Seule dans sa chambre elle tourne, décolle, voltige entre les courants d'air. De sa fenêtre, elle jette à l'océan qui l'observe son corps en barrage contre l'ennui. Sa délicate robe pêche la fait se sentir princesse d'opéra. Ses yeux fermés dressent tout autour de la petite danseuse un paysage de vacances roses qui l'apaise et l'aide à luter. Chaque pas est une victoire de plus contre l'inertie qui la maintient à terre, les pieds ancrés inlassablement. Mais la jeune fille danse, célèbre sa liberté en embrassant le ciel, et n'adresse plus un regard à la futilité de la gravité. Elle s'envole, ses ballerines ne touchent plus le sol, et son être tout entier s'échappe par la fenêtre. Elle voit déjà sa maison, toute petite sous elle, qui rétrécit encore, jusqu'à ne plus être qu'un point minuscule parmi d'autres points plus petits encore. Et parmi les nuages, la ballerine est plus légère que jamais, débarrassée de l'ennui qui la clouait, écartelée, dans sa vie trop tranquille.