Gueule De Bois

Il est six heure et quinze minutes. Ton réveil a déjà sonné plusieurs fois, mais tes yeux ne s'ouvrent pas. Du moins jusqu'à ce que tu réalises que...

- Putain! Il est six heure et quart ! Merde, merde, merde !

Tu jures comme un bucheron et t'extirpe hors des draps tant bien que mal. Assise au bord du lit, tu poses une main sur ton front gelé et avec l'autre main tu repousses quelques mèches rousses derrière ton oreille. Tu te remémore la soirée arrosée d'hier soir et à cet instant précis, tu regrettes les litres d'alcool ingurgités la veille. Allez ma vieille, faut y aller.
Tu te donnes une tape sur la cuisse et te déplace en titubant jusqu'à la machine à café. Tu sors ta tasse préférée, celle que ton père t'as offerte à la remise des diplômes. "Proud daddy of an amazing girl" est inscrit dessus. Tu caresses l'écriture du bout des doigts et pose la tasse sur l'îlot central, un sourire plein de tendresse au bord des lèvres.

Tu te diriges vers la salle de bain et constate l'étendue des dégâts.

- Oh mon Dieu... Plus jamais ma fille. Dis-tu en rigolant de ton propre mensonge.

Tu enleves les restes de maquillage ayant noirci tes yeux et une fois la tache accomplie, tu attaches grossièrement ta longue tignasse bouclée en un chignon désordonné mais passable.

Tu passes grossièrement une fine couche de crème sur ton visage de porcelaine, puis te mets à parcourir frénétiquement l'appartement à la recherche de tes vêtements de travail.

Une fois trouvés, tu les enfile à toute hâte, consciente de ton retard déjà conséquent. Et tu te rappelle...

-oh non Bruce, excuse-moi mon pote... J'ai vraiment pas le temps de t'emmener en promenade. Je t'ai ouvert la porte du jardin...

Bruce te regarde avec ses petits yeux de chien battu, et remue la queue énergiquement, la langue pendue jusqu'au sol. Tu lui caresse affectueusement le haut de la tête. Cet adorable Husky est ton fidèle compagnon depuis si longtemps. Vous nouée une si grande complicité depuis le ce jour où tu l'as recueilli. Tu as toujours été une amoureuse des animaux. Eux seuls ne t'ont jamais déçue. A contrario, les relations humaines n'ont jamais été ton fort. Tu passes ton temps à éviter tout contact avec les autres. Il n'y a qu'une personne qui le comprend, Tommy. Ton coéquipier et ami depuis l'école de police.

Tommy a toujours été là, et ce, dès votre rencontre en première année. Il ne comprenait pas ta fascination pour les génies du crime, comme tu aimes les appeler. Il ne comprenait pas que tu puisses comparer les horribles scènes de crime auxquelles vous deviez faire face, à des œuvres d'arts incomprises et mystiques.

Mais stop. Assez rêvassé. Il est temps de te mettre en route avant que Brenner ne te tombe dessus.

***

Arrivée au bureau, tu t'empresses de rejoindre ta chaise, tête baissée et te fonds sur ton clavier, ton sac à main encore posé sur tes genoux. Mais une voix qui t'es familière vient murmurer à ton oreille :

- Alors Manson, soirée bien arrosée encore hier soir...? Si tu voyais ta face...

- Putain Tommy, c'est pas le moment... J'ai une gueule de bois monumentale et j'avais tout, sauf envie de me pointer ici ce matin...

-MANSON ! BLAKE ! DANS MON BUREAU !

- Finalement on est rattrapés par la réalité ma grande ! Allez debout ! Se réjouis Tommy.

Tommy descend de ton bureau sur lequel il s'était assis au préalable et tu lui emboite le pas vers le bureau de Brenner. Ce dernier semble énervé, comme à son habitude. Son visage marqué témoigne d'une fatigue de longue date, sûrement due aux dernières années sans aucune vacances.

-Asseyez-vous, je vous prie.

Brenner vous montre les deux chaises face à son bureau en remontant ses lunettes sur le nez. La tête baissée, il soupire et croise les bras formellement. Son ventre rebondi, maintenu dans une chemise délavée et trop serrée, vient s'écraser contre son gigantesque bureau.

-Bon, je vous ai pas appelé pour faire la causette. J'ai une affaire pour vous deux. Une jeune femme, Jenny Curtis, a été retrouvée morte dans un entrepôt à deux rues d'ici. J'ai besoin que vous vous y rendiez au plus vite. La scientifique est déjà sur place mais certains éléments nécessitent toute votre attention.

-De quoi s'agit-il ? Demande Tommy

-Oh, je sais que l'agent Manson a des petits plaisirs étranges alors je ne vais pas lui gâcher la surprise ! Tenez, prenez ce dossier et Allez-y maintenant. Dit Brenner sur un ton ferme et sarcastique à la fois.

Tommy et toi sortez silencieusement du bureau de Brenner. Tu jettes un dernier regard noir vers son bureau. Mais quel connard. Sans te retourner, tu descends jusqu'au parking, sans même dire un mot à Tommy, énervée par la remarque abjecte de ton supérieur. Soudain, tu sens qu'on t'empoigne le bras sèchement :

-Hope, s'il te plaît attends. Écoute pas ce trou du cul. Il est juste frustré de ne plus pouvoir aller sur le terrain. Il sait que tu as un don, et ça le fout en rogne. Mais laisse tomber, vraiment.

-Tom s'il te plaît. C'est pas la peine t'inquiète pas. Dis-tu en te libérant de son emprise.

P

uis tu te diriges vers ta voiture, sans dire un mot.

-Laisse-moi conduire Hope.

Et sans même te laisser le choix, Tommy accède à la place du conducteur. Sa carrure imposante semblerait presque écraser l'intérieur de ta petite voiture. Il passe une main dans ses cheveux et prends les clefs que tu lui tends, pour ensuite allumer le contact.

Le moteur démarre et vous voilà en route pour aller découvrir la dépouille de la jeune Jenny Curtis.

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