20.

Je recule d'un pas, complètement sous le choc.

-Tu...tu te drogues ?

Brooklyn ne répond pas et continue de me fixer. Un rire nerveux s'échappe de mes lèvres. Je ne peux pas m'empêcher de rire, ça en devient hystérique.

-Sérieusement ?, lui demandais-je.

Il hoche la tête et je souffle :

-Non, je n'y crois pas.

-Tu as voulu savoir la vérité, maintenant tu l'as.

Il se lève pour partir et je le retiens en prenant son poignet.

-Tu me dis que tu as une dealeuse et après tu t'en vas comme ça ? Comme si de rien n'était ?

-Je sais très bien que tu ne veux plus de moi maintenant. Ça ne sert à rien que je reste ici.

-Je n'ai jamais dit que je ne voulais plus de toi, rétorquais-je. Je vais t'aider à ne plus te droguer.

Brooklyn enlève son poignet de l'emprise de ma main et me regarde sévèrement.

-Je n'ai pas besoin de me faire aider, je vais très bien.

J'ai l'impression de me revoir avec Daniel et Lucy avant mes rendez-vous chez le psy. Je ne voulais pas me faire aider et pourtant j'ai réussi à remonter plus ou moins la pente. Je veux rendre la pareille à Brooklyn, faire en sorte qu'il aille bien et qu'il vive normalement... Mais je sais aussi combien c'est énervant de voir que les gens autour de soi vous prenne pour un malade timbré.

-Si, tu as besoin de moi, répondis-je. Tu veux continuer à te droguer comme ça ? Tu trouves vraiment que c'est une bonne chose pour toi ?

-Je ne suis plus un gamin, Sara.

-Très bien. Alors je ne t'aiderais pas, mais ne vient pas te plaindre si un jour tu fais une overdose.

Il ne répond pas, encore une fois. Ça m'énerve tout simplement alors je ne dis rien non plus. Nous nous scrutons pendant de longues secondes, puis Brook prend une grande inspiration et sors de ma chambre. Je le suis et nous descendons en bas, à pas de loup.

Il est trois heures du matin et les Campbell dorment à poigts fermés. Hors de question qu'ils voient Brooklyn ici à cette heure-là. Ils risquent de se poser des questions qui peuvent être plus que gênantes.

J'ouvre la porte d'entrée et Brooklyn sort dans le couloir qui s'allume automatiquement. Il se tourne vers moi et chuchote :

-Alors... À demain...?

-À demain.

Il s'éloigne dans le couloir et descend en empruntant les escaliers. Je referme la porte derrière moi et remonte dans ma chambre. Je longe le couloir et découvre Kurt qui ouvre la porte de sa chambre, son regard se rivant sur moi.

-T'étais avec qui ?, s'intrigue-t-il.

Son regard reste dur et froid. J'ouvre la porte de ma chambre et lui répond :

-Qu'est-ce que ça peut te faire ?

-J'ai entendu la voix d'un mec.

-Occupe-toi de tes oignons.

-Je saurais qui c'était et je le dirai aux parents, menace-t-il.

Je lâche un petit rire moqueur.

-T'as quel âge Kurt ? T'es pas un gamin.

-Non mais quand les parents sauront que tu as ramené un mec ici, ils vont être furax et vont te renvoyer à Seattle. Après tout, tu vas mieux donc ils n'ont plus rien à voir avec toi. Tu ne nous manqueras pas.

Je serre les dents et ne répond pas. Je ferme la porte derrière moi et retourne sous ma couette.

Quel connard. Il ne peut pas savoir à quel point ses mots me blessent. Ici, c'est devenu chez moi. Je ne me vois pas retourner à Seattle et encore moins à cause des manigances de Kurt. Je ne le laisserai pas faire.

*****

La sonnerie du lycée assourdit mes oreilles et nous ramassons nos affaires pour sortir de la salle de classe.

-Alors ?, me demande Abi en me suivant dans le couloir du lycée.

Elle se met à ma hauteur et me lance un air interrogateur.

-Quoi?

-Avec Brooklyn. Pourquoi tu me parlais d'une Shana hier soir par messages ?

Je ne sais pas si je dois lui en parler ou non. Je suppose que Brooklyn ne veut pas que son addiction à la drogue se sache...

-Pour rien, répondis-je. Ce n'est pas très grave, ne t'en fais pas.

Abigail n'insiste pas. J'avoue que c'est ça que j'aime chez elle, c'est le fait qu'elle comprenne mon envie de rester discrète et de ne pas vouloir tout lui dire. Emily est aussi comme ça, et c'est cette qualité que j'attends souvent chez une amie.

Après, je ne sais pas si Abi est comme ça avec moi parce qu'elle sait que je lui dévoilerais mes secrets le moment venu... Enfin bref, je trouve ça bien qu'elle ne m'harcèle pas et qu'elle respecte mon intimité.

Abi et moi s'asseyons sur un coin d'herbe, sous un arbre. Elle commence à me parler d'un certain Martin sur lequel elle a des vues. C'est un garçon qui travaille au coffee-shop au coin de la rue mais je ne l'ai encore jamais vu. Je suis certaine qu'elle me le présentera un de ces jours et qu'ils finiront ensemble.

À sa description, il m'a l'air plutôt beau et il a la vingtaine. Yeux bleus, blond avec une petite barbe de trois jours... Il correspond bien au style d'Abi qui est aussi blonde aux cheveux bouclés.

Je l'écoute déblatérer sur ce garçon en regardant d'un oeil distrait Brooklyn qui traverse la cour avec Ash, leur casque de moto à la main.

Nous ne nous sommes pas adressé la parole de la journée, même lorsqu'il est passé près de moi dans les couloirs pour rejoindre sa salle de classe. Je crois qu'il pense que notre relation est finie, maintenant que je connais son "secret", mais c'est faux. Ce n'est pas ça qui m'empêchera de l'apprécier.

Je me lève en prenant mon sac de cours et Abi me jette un regard interrogateur.

-Hé ! Tu vas où ?, me demande-t-elle.

-Voir Brook, répondis-je.

Abi me prend la main en me retenant d'avancer plus.

-À mon avis ce n'est pas une bonne idée, dit-elle. Vous avez l'air d'être en froid...

-Justement, autant aller lui parler pour régler le problème.

Abi soupire et se dirige vers un groupe d'amies tandis que je vais vers Brooklyn. Il discute avec Ash dans le coin fumeur, près d'un arbre. Je m'avance vers eux et Ash me remarque. Il tape l'épaule de son meilleur ami.

-Ta petite amie est là, lui dit-il.

Brook se tourne vers moi.

-Ce n'est pas ma petite amie, rétorque-t-il.

-OK OK !

Il écrase sa cigarette sur le bitume et s'éloigne à pas rapides. Je m'assois près de Brooklyn, sur une grosse racine d'arbre. Je hume l'odeur du tabac qui emplit légèrement mes poumons.

-Qu'est-ce que tu veux ?, me demande Brook en tirant sur sa clope.

-On ne s'est pas parlé depuis hier soir, dis-je.

-Je sais.

Un silence s'installe entre nous. On n'entend que le bruit du feuillage au-dessus de nos têtes, puis je dis :

-Je n'ai pas envie qu'on arrête de se voir.

Brooklyn tourne la tête vers moi en faisant un minuscule sourire à peine visible.

-Moi non plus.

Nous nous regardons pendant de longues secondes. Si ce n'était pas lui, j'avoue que j'aurai été gênée d'être fixée de cette façon. Mais avec lui, il y a quelque chose qui fait que je me sente bien en sa présence.

Finalement, il passe un bras autour de ma taille pour me rapprocher de lui. Je lui fais un petit bisou sur la joue et il émet un rire.

-Recommence, dit-il en souriant.

Je lui refais un bisou et il me le rend à son tour.

-Je t'aime bien, dit-il.

J'éclate de rire, m'apprêtant à entendre un "je t'aime" amoureux, enfin vous voyez de quoi je parle. Mais ça ne fait qu'une semaine que Brooklyn et moi sommes amis, autant ne pas précipiter les choses.

-Je t'aime bien aussi.

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