Petit déjeuner.
Lisandro
Ce matin, quand l'alarme de mon téléphone a sonné à six heures, je me suis demandé pendant une fraction de seconde où je me trouvais. Le réveil est de plus en plus difficile.
Depuis plus de cinq mois que je suis revenu vivre à Milan, suite au décès de mon père, pour prendre la codirection au côté de ma mère de la maison Haute Couture Lombardi, créé par Emilio mon paternel, et aider Lucia, ma mère, dans ses recherches de candidats pour trouver un nouveau créateur artistique. Mes heures passées dans la société ne font qu'augmenter, et mes nuits à l'inverse raccourcissent. Et je ne parle pas uniquement de celles que je passe à baiser, quand l'occasion se présente, ou quand mes cauchemars s'invitent dans mon sommeil.
Ce matin, ne fait pas exception à la règle, et il est sept heures quand j'arrive dans les locaux de Lombardi couture. Je salue Pablo, qui vient de prendre son poste, et monte directement au deuxième étage par les escaliers. Je dois avouer, que c'est l'un de mes moments préférés, de la journée, quand tout est calme, que tous les bureaux sont éteints, que seule la lumière du jour qui se lève perse à travers les stores blancs. Sauf que ce matin, une lumière venant de la pièce cuisine attire mon regard. D'où je suis, je ne distingue que l'ombre d'une silhouette. Je reviens sur mes pas et me dirige vers celle-ci, pour assouvir ma curiosité, et voir qui est la personne aussi matinale que moi.
Chiara
Hier matin, j'étais devant les portes de la société en train de passer un coup de fil à Natanale, un ami mannequin, et colocataire d'Alessio, quand mon regard est attiré par une voiture, qui se gare en double file devant l'entrée, et qu'une fille splendide en sort, sans se soucier de l'embouteillage qu'elle produit, ni des klaxons qui font un concert. Je la vois se diriger vers moi en courant, et sans me jeter un coup d'œil, elle me lance ses clés en me disant sans s'arrêter, qu'elle a rendez-vous avec Madame Lombardi, et que je serai aimable d'aller garer sa voiture. Mon IPhone dans une main, et les clés que j'ai attrapé au vol dans l'autre, je reste planté, comme un con sur le trottoir, sans avoir eu le temps de réagir, qu'elle est déjà à l'intérieur. J'entends Natanale qui me demande si je suis toujours là, et avant de raccrocher, je lui dis que je le rappelle plus tard, sans autres explications.
Il s'est passé quoi là ? Depuis quand on me prend pour un voiturier ?
En reprenant mes esprits, je fais demi-tour pour rejoindre ma mère dans son bureau, qui m'attend pour notre entretien avec notre nouvelle créatrice artistique... Quand une évidence me percute. Celle qui m'a pris pour un voiturier est Chiara Arlegui, la jeune et talentueuse diplômée, et non moins magnifique, que nous venons d'embaucher pour remplacer mon père. Je sens que les présentations vont être amusantes. En les imaginant, un sourire naît sur mes lèvres.
En passant devant le comptoir d'accueil, Melissa me salue avec un sourire, qui attend autre chose de ma part, qu'un simple bonjour, mais je ne mélange jamais, travail et plaisir, bon, sauf quelques fois avec Valeria, mais là c'est plus pour alléger ma conscience qu'autre chose.
J'arrive au deuxième étage, fait un signe à Carlotta la petite amie d'Alessio, tout en lui demandant si ma mère est dans son bureau avec notre rendez-vous, et me dirige vers celui-ci, quand elle me le confirme.
Quand je pénètre dans la pièce, Chiara est encore debout, dos à moi, très bien, la surprise n'en sera que meilleure, elle se retourne à l'entente du mot "voiturier", et je peux lire dans ses yeux magnifiques toute la confusion de son geste. En m'approchant, pour lui tendre la main et lui rendre ses clés par la même occasion, je la détaille de la tête aux pieds, et je me dis que mon karma se fout de ma gueule, car ma résolution de ne pas mélanger travail et plaisir va être dure à tenir !
Chiara Arlegui est un ange, qui va me faire brûler en enfer !
Sa poignée de main, est ferme et douce à la fois, une sensation bizarre traverse mon corps, et je me répète que mon karma se fout doublement de ma gueule, si en plus, juste une poignée de main me donne des frissons. Je remonte mes yeux, vers elle, et je lis dans son regard qu'elle a ressenti la même chose que moi.
C'est ma mère par un raclement de gorges, qui nous ramène dans ce bureau, non sans me faire un petit sourire, et me demande d'expliquer à Chiara ce que l'on attend d'elle. Et c'est avec un air de défi, qu'elle prononce mon prénom pour la première fois. Et croyez-moi, rester de marbre face à sa prononciation relève du miracle. Ma mère met fin à l'entretien, en me demandant, de faire visiter nos locaux, et de présenter Chiara à ses collègues. Tout se passe extrêmement bien, tout le monde est content de faire sa connaissance et lui souhaite la bienvenue, sauf Valeria, qui n'a pas pu s'empêcher de faire la garce, comme à son habitude, quand une fille retient mon attention. Mais dans ces locaux, c'est moi son boss, donc je n'ai pas hésité à la remettre à sa place, petite sœur de Stefano mon ami défunt ou pas. Le passé, n'a pas sa place ici !
La suite de la visite, a été une douce torture pour mes yeux, mais aussi pour mon sexe, car si je me tiens un maximum à côté d'elle, les rares fois, où j'ai dû la laisser passer devant et où j'ai pu admirer son cul dans sa robe parfaitement coupée, celui-ci se rappelle à mon souvenir.
Même si Chiara est un ange, je sais que, même le plus pur, peut se transformer en déesse des enfers. Donc, elle restera un fantasme, et mon putain de karma ! Impossible pour moi, d'aimer à nouveau, et d'avoir une totale confiance en qui que ce soit.
C'est un buongiorno, qui me sort de mes souvenirs, et je me rends compte que Chiara me tient la porte pour que je rentre.
— Bonjour Chiara, tu n'as pas dormi ici j'espère ? belle entrée en matière mec !
— Non t'inquiète, c'est juste que j'aime particulièrement ce moment de la journée, ou je suis dans le calme pour réfléchir et créer, ça m'aide !
Quand je le dis que le karma se paye ma tête !
— Et toi, tu as dormi ici ? me demande-t-elle avec son sourire, qui a du en faire tomber plus d'un. Et cette pensée ne me plait pas du tout.
— Non, je suis comme toi, j'aime aussi me retrouver seul avant l'agitation, j'en profite pour m'avancer dans mon travail.
Un silence s'installe, et je fixe mes yeux partout, sauf sur elle, bravo mec t'as quel âge déjà ?
— Tu veux un café ? Je viens d'en faire, et j'ai acheté des croissants, un premier petit déjeuner avec mon patron, pour mon premier jour, tu ne peux pas me le refuser ! me dit-elle.
— Je n'en ai pas l'intention non ! Demain pour ton deuxième jour, et ton deuxième petit déjeuner avec ton patron, c'est moi qui apporte les viennoiseries.
Elle éclate de rire, et me serre la main en guise d'accord. Et cette putain de sensation refait son apparition. Elle enlève sa main, comme si je l'avais brûler, et sans un mot se dirige vers la cafetière, pour la poser sur la table, je m'occupe de prendre deux tasses, et m'assois en face d'elle.
— Lait ? Sucre ? me demande-t-elle, alors que son portable sonne pour la deuxième fois. Elle y jette un rapide coup d'œil et le retourne sur la table.
— Non, ni lait, ni sucre, merci, ce serait faire honte au café italien ! dis-je pour détendre l'atmosphère.
— Quand on a vécu comme moi à Londres, pendant cinq ans, plus rien ne me fait honte en matière culinaire. Heureusement, que quand je rentrai chez moi à Biarritz, mon père qui est cuisinier, me faisait ses spécialités, sinon j'aurai fini par oublier ce qu'est de la bonne cuisine.
Je ne peux m'empêcher de sourire, et me dire que Chiara, dans d'autres circonstances, si je n'avais pas été trahi par la seule fille que j'ai aimé, Livia, aurait pu être une merveilleuse petite amie. Elle est belle, intelligente, douce mais avec un sacré caractère, et surtout de la bonté se dégage de son visage.
— Si je veux profiter un minimum, de ce calme, je vais devoir te laisser, et rejoindre ma superbe cage de verre. Dans la journée, si tu as quelques minutes à m'accorder, je voudrai te montrer les croquis que j'ai dessiné hier soir.
— T'es sure que tu as dormi ? Tu passes quand tu veux, je n'ai qu'un rendez vous ce matin, et après, je dois bosser sur les différents lieux qu'a sélectionné Valeria, pour le défilé printemps/été.
— Très bien, je dois faire un détour par la réserve pour voir si l'on a de la dentelle de Calais, et je passe te les montrer.
Une fois que Chiara, est sortie de la cuisine, je me dirige vers mon bureau, et m'aperçois que le petit déjeuner à durer plus longtemps que prévu, car Carlotta et Alessio sortent de l'ascenseur, en plaisantant, rejoignent leur poste de travail, non s'en m'avoir embrassé pour me dire bonjour.
— T'es pas encore dans ton bureau mec ? Panne de réveil ?
— Non, je viens de finir de prendre mon petit déjeuner avec Chiara.
Alessio écarquille les yeux, et je vois Carlotta sourire, depuis quand je me justifie ?
— Ce n'est pas ce que tu crois, pervers, nous sommes arrivés pratiquement en même temps... Pourquoi j'ai l'impression que je m'enfonce là ?
— Peut-être parce que c'est le cas ? me confirme mon pote. C'est cool que tu t'entendes bien avec elle, et puis qui sait, peut-être qu'elle arrivera à te faire déculpabiliser et aimer à nouveau !
— Non, ça je ne crois pas, et tu le sais très bien ! Alors enlève-toi ces idées de ton cerveau de machine à calculer.
— Tu connais le proverbe Lisandro... me taquine Carlotta. Fontaine...
— Quel proverbe ? nous coupe une voix, que j'aurai souhaité entendre beaucoup plus tard.
Valeria arrive vers nous, avec un sourire des plus faux, dans un tailleur pantalon qui met en valeur sa silhouette de mannequin, c'est vrai que c'est une fille magnifique, elle a un corps de rêve, pas cent pour cent naturel, mais peu importe, au lit, elle est plus que bonne, mais c'est une vraie salope, qui n'hésite pas à employer tous les moyens pour arriver à atteindre ses buts. Je sais qu'elle attend beaucoup plus de moi, que ce que je lui donne de temps en temps, mais elle sait aussi, qu'elle n'aura jamais plus. De toute façon, si un jour je devais retomber amoureux, ce ne serait sûrement pas d'une fille comme elle. Si elle travaille avec nous, et que ma mère la tolère, c'est uniquement en souvenir de l'amitié qui lie nos deux familles, avant la mort de son frère.
— Aucun que tu ne connaisses, ou que tu comprennes, lui lance Carlotta. En allumant son ordinateur, et en mettant son oreillette.
— Bon ! dis-je avant que cela ne dégénère, on a tous du travail qui nous attend, Valeria, apporte moi la liste des lieux que tu as sélectionné, je voudrai les étudier, avant de les montrer à Lucia et à Chiara.
— Pourquoi à la créatrice artistique ? Elle, elle dessine c'est tout !
— Et moi, je dirige ! lui dis-je sur ton qui ne mérite aucune réplique. Du coin de l'œil, je vois Alessio et Carlotta, se retenir de rire, mais je n'en tient pas compte.
— Très bien, je te les porte tout de suite.
Elle tourne les talons et dans un mouvement de hanche chaloupé, se dirige vers son bureau.
— Tu as mangé du lion ce matin ou quoi ? Attention au retour de bâton mec. Cette fille craque pour toi, et est prête à tout pour épouser un Lombardi.
Je les laisse penser ce qu'ils veulent, et prend la direction de mon bureau. Je suis à peine installé, devant mon macbook pro pour checker mes mails, que l'on frappe à la porte.
— Tiens la liste, ce que j'ai entouré en jaune, sont les plus intéressants, et raisonnables en terme de coût et surtout disponibles aux dates que nous avons fixé, ceux en rouge sont les plus luxueux, mais à mon avis les plus représentatifs de la maison, et donc les plus chers. Si tu as besoin de précisions, je suis dans mon bureau.
— Merci Valeria, ferme la porte en sortant, lui spécifie-je sans la regarder.
Elle allait répondre, mais un coup frappé contre la porte entrouverte, la coupe dans son élan, me fait lever les yeux, et je vois Chiara qui attend, que je lui dise d'avancer. En passant près d'elle, Valeria lui donne un coup d'épaule, et sort de mon bureau sans un regard, ni un bonjour pour Chiara.
— Je te porte les croquis, dont je t'ai parlé ce matin, pendant notre petit déjeuner, me dit-elle en avançant vers mon bureau, sans tenir compte de Valeria.
J'entrevois Valeria marquer un temps d'arrêt, et tourner sa tête pour fusiller du regard Chiara, qui elle, est déjà penchée sur mon bureau pour étaler ses dessins.
— J'ai agrafer les échantillons de tissus, que j'ai choisi pour chaque pièce. Qu'en penses-tu ?
Ben, là, tout de suite, pas grand chose, je suis en train de me battre avec ma conscience, pour enlever les images qui me viennent de toi, nettement moins habillée, mais dans la même position !
— Lisandro ? Tu m'écoutes ?
— Oui ! Pardon.
— J'étais entrain de t'expliquer, que si tu les valides, Carla lance dès maintenant, le coupe moulage. Pour la robe toute en dentelle, celle qui avec ton accord et celui de Lucia, clôturera le défilé, je dois me rendre chez le brodeur, cette après-midi.
— Elles sont toutes magnifiques Chiara, tu as vraiment fait un travail formidable, tu as su donner une note de modernité, tout en gardant l'esprit de la maison. Je valide à cent pour cent .Tu veux que je t'accompagne chez le brodeur ? Avant on va déjeuner dans une pizzeria, qui se trouve à côté, et ensuite je te dépose chez Francisco.
— Merci, mais une autre fois, je vais juste grignoter un sandwich et ensuite je file. Si tout est ok pour toi, je remonte voir mes petites fées.
Une fois que Chiara, a quitté mon bureau, j'étudie la liste que ma fait passer Valeria sur les endroits disponibles pour notre futur défilé. Deux ont retenu mon attention, mais avant de prendre une décision, je veux en parler avec ma mère et Chiara.
La journée est passée rapidement, sans que je ne recroise Chiara. En sortant, Alessio qui attend sa petite amie près de l'ascenseur, me propose d'aller boire un verre avec lui et Carlotta dans notre bar habituel.
En rentrant chez moi en début de soirée, je me rend compte qu'il me tarde d'être à demain matin, pour mon rendez-vous petit déjeuner avec Chiara.
Et, ça fait bien longtemps, que programmer mon réveil si tôt ne me dérange pas !
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