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18/11/2015
Je descends du bus, mon sac militaire sur le dos. J'ai l'impression d'être au bout du monde. A près de six mille kilomètres de chez moi... Le sol défoncé est sec, poussiéreux. Il ne pleut pas souvent, en Afghanistan. Enfin... Je crois. En réalité, il y a une semaine, je n'aurais même pas su situer précisément ce pays sur une carte. Il appartenait à une réalité de journaux télévisés, de guerre et de chiffres alarmants s'empilant les uns sur les autres avant que nous n'ayons le temps d'en prendre la mesure. Aujourd'hui il est là, sous mes pieds. Et c'est comme si une voix en moi disait « Alors... Ça existe vraiment ».
J'arrive de France, de Paris. Ça fait deux jours que je suis en transit. J'ai pris le bus pour aller jusqu'à la gare, avec des rêves plein la tête et de l'énergie à revendre. Puis un RER, qui m'a déposé à l'aéroport Charles de Gaulle. Deux avions. Un train. Et enfin, ce bus. Pendant près de trois heures. J'ai pas mal perdu de mon énergie et de ma motivation. Même mes rêves, ils semblent bien pâle, abimés comme des photos surexposées. A vrai dire, je ne sais pas très bien ce que je fous là.
J'ai été recruté par Médecin Sans Frontières il y a quelques semaines. Je venais de rater ma quatrième année de fac de psycho, j'étais sensé redoubler et je songeais à arrêter et à voir ce que je pouvais faire avec ma licence. Je suis tombé complètement par hasard sur les recrutements de volontaires MSF. Et... Voilà. Il y a trois jours, ils m'ont appelé pour me dire qu'il avait besoin de quelqu'un avec mon profil sur une de leur mission en Afghanistan, dans une zone sans risque – Enfin, avec moins de risques que les autres – ou il y avait une maison de convalescence pour les enfants victimes de mines anti-personnel. Je ne sais pas très bien ce que ça voulait dire, mon profil, exactement. Mais ça m'allait. Ils n'avaient pas besoin d'un médecin, plutôt d'un infirmer/homme à tout faire. Alors j'ai bouclé mes affaires dans un gros sac militaire qui avait appartenu à mon grand-père, j'ai fait vérifier mes vaccins et je suis parti.
Le bus m'a lâché dans une rue pleine de monde, mais dès que je tourne à l'angle dans la direction que le chauffeur m'a indiqué, je me retrouve dans un endroit très différent. Une rue résidentielle calme, à moitié en ruine comme toute la ville que j'ai pu voir à travers les fenêtres du bus, mais jolie. Le vent agite les branches des arbres, il y a de longs rubans de papier accrochés aux branches de certains. Au bout de la rue se dresse un grand bâtiment en pierres blanches et sales, solennel comme une tour de garde. Le siège de Médecins Sans Frontières.
La double porte à l'avant est ouverte. J'entre, mais il n'y a absolument personne. Je ne sais pas très bien à quoi je m'attendais, peut-être pas à une ruche pleine de vie mais... Je pose mon sac, fais quelques pas dans le grand hall. J'ai l'impression d'être dans un ancien palais, à cause du sol en mosaïque et du très bel escalier. Un temple des temps anciens, abimés par les années de guerre. Je consulte ma montre, mais je ne suis pas sûr du décalage horaire exact, et elle ne m'apprend rien. Je n'avais pas rendez-vous avec le directeur à une heure précise. Je pourrais monter l'escalier et chercher son bureau... Ou je pourrais faire un tour, visiter. Fouiller un peu.
Si tu décides de grimper l'escalier pour rencontrer le directeur, rends-toi au paragraphe 56.
Si tu préfères fouiller un peu parce qu'après tout, on n'a qu'une vie, rends-toi au paragraphe 33.
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