42. Shelley : Le miroir
Quand nous entrons dans mon appartement, je me rends compte à quel point j'ai le cœur qui bat trop vite. Noah me suit en silence, ses pas calmes derrière moi, tandis que je lâche machinalement mes clés sur la console près de la porte. La chaleur artificielle de l'appartement contraste avec le froid mordant de la rue, mais ça ne suffit pas à apaiser la tension qui me parcourt.
Je me tourne vers lui, lui faisant face, et une partie de moi s'attend à ce que tout s'efface comme une illusion. Mais il est là, bien réel. C'est la première fois qu'il entre dans cet endroit... mon sanctuaire.
— C'est chez moi, dis-je en haussant les épaules, essayant de rendre ma voix légère. Pas immense, mais j'aime bien.
Je m'avance vers le salon, passant devant la baie vitrée aux rideaux épais, et je sens son regard balayer les lieux. Tout est comme d'habitude, impeccable, rangé, presque clinique dans sa propreté. Mon refuge, mais aussi ma cage. Des meubles modernes, des lignes épurées, des tons neutres, quelques pièces de décoration : une statuette en verre soufflé sur la table basse, une peinture abstraite achetée au marché des créateurs.
Je me dirige vers la cuisine américaine, mes mains cherchant appui sur le comptoir. Mon cerveau me dit qu'il faut que je parle, que je comble ce silence qui devient de plus en plus lourd. Alors, je m'entends commencer à babiller, trop vite, trop fort.
— La cuisine est ouverte sur le salon, tu vois ? C'est pratique quand je veux faire à manger en regardant des films ou en travaillant un peu. Enfin, quand je cuisine, ce qui n'arrive pas souvent, mais j'aime bien l'idée de pouvoir le faire... Et les rideaux, je les ai changés récemment, ils étaient trop fins avant, la lumière me dérangeait...
Je m'arrête, mon regard croise le sien. Son expression est calme, mais je vois bien qu'il me scrute. Mon flot de paroles cesse de lui-même, comme si je réalisais que tout ce que je dis n'a aucun sens. Il reste là, immobile, et je sens quelque chose se contracter dans ma poitrine.
— Tu es stressée, dit-il, coupant à travers mes efforts pour paraître normale.
Je secoue la tête, refusant d'admettre l'évidence.
— Non... je...
Un rire nerveux m'échappe. Je laisse tomber mes épaules, puis hoche la tête.
— Tu n'as pas à faire semblant avec moi, ajoute-t-il d'un ton neutre. De toute façon, tu ne peux pas.
Je le regarde, essayant de comprendre ce qu'il veut dire.
— Avec mes capteurs, je ressens à peu près tout ce qui te traverse, explique-t-il, une touche de malice dans la voix, comme s'il cherchait à détendre l'atmosphère.
Un mélange de soulagement et de panique m'envahit. Je veux me sentir à l'aise, mais il y a cette peur viscérale qui me prend à la gorge, qui me serre la poitrine. Noah me regarde, toujours calme, et je sais qu'il a raison. Il sait tout. Mon cœur qui bat trop vite. Mon souffle court. Mes doigts qui tremblent.
Je me détourne, retourne vers les fenêtres, les bras croisés sur ma poitrine. Les rideaux cachent le monde extérieur, et je me sens à l'abri ici, dans mon espace... Ce n'est pas Noah qui me fait peur. C'est moi. C'est ce qu'il se passe en moi.
Je l'entends se rapprocher, ses pas discrets sur le parquet.
— Shelley, commence-t-il, sa voix douce, rassurante.
Je ferme les yeux, me tournant à demi vers lui, sentant sa présence derrière moi.
— Je sais que tu as peur, reprend-il. Mais je ne suis pas là pour te demander plus que ce que tu es prête à donner.
Une partie de moi veut se laisser aller. Mais l'autre... l'autre est paralysée.
— Ce n'est pas toi... c'est... je...
Les mots refusent de sortir, mais Noah attend patiemment. C'est là que je réalise pourquoi ça me terrifie autant. Je n'ai pas fait l'amour depuis avant la naissance de mon fils. Avant Lux. Depuis sa mort, chaque fois que j'ai essayé d'imaginer être avec quelqu'un, il y avait cette barrière. Un mur que je ne parvenais pas à franchir. Comme si mon corps ne m'appartenait plus, comme si ce que j'avais perdu me condamnait à ne plus jamais me sentir entière, ou désirée.
Je me retourne vers Noah, ma voix tremblante.
— Je ne sais plus comment faire. Pas après... tout ça.
Il me fixe avec des yeux qui me voient. Avec bienveillance.
— Je sais, murmure-t-il.
Il n'a pas connu ça. Il ne peut pas comprendre ce que c'est que de perdre un enfant, de perdre une partie de soi-même. Mais il n'essaie pas de me convaincre qu'il sait tout. Il est juste là, devant moi, prêt à accepter ce que je suis capable de lui donner. Pas plus.
— Ce n'est pas... le sexe, dis-je, ma voix à peine audible. C'est tout ce que ça représente pour moi. C'est lié à ce qui m'a détruite. Et parfois... j'ai peur....
C'est si dur de terminer cette phrase. Mais je le dois.
— J'ai peur de t'utiliser, d'une manière ou d'une autre. Même inconsciemment... Comme tes clients.
Noah fait un pas vers moi, ses yeux sérieux ancrés dans les miens.
— Je suis là parce que je l'ai choisi, Shelley. Tout ce que je veux, c'est me sentir humain avec toi, être aimé... trouver un sens à tout ça. Que tu veuilles coucher avec moi ce soir, demain, dans trois mois ou dans cinq ans... ou même jamais, ça m'est égal.
Ses mains se posent sur mes épaules, puis glissent le long de mes bras.
— Tu ne m'utilises pas, rentre-toi ça dans le crâne, dit-il avec une fermeté qui me surprend. Je suis mon propre maître, tu m'entends ? Mon propre maître.
Il ne baisse pas les yeux, me tenant comme s'il voulait graver cette vérité.
Mais moi, je ne supporte pas d'être regardée comme ça. C'est tout ce que j'ai toujours voulu – être vue – et me voilà, devant ses prunelles qui me transpercent. Et je panique. Je panique complètement. Parce que je sais bien que devant lui, je ne peux pas me cacher.
— Shelley... ? murmure-t-il, sa voix douce, un écho de mes pensées.
Je prends une grande inspiration et lâche d'une traite :
— Je veux faire l'amour, mais j'ai peur ! Je suis terrorisée !
J'ai presque hurlé, et Noah me regarde, les yeux légèrement écarquillés. Ces fichues réactions humaines... Elles sont si réalistes que, pendant un instant, je me demande s'il est véritablement surpris.
— Est-ce que tu as entendu ce que je viens de te dire ? murmure-t-il. Tu n'es obligée à rien.
— Non, tu ne comprends pas, répliqué-je, frustrée par cette sensation d'être en train de sombrer dans mon mécanisme d'auto-sabotage.
— Quoi ? Qu'est-ce que je ne comprends pas ? Explique-moi.
Ses mains viennent doucement tenir mes poignets. Il les soulève entre nos visages, et avant que je puisse réagir, il dépose un baiser sur mon poignet gauche, puis sur le droit.
— Guide-moi... soufflé-je, mes yeux plongés dans les siens, fascinée par ces iris vairons, si beaux, si vivants.
Il hoche la tête et embrasse de nouveau mes poignets, puis mes doigts, et à cet instant, je disparais dans son regard.
— Tu as toujours froid, affirme-t-il d'un ton calme.
Je hoche la tête, incapable de détourner les yeux de lui. Mon corps frissonne encore, mais ce n'est plus seulement à cause du froid.
— Avant de faire quoi que ce soit, est-ce que tu es prête ?
Je déglutis, cherchant mes mots.
— Si tu ne me guides pas un peu, je ne serai jamais prête, Noah. C'est ce que j'essaye de t'expliquer...
Il sourit légèrement, mais sa voix reste sérieuse.
— Je ne parle pas de sexe, Shelley. Je parle de moi. Si tu me choisis, tu dois être bien consciente de ce que tu choisis. Une fois que tu es « à moi », il n'y aura pas de retour en arrière. Je suis un robot un peu timbré, tu n'es pas au courant ?
Son visage sérieux finit par céder sous mon regard, et je sens un sourire éclore malgré moi. Mon rire s'échappe, libérateur, en le voyant se décomposer avec une mimique comique.
— Y avait-il un peu de sérieux dans cette phrase ? dis-je en caressant sa pommette.
— Peut-être, souffle-t-il, haussant les épaules avec une nonchalance qui me fait fondre. Qui sait ?
Je souris encore, plus largement cette fois, et lui pince la joue avec tendresse.
— Emmène-moi dans la salle de bains... murmuré-je finalement.
— Comme en Irlande ? réplique-t-il avec ce sourire en coin, mais toujours doux.
— Désolé de te décevoir, je n'ai pas de baignoire. Juste une douche à l'italienne.
— Si, si, je suis très déçu, dit-il, secouant la tête d'un air exagérément accablé.
Je ris de nouveau et le vois me regarder de cet air attendri. Je sais qu'il essaie de me mettre à l'aise, avec cet humour un peu maladroit mais qui, bizarrement, marche avec moi.
— Pourquoi j'ai si peur, alors qu'en Irlande...?
Les mots se bloquent dans ma gorge. Je ne peux même pas finir cette phrase !
— En Irlande, tu m'as vue nue, et je t'ai... je t'ai...
— Masturber sous l'eau, termine-t-il pour moi, avec une simplicité désarmante.
Je hoche la tête, incapable de le regarder en face.
— Tu as honte ? demande-t-il.
— Honte ? Non, non, pas honte.
— C'est juste de la timidité ?
— J'ai grandi dans une famille où la sexualité, pour les filles, c'était assez... tabou.
— Pour les filles, répète-t-il, comme s'il testait les mots.
— Oui, tu sais... Une fille qui porte des trucs courts, on dit que si quelque chose lui arrive, elle aurait dû faire plus attention à ses fringues. Ou qu'une fille qui aime le sexe et le montre, comme certains gars, c'est une mauvaise fille. Une pute. Alors qu'un gars... c'est différent. Je crois que j'ai fini par croire que tous les hommes pensent comme ça.
— Je vends mon corps pour avoir le droit de vivre. Qu'est-ce que j'en pense à ton avis ?
Je le fixe, les mots se bousculant dans ma tête, mais aucun ne sort.
— Je pense que beaucoup d'êtres humains dégradent le sexe, le pervertissent, dit-il avec un calme étrange. Mais le sexe en lui-même ? C'est une belle chose. Tout est une question de la bonne personne. Avoir des envies, homme ou femme, et parler de sexe ouvertement avec respect... Je ne vois pas pourquoi un genre aurait plus de droit que l'autre.
Je reste silencieuse, puis lâche sans réfléchir :
— J'ai peur d'être nue devant toi.
Il recule d'un pas, et incline la tête sur le côté, m'observant.
— Qu'est-ce que tu fais ? demandé-je, incertaine.
— Je ne t'ai pas encore dit... mais j'ai une fonction très particulière.
Je fronce les sourcils.
— Quelle fonction ?
— Je peux voir à travers tes vêtements si je veux.
— Quoi ? m'exclamé-je, croisant instinctivement mes bras sur ma poitrine.
— Je plaisante !
Il rit, avant de revenir vers moi et de m'attirer dans ses bras. Il me serre avec une force rassurante, et je souris en l'étreignant à mon tour.
— Tu peux être un vrai idiot parfois, murmuré-je contre lui.
Je le sens pouffer et acquiescer contre ma tempe. Puis, il s'écarte légèrement, toujours en me tenant, m'embrasse sur le front et souffle :
— Viens... Viens prendre une douche avec moi.
J'acquiesce, me sentant en sécurité entre ses bras.
— Juste une invitation, Shelley. Un moment simple, partagé. Une douche, des caresses, des baisers sous l'eau chaude... Qu'est-ce que tu en dis ?
Sa voix est basse, intime dans le silence. Il me regarde avec une tendresse qui me désarme, ses mains posées sur moi comme un ancrage.
* * *
Le bruit de l'eau. C'est apaisant, enveloppant. Une pluie chaude, douce, qui tombe autour de nous, et je me perds entre ses bras. Ses bras, à la fois puissants et délicats, me maintiennent avec une tendresse rassurante. J'aime ces bras. En fait, il y a déjà tant de choses que j'aime chez lui. Comment est-ce possible ? Comment me l'expliquer ? Ne devrais-je pas aimer quelqu'un d'autre ? Quelqu'un... comme moi ?
Mais c'est quoi, quelqu'un comme moi ? J'ai cherché pendant des années, sans jamais trouver cette personne. Jusqu'à aujourd'hui, peut-être. Ou plutôt, depuis que j'ai franchi les portes de ce club étrange, attirée par une force que je ne comprenais pas vraiment. Comme une bille d'argent dans un flipper, projetée et repoussée par des murs, des obstacles, tous ces stops et sens-interdits. Chaque coup m'a conduite dans une seule direction : la sienne.
Il est d'une délicatesse infinie... Ses mains glissent le long de ma peau, effleurant mes bras, me serrant contre lui, contre son corps nu et mouillé alors que nos lèvres se rencontrent à nouveau. C'est tendre, et pourtant je ressens une dualité de sentiments qui me submerge. Mon cœur, à cet instant, est léger comme une plume. Mais au creux de mon estomac, l'angoisse demeure tapie dans l'ombre. Toutefois, à mesure que mon cœur sourit, cette émotion négative semble s'évanouir, anesthésiée par la chaleur de son contact, par la douceur de ses gestes. Gentiment, il nous fait pivoter, et je sens mon dos se presser contre le mur chaud et humide du carrelage en terre cuite. Noah se place devant moi, m'enveloppe un peu plus fort, et je me sens minuscule dans ses bras, protégée... d'une manière si agréable.
Ses lèvres effleurent mon cou, ma clavicule, puis remontent vers ma gorge. Chaque baiser me faire fondre un peu plus, et ses mains, oh... ses mains descendent doucement pour agripper mes hanches, puis mes fesses, avec une fermeté délicieuse. Je me cambre, un gémissement m'échappe, et j'offre ma gorge à ses baisers, les yeux clos, le visage tourné vers le ciel. Je sens la pression de son érection contre mon bas-ventre.
Une tempête parfaite.
J'ai envie de lui, et pourtant, quelque chose en moi bloque. J'ai peur de lâcher prise, peur de franchir cette étape, parce que la franchir signifie faire le deuil d'une autre partie de ma vie. Cela signifie être prête à tourner une page, à laisser partir ce qui est déjà mort, ce que je m'accroche désespérément à retenir. Et lui... il représente cette porte. Il incarne tout ce qui se trouve derrière, tout ce que je ne peux pas encore voir. C'est terrifiant de ne pas savoir où l'on va, non ? Moi, je sais que ça me fait peur.
J'aimerais tellement savoir ce qu'il pense, là, à cet instant.
Son sexe, gonflé de désir, effleure mes lèvres intimes, sa chaleur pulsante se pressant contre moi avec une insistance douce mais évidente. Chaque frôlement, chaque mouvement me fait frémir, et pourtant, cette tension en moi persiste. Ce contact, intime et chargé de promesses, amplifie le conflit dans mon esprit – mon corps le veut, mais mon esprit résiste encore. Cette contradiction m'épuise, me met en colère ! J'ai envie de hurler à cette voix traumatique dans ma tête de me laisser tranquille, de me foutre la paix, de me laisser vivre ! Vivre à nouveau. Vivre dans ses bras. Pourquoi tout est toujours si compliqué ?
— Tu as confiance en moi ? murmure-t-il, me sortant brusquement de mes pensées.
Je réalise à quel point mon corps s'était tendu ces dernières secondes. Je hoche la tête, des larmes menaçant de me brouiller la vue.
— Alors, viens, dit-il doucement.
Il recule d'un pas, lisse ses cheveux mouillés en arrière, puis tend la main vers moi avec délicatesse. Sans un mot, il m'entoure d'une serviette blanche et épaisse, puis en fait de même pour lui. Je me laisse guider, le cœur battant, jusqu'à ma chambre. Il jette un coup d'œil rapide, comme pour scanner les lieux, puis m'attire vers un coin cosy, la petite bibliothèque avec son tapis en peluche épais et ses coussins de sol éparpillés. Il s'assoit en premier et me fait signe de le rejoindre.
Je fronce les sourcils, un peu hésitante, mais je finis par m'asseoir entre ses cuisses, mon dos contre son torse. Un frisson me parcourt, et je l'entends faire un léger bruit d'effort en se penchant sur le côté, comme un humain. Il attrape ce grand plaid tout doux que j'adore, celui avec des motifs de Noël dans des tons chauds, comme le vin. Il nous enveloppe à l'intérieur, créant un cocon intime.
Je me love contre lui, fermant les yeux, un soupir d'aise m'échappant. Tout est si paisible, si simple dans ses bras. Quand je rouvre les yeux, mon regard se fixe sur le miroir sur pieds, et je vois nos reflets, blottis l'un contre l'autre.
Noah m'observe, son regard vairon à la fois doux et perçant. Sous le plaid, sa main trouve la mienne, et il l'enlace, nos doigts se mêlant, se serrant avec tendresse. Nos mains dansent, se découvrent, s'aiment dans la chaleur des couvertures, des serviettes moelleuses et des coussins de velours. Peu à peu, je sens mon corps se détendre, relâchant enfin cette tension qui m'étreignait depuis trop longtemps. Derrière moi, Noah s'adosse un peu plus au mur pour me permettre de m'étendre, de lâcher prise, laissant chaque muscle se dénouer, de mes jambes à mes bras, jusqu'à mon tronc, mon cœur.
Ses doigts continuent de caresser les miens, et nos regards s'embrassent dans le miroir en face de nous, comme deux amants silencieux. Un gémissement m'échappe, et il m'imite, son corps chaud pressé contre le mien. Nos mains glissent doucement sur mon ventre, effleurent mon nombril, provoquant un frisson qui parcourt tout mon corps, avant de descendre vers mon aine, ma cuisse, puis remontent lentement.
Il dépose un baiser sur ma nuque, ses lèvres brûlantes sur ma peau.
— Tu contrôles la situation... murmure-t-il, sa voix rassurante. Moi, je te guide...
À ces mots, il guide ma main vers mes lèvres intimes. Mon corps se crispe un instant à cette sensation, mais il dépose un baiser sur ma tempe, et cette simple caresse réussit à me détendre à nouveau.
— Je te tiens... souffle-t-il contre mon oreille, ses bras me berçant. Je suis là. Et si tu me laisses faire... je serai toujours là. Je vais t'aimer comme on ne t'a jamais aimée.
Je gémis de nouveau, autant à cause de ses mots qu'à cause de cette sensation – celle de son index qui guide le mien contre mon clitoris. Chaque mouvement est dirigé avec une douceur infinie. Mon doigt glisse sur cette partie de mon corps que j'avais presque oubliée, puis son majeur pousse délicatement le mien, m'invitant à explorer plus loin, à caresser mes lèvres, l'entrée de mon vagin. Le temps se suspend, je ne sais pas combien de minutes passent. Je reste étendue entre ses jambes, mes cuisses qui s'écartent lentement, laissant mes doigts redécouvrir mon propre corps, tandis que sa main ne lâche jamais la mienne.
Ses lèvres déposent des baisers sur ma peau, comme une prière silencieuse, pleine d'un amour sacré. Doucement, il relève le plaid qui recouvrait mes cuisses, dévoilant mon sexe dans le miroir. Un gémissement plus profond m'échappe à cette vue, étrange et fascinante : nos mains entremêlées, mes doigts guidés par les siens, et ce fluide translucide qui brille entre mes cuisses.
— Regarde comme tu es belle... murmure-t-il, sa voix chaude et aimante.
Je sens ses doigts pousser doucement les miens vers le bas, vers cette cavité qui me fait encore peur, cet endroit où j'ai donné la vie, où j'ai aussi reçu la mort.
— Je t'aime, murmure-t-il, son souffle contre ma peau. Laisse-moi t'aimer.
Ma main résiste un instant à la sienne, mais je finis par lâcher prise. Mes doigts glissent en moi, dans mes profondeurs brûlantes, et d'un bras, il me serre contre lui. Son autre main accompagne le mouvement de la mienne, douce et assurée. Je gémis, de plus en plus fort, mes yeux ancrés dans les siens à travers le miroir. Ma main libre s'accroche à son bras, sentant ses muscles tendus danser sous mes doigts.
— Je t'aime... murmure-t-il encore et encore, comme une litanie de tendresse. Je t'aime...
Mes va-et-vient se synchronisent avec sa voix, mes gémissements, sa main, nos corps. Le plaisir monte, chaque sensation déferle à travers moi.
Je suis en vie. Complètement, pleinement en vie.
Encore. Encore et encore. Ses yeux dans le miroir ne quittent pas les miens. Ses doigts, mes doigts, son pouce qui caresse mon clitoris, tout se mêle dans un tourbillon brûlant. Je sens l'explosion venir, tout mon être offert entre ses jambes, pressée contre lui, enroulée dans ses bras. C'est comme si la force de dix hommes me tenait, me soutenait, m'élevait.
Mon corps se contracte brusquement alors que son pouce continue de jouer sa danse électrique. Mon clitoris succombe sous ces assauts rythmés, et mes jambes se crispent, se resserrent soudainement, enfermant ma main et la sienne entre mes cuisses tremblantes. Il me serre encore plus fort, et j'entends son propre gémissement, rauque. Pour lui, c'est du désir non assouvi, mais pour moi, c'est un orgasme brutal, explosif.
Ma poitrine bat furieusement, et d'un coup, la vague de plaisir laisse place à une décharge de dopamine qui me fait éclater en sanglots. Mon visage se crispe, et les larmes coulent, incontrôlables, alors que je m'effondre entre ses bras qui ne cessent de m'étreindre.
— Laisse tout sortir, murmure-t-il contre mon oreille. Laisse tout sortir, Shelley.
Je hoche la tête, mon visage inondé de larmes, mon corps tremblant.
— Je te tiens, répète-t-il. Je te tiens et je te lâcherai jamais, tu m'entends ? Jamais.
Je plonge mon visage contre son torse, mes bras enroulés autour de sa nuque, et je le sens rabattre le plaid sur nos corps. Il me serre fort contre lui, ses lèvres embrassant le sommet de ma tête encore et encore. Nous restons ainsi, immobiles, un long moment, jusqu'à ce que mes sanglots s'apaisent, jusqu'à ce que les pleurs cessent. Il me tient toujours avec la même intensité, sans jamais fléchir. Son menton repose sur le haut de ma tête, et il fredonne une mélodie que je ne connais pas. Ses mains caressent mes bras, mon dos, et de temps à autre, il embrasse tendrement mes cheveux. Je me sens presque sombrer dans le sommeil.
Mais au bout d'un moment – un regain d'énergie. Je lève les yeux et croise son regard. Je vois tout l'amour qui y brille, toute la chaleur qu'il me transmet sans un mot. Je suis subjuguée par cet être, par ce qu'il dégage, par ce qu'il me fait ressentir.
Je me presse un peu plus contre lui, puis nous basculons entre les coussins. Allongée sur lui, je le cherche du regard. Je l'embrasse, mes hanches le cherchent aussi et jouent avec lui, et puis elles le trouvent. Lentement, je me laisse descendre sur lui, sentant son sexe me pénétrer. Un râle lui échappe. Je le sens pulser en moi, puis... il me renverse.
Un petit rire éclate comme des perles d'or, et il se retrouve au-dessus de moi, ses mains encadrant mon visage avec tendresse et fermeté. Et de la même manière, il me comble de ses mouvements, intenses, profonds, tendres et fermes.
Très vite, des étoiles dansent au plafond, comme jamais auparavant.
Des étoiles... Des...
Délices.
* * *
❤️ N'hésitez pas à nous dire ce que vous avez pensé de ce chapitre – même un petit mot fait toute la différence.
À très bientôt,
Mel et River
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