Tome II, chapitre XI.

Une fois devant l'entrée de chez Isaia, Ilyes vint l'aider une nouvelle fois à se lever et le soutint jusqu'à la porte, qu'il ouvrit et s'arrêta après avoir posé un pas dans sa maison.

— C'est bon je saurais me débrouiller seul, lança Isaia en se tenant sur tout ce qu'il pouvait atteindre pour ne pas tomber. Et remercie ta mère pour moi, c'est gentil d'avoir pris soin de moi.

Le silence de son compagnon le poussa à tourner la tête vers lui et il y découvrit une moue boudeuse.

— Et moi alors, tu ne me remercies pas ?

— Merci pour hier, mais pour ce qui s'est passé ce matin, tu...

— Isaia ? T'es là ? demanda une voix s'approchant d'eux.

Le châtain paniqua, il se tourna vers le brun pour lui dire de déguerpir mais trop tard, son père les avait déjà rejoint dans l'entrée, il embrassa le front de son fils pour lui dire bonjour et eut un sourire étrange en voyant Ilyes à ses côtés. Il lui serra poliment la main.

— Bonjour, je suis le père d'Isaia, mais je crois qu'on s'est déjà vus non ? demanda son père à l'intention de l'intrus.

Isaia fut surpris, ils se connaissaient ? Impossible, son géniteur était souvent en déplacement, bon moins depuis la rentrée, et Ilyes n'était jamais venu ici. Comment pourrait-il le connaître ?

— Bonjour, je m'appelle Ilyes et... Hum, c'est possible, sembla-il étonné, lui-aussi.

— Mais je croyais que tu étais avec Mattéo et Claire ? Puis tu aurais pu répondre à mes messages Isaia, informer son père n'est pas en option, surtout quand celui-ci s'inquiète pour son fils, le réprimanda gentiment son père avec un léger sourire.

Étrange. Leo et Isaia étaient pareils sur ce point : ils souriaient très rarement et riaient encore moins. Que son expression soit si enjouée alors que son fils avait fait silence radio et l'avait, apparemment, inquiété, était définitivement anormal.

— On s'est croisé dans sa soirée et on a discuté, finalement on a pas vu le temps passer et il était déjà très tard, alors il ne voulait pas vous réveiller et je l'ai invité à dormir chez moi, mentit Ilyes, avec une confiance en lui... Monstrueuse.

Le célèbre photographe hocha la tête, toujours sans se départir de son petit sourire. C'en devenait flippant. Isaia aurait bien aimé lui dire qu'il n'avait pas besoin d'aide et qu'il pouvait disposer, à présent, mais pas devant son père, il risquerait de se poser des questions.

— Très bien, mais la prochaine fois pense quand même à m'envoyer un message, même s'il est très tard, d'accord ? reprit-il en regardant son fils.

Isaia hocha la tête et Ilyes lui tendit une nouvelle fois sa main.

— Je dois partir, heureux de vous avoir rencontrer, finit le brun avec un sourire éclatant et charmeur.

— De même, répondit Leo en attrapant sa poignée.

Quand l'autre eut enfin passé la porte, le châtain soupira, enfin débarrassé de son tortionnaire psychologique. Il allait se rendre dans sa chambre pour se reposer quand il fut coupé par son père.

— Et donc, ça fait combien de temps que vous êtes ensemble ? demanda-t-il curieusement.

Isaia s'étouffa avec sa propre salive et écarquilla les yeux en se tournant vers lui, l'air très choqué.

— Pardon ?

— Isa tu peux tout me dire tu sais et je suis pas si vieux au point d'oublier que vous vous êtes embrassés en rentrant d'Italie, et que tu avais ce grand sourire heureux scotché sur tes lèvres, pouffa doucement son père.

Le châtain fronça les sourcils, comment ça, ils s'étaient embrassés devant son géniteur ? N'importe quoi, quand ils s'embrassaient, c'était toujours dans l'intimité et la seule personne qui les avait vu, était Lilo et c'était il y avait très longtemps de cela. Jamais il n'aurait emb... Puis cela lui revint d'un coup, après avoir fait le chemin du retour dans sa voiture, Ilyes l'avait aidé à rentrer ses sacs de voyage et lui avait offert un baiser pour lui dire au revoir... C'était peu de temps avant qu'il ne sache que ce connard faisait parti de ses bourreaux.

Il sentit aussitôt ses joues rougir, alors son père pensait vraiment qu'ils sortaient ensemble depuis ce baiser ? La gêne s'empara entièrement de lui et il aurait voulu se cacher six pieds sous terre à l'heure actuelle, surtout sous le regard curieux et amusé de Leo.

— N...Non je... balbutia-t-il au summum de la honte.

— Et maintenant tu passes la nuit chez lui, je savais pas que vous en étiez à ce stade, continua-t-il.

Définitivement, Isaia était mort de honte. Et voilà que maintenant, il pensait qu'ils... Qu'ils couchaient ensemble ! Non, c'était trop horrible comme situation, surtout que c'était entièrement faux !

— Quoi ? Non... Non ! On fait rien, enfin je veux dire on... On sort même pas ensemble, je le jure, tenta-t-il de se défendre.

Leo fronça les sourcils et s'approcha de son fils, il posa sa grande main sur la tête dans un geste affectif et lança :

— Isaia, je te l'ai déjà dit, je m'en fiche de ta sexualité, si ce garçon te rend heureux alors je le suis également.

Il ne laissa pas de temps à Isaia pour répondre et repartit dans le salon. Isaia soupira fortement et tenta de regagner sa chambre en s'accrochant à tout ce qu'il pouvait. Il se laissa tomber dans son lit et se rendormit, essayant de faire abstraction aux dernières vingt-quatre heures. Son sommeil fut quelques peu perturbé par des rêves étranges dont il n'avait que peu de souvenir en se réveillant plusieurs heures plus tard. Il avait l'impression de ne pas avoir dormi et sa tête faisant un boucan pas possible, il y avait un vrai orchestre à l'intérieur. Il se douta tout de même de ce à quoi il avait bien pu rêvé, car en prenant sa douche, une question le taraudait : et sa mère, qu'aurait-elle dit si elle apprenait qu'il était intéressé par les garçons ? Est-ce qu'elle l'aurait accepté ? Rejeté ? Isaia aimait croire qu'avec son esprit ouvert, elle aurait réagi de la même manière que son père, mais il n'en était pas sûr. Il se prenait donc la tête là-dessus, posant le pour et le contre de la question, amplifiant son mal de tête.

Quand il sortit, encore tout dégoulinant, il se regarda dans le miroir et eut envie de pleurer. Sauf que cette fois, ce n'était pas par le manque qu'il ressentait, mais plutôt par l'ignorance. Celle de ne pas savoir si sa mère serait d'accord pour son orientation sexuelle. Il ne se mentait plus, il savait très bien qu'il était probablement gay étant donné qu'aucune fille ne l'ait attiré et que la personne avec qui il aurait pu avoir une relation était un garçon.

Il s'essuya vigoureusement le corps jusqu'à rendre sa peau rouge, il avait l'impression que les lèvres d'Ilyes étaient partout sur lui, qu'elles avaient embrassé chaque parcelle de sa peau et il ne put s'empêcher de frissonner à cette pensée. Il ferma un instant les yeux pour tenter de se souvenir de sa nuit, cependant, rien de bien concret lui venait en tête, il entendait la voix d'Ilyes, il se rappelait soit du début d'une phrase, soit la fin, soit seulement quelques mots mais jamais une en entière et c'était foutrement rageant. Il rougit violemment en se souvenant d'un coup de bassin qu'il aurait donné lui-même au brun. Il se concentra sur cette sensation, qu'il devait admettre honteusement, plutôt bonne et d'autre coups lui vinrent en tête, notamment les mains du brun dans son dos, caressant sa peau nue et l'appuyant sur son bassin. Il se mordit la lèvre et sentit une chose étrange remuer dans son ventre. Il décida de s'arrêter là, ayant trop peur de la suite et de comment réagissait son traitre de corps.

En revenant dans sa chambre, il prit une cigarette et l'alluma puis se mit à la fenêtre pour tirer des taffes. Il ne savait pas si c'était bon de fumer après avoir été sûrement drogué, mais il en avait terriblement envie. Tout son corps était engourdi et il ne se sentait pas encore très bien. Il prit également son téléphone et le brancha pour qu'il se recharge. Il attendit quelques minutes puis appuya sur le bouton au dessus de son téléphone, laissant l'écran apparaître et se dirigea directement dans ses messages. Celui-ci vibra autant de fois qu'il y avait des messages, c'est-à-dire pendant quelques secondes.

Claire lui avait envoyé une bonne dizaine de messages, elle paraissait morte d'inquiétude et s'était excusée un millier de fois pour ne pas avoir été là.

Quant à Mattéo, il lui demandait si tout allait bien et de lui envoyer un message quand il sera en possibilité de le faire. Il s'était également excusé de l'avoir laissé aux mains de ce « connard d'Ilyes ».

Il leur envoya simplement un « tout est ok, on se voit au lycée lundi. », il n'avait jamais aimé s'étendre dans les messages et ses plus longues conversations avaient été avec son bourreau.

Puis, il n'arrivait pas à digérer ce que lui avait fait Mattéo, il l'aimait beaucoup, c'était son meilleur ami et il s'était senti mal quand ils se parlaient pas, mais se souvenir que Mattéo n'était pas une personne de confiance sur ce point le dérangeait énormément. Il aurait aimé qu'il s'affirme et s'impose, il ne voulait pas d'un protecteur, mais simplement d'un ami qui soit là pour son pote... Il n'avait, en revanche, rien contre Claire. Elle avait été là pour profiter d'Hugo et n'avait rien vu de la scène. Si elle avait vu Ilyes, il était persuadé qu'elle se serait fait entendre, même s'il subsistait en lui une petite part de doute.

Jihane lui avait demandé si ça allait mieux et un numéro inconnu s'était présenté comme étant un certain Thibault, l'ami de la jeune fille qu'il avait raccompagné chez lui, il lui disait qu'il avait oublié sa veste chez lui et qu'il pouvait la ramener ou alors il pourrait le faire s'il lui donnait son adresse, en omettant pas de le remercier encore une fois.

Il avait complètement oublié la fille d'hier ! Finalement, et assez ironiquement, ils avaient fini dans le même état... Le destin se foutait vraiment de sa gueule.

Il répondit que tout allait bien à Jihane et demanda à Thibault s'il ne pouvait pas venir le chercher le lendemain, ne se sentant pas le courage de sortir, auquel il lui répondit aussitôt qu'il n'y avait aucun soucis.

Il chercha ensuite le numéro de Simon, bien décidé à lui faire entendre sa pensée, quand il trouva, il lui envoya un message :

« Toi, ne t'avises plus de demander à Ilyes de venir me chercher, sinon je te jure que tu me le paieras. » 15:16.

Il eut le temps de finir sa clope et de l'écraser contre son cendrier avant de recevoir une réponse de Simon.

« Je l'ai appelé parce qu'il s'y connaissait nouveau drogue et que tout le monde paniquait et ne savait pas comment s'y prendre avec toi. C'est lui qui est venu, malgré le fait que je lui ai demandé de rester à son taffe. » 15 :22.

Isaia fut surpris, est-ce qu'il disait la vérité ? Qui croire entre les deux ? Pourtant, il savait au fond de lui que Simon était plus sincère que le brun. Alors comme ça, c'était lui qui avait insisté pour venir le chercher ? De plus, Ilyes lui avait dit qu'il s'ennuyait quand son ami l'avait appelé, en réalité, il était en train de travailler.

Quel enfoiré ! Il me ment encore, pensa Isaia.

Il était en colère qu'il lui ai menti ouvertement, mais après tout, c'était Ilyes et il n'était pas non plus choqué, il savait désormais à quoi s'attendre avec lui. Il n'avait même plus la force de péter les plombs contre lui, il pouvait même se dire – avec horreur – qu'il s'était habitué à son caractère je-m'en-foutiste poussé à l'extrême.

     

     Lundi arriva rapidement, il partit en cours sans entrain, se sentant encore un peu assommé de son week-end. Étrangement, il n'y avait ni Claire, ni Mattéo qui l'attendaient devant le lycée aujourd'hui, il mit alors ses écouteurs et écouta du Nirvana à un assez haut volume pour oublier les autres autour de lui. Il détestait être entouré par tant de monde, mais encore plus se retrouver seul autour de tant de monde. Il avait cette sensation qu'ils le regardaient, le jugeaient. Il savait qu'il psychotait beaucoup, mais cette pensée n'arrivait jamais à partir, même s'il le désirait très fortement. Quand les portes s'ouvrirent, il laissa la masse entrer pour ne pas se retrouver au milieu et compressé de partout. Une fois les voies dégagées, il put enfin entrer dans l'établissement, cependant, il n'eut le temps de faire trois pas, qu'il aperçut Ilyes pas loin de lui, près de la vie scolaire, ses écouteurs également enfoncés dans ses oreilles et le regard fixé sur son téléphone. Il remarqua des filles passer à côté et sourire niaisement en le matant sans discrétion.

Bande d'idiotes, il aurait eu envie de balancer, sans vraiment réfléchir.

Il fonça droit sur lui et sans que le brun ne puisse avoir le temps de comprendre ce qui lui arrivait, Gianni lui attrapa le col de sa chemise bleue foncée et le poussa fermement contre le mur, plaquant son corps sur la surface carrelée gelée. L'étonnement et l'incompréhension qu'il put lire dans les yeux d'Ilyes le fit jubiler intérieurement, c'était si rare de le surprendre, de prendre le dessus sur lui que c'en était presque jouissif !

Il ferma les yeux quelques secondes pour reprendre ses esprits, il commençait à délirer, sérieusement. Il fronça les sourcils et ancra son regard dans le sien. Il faillit défaillir en constatant que le brun avait à présent un petit sourire malicieux sur les lèvres. Voilà, son sentiment de puissance n'avait duré que cinq secondes à peine.

De sa main libre, il retira ses écouteurs brusquement et le fusilla des yeux.

— T'es vraiment un enfoiré à me mentir sans cesse ! Alors quoi, t'es mythomane ? Tu ne peux pas refréner tes pulsions de mensonges compulsives ? lança sèchement Isaia, se voulant le plus ferme possible.

— De quoi tu parles Gianni ? fit-il mine de ne pas comprendre.

— TU es venu me chercher sans qu'AUCUN ne t'ait demandé de le faire, tu m'as encore menti. Putain ! ne put se retenir le châtain.

Le sourire d'Ilyes s'agrandit, il semblait fier de lui et amusé par la situation tandis qu'Isaia désirait plus que tout lui faire ravaler son sourire, comme d'habitude.

— Je suis en train de me dire que je t'ai vu dans tout tes états : peiné, triste, heureux, joyeux, amusé, en colère, complètement furieux. Mais tu sais dans quel état j'aimerai te voir bébé ?

Il s'approcha de son oreille pour plus d'intimité et lui susurra d'une voix étrange :

— Excité et jouissant pour moi.

Isaia sentit son corps chauffer rien qu'à cette phrase et resserra son emprise, il le cherchait ! Il s'apprêtait à lui envoyer son poing mais le brun fut plus rapide et stoppa son geste en attrapant son poignet.

— Pas de démonstration d'affection dans l'enceinte du lycée ! s'écria une pionne, qui venait juste de sortir son nez en dehors de sa salle pour les réprimander.

Le châtain déglutit, ils avaient vraiment l'air de se câliner, là ?! 

Il lâcha rapidement le brun, lui intimant avec un regard meurtrier qu'il le paierait avant de s'enfuir dans sa classe. 

Une fois assis, il se mit à réfléchir, étant donné que son prof était en retard, et se dit qu'il devait trouver un moyen de cesser ce jeu puéril avec Ilyes. Il en avait plus que marre de lui et ses insinuations douteuses, le rendant toujours plus dingue.

Et si... Et s'il lui proposait de faire la paix

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