Chapitre 7
Je ne savais pas dire non. Refuser n'était pas compliqué mais s'y tenir et ce malgré l'insistance faisait se sentir littéralement égoïste et sans cœur. J'avais été faible.
— Livia, il faut que le côté gauche passe par-dessus le côté droit ! me réprimanda Emma. Franchement, personne ne t'a appris à en mettre un ?
Traversant son lit à la vitesse de la lumière, la blonde me saisit par le col pour défaire tous mes efforts à mettre ce fichu yukata. En plus d'accepter de les accompagner, j'avais obligation de porter la tenue culturelle à ces petits évènements et croyez-moi, c'est beaucoup plus compliqué à mettre qu'il n'y parait. Emma d'ordinaire très bavarde malgré le peu que je la connaissais, c'est-à-dire quelques jours, venait soudainement de se terrer dans un silence de mort.
— Qu'est-ce qu'il y a ?
— Ça te fait mal ? Ce sont des brulures non ?
Chacun de ses gestes étaient doux, comme si elle avait à faire à une poupée de porcelaine capable de se casser à tout moment. On me posait souvent cette question, cela faisait plus d'un an et demi que c'était marqué au fer rouge sur ma peau, ça n'était pas très beau, du point de vue non médical bien sûr. Combien de fois m'avait ont dit que les cicatrices étaient magnifiques et que j'avais beaucoup de chance ? De la chance, et puis quoi encore ? Ce n'est pas vous qui êtes brulés alors je m'en fiche que les cicatrices soient belles, si elles pouvaient disparaitre, ça m'arrangerait très bien.
— Pas vraiment, comparé à avant, je ne sens plus rien. C'est réparé si on peut dire ça comme ça.
Nouant la grande ceinture autour de ma taille, son regard doré remonta lentement jusqu'à mon visage avant qu'elle ne pointe mes yeux du doigt avec un sourire malicieux.
— T'as pas à complexer, tu es magnifique, j'aurai presque peur que tu me pique Draken ! Tu sais, il faut attirer l'attention sur autre chose si tu n'aime pas qu'on regarde tes brulures... Tes yeux, ils sont trop beau et avec ta double paupière, un trait de liner ça tirait super bien. Viens là, je vais t'en faire un noir même si le violet irait mieux mais je n'en ai pas.
Enfin quelque chose qu'elle n'avait pas déjà dans cette énorme chambre très féminine, aussi coquète qu'elle mais aussi très adulte, très mature malgré le fait qu'elle soit une adolescente tout comme moi. Même si elle m'a forcé à dormir chez elle et venir à cette fête, Emma me plaisait beaucoup, d'une nature très honnête et solaire, on ne s'ennuyait pas.
— Au fait, tu veux bien me rappeler pourquoi je dois vous accompagner ? demandai-je non sans ronchonner.
— Tu sais qu'Hina y va avec Takemichi ? Donc si Draken voit qu'il n'y aura que moi, il va penser à un double rencard et du coup il voudra pas faire le tour de la fête avec moi, c'est pour ça que j'ai dit que toi tu seras là. Pour dissiper les doutes, expliqua-t-elle avec un énorme sourire très fière de son plan.
— Ouais donc c'est bien ce que je disais, vous voulez que je tienne la chandelle.
— Mais non ! (elle débouchonna un crayon noir à pointe fine pour tracer quelque chose sur ma paupière droite). Et puis tu aurais aussi pu inviter quelqu'un.
— Déjà que j'ai pas eu le choix, tu veux que j'invite qui au juste ?
— Oh, arrêtes de ronchonner Liv' et puis, je sais pas moi, Baji ou Chifuyu...t'as pas quelqu'un dans le viseur ?
Un fin sourire narquois s'étira sur ses lèvres pulpeuses tandis qu'elle continuait à tracer les fameux traits de liner au coin des yeux.
— Je t'arrête tout de suite ! m'exclamai-je comprenant enfin ce qu'elle sous entendait. Y'a rien avec les garçons, on se connais depuis juste deux semaines.
— Bizarrement, les gens vous voient pas mal trainer ensemble, on me l'a fait pas à moi. Et puis regardes toi, t'es toute rouge.
Rouge ? Sans doute. Je sentais bien mes joues chauffer mai ça n'avait aucun rapport avec de l'amour, seulement une extrême gêne.
— Emma, vraiment. Chifuyu est super gentil, c'est mon ami et Baji...Baji, je sais pas trop, il fait la gueule depuis hier mais c'est un ami aussi, enfin, je pense. J'espère qu'il le pense aussi.
La blonde souffla de soulagement, à croire que tracer deux traits lui avait demandé beaucoup d'énergie avant de se reculer quelque peu pour me fixer avec de grands yeux.
— Mmh...songea-t-elle. Oui, c'est bon, c'est symétrique ! Oh, pour ce qui est de Baji, qu'est-ce qu'il s'est passé exactement ?
J'hésitai à tout lui raconter, sans doute Mikey n'allait pas aimer que sa sœur soit informée de ses affaires de gang, dans le doute, mieux valait omettre les détails du groupe anti-toman et se concentrer sur l'essentiel. C'est donc en prenant place sur son lit, que je lui racontai, dans les grandes lignes, l'attaque de la ruelle puis le comportement étrange de Baji. Bien évidemment, le passage de la difficulté que j'avais eu à m'en sortir avait été trainé aux oubliettes.
— Mmh, je vois... C'est du Baji tout craché ! s'exclama t-elle.
— Hein ? Je suis en train de te dire qu'il m'a mal parlé et toi t'es contente ?
La blonde se leva, plantée devant le grand miroir de la porte de son armoire, son regard concentré sur le chignon soigneusement coiffé sur sa tête, elle me fixa quelques secondes. Les mèches retenues en une sphère emprisonnée autour d'une tresse et agrémenté d'une jolie fleur aux tons violets et dans son yukata bleu marine aux tournesols jaunes, Emma était absolument sublime.
— Il a toujours été comme ça, quand il est contrarié, il fait des choses vraiment stupides comme, par exemple, bruler une voiture parce qu'il a faim. Tu vois ? Je suis certaine qu'il ne le pensait pas et qu'il viendra s'excuser. Enfin, à sa manière.
— Brulé une voiture ? Sérieux ?
— J'étais pas là mais tu peux demandé à Mikey si tu ne me crois pas.
— Non, non, fis-je en bougeant les mains de gauche à droite. Je te crois, je suis juste un peu surprise c'est tout.
— Emma ! tonna une voix lointaine et abimée par le temps. Téléphone !
Sans même un mot de plus, elle laissa tomber le crayon qu'elle tenait dans la main puis se précipita dehors me laissant seule dans la pièce. Plongée dans un silence reposant, je lâchai un soupire en pensant à cette longue soirée qui s'annonçait. Le festival ne me disait vraiment rien et y suivre de loin Draken, Emma, Takemichi et Hinata encore moins. Les démonstrations d'amour ou le fait de le tenter, de le forcer à venir s'agripper à quelqu'un n'avait rien d'extraordinaire, à y réfléchir, c'était plutôt triste de devoir admirer ce spectacle à la fois magnifique et détestable sans jamais pouvoir le vivre. Ce genre de sentiments accessibles aux autres et inexistant pour toi, qu'est-ce que ça faisait mal. En quoi était-je moins méritante ?
— Ça te va grave pas.
Adossé à l'encadrement de la porte, un blond aux cheveux mi longs ramenés en arrière fixait grossièrement ma tenue avec un sourire indescriptible collé au visage.
— Je t'ai pas demandé ton avis de toute façon...
— Le noir c'est cool mais les fleurs roses et vertes quand on sait que t'es une fille violente, ça fait pas très crédible, compléta-t-il.
Sceptique, j'arquai un sourcil non sans étirer un sourire semblable au sien.
— Je dois le prendre comment ?
— A toi de voir, répondit Mikey haussant les épaules. En tout cas, amuses toi bien à surveiller nos deux petits couples, enfin, un et demi parce que le deuxième y'a que Emma qui s'y met.
— Vas-y, c'est ça, moques toi. La prochaine fois je jure que ça sera à ton tour de t'y coller.
— Oh que non, jamais ! babilla-t-il. Je suis trop occupé là.
Roulant des yeux de manière exagéré, le reflet du miroir vint attirer une attention particulière à mon regard décoré d'un liner noir qui, ma foi, sublimait parfaitement la forme des yeux.
— Et bah, soufflai-je, Emma avait raison, c'est canon.
— Pardon ! hurla celle-ci en contournant son frère. C'était Hina, elle part de chez elle, faut qu'on y aille maintenant sinon on va pas arriver en même temps. Dépêches toi Liv'.
Dans un coup de vent, la furie avait attrapé son sac à main, plaqué un bisou sur la joue de son frère puis repartie aussi vite. Mikey conserva une mine neutre qui se voulait presque indifférente à la marque d'affection d'Emma bien que je le vis étirer un fin sourire.
— Fais pas genre, je t'ai vu ! me moquai-je une dernière fois en emboitant le pas à Emma.
Le trajet fut assez court, à peine un petit quart d'heure de marche et pourtant, je n'avais qu'une envie : m'enfuir très loin d'Emma. Parait-il, que j'avais gâché tous ses efforts de par la simple présence de mes baskets noirs et c'est donc depuis quinze minutes, que la jolie blonde expliquait en large et en travers l'importance de porter des claquettes avec un yukata. D'accord ça n'était pas complétement japonais de mettre des chaussures mais de la à hurler au drame... En plus les claquettes, a part irriter la peau entre les doigts de pieds, je n'y trouve aucun argument en leur faveur.
— Emma, qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Hinata en se rapprochant de nous.
— Observe bien, s'indigna-t-elle en me pointant d'un doigt accusateur. Y'a rien qui te choque ?
Ma meilleure amie vint quelque peu froncer les sourcils avant d'afficher son doux sourire habituel.
— Je te trouve très jolie Livia.
— Merci Hina, toi aussi t'es superbe dans ce kimono rose, ça te va super bien, vous allez en faire tourner des têtes toutes les deux, taquinai-je en me tournant vers Emma qui, à ma remarque, fit un tour sur elle-même. Bon allez, grouillez-vous, vos Appolon vous attendent !
J'empoignai mes deux amies par le bras avant de me précipiter à l'entrée du petit festival, esquivant les personnes présentes, je m'arrêtai un instant pour admirer la beauté du lieu. Tout était éclairé de douces lumières orangées et l'allée principale entouré de dizaines de petits stands donnaient une ambiance festive que je n'avais encore jamais vu. La plupart des femmes vêtues de yukata circulaient accompagnées de leurs amis ou famille en riant et je ne pus que me dire qu'Emma avait bien fait de m'obliger à en porter un, j'étais exactement au bon endroit, dans la tenue appropriée. La sensation qui m'assaillait souvent, celle d'être une étrangère, ne s'appliquait pas en cet instant parce que tout était tellement vivant et remplit de bonne humeur que personne ne se souciait de moi. J'étais à la fois invisible et intégré, fasciné et désintéressé, heureuse et malheureuse. J'aurai dû demander à mon père de venir, lui qui avait si souvent voulu me trainer dans un festival sans que je ne fasse le moindre effort pour l'y accompagner, ce soir-là, c'était égoïste d'y être sans lui. Sur un coup de tête, j'empoignai mon cellulaire à clapet, celui-ci s'éclairant difficilement au vu du faible niveau de batterie qui lui restait. Sept pourcents pour s'excuser...
— Livia ? Quelque chose ne va pas avec ta copine ?
— Ah, nan, ça va. Je m'amuse bien avec Emma. C'est juste que...Papa je suis désolé.
— Pourquoi tu t'excuse ? demanda-t-il pendant que je l'imaginai froncer les sourcils à travers le combiné. Qu'est-ce qu'il y'a ? Si ça ne va pas, tu peux rentrer à la maison ma chérie.
Un homme âgé passant juste devant moi m'adressa un doux sourire de politesse auquel je répondis avant qu'il ne disparaisse à travers la foule. Ce simple échange m'avait calmé et je pus donc répondre d'une voix audible à mon père.
— En fait, je suis au festival de Musashi avec Emma, Hinata et Takemichi, y'a Draken aussi mais tu ne le connais pas. Je voulais te dire que je suis désolé. Désolé de ne jamais être venue avec toi quand tu me le demandais. Ce soir, c'est avec toi que j'aurais dû y aller.
Mon père marqua un silence, je cru qu'il m'en voulait.
— Qu'est ce que tu fais au téléphone avec moi ? Vas t'amuser avec tes amis, profites, me dit-il d'une voix étrangement douce et émue. L'important c'est que tu sois heureuse en ce moment, je suis content que tu sortes un peu plus. Aller, raccroche ma puce.
— Attends ! Me raccroche pas au nez ! Juste, je te promets qu'au prochain festival qu'il y'a, on ira tous les deux, rien que toi et moi. A demain, bisous.
C'est ainsi que se termina notre conversation, sur une bonne note qui m'allégeait le cœur, peut-être était-ce seulement une impression mais j'eus le sentiment que nous nous étions un peu plus rapprochés en un seul coup de fil que de puis une année que nous ne vivions plus qu'à deux. Comme il l'avait suggéré, je ferai mieux d'aller profiter de cette soirée avec mes amis. En rangeant mon téléphone qui survivait encore grâce à ses trois derniers pourcents, je balayai l'allée des yeux. Ils n'étaient plus là, ils m'avaient laissé toute seule plantée au milieu du couloir de la festivité comme une idiote. J'avais beau être adolescente, les gens me regardaient plutôt comme une enfant perdue lorsque je croisais leurs regards.
— Super les amis, grommelais-je en avançant à petite foulées.
A mesure que les épaules se frôlaient, que le paysage défilait et qu'aucun visage familier ne me parvenait, mon cœur s'accélérait et sans prévenir, une averse éclata. Les gens courraient pour aller s'abriter, les chemins se vidaient décuplant par la même occasion ma solitude. Une par une et rapidement, les gouttelettes se déposaient en un rythme effréné sur mon crane. J'avais un mauvais pressentiment.
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Salut ! J'espère que ce chapitre vous à plus, moi pas mais passons. Je suis désolé, j'avais un bon rythme d'écriture sur cette fanfiction, je suis pas partie en vacance, j'ai aucune excuse, juste la flemme je pense. Autant être honnête.
Je sais pas si c'est trop vous en demander mais vous pouvez me laisser des commentaires, vos avis, vos attentes etc... ça me ferai super plaisir et c'est motivant. Merci d'avoir lu !
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