité. Heureusement on sonne pile à ce moment. Et je ne rate pas l’occasion de fuir.
–– Bonjour mademoiselle, me salut le livreur dont le visage est camouflé par l’énorme bouquet qu’il tient entre les mains.
L’échange se poursuit dans le silence. Une signature pour lui et les fleurs pour moi, après s’être rassuré que j’étais bien mademoiselle Tiger.
–– Elles sont de qui ?
–– Semy, m’empressé-je de répondre, le cœur battant à la chamade.
C’est le résultat du mensonge. Celui de la vérité aussi. Elles sont de Sinclair. Et pas besoin d’ouvrir la carte pour le savoir, le bouquet est rouge et blanc, comme à chaque fois.
–– Je vais… les porter à ma chambre.
Le malaise persiste. Et c’est dommage, mais toute vérité n’est pas bonne à dire. Il y’a une semaine dans cet appartement, j’en ai eu la confirmation. Non en fait, toute vérité n’est pas bonne à entendre. Parfois on n’est juste pas préparé et alors, les choses virent rapidement au cauchemar.
En entrant dans ma chambre, je m’empresse de déposer le bouquet sur la commode près de la porte après avoir retiré la carte, et marche vers mon lit. L’estomac noué par l’appréhension devant ce retour au nouvel après un silence radio de sept jours, je n’ose pas lire. À vrai dire, je ne sais plus quelles sont mes attentes. Je ne sais plus quoi penser. Ce jour-là devant cet inconnu… oui, parce que j’ai eu l’impression d’être devant un étranger, je n’avais qu’une envie c’était de prendre mes jambes à mon cou. Puis je suis montée dans ce taxi et là, j’ai réalisé, trop tard peut-être que c’était le même… Que c’est surtout le vrai. La version originale. Un homme brisé, à l’équilibre entre sa bonté et sa cruauté. Cependant, il était déjà trop tard. J’étais déjà parti, j’avais déjà renoncé et laissé du terrain au doute et à la peur. Et peut-être est-ce vrai, je ne suis pas prête à le recevoir. Je n’ai moi non plus été préparée à ce qui nous arrive. Ou peut-être ne sommes-nous pas simplement faits pour être ensemble…
J’inspire devant l’illustration en bâtonnets. Le bonhomme à genou devant la princesse. Est-ce que je fonds ? Bien sûr que oui. Malgré cette cuisante envie de meurtre qui persiste lorsque son visage apparaît sous mes paupières, et ce, avec la même intensité que la boule de rancœur douloureuse qui me ballonne le ventre. Je lui en veux. Ça n’en finit pas. Pour m’avoir menti, parce qu’il s’est servi de moi, pour les méchancetés qu’il m’a lancées sur la tête. Je déteste surtout l’homme égocentrique qu’il peut être parfois et dont il n’a même pas conscience. Cependant, il a eu au moins raison sur un point, c’est aussi ma façon d’aimer. Tout comme il a tort sur un autre point, je ne me résous pas à rester à ses côtés parce que je l’aime justement, beaucoup trop… Et ça m’effraie.
Et comme pour mieux me convaincre que je fais le bon choix, je retourne sur l’Instagram de sa fiancée, pour mieux effacer ce qu’il convient de maintenir à l’état de mensonges dans ma tête pour mon bien. C’est bien plus confortable de continuer à croire qu’il l’aime elle, que toutes ses explications n’étaient que des mensonges, que d’affronter la seule réalité qu’il soit. Cette vérité qu’il m’a dans la colère, balancé pour les mauvaises raisons : je suis faible… car incapable de choisir, car pataugeant dans la neutralité pour espérer avoir le meilleur des deux mondes, car je garde tout en moi sans me montrer, crier mes contrariétés ou demander de l’aide quand j’en ai besoin. Je m’en rends seulement compte aujourd’hui, je ne me suis jamais assumée. Jusqu’à ce qu’il arrive lui…
Memphis… Putain, il est Memphis. Comme quoi, on attire que ce qui nous ressemble. Moi qui croyait en avoir été épargnée. C’était vraiment trop beau de penser qu’un gentil aristocrate verrait autre chose en moi qu’une racaille. S’il n’avait pas été le criminel qu’il est et connu les réalités de ceux qui viennent de ces bas-fonds obscurs, est-ce qu’il m’aurait seulement regardé, ou aurait-il tranché comme son père, ses frères et sa mère ? La réponse résonne aussi clairement en moi que la réalité m’éclate en plein visage. Je n’aurais pas été assez bien pour lui. Je ne suis certainement qu’une autre des solutions qu’il s’acharne à trouver à une histoire qui n’en a jamais eu besoin en réalité. Peut-être s’est-il égoïstement aussi rapproché de moi pour rappeler à sa conscience qu’il y a pire que lui sur terre et ainsi apaiser ses remords. Pour avoir moi-même très souvent utilisé cette méthode, je sais que ça fonctionne. Comparer ses malheurs à ceux d’un autre qu’on croit plus désespéré, pour se sentir un peu mieux.
–– C’est lui, n’est-ce pas ?
La panique me dope d’adrénaline. C’est dans de grands mouvements que je me redresse de mon lit avant de m’éponger le visage pour faire face à ma mère.
–– Que… quoi ? Comment ? Rien.
La peine que je lis dans ses yeux finit par me désarmer. Résignée, je me m’écroule à nouveau sur mon lit.
–– Pas la peine de cacher le portable, j’ai vu les photos. Et bien sûr que c’est lui.
Je ne réponds rien. Que dire d’autre en plus ?
–– Je ne suis pas en train de te blâmer Holy, je veux juste que mon bébé me parle. Tu es mon unique fille et je veux pouvoir partager cette étape si précieuse de ta vie.
–– Danaé aussi est ta fille maman, fais-je dans une dernière tentative de diversion. Elle se sent seule, tu sais.
–– Je sais mon trésor. Et je la considère comme ma fille aussi. Mais ça ne change pas la réalité des faits pour autant. Allé, fais-moi de la place.
Plus lourde tout à coup, je rampe sur le dos jusqu’à la tête de lit. Elle s’assied à mes côtés et m’intime par un geste de la main de poser ma tête sur ses cuisses. Je ne me fais plus prier, j’en ai besoin. Tout comme je suis fatiguée de vivre toute seule dans ma tête.
–– C’est toujours aussi difficile de le voir avec elle maman. Pourtant, je ne peux pas l’aimer. Je ne dois pas, n’est-ce pas ?
Elle ne répond pas, certainement pour m’encourager à poursuivre, malgré la douleur qui obstrue ma gorge.
–– Je ne suis jamais senti aussi bien de me sentir fragile qu’entre ses bras, explosé-je alors au milieu des spasmes de douleur qui accompagne mon larmoiement. Quand il dit mon nom, j’ai l’impression d’être une autre. La femme la plus exceptionnelle du monde et… Je l’aime maman. Mais ça fait si mal. Il m’a coupé les ailes et maintenant j’ai peur de ne plus savoir vivre sans lui maman.
J’échoue à essayer de défier ma gorge en feu et me laisse plutôt aller aux sanglots. Je pleure sans retenue sous les caresses de ma mère qui ne tarde à m’accompagner.
–– Mais je ne dois pas, il a m’a fait si mal. Il a fait des choses horribles. Je n’arrive pas à lui pardonner, même si je ne cesse pas de l’aimer. J’ai honte maman. Je dépends de lui, de ses sourires, de son odeur. J’ai trahi ma famille. Papa ne va pas me le pardonner. Personne ne pourra me comprendre tu sais. Il a fait des choses graves. Vous vous avez tout fait pour nous éloigner de cette vie dangereuse et je ne veux pas vous décevoir. Tu ne comprendrais pas. Personne ne le pourra.
J’ai conscience de ne pas être plus claire que je ne le voudrais. Pas plus que je ne suis logique. Et c’est d’ailleurs ce que mon visage en larme recherche auprès du sien, lorsque je me redresse.
–– Je suis à bout. Dis-moi quelque chose. Dis-moi que je me trompe que ce n’est pas de l’amour que je ressens. Que ça va me passer comme une vilaine grippe, l’imploré-je en agitant ses mains dans les miennes.
–– Chut, chut… tout ira bien mon amour, gémit-elle avant de me prendre dans ses bras.
Très fort. Nous nous serrons très fort l’une contre l’autre et sur le coup, j’ai l’impression d’aller un peu mieux, pendant qu’elle cajole l’écart entre mes tresses.
–– L’amour est parfait, parce qu’aimer c’est prendre sur soi les imperfections. Je te l’ai souvent répété, tu t’en souviens ?
–– Humm.
–– Je voudrais pouvoir te dire chérie que je t’empêcherai de suivre ce garçon. Et crois-le je voudrais pouvoir en être capable, mais je sais que j’échouerai lamentablement. Je t’écoute et je sais que tu lui as déjà donné une partie de toi, même si tu n’oses pas encore te l’avouer à voix haute. Et sur le coup j’ai peur moi aussi. Je ne sais pas s’il prendra soin de mon bébé. Mais tu sais quoi ?
Elle attend d’avoir ma réponse et me repousse gentiment pour me voir.
–– Je sais sans l’ombre d’un doute que souffriras si tu ne tentes pas ta chance.
–– Je ne sais pas…
–– Est-ce qu’il t’aime aussi ? me questionne-t-elle en essuyant mes joues.
–– Je ne sais pas. Il m’a demandé de l’attendre mais…
–– Est-ce que tu lui as demandé ?
–– Quoi ?
–– S’il t’aime.
Je voudrais manifester mon agacement, mais je n’ai en plus la force.
–– Tant de choses nous séparent, c’est impossible.
–– Est-ce que tu lui as demandé de rester ?
Elle m’écoute au moins quand je parle ? Je comprends vite que oui.
–– Il y’avait cette fille dans un bar perdu du Bronx tu sais. Maltraitée par une tante qui l’a toujours considéré comme un fardeau, comme une moins que rien. Puis un jour, un jeune homme est entré dans ce bar et il l’a vue. Ils se sont reconnus. Contre vent et marrée, il a lutté pour la faire sortir de là, tout en sachant qu’il prenait le risque de se faire envoyer les flics. Elle était mineure et lui un caïd. Ce n’était pas l’idéal pour lui de donner enfin un motif aux flics de l’embarquer. Mais il n’a pas flanché et ils y sont arrivés. Puis la fille a vite compris que l’enfer ne faisait que commencer. Le prince n’était pas aussi parfait que ses yeux d’enfant le croyaient. Leurs mondes étaient si différents… Mais son cœur l’avait déjà choisi. On est passé par le feu et le sang, mais nous en sommes là aujourd’hui. À coups de sacrifices. De mauvaises décisions. On en a détruits des murs, tu peux me croire. Et dis non à tant de monde, surtout aux plus chers. Je n’ai pas à te rappeler nos morts… Mais dans cette imperfection, je trouve mon équilibre. Vous, lui, représentés ma perfection. Celle que je n’échangerais pour rien au monde. Ça n’a pas à être parfait chérie. S’il y a simplement de l’amour, vous trouverez un moyen.
Elle me sourit après avoir redressé mon menton.
–– Holy est la plus Tiger des Tiger a l’habitude de répéter ton père. Et je suis d’accord avec lui. Tu es celle qui est toujours resté. Tu n’es jamais parti. Celle qui se plie en deux pour papa, pour maman. Personne ne te le dit, mais nous le voyons. Celle qui fait passer tout le monde avant elle-même. Je le vois, ponctue cette dernière face à l’étonnement patent sur mon visage. Je ne sais pas ce qui s’est passé entre vous. Tu me le diras lorsque tu seras prête, mais ne renonce pas à ton bonheur. Je te l’interdis. Et surtout pas à cause du monde autour. Nous sommes tes parents, mais ça n’empêche pas que nous puissions nous tromper. Tu es la seule à savoir ce qu’il représente pour toi. Nous on ne le saura jamais, même si c’est de notre devoir veiller sur toi. Puis sache que ton père ne cessera pas de t’aimer parce que tu vas contre sa volonté. Pas même lorsqu’il rugira. Ce n’est pas à nous de comprendre. C’est ton histoire, c’est à toi de l’assumer. Et de te battre, si tu crois qu’elle en vaut la peine.
Cette discussion, je m’en souviendrai toute ma vie, pour sûr. C’est l’une des plus profonde qu’on ait eu jusqu’ici. Et c’est rassurant de pouvoir compter sur maman. Je me demande quand-même si elle continuera à être aussi compréhensive lorsqu’elle apprendra ce qu’il a fait.
Peut-être devrais-je lui dire… Non, elle n’a pas à le savoir. Il faut juste que je réussisse à convaincre Faye de se la fermer. Je ne veux pas que Sinclair ait plus d’ennuis, il a déjà assez souffert. Ce n’est pas parce que je lui ai fait pleins de reproches que je n’arrive à le voir. Seulement il perpétue les mêmes erreurs, il fallait qu’il les voit enfin. Il se gâche la vie tout seul, tel un serpent qui se mord la queue. Alors oui, peut-être bien qu’il a besoin de moi, pour imposer des limites au gamin caché au fond de lui et à qui on n’a pas su en mettre à temps. Pour apaiser les peurs qu’il m’a confié avoir et les larmes invisibles qui coulent sur son beau visage. Je doute que sa famille soit au courant de toute cette histoire. Il doit se sentir seule, comment n’ai-je pas percuté à temps ? Mais il doit m’en vouloir à l’heure qu’il est. J’ai si souvent préféré partir sans lui laisser une chance, trop centrée moi aussi sur mes douleurs. Trop effrayée surtout de laisser entrer plus de monde dans ma vie, parce que ça reviendrait également à la même hauteur. Je ne suis pas si différente dans le fond, j’ai d’abord pensé à moi sur ce coup-là. Je crois que c’est ce que ma mère essayait de me faire comprendre avec leur histoire. Je dois lui tenir la main. Si je l’aime, ça devient ma responsabilité. Peu importe les peurs, on les souffrira ensemble. Et si j’ai des doutes, je devrais lui en parler, pas ruminer.
La bienséance aurait voulu que j’embrasse d’abord ma mère pour la remercier, mais c’est à Sinclair que je pense avant et attrape mon téléphone pour lui laisser un message.
« Est-ce qu’on peut se parler ? Chez nous ? »
–– Merci maman.
Elle laisse transparaitre tout l’amour qu’elle me porte dans un sourire et un regard. Je ne pourrais pas me sentir plus chanceuse qu’à l’instant.
–– N’oublie pas chérie, si ses défauts ne t’empêchent pas de l’aimer, alors ne le repousse pas. Rappelle-toi que l’amour est justement fait pour nous rappeler que l’autre est plus que ses imperfections. C’est surtout un cœur qui a besoin d’être aimé et soutenu.
Voila, de quoi entrer un peu dans la tête de Holy. Est-ce qu'on saisie un peu ses peurs? Je n'ai pas voulu y aller à fond. Et laisser le soin à une future conversation avec son Sinclair adoré pour mieux éclaircir ce qu'ils ont sur le cœur. Demain un nouveau chapitre devrait être publié aussi... Voir deux si j'arrive à me décider sur un détail à temps.
On arrive presque au milieu de l'histoire et mes doutes refont surface du coup😂😪... C'est compliqué mais, je compose avec... Surtout que j'ai pas mal d'inspiration en ce moment.
N'hésitez pas à me laisser vos avis. Ils me font vraiment plaisir et parfois, m'inspire une suite. Alors ne vous retenez pas...
Bon, je vais m'arrêter là et vous dire à demain. Prenez soin de vous et de ceux que vous aimez comme l'a conseillé maman Tiger à Holy... Aimez fort, notre monde en a besoin😜😜.
Love guys 😜❤️
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