24 - Vacances d'été

L'été arriva et, avec lui, s'achevèrent les compétitions sportives qui voyaient s'affronter les lycées de l'archipel.

Comme ils l'avaient espéré, le club de kyūdō du lycée Ikubunkan atteignit sans encombre les demi-finales, mais il fut défait juste avant le podium par le lycée Tsujimine qui accueillait, comme eux, des nouvelles recrues au niveau incroyable.

– C'est de ma faute ! Se lamenta Nanao sur tout le chemin du retour. Si je n'avais pas manqué ces deux tirs à la fin, nous aurions fini à égalité !

– Ce qui n'aurait pas fait de nous les gagnants, lui fit remarquer Yuzuha irritée par ses jérémiades.

En cas d'égalité lors d'un match de kyūdō, les juges désignaient l'équipe victorieuse à l'aide des points qu'ils leurs avaient attribués pour leur posture, leur concentration et la qualité de leurs tirs.

– Alors on aurait perdu aussi parce que je suis une nullité ! S'exclama Nanao.

Yuzuha leva les yeux au ciel. On sentait qu'elle était à deux doigts de perdre patience.

– Moi, intervint Yukino, je trouve que ça n'est pas une mauvaise chose cette défaite. C'est toujours bon de savoir où l'on peut s'améliorer et puis ça veut dire que nous passerons encore une année à nous entraîner ensemble en vue de monter sur le podium, ça me fait plaisir.

Nanao la couva d'un regard où perlait des larmes.

– Tu es sérieuse ? Dit-elle. Tu ne m'en veux pas ?

– Évidemment que non !

Avec l'été se profilèrent aussi les vacances qui allaient permettre aux étudiants de se reposer.

– Il était temps ! S'exclama Haruka après leur dernier entraînement. Je n'en pouvais plus des tests de fin de semestre !

Yukino, Yana et elle s'étaient arrêtées devant le portail du lycée.

– Tu ne vas pas avoir une minute à toi cet été, fit remarquer Yana en se tournant vers Yukino.

– C'est vrai qu'entre le festival à préparer et les devoirs qu'on nous a donnés, énuméra Yukino, les vacances vont être chargées.

– Il faut quand même qu'on trouve le temps de sortir ensemble ! S'exclama Haruka. J'ai envie de faire les boutiques. Les centres commerciaux ont tous la clim, ça nous évitera de mourir de chaud et puis Yuzuha senpai sera peut-être d'accord pour nous accompagner ! Ça serait sympa !

– Oui, j'aimerais bien moi aussi qu'on se voit, répondit Yukino. On s'appellera et on tâchera de convenir d'un jour. De mon côté, je vais aussi essayer de passer du temps avec mon petit ami. On ne s'est pas vus aussi souvent qu'on le voulait dernièrement.

À côté d'elle, Yana et Haruka échangèrent un regard silencieux.

Même si personne, au sein du club, n'était au courant des relations entre les membres de la famille Shiba en dehors de Yukino, Taiji restait quelqu'un d'impressionnant.

– Tu as du courage... Souffla Haruka. Moi, il me fait un peu peur.

– Plus qu'un peu... Corrigea Yana.




Yukino passa les premiers jours de vacances sous la conduite de son oncle, à revoir les pas de la danse kagura qu'elle devrait effectuer pour le festival qui aurait lieu au début du mois d'août.

C'était une chorégraphie qu'elle connaissait depuis qu'elle était petite, cependant c'était une chose de l'accomplir devant sa famille, sous les applaudissements de son père et de sa mère, et un autre de l'exécuter devant un parterre d'inconnus durant un matsuri bondé.

Un jour, de retour des courses, sa tante leur déclara, exaltée :

– Le festival de cette année va attirer un monde fou ! Tout le quartier n'a plus que cet événement à la bouche ! J'en ai même entendu parler au konbini ce matin !

Yukino, qui était en plein entraînement, s'immobilisa entre deux pas.

Elle n'était pas sujette au stress d'ordinaire, mais l'idée de rater sa prestation sur le kaguraden l'angoissait.

(NDA : Kaguraden, estrade sur laquelle se déroule les danses kagura.)

Son oncle, assit dans un coin de la pièce, la rassura.

– Le plus important est l'intention qui doit transparaître dans la danse, lui dit-il. Si tu oublies un pas ou deux, cela n'est pas grave.

Yukino inspira et expira plusieurs fois.

Il avait raison, elle le savait. Mais elle serait tout de même soulagée quand le festival serait terminé.

Pour moi, les vacances commenceront alors pour de bon !

Heureusement, Taiju lui avait promis de venir assister aux festivités et la pensée qu'il serait dans le public l'aidait à oublier un peu ses appréhensions. 

Après les cérémonies, tous les deux avaient prévu d'aller parcourir les stands pour profiter du festival.

On ira manger des takoyakis et de la glace pilée et puis on regardera le feu d'artifice ensemble ! Se répétait-elle en boucle, avant d'ajouter systématiquement : Mais j'ai quand même hâte que ce soit fini...




Ce soir-là, Taiju l'appela alors que Yukino sortait alors de son bain.

Elle se laissa tomber sur son lit, juste enroulée dans une serviette.

Tu fais un truc demain ? Lui demanda-t-il.

Yukino roula sur le dos.

– Rien de spécial, dit-elle. Enfin si, je suis censée répéter, mais je suis sûre que mon oncle me laissera une journée de répit si je le lui demande.

Ça te dirait qu'on aille à la plage ?

– Tous les deux ?

Ouais.

Yukino se redressa à demi. Cette idée lui plaisait. La plage, cela avait vraiment un goût de vacances d'été.

– J'en aurais très envie ! Dit-elle.

Ok, alors je viens te chercher demain matin. Sois prête tôt, on a de la route !




Taiju raccrocha.

Il regarda un instant le portable dans sa paume, avant de le laisser tomber sur le canapé à côté de lui.

Il n'y avait rien à faire. Il avait beau essayer de rester loin d'elle, de mettre ses sentiments de côté, son corps semblait incapable de se tenir aux décisions que son cerveau avait prises. C'était comme s'il était attiré par elle comme par un aimant. Dès qu'il ne la voyait pas durant quelques jours, il se mettait à ressentir les affres du manque tel un drogué.

J'ai besoin d'elle, c'est plus fort que moi.

Plutôt qu'une drogue, en fait elle lui faisait l'effet d'être un astre autour duquel il se mettait à graviter dès qu'elle apparaissait. Sans elle, il se retrouvait plongé dans le noir, incapable de se diriger.

C'est ça être amoureux ?

Taiju n'avait jamais ressenti ce genre de choses par le passé. Bien sûr, il aimait son frère et sa sœur. Son père aussi et sa mère plus que tout quand elle était en vie. Mais ça n'était pas pareil. Eux, ils étaient comme ses racines, il les aimait parce qu'ils faisaient partie de lui. Sans eux, il n'aurait pas été le même.

Mais Yuki...

Elle était plus que ça et autre chose en même temps.

Finalement, il abandonna le canapé et se dirigea vers l'entrée.

Il avait besoin de rouler. Quand il n'arrivait pas à mettre de l'ordre dans ses idées, c'était la seule chose qui lui permettait de se calmer.

Tant que je fais gaffe... tant que je ne perds pas le contrôle, tout ira bien, se répétait-il. Il faut juste que je fasse gaffe.

Sauf qu'il savait parfaitement que ça ne fonctionnait pas comme ça. Mieux que quiconque, il savait de quelle manière s'exprimait son amour. Par la violence. Il avait besoin de brutaliser ceux qu'ils aimaient pour leur prouver ses sentiments. Comme si c'était la seule façon pour lui de communiquer.

Si jamais tu me frappes ne serait-ce qu'une fois, même par accident, 

tu ne me reverras jamais.


Il n'avait pas oublié ces mots et ils le glaçaient toujours autant d'effroi.

Encore faudrait-il que Taiju Shiba soit le genre d'hommes à reconnaître qu'il avait peur.





Le lendemain, Taiju quitta son appartement de bonne heure. 

Les plages étaient rares autour de Tokyo qui était davantage une ville portuaire et il fallait se rendre jusqu'à Kamakura, au sud de Yokohama, à presque deux heures de route, pour trouver un littoral acceptable.

Évidemment, en ce début des vacances d'été, les routes étaient noires de monde sans parler des trains, presque plus remplis qu'aux heures de pointe.

Mais en partant tôt, ça devrait aller, se dit-il en se mettant en route.

Sans compter qu'ainsi ils éviteraient les grosses chaleurs.

Quand il arriva près du sanctuaire, il vit Yukino qui lui faisait signe depuis le bord de la route.

Elle avait mis un short qui dévoilait ses jambes et ses cheveux étaient rassemblés sous un chapeau qui lui dégageait le cou, laissant voir la peau délicate de sa nuque.

Putain de merde... Eut-il le temps de songer en détaillant son physique de bas en bas.

Elle lui faisait un peu plus d'effet à chaque fois lui semblait-il.

Elle vint sa rencontre tandis qu'il se garait le long du trottoir.

– Taiju ! Dit-elle. Je suis tellement contente que l'on passe cette journée ensemble, tu n'as pas idée !

Elle semblait déborder d'enthousiasme.

– On dirait que c'est la première fois que tu vas à la plage, s'étonna-t-il.

– Bien sûr que non, mais là, c'est l'océan !

Cette idée paraissait particulièrement lui plaire.

Elle rangea son chapeau dans son sac à dos – c'était un modèle qui se repliait sur lui-même, vit-il – et mit le casque qu'il lui tendait.

– Tu sais nager au moins ? Rigola-t-il en l'aidant à se mettre en selle.

– Évidemment, répondit-elle très sérieuse, je barbote comme un petit poisson !

– Alors allons-y, tu me montreras ça !



NDA : Un petit Taiju pour cette fin de chapitre ! 

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