Chapitre XLIII.
- Je n'aurais pu rêver mieux, lança Ilyes enjoué.
Ses poils s'étaient hérissés et sans même s'être tourné pour vérifier qu'il n'avait pas confondu ou rêvé, son corps se rapprocha de la fenêtre, s'éloignant de la personne à ses côtés. Lorsqu'il se décida enfin à lui faire face, il eut des envies de meurtre en voyant le grand sourire d'Ilyes qui dévoilait ses petites canines légèrement plus grandes, mais ses yeux noirs le persuadaient de ne pas le faire. Il ne pouvait pas faire disparaître des yeux aussi intriguant, mystérieux, magnifiques, même si la personne derrière était la pire des enflures. Son sourire perdit de son ampleur, laissant apercevoir des lèvres charnues que le châtain avait pu goûter avec une terrible envie plusieurs fois. Et cette fois ne fut pas différente des autres, pour son plus grand malheur, la bouche du brun lui donnait encore des envies inexplicables. Était-il masochiste ? Parce que vouloir embrasser un mec qui nous a trahis, c'est être profondément débile.
- Mes lèvres te donnent envies, Gianni ? Chuchota lentement Ilyes.
Isaia se mit à rougir, n'arrivant pas à contrôler ses émotions. Il s'était trop égaré sur sa bouche. Jamais il ne lui avouerait, ce serait du suicide, de la bêtise pure et brute.
- Jamais, grogna presque Isaia.
- Ne nie pas mon cœur, je me rappelle encore de notre dernier baiser, c'est toi qui avait...
Le châtain ne lui laissa pas le temps de finir qu'il plaqua sa main sur sa bouche pour le faire taire en regardant devant pour s'assurer que personne n'avait entendu. Certes il l'avait presque embrassé lundi, mais ça, il n'assumait déjà plus. Heureusement qu'ils étaient aux dernières places, devant eux se trouvaient juste Simon et un autre mec, mais ils semblaient en grande discussion. D'ailleurs, ils parlaient plutôt fort.
Isaia retira sa main tout aussi vite en sentant une langue venir la lécher sans pudeur, et il faisait ça en le regardant bien droit dans les yeux. Il regarda sa main d'un air dégoûté en lâchant :
- Mais t'es dégueulasse !
- Oh s'il te plait, tu disais pas ça quand elle était dans ta bouche, répliqua Ilyes, prenant un faux air ennuyé.
Ce n'était plus le feu aux joues qu'il avait, c'était le volcan complet en éruption.
Quel con, se traita-t-il mentalement. Il aurait dû se douter que quand sa prof parlait de classe de TL, Ilyes y serait. A vrai dire, il y avait deux classes de terminale L, par conséquent, une chance sur deux de retomber sur le brun. Quand il disait qu'il portait la poisse. Il soupira de désespoir. Encore une fois, la phrase lève toi et tombe valait pour lui.
- Moi qui croyais m'ennuyer à cette sortie, je suis plus que ravi d'être finalement venu, tu ne peux même pas savoir à quel...
- Ta gueule, je veux pas t'entendre ni te parler, le coupa Isaia sur les nerfs.
- Bébé Isaia sort les griffes, que c'est excitant.
- T'es un cinglé.
Ilyes se mit à rire et cette fois-ci, quelques têtes se retournèrent vers eux, mais cela n'arrêta pas le moins du monde le brun.
- Ah, ouais, sûrement, répondit-il finalement.
Sa réponse décontenança légèrement Isaia, il était si... Étrange. Ce garçon était vraiment incompréhensible. On ne savait jamais quand il était sérieux, il paraissait toujours amusé, mais quand Isaia l'avait frappé, il n'avait montré aucun signe d'énervement ou quoique ce soit. Mais le plus perturbant, sans doute, était lorsque son visage n'exprimait rien, il était figé. Il donnait l'impression de mépriser tout le monde, ou alors de s'en foutre de tout le monde. C'était contradictoire, mais les deux lui collaient à la peau si parfaitement qu'en choisir un était impossible.
- Isaia... Souffla Ilyes près de son oreille.
Encore une fois, il arrivait à lui donner des frissons. Isaia avait les yeux rivés vers la fenêtre, regardant distraitement le paysage défiler, mais le souffle chaud qui s'échouait dans son cou l'agaçait énormément, ça réveillait des trucs en lui qu'il aimerait autant oublier.
- Arrête ça, répondit sèchement le châtain.
- Ilyes arrête de draguer, tu vas lui faire peur au petit ES, s'exclama une voix.
Isaia se tourna vers l'auteur, qui était à quelques sièges devant eux, Ilyes se mit à rire avant de lui jeter son sac dessus.
Arrêter de le draguer ? Il est au courant qu'Isaia est un garçon au moins ?
L'autre ouvrit le sac du brun et Isaia avait l'impression que tout le monde s'était tourné vers le garçon pour voir ce que contenait le sac.
- Alors, nous avons un cahier de littérature, un autre d'anglais et enfin... Un d'italien. Mec, t'as même pas rangé ton sac avant de partir, se moqua le garçon.
Les autres se mirent à rire également, certains lançaient quelques phrases mais Isaia n'écoutait plus. Il s'était arrêté à " un d'italien "... Italien. L'enfoiré faisait italien ! Il apprenait l'italien !
- Tu... Tu apprends l'italien ? Lui demanda Isaia de la voix tremblotante.
- Ouais, depuis six ans, pourquoi ? Répondit Ilyes en le regardant, fronçant un peu les sourcils pour lui faire comprendre qu'il ne saisissait pas le sens de sa question.
- Depuis... SIX ANS?! S'outra Isaia.
Ilyes ne voyait toujours pas, avant qu'un déclic ne fasse surface et que ses yeux s'agrandirent.
- Ah, ouais, pour l'Italie, mh, ne sut quoi dire le brun.
- Putain t'es... Tu savais parler italien ! Tu comprenais l'italien ! Tu t'es bien foutu de ma gueule ! S'énerva Isaia, dont le sang ne faisait qu'un tour.
- Oh oh oh, ne va pas t'imaginer des trucs chelou, je suis une quiche en italien, j'ai jamais au dessus de 12 de moyenne, et je sais même pas comment je fais sérieux. Si je t'ai fait croire que je savais pas l'italien, c'est parce que... J'assumais pas trop mon niveau, j'suis en terminale L mais je gère moins qu'un petit ES tu vois ? Répondit-il en se touchant la nuque d'un air gêné.
- Tu m'as menti putain.
- J'ai ma fierté. J'ai pas envie de paraître con, surtout quand il s'agit de toi.
Isaia sentit son cœur louper un battement, Ilyes avait prit son visage inexpressif qu'il ne savait déchiffrer. Trop sérieux ou trop cynique ? Non, il se foutait encore de sa gueule. Il jouait de sa crédulité pour se faire pardonner, le brun était quelqu'un d'immoral, et ça, il commençait à le comprendre.
- T'es un connard, c'est tout, conclut Isaia.
- Si t'as envie de te défouler, tu peux toujours m'embrasser, lança Ilyes redevenu taquin.
Le châtain soupira. Cette sortie s'avérait être un vrai calvaire, lui qui pensait juste prendre du plaisir et revenir tranquillement chez lui, pour le plaisir, on repassera. Cependant, il était curieux d'une chose et temps qu'à faire, autant profiter de l'occasion pour se renseigner, de toute façon, c'est la dernière fois qu'il lui parlerait. Il fit un effort surhumain pour lui faire face, mais voyant la proximité, il posa une main sur son torse et le recula à bonne distance.
- Est-ce... Tu t'es foutu de moi aussi, quand tu... M'embrassais ? Demanda tout bas Isaia, ne voulant pas que l'on puisse l'entendre.
- Oui, balança Ilyes simplement.
Le châtain se sentit mal face à cette phrase, comme si on venait de lui enfoncer un couteau dans le cœur. Après tout, il avait espéré cette réponse, alors pourquoi ça le faisait réagir aussi tristement ? Il entendit le brun soupirer et celui-ci lui lança un regard lassé.
- C'est ça que tu veux entendre, non ?
Isaia fronça les sourcils avant qu'Ilyes ne pose ses doigts sur son menton et rapproche leur visage. Il plongea son regard dans le sien, puis doucement, ses yeux fondirent sur ses lèvres.
- Alors je suis désolé de ruiner tes espoirs, mais non. J'ai aimé chacun de nos baisers, et je ne mens pas quand je te dis que si tu m'embrassais, je te répondrai.
Le châtain se mordit la lèvre inférieure, il avait envie de le faire pour voir sa réaction, parce qu'il était presque certain qu'Ilyes disait ça car il croyait qu'Isaia n'était pas capable de franchir le pas. Puis aussi parce que cette bouche insolente le tentait terriblement. Il donnerait tout pour revenir en arrière, et partager un baiser qu'il pensait encore sincère et passionné.
- Nous sommes arrivés, n'oubliez pas vos bloc-notes !
Ce qui acheva les pensées d'Isaia. Le professeur accompagnant venait de décider pour lui, mais de toute manière, jamais il n'aurait osé l'embrasser. Ilyes soupira et se leva, le châtain le suivait du regard et le vit récupérer son sac auprès de son camarade de classe puis descendre du bus.
Ils entrèrent ensuite dans un grand bâtiment, les enseignants partirent à l'accueil pour régler les derniers détails et tout le monde attendait en bavardant avec leurs amis. Isaia se sentit seul, son regard se posa donc naturellement sur le brun, qui parlait à une grande brune. Quelque chose dérangeait le châtain, les deux se souriaient trop pour de simples amis, il y avait une complicité évidente, et il pouvait l'affirmer rien qu'en les regardant. Et il se détestait à réagir.
Ce mec était probablement son bourreau principal, pourtant il n'arrivait pas à le rejeter, et c'était horrible. C'était comme aimer son tortionnaire.
Il détourna le regard, il n'avait pas envie de s'énerver pour ce salaud. La visite se fit plutôt calmement et tout le monde semblait écouter le guide, ce qui était cool pour se concentrer. Isaia était aux anges, et dès qu'il y avait une question, c'était le premier à lever le doigt pour y répondre. A la fin, même le guide ne voulait plus l'interroger et favorisait les autres.
Au bout d'une heure et demie, la visite guidée fut terminée et, tandis que les profs parlaient avec le guide, les élèves étaient partis dans la boutique pour s'acheter des souvenirs. Isaia feuilleta un livre qui regroupait les photos qu'il avait vu avec des explications en dessous, avant que son cœur ne loupe un battement en sentant une main se poser sur sa hanche et un souffle s'échouer sur sa nuque.
- Hey mon petit photographe.
Isaia ne prit pas la peine de se retourner, il retira juste la main de son corps et répondit sèchement :
- Retourne avec ta pimbêche.
Mais aussitôt dit, qu'il regrettait déjà. Cette phrase puait la jalousie à des kilomètres et il sentit ses joues rougir. Il priait pour qu'Ilyes ne le prenne pas dans ce sens et qu'il l'ignore.
Tout à coup, une main vint agripper fermement son bras et Ilyes tira dessus, l'emmenant ailleurs. Isaia protesta et essaya de le faire lâcher, mais le brun avait beaucoup plus de force que lui. Il pâlit en voyant le symbole des toilettes et se débattit encore plus fort. Une fois dans ceux-ci, Ilyes les fit entrer dans une cabine de toilette, celle handicapé semblait-il, et il n'eut le temps de prononcer un mot que deux bras vinrent encercler son corps et le serrer à un autre d'une manière si... Possessive. Encore une fois, il n'arrivait à détester ça, bien au contraire, il se sentait bien, là, dans les bras d'un mec qui l'avait blessé et fait pleuré, déprimé pendant une semaine aussi. Il ne savait plus quoi penser, il soupira en se laissant faire. Il ne cherchait même pas à comprendre pourquoi Ilyes était actuellement en train de lui faire un câlin. Son odeur l'enivrait et son ventre se contractait. Il avait envie que leurs corps soient encore plus proche, si proche qu'il serait incapable de passer une feuille entre eux.
- Qu'est-ce que tu fais ? Souffla Isaia après quelques minutes.
Lorsque le brun recula légèrement son visage pour être en face d'Isaia, il remarqua qu'ils respiraient tous les deux par la bouche et que leur respiration était plus forte que d'habitude. C'était horrible, toute cette tension et cette envie qui le dévorait. Il vit le visage d'Ilyes s'approcher dangereusement du sien, et ne réfléchit pas longtemps avant de laisser son côté instinctif prendre le dessus. Il savait qu'il allait le regretter et cela commençait déjà, mais tant pis, il était trop tard.
Leurs bouches se joignirent et son ventre s'enflamma aussitôt, appréciant plus que de raison ses lèvres chaudes qui caressaient sensuellement les siennes. Il se sentit partir en arrière et son dos buta contre le mur froid, délicieuse contradiction avec son corps brûlant. Une des mains d'Ilyes remonta et vint se poser sur sa joue pour intensifier le baiser, mais dès qu'il sentit sa langue voulant entrer dans sa bouche, il le repoussa. Il ne savait pourquoi, mais il eut une subite envie de pleurer, c'était comme de voir, de goûter ce que l'on avait très probablement perdu. Cependant, il se ressaisit rapidement et fronça les sourcils.
- Ne refais plus jamais ça.
Puis il s'éclipsa des toilettes, heureusement sans que l'autre ne le retienne. Tout ce qu'il voulait faire était de le faire souffrir, aujourd'hui plus que jamais, surtout après avoir eu ce dont on l'avait privé. Avant qu'il ne quitte les toilettes, il entendit derrière lui :
- Isaia, quand tu sauras la vérité, saches que je ne regrette rien.
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