CHAPITRE DOUZE

Avant toute aventure dans un lieu hostile, il faut bien s'équiper. Tandis que Joe marchait vers une direction aléatoire, son petit groupe avait réussi à la dissuader d'y aller aussi énerver. Si elle voulait parler avec les autres, il est vrai qu'elle devait rester calme et ne pas réagir comme eux. Ils étaient alors repassés par l'accueil pour prendre une carte du domaine. C'était une carte un peu enfantine mais au moins, c'était très clair.

Posée sur une table, Joe pointait du doigt le domaine des « Cerfs » sur la carte. C'était là où elle était de base et ça avait été la partie la plus touchée par la tempête. D'après Zack, il se trouvait dans la partie des « Moutons » puisque sa résidence était plutôt banale et simple. Les maisons hyper modernes où résidait Bailee se trouvaient dans la partie « Ours brun ». Le manoir de Whitley se trouvait seul dans l'unique partie « L'Aigle » ce qui était un nom évident. Ted se trouvait dans la partie « Lémurien ». Les résidences ressemblaient à des mini lotissements. Cette partie était proche de la route principale menant à Little Rock. Sawyer était chez les « Kangourous » dans des maisons ressemblants à des cabanes. Il y avait aussi les « Phacochères », les « Perroquets », les « Tapir », les « Tortues », les « Castors » et enfin les « Pumas ».

Joe soupirait à la vue de cette carte immense. C'est pourquoi Sawyer avait envisagé d'y aller en voiture.

— Oui mais on doit être armé. Qu'est ce qui réunit les gens ? demande-t-elle alors.

— La Coupe du Monde ? propose Ted.

— Les mariages ? annonce Bailee.

— Les fêtes nationales ? présente Sawyer.

— La nourriture, lâche finalement Zack.

Lui et Joe s'échangent un regard entendu.

— Exactement. J'ai eu une idée ! On va faire des cupcakes au chocolat, nature et pourquoi pas au caramel ? Si on n'en donne un à chaque personne avant de leur parler, ça les mettra en confiance et ça les adoucira, explique-t-elle.

— Tel une odieuse chasseuse, intervient Bailee.

— Aux fourneaux alors !

Pendant toute la matinée et le début d'après-midi, ils avaient préparé plus d'une centaine de cupcakes pour régaler la famille. Joe espérait que cette technique allait marcher, ou du moins leur permettre une approche pour converser comme des adultes.

Une fois dans la voiture est garée devant l'une des onze autres parties du domaine, tous les regards s'étaient tournés vers Joe.

— Alors, c'est quoi ton plan exactement ? demande Sawyer.

— Je pense qu'il faut surtout les écouter et entendre leurs avis, lui dicte son instinct.

— C'est pas mal mais... commence Zack.

— Si on agit aussi violemment qu'eux, ça ne sert à rien parce qu'on va juste crier et personne ne sera entendu et on ne trouvera pas de solutions, enrichit Joe.

— C'est vrai, répond à contre cœur Zack.

Par moment, Joe était plus mature que lui. Parfois, il avait l'impression qu'elle était la plus âgée de tous.

— Allons-y alors.

Et ce fut la journée la plus longue de toutes. Combien de fois avaient-ils frappé aux portes ? Combien de fois avaient-ils eu peur de se faire rejeter ? C'était la journée des négociations et de l'écoute. A chaque fois, Bailee leur tendait un panier de cupcakes puis Joe entamait la conversation. La première question était toujours la même :

— Pourquoi êtes-vous en colère ?

— Avoir des secrets dans une famille, ça fait mal.

— On a l'impression d'être de la merde.

— C'est comme si où ne nous faisait pas confiance.

— J'en veux à Whitley et à Earl de nous avoir laisser dans le mensonge pendant toutes ces années.

— On a perdu tant de temps !

— J'ai l'impression de ne pas faire partie de cette famille.

— Je pensais connaître ma famille mais j'ai eu tort.

Puis la deuxième question :

— Pourriez-vous sympathiser à nouveau avec l'autre famille ?

— Oui.

— Non.

— Peut-être.

— Non.

— Non.

— Non.

— Oui.

— Peut-être.

— Oui.

— Oui.

Puis la troisième question :

— Vous en voulez à une famille entière juste pour l'action d'une personne. Ne pensez-vous pas que vous être trop injuste ?

Beaucoup s'étaient rendus compte de cette erreur mais d'autres restaient positionnement sur leurs idées. Les réactions étaient à peu près les mêmes pour la quatrième question qui traitait de l'homophobie. Une partie étaient pour, une autre neutre et une infime contre. Après tout, c'était le choix des gens et on devait les respecter tant qu'ils étaient toujours humbles et intelligents dans leurs propos.

Les rôles de Zack, Ted et Sawyer étaient de prendre des notes des réponses pour trouver une solution finale. Du moins, une esquisse.

— Tu avais raison, parler avec les gens les à un peu apaiser, fait remarquer Bailee en apportant des tasses chaudes dans le salon.

Ils étaient rentrés pour mettre toutes les idées et les réponses en ordre.

— Le problème de cette grande famille, c'est le manque de communication. Même entre les membres de famille proches, constate Joe d'un air triste.

Elle gribouille sur sa feuille et Zack remarque qu'elle s'était arrêtée d'un coup, comme si elle avait eu une idée brillante.

— Attendez ! Nous avons deux merveilleux avocats avec nous. Zack, Bailee, est-ce qu'ils existent des solutions partiellement juridiques pour des problèmes de famille ?

Les deux avocats se lancent des regards compréhensifs. Bailee souriait grandement et s'était assise aux côtés de Joe.

— Si ! Les médiateurs. Il en existe dans différentes branches du droit mais pour la famille, c'est un tiers qui trouve des solutions pour régler des conflits. C'est à la fois un travail de psychologie et de droit.

— C'est un peu un mini juge ?

— On peut dire ça oui.

Joe réfléchit encore et sursaute dans un éclat de rire.

— Oh je sais, je sais ! Il existe des conseils de famille, non ?

— Oui mais en général, c'est pour décider de l'avenir d'une seule personne. C'est une question de tutelle, explique Zack.

— Et si on créait une sorte de conseil de famille avec un médiateur neutre ?

— C'est-à-dire ? fit Ted.

— Eh bien, on pourrait prendre plusieurs membres de chaque famille... Disons, deux femmes et deux hommes de tranches d'âges différents. Le médiateur pourrait être un ami de la famille voire un total inconnu. Whitley pourrait être au « centre » avec Earl, puisqu'il s'agit de deux familles différentes mais ils ne pourraient pas réellement décider... Puisque ça les concernerait un peu tous les deux. Ainsi, selon les différents problèmes, ça enlèverait une épine du pieds à tout le monde et la famille pourrait se ressouder. C'est possible ?

— Je pense oui. On peut même le faire sans réellement chercher quelque chose de juridique là-dedans. Ce serait plutôt quelque chose touchant à la moralité, acquiesce Zack.

— Ecrivons ça au propre et proposons le à Whitley !

— Un Conseil de Famille ? répète Whitley après avoir lu une feuille d'A4.

— Oui ! On pourrait même en faire pour résoudre les vieilles tensions... Et puis, dans les années qui suivent, vous pourrez même en faire souvent pour parler entre vous et vous rapprocher les uns des autres.

Earl semblait convaincu par cette idée.

— C'est une bonne idée Whitley. Les générations à venir connaîtront ce vieux différend entre les deux familles mais ça permettrait de rester une famille unie, même quand on ne sera plus de ce monde.

— Comme une tradition ? dit-elle doucement.

— Une obligation, affirme-t-il, posant une main sur son épaule.

— Earl a raison, explique Joe, beaucoup de familles manquent de communication mais la vôtre, excusez-moi l'expression, détrône toutes les autres. Si vous voulez être en paix aujourd'hui et demain, c'est une solution envisageable.

— Je ne sais pas les enfants... Vous m'avez dit leur avoir parlé mais il reste des tensions.

— Evidemment, lâche Zack.

— Je ne sais pas si c'est le bon moment... Peut-être dans quelques mois mais pas maintenant.

— Tu ne veux même pas essayer Grand-mère ? questionne Joe.

Whitley avait un regard triste.

— Chaque seconde depuis hier, je pense aux regards et aux réactions de la famille. Les imaginer encore et encore me fait mal et... Dans mon cœur, j'ai un trou. Un trou béant. Je pense à Rima et je me dis que... On lui fait du mal. Je souffre pour nous deux et je ne supporte pas. C'est comme si elle n'était pas en paix et ça me brise le cœur. C'est comme salir sa mémoire.

Joe acquiesce silencieusement.

— Je suis désolée les enfants, reprends Whitley, mais j'ai commencé à envoyer des mails et des SMS. J'annule le reste de la semaine. J'annule mon anniversaire.

Zack et Joe s'étaient levés brusquement de leur siège.

— Quoi ?!

— Tu ne peux pas faire ça grand-mère !

— Joe, j'ai appelé tes parents, ils vont venir te chercher comme tu n'as pas de moyens de transports à toi...

— Quoi ?! répète-t-elle.

— Je suis désolée trésor.

Joe était perdu dans ses pensées. Ses parents. Ici ? La prendre ? Partir ?

— J'avais prévu tant de choses... Le dernier jour, je voulais même faire le bal de promo que Rima et moi n'avions jamais eus...

— On va le faire, souffle Zack.

Joe se tourne vers lui, ainsi que Earl et Whitley. Il relève le regard pour confronter tout le monde.

— Tu peux au moins attendre deux jours grand-mère ? Deux jours seulement. Le temps qu'on se dise tous au revoir, qu'on se réconcilie, qu'on se rassemble. Demain, on t'aidera à tout organiser et préparer, et le lendemain soir, on se dira au revoir. Ne les laisse pas partir comme ça, je t'en prie, murmure-t-il à la fin.

Joe ne l'avait jamais vu comme ça. Elle ne se doutait pas une seconde qu'au fond de lui, il ne voulait pas partir sans avoir dit au revoir à Joe à sa manière. Ça aurait pu paraître égoïste mais pas pour Zack.

— Renvoie des mails d'erreur et dit à tout le monde de rester encore. Fais croire qu'il est difficile de sortir de l'Arkansas à cause des conséquences de la tempête, conseille Zack en se levant.

— Oui... Il se fait tard, vous devirez y aller. Une longue journée nous attend demain.

— Je ne pense pas qu'elle soit aussi périlleuse que celle d'aujourd'hui, répond Joe en souriant d'un air fatigué.

Zack avait déjà dépassé l'embrassure de la porte quand Whitley interpelle Joe.

— Je sais que tes parents arrivent demain matin alors... Profites-en pour leur parler. Tu vois ce que je veux dire ma puce ?

— Oui.

— Bien... Courage.

Joe déglutit avant de sortir du bureau de Whitley. Zack l'avait attendu quelques mètres plus loin.

— Sacrée histoire, hein ? Qui aurait cru qu'on en serait arrivé là le jour de notre rencontre dans le taxi ?

— C'est dingue oui...

Elle répondait par automatisme, regrettant déjà la confrontation de demain.

— Tes parents sont difficiles ?

— Surtout ma mère... On a toujours eu des relations compliquées elle et moi. J'étais surtout proche de ma grand-mère.

— Je vois.

— Je vais mal dormir cette nuit, je le sens.

— Ne te rends pas malade, OK ?

— T'inquiètes.

Ils sortent du bâtiment principal et Joe marche lentement vers la voiture. C'est comme si elle était devenue molle tout d'un coup, comme privée de son dynamisme et de son énergie. Elle était fatiguée d'avance. Et qui plus est, dans quarante-huit heures, elle devra dire adieu à tout ceux qu'elle a rencontré ici. Et ça lui pincé le cœur.

— Que vas-tu faire concernant ton projet en fait ?

Et une autre mauvaise nouvelle. Joe hausse d'un air nonchalant les épaules.

— Rien, je pense.

Zack n'avait pas insisté et Joe faillis le remercier pour ça. Il se gare devant la résidence de Bailee. Joe se détache lentement. Elle était prête à sortir mais Zack l'avait retenu par le bras.

— Euh... Joe ?

— Oui ? se retourne-t-elle.

Il ne semblait pas vouloir parler. Elle était prête à descendre mais il s'était ressaisi au bon moment.

— Est-ce que tu me trouves vieux ?

Elle se fige quelques instants pour réfléchir. En effet, Zack était beaucoup plus vieux qu'elle. Mais jusqu'à cet instant, elle n'avait pas pensé à leur différence d'âge pendant une seconde.

— Pourquoi, quel âge as-tu ? questionne-t-elle, un sourire au coin.

— Dans la trentaine.... Trente-cinq ans... Trente-sept ? lâche-t-il en retenant son souffle.

— Bah tu sais quoi ? Ça ne se voit pas. Parce que quand je te regarde, et la manière dont tu te comportes.... On dirait presque un mec de vingt ans.

Elle marque une pause.

— L'âge, c'est pas important, mais ce qu'il y a dans la tête oui.

— Alors, on est proche tous les deux, hein ?

— Oui.

Elle vient lui caresser tendrement la tête.

— Tu es mon abruti-mignon.

— Je suis ton abruti-mignon, répète-t-il.

Avant qu'elle ne regrette quoi que ce soit, Joe était sortie de la voiture en faisant des signes de la main à Zack pour lui dire au revoir. En se retournant pour entrer dans le logement, Joe vit Bailee et Sawyer se cacher maladroitement derrière le rideau. Elle pousse un soupir en rentrant à l'intérieur.

— Tu aurais dû l'embrasser, il n'attendait que ça ! lance Bailee.

— Qu'est-ce que tu fais encore là ? demande-t-elle à Sawyer pour changer de sujet.

— J'allais partir.

Elle croise ses bras contre sa poitrine en l'observant remettre ses chaussures et sa veste. L'un de ses sourcils se hausse. Tiens... Il avait enlevé ses chaussures. Puis son regard se porte sur Bailee qui faisait mine de rien.

— A plus Bailee, dit-il en se rapprochant d'elle.

Les deux jeunes gens hésitent un instant, à cause de la présence de Joe, puis se font un rapide bisous sur les lèvres. Choquée et surprise, la mâchoire de Joe tombe et Sawyer s'évapore les joues en feux.

— Moi j'ose au moins, siffle Bailee avant de refermer la porte derrière Sawyer.

— Vous allez bien ensemble ! C'est adorable.

— Beurk pas ce mot, « sexy » c'est mieux.

— OK, vous êtes sexy ensemble, répète Joe en roulant des yeux.

Joe se laisse aller péniblement sur le sofa.

— Je me sens bête, je n'ai rien vu venir.

— On ne peut pas tout voir dans la vie ou alors on est des dieux. Et puis, que signifie la vie sans surprise de temps en temps ?

— Elle serait bien blafarde.

Bailee vient s'installer à côté de Joe.

— Alors, Whitley est d'accord pour le Conseil de Famille ?

— Oui mais elle ne veut pas le faire tout de suite. Bailee, elle a voulu annuler toute la semaine et renvoyer les gens chez eux mais Zack a réussi à la convaincre de garder les deux jours à venir. Elle veut faire une sorte de bal de promo, un bal pour clôturer ses semaines de fêtes je pense.

— Vous avez bien fait.

Joe déglutit.

— Elle a appelé mes parents, ils vont venir demain matin.

— Outch.

— Ça va être l'occasion de leur dire tout ce que j'ai sur le cœur.

— Que de réjouissance alors, ironise-t-elle.

— Exactement. C'est pour ça que je vais me coucher immédiatement parce que si je ne m'endors pas tout de suite, je ne dormirais pas de la nuit. Alors... Bonne nuit !

— Bonne nuit ma belle.

Finalement, elle avait fait une nuit blanche et n'était absolument pas prête pour la conversation à venir. Au petit matin, elle s'était réveillée sans grande conviction. Si ça n'avait tenu qu'à elle, Joe serait restée toute la journée au lit. Elle s'était lavé le visage, légèrement maquillée puis elle avait mis une tenue assez simple. Elle attendait à présent dans le salon. Son pied taper furieusement le sol. Son portable se mit à vibrer.

— C'est elle, annonce-t-elle.

Elle fait glisser le logo montrant un téléphone vers le haut et colle l'appareil à son oreille.

Où es-tu ? demande sa mère d'un ton sec.

Pas de bonjour. Pas de formule de politesse pour savoir si ça allait. Comme d'habitude quoi.

— Je suis prête à venir.

Je suis sur le parking de l'accueil dans la voiture, rejoins-moi là-bas.

— OK.

Elle raccroche et son cœur commençait à tambouriner dans sa poitrine. Elle décide de venir à pied jusqu'au point de rendez-vous, pour lui laisser encore du temps afin de se préparer psychologiquement. A peine arrivée, elle avait reconnu la voiture de sa mère. Elle et son père l'attendaient immobiles à l'intérieur.

— Drôle d'endroit pour des retrouvailles.

— Si tu vois que la voiture accélère brusquement en avant, sors-moi de la voiture parce que ce sera une tentative de meurtre.

— Tu feras attention alors.

— De ma part, ajoute Joe avant de s'éloigner.

Elle entre à l'arrière de la voiture puis claque la portière.

— Où sont tes affaires ? demande son père en se retournant.

— Je reste encore deux jours ici.

— Ce n'est pas ce que nous a dit cette femme, répond froidement sa mère.

Joe inspire longuement.

Cette femme c'est Whitley et tu la connais très bien.

— Peu importe Majorelle, nous sommes ici alors va chercher tes affaires.

— Non, justement, je voudrais qu'on parle.

Sa mère se retourne, éteignant le moteur.

Parler ? souffle-t-elle comme si c'était une grossièreté.

— Oui, parler. J'ai appris un tas de choses ici. Comme le fait que communiquer est important et que se confier peut mener à nous retirer une grosse épine du pieds.

— N'importe quoi, grommelle-t-elle.

Elle allait rallumer son moteur mais Joe avait repris la parole, d'une voix forte.

— Depuis toujours avec vous, j'ai mal dans la poitrine. Je n'arrive plus à respirer convenablement quand on se retrouve tous les trois. Vous n'étiez jamais là quand j'avais besoin de vous. Grand-mère Rima était la seule présente ainsi que Whitley.

— Ne parle pas de ces femmes Majorelle, désapprouve sa mère.

— Pourquoi pas ? Parce qu'elles sont lesbiennes, c'est ça ?

Sa mère se retourne vers elle comme si elle l'avait giflé.

— Eh oui, je suis au courant Maman ! Je comprends un tas de choses maintenant. Pourquoi tu détestais grand-mère et pourquoi tu ne supportais pas de voir Whitley. C'est dégueulasse !

— Ne parle pas comme ça à ta mère, ordonne son père.

— Non ! Je ne suis plus une gamine. Et je ne dis que la vérité, rien de plus. Vous ne supportez juste pas de l'entendre.

— Sors de la voiture ! aboie sa mère.

— Je n'ai pas terminé !

Ils respiraient tous les trois très forts, signe que l'orage allait éclater dans quelques secondes.

— Vous savez ce que j'aurais aimé que vous soyez ? De vrais parents. Quand Grand-mère est morte, je n'avais plus que vous ! Et vous n'avez rien fait. Vous n'avez rien proposé. Vous êtes restés dans votre ville à faire vos propres affaires !

La voix de Joe tremblait violemment.

— Même à mon âge, j'ai... J'ai encore besoin de mon Papa et de ma Maman.

Joe éclate en sanglots. Après de longues minutes, elle réussit à se calmer, ne laissant pas ses parents lui répondre.

— Pourquoi c'est si difficile pour vous ? Même si vous n'étiez pas présents quand j'étais enfant, vous pouvez encore l'être quand je suis adulte. La vie est courte et on peut tout perdre du jour au lendemain.

Elle essuie une grosse trace de morve sur sa manche. Elle voyait que ses mains tremblaient. Elle devait être pitoyable à regarder. Elle renifle plusieurs fois et croisent enfin le regard de ses parents.

— Vous m'avez tellement déçu dans le passé... Mais vous pouvez encore vous faire pardonner. J'ai aussi appris ça ici.

Elle ouvre la portière de la voiture lentement mais hésite à partir.

— Et que vous le vouliez ou non, on a tous une part d'homosexualité en nous. Alors... Apprenez à tolérer ces personnes là s'il vous plait. Regardez Glee.

Elle descend finalement de la voiture. Un énorme poids dans son cœur venait de s'envoler. Enfin elle leur avait dit la vérité. Enfin elle leur avait exprimé ses sentiments. Elle claque la portière puis commence à s'éloigner. Elle entend une vitre se baisser puis un petit coup de klaxon. Elle se retourne alors. Sa mère lui souriait lentement. Mais genre un vrai sourire. Elle pousse un long soupir, comme si elle cherchait ses mots. Joe la voyait tapoter nerveusement le volant.

— Quant tu reviendras à la maison... Ca te dirait que je te fasse de la soupe au potiron, un hachis parmentier et de la semoule sucrée ?

Son cœur faillis exploser de joie.

— Oui, répond-t-elle émue.

— Tu te souviens ? Quand je ne travaillais pas, on faisait ça à tous les Halloween.

— Devant l'un des films de Casper avant la chasse aux bonbons ? Je me souviens.

Le sourire de sa mère s'agrandit.

— Au revoir Joe.

— Au revoir Maman... Au revoir Papa.

Bon, ce n'étaient pas des retrouvailles de folies mais Joe savait que les blessures allaient se guérir petit à petit. Il y avait toujours eu des non-dits et ses parents n'avaient pas répondu à son venin... Mais au moins, c'était un bon nouveau départ. Tout en rebroussant chemin pour rejoindre Bailee, elle pensait que ce nouveau départ pouvait aussi s'accorder avec les familles Vermeil et Perwinkle. 

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