Treizième Grain

 Je vous conseille d'écouter la musique en lisant !

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Jungkook adressa un petit sourire désolé à la dame de l'accueil qui avait presque les larmes aux yeux. Pourtant elle ne tenta pas de le retenir parce qu'il semblait si calme et déterminé qu'elle avait compris que sa décision était prise.
Il prit sa main dans les siennes, la pressant légèrement et la regardant dans les yeux. "Courage", lui souffla t-il avant de partir, le coeur tout de même un peu lourd.

Il passa sans une pensée les portes de l'université.

L'esprit vide et léger, il se retourna une dernière fois. Un petit sourire habillait ses les lèvres, teinté de peine et de regrets à venir.

Il grava l'image de son ancienne école et leva les yeux vers le ciel pour ne laisser aucun larme s'échapper. Il repartir presque immédiatement, de peur de ne plus vouloir s'en aller s'il ne partait pas dans la seconde qui suivait.

Ça y était. Il n'était officiellement plus un étudiant.  Ça faisait tout de même bizarre, mais c'était pour le mieux, pensait il.

Namjoon allait sacrément râler mais c'était le choix le plus malin : ça coûtait trop cher et mentalement il n'était pas assez solide pour préparer des examens alors qu'il déprimait. Ça lui donnerait aussi assez de temps pour travailler et gagner assez d'argent pour habiter seul ( ce qui semblait presque impossible parce que les appartements qui lui plaisaient était à des prix inimaginables ). En plus, son ancienne université était à presque cinquante minutes de son logement actuel -c'est à dire chez Hoseok-, ce qui était juste trop compliqué pour eux.

Enfin bon.

C'était fait.

Et maintenant il fallait qu'il trouve un travail. Enfin, à vrai dire il savait qu'il devrait en cumuler deux ou trois pour réussir à faire des économies mais il fallait déjà être embauché une fois.

Mais il était déterminé : parce que il détestait abuser de l'hospitalité de Hoseok, parce qu'il se sentait de trop entre les deux autres hommes, et parce qu'il avait simplement envie de prendre un nouveau départ. 

Alors qu'il s'asseyait sur le banc de la station de métro, son regard se retrouva capté par une affiche publicitaire.

Et il se retrouva soudainement absorbé par l'image qui couvrait le mur.

Une bouche.

Une bouche rougie, et des lèvres comme des cerises dans lesquelles on rêverait de croquer.

Et un sourire mesquin, un peu aguicheur, qui décore les croissants de chair, et qui découvre légèrement quelques dents aussi blanches et régulières que des perles.

Et un grain de beauté adorable sur le bout de son nez délicatement taillé.

Et des yeux savamment maquillés de différentes nuances de brun, des yeux dont les iris vous brûlent et semblent vous dévorer tout entier. Un regard affamé.

Et, comme pour harmoniser le tout, quelques mèches de cheveux d'un châtain presque blond qui lui masquent presque le regard, comme pour le faire paraître plus mystérieux encore, plus beau.

Oh, comme il fut dur pour Jungkook de quitter Taehyung des yeux pour monter dans ce train. Et comme cela lui fit mal de trouver partout sur son chemin, encore et encore, les mêmes images, le même regard familier.

Comme cela était douloureux de réaliser que jamais, au grand jamais, Jungkook ne pourrait le quitter des yeux et l'enfouir dans un coin de sa mémoire, tout simplement parce qu'il était partout. Parce que des affiches ornées de son visage le narguaient aux quatres coins de la ville.

Alors, Jungkook se fit une promesse.

Il n'oublierait pas Taehyung, de toute façon c'était vain.

Mais il ferait de son mieux pour s'occuper, pour penser à d'autres choses, pour avoir moins de moments pour penser à lui.

Il avait toujours pensé que le jour ou il partirait, son coeur se briserait en mille morceaux. Pourtant, son ancien amant est parti. Loin, en plus, et pourtant il ne sent ni douleur insoutenable, ni envie de se jeter hors du train.

En réalité, le départ de Taehyung n'a rien enlevé. C'était comme si, avant qu'il n'arrive dans la vie de Jungkook, ce dernier avait un coeur incomplet. Et le mannequin l'avait complété, le rendant heureux, vraiment heureux.

Alors maintenant qu'il était parti, c'était comme s'il revenait avant. Comme s'il se vidait à nouveau, le coeur empli d'espaces que personnes ne pourrait jamais plus effacer.

De minuscules espaces dans le temps, des fractions de secondes ; le soir, dans son lit, ou bien encore comme ce qui venait de lui arriver à l'instant ; des poussières de temps où un vide lui emplissait l'être et où Taehyung lui manquait à en crever.

Au final, être vide faisait bien plus mal qu'être brisé. Parce que si un coeur en miettes pouvait, avec suffisamment de patience, être reconstruit, un coeur dont il manquait une partie ne pouvait que se divertir, créer d'autres espaces.

Mais jamais le vide ne se guérissait.

Le vide était sa malédiction.

" " "

Jungkook mit son deuxième écouteur et ferma les yeux un instant.

La musique l'enveloppa aussitôt, le plongeant dans une bulle de tendresse et de réconfort.

C'était une mélodie un peu étrange, et plutôt semblable à une berceuse pour enfant. Une mélodie sifflée qui restait en tête, et un piano doux qui caressait le coeur. Rien de bien compliqué, pas de paroles ni de complexité. Mais cette chanson, elle faisait du bien.

On se sentait transporté dans un autre monde, assis quelque part au milieu de la nature, entre les criquets et le vents qui chantaient en coeur. On se sentait câliné, on savait que ça allait bien se passer, comme si quelqu'un nous tenait la main et la serrait fort ; assez fort pour qu'on se rappelle qu'on existe.

C'était ce genre de musique dont on a besoin, ce genre de musique qui donnait envie aux enfants de devenir musiciens, ce genre de musique qui vous faisait voir le monde autrement.

À travers les orbes émerveillées de Jungkook, par exemple, qui s'était arrêté en plein milieu de la rue, soudainement stupéfié par la beauté du monde. Comme s'il avait pris une balle en plein coeur, il se tenait là, aveugle à ceux qui le bousculaient avec violence, à observer la bouche entrouverte cette foule baignée par le coucher de soleil qui faisait miroiter les immeubles.

La rue semblait infinie, continue. Des kilomètres de béton grisâtre qui paraissaient soudainement comme une rivière d'argent. Les immeubles, fièrement dressés dans le ciel, le touchant du bout des doigts, ne lui avaient jamais parus aussi grandioses, aussi impressionnant. Et même les passants, de toutes les couleurs de peaux, de cheveux, et de coeurs, même eux étaient bien plus beaux qu'ils ne l'avaient jamais étés.

Juste un moment arrêté dans le temps où Jungkook s'etait senti juste... Bien.

Et, lentement, il s'était insinué dans ses veines.

Alors qu'il s'était remis à marcher, doucement, comme par peur de briser ce rêve utopique dans lequel il se trouvait plongé, toujours guidé par sa merveilleuse musique.

La fameuse pensée l'avait encore fait frissonner. Des larmes étaient lentement venues faire briller ses yeux, et sa gorge s'était serrée, compressant ses poumons comme s'il n'avait plus le droit de respirer. Et la noirceur s'était insinuée dans son regard, brisant chaque étincelle.

La fatigue lui avait soudainement pesé sur les épaules. Le poids du monde entier reposait sur son corps frêle alors qu'il atteignait enfin l'appartement d'Hoseok.

Et, alors qu'il s'apprêtait à y entrer, il s'était retourné.

Il avait vu le monde.

Le monde sublime qui avait été prêté à ses yeux, le temps d'une mélodie.

Il avait entendu son rire grave, il l'avait vu au coin de la rue, marcher lentement vers lui. Il avait repensé à son regard amoureux, et son ventre s'était tordu. Il avait laissé les larmes lui échapper, et faire naufrage sur ses lèvres craquelées et dans son cou. Il avait serré les poings, à s'en planter les ongles dans la peau.

Taehyung lui aurait embrassé le coin des lèvres. Il aurait caressé sa joue de ses longs doigts d'artiste, et lui aurait murmuré quelques mots doux qui l'auraient fait sourire.
Taehyung l'aurait serré dans ses bras, si fort, et ils auraient été deux à affronter le monde.
Taehyung l'aurait envahi de son odeur musquée, et aurait déposé un autre baiser sur ses lèvres.

Et il se serait enfin senti moins vide.

Mais... Taehyung n'était plus là.

Taehyung ne reviendrait pas, il devait vraiment arrêter de rêver parce désormais c'était vain, et ça faisait trop mal pour qu'il continue.

Alors, Jungkook a essuyé ses larmes du dos de la main, avant de renifler un bon coup.

Il est rentré dans l'appartement, et est allé se coucher.

La musique s'était arrêtée au moment où il avait commencé à rêver.

Et il faisait trop froid dans son grand lit.

 " " "

Chapitre un peu poétique et assez étrange je crois, mais je l'aime bien c:

J'adore vraiment cette musique de Koya ;-; Je l'ai écoutée en boucle pour écrire le chapitre et honnêtement c'est super inspirant.

à plus dans le bus c:

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