Chapitre 4
À Trois-Rivières, il n'y avait pas de plage.
Ni de crique, ni de côte, ni même d'océan.
Quel dépaysement, pour les trois enfants qui avaient connu jusqu'ici des vacances baignées de vagues et de sable !
Il arrivait à Adèle d'en chercher, des plages : Internet, guides touristiques, elle les épluchait à la recherche d'un site ensoleillé et bordé par la mer, qui lui apporterait les embruns dont elle avait besoin...
Peut-être était-ce pour cette raison qu'elle avait choisi Mille et un secret à Trois-Rivière.
Peut-être était-ce pour découvrir une plage non-loin d'ici.
Assise sur un vieux lit de bois et aux blancs draps de lin, Adèle lisait, parcourant rapidement les pages de ses yeux bleus et vifs.
« Tu lis vraiment à cette vitesse ? »
Adèle releva la tête de son livre, et vit Nadia, appuyée dans l'embrasure de la porte de sa chambre, ses cheveux châtains descendants en cascade sur ses épaules.
La jeune fille haussa les épaules.
« Je parcours.
— Tu devrais lire, insista Nadia, secouant la tête avec détermination. Mot par mot.
— Je sais.
— Pourquoi tu ne le fais pas, alors ? »
Elle haussa les épaules à nouveau.
« J'sais pas.
— C'est dur de discuter avec toi, Adèle. Aucun débat, aucun argument. »
Adèle baissa les yeux, refermant son livre. Elle ne prit même pas la peine d'y glisser un marque-page, puisque de toute façon, elle ne les avait pas lues, ces quarante-trois pages.
Nadia se décolla enfin de l'embrasure, et poursuivit son chemin dans le couloir. Adèle l'entendit descendre les escaliers.
Une fois que les bruits de pas étaient devenus lointain, Adèle se laissa tomber sur son matelas.
Il rebondit.
Une fois.
Deux fois.
Elle souffla sur une mèche, se baladant devant ses yeux.
***
Peut-être était-ce le lieu qui ne l'aidait pas à se concentrer.
Peut-être que si elle quittait sa chambre, Adèle trouverait le courage de s'embarquer dans l'aventure des mots de ce livre.
Alors, après le déjeuner, elle s'en alla dehors, et, posée près des buissons grimpants délimitant le terrain, assise en tailleur dans l'herbe, elle rouvrit son livre.
Je vais y arriver. Je vais lire.
Ses regard avançait lentement, mais sûrement : les mots coulaient mécaniquement sous ses yeux, un à un. Elle les identifiait. Elle visualisait. Puis elle reprenait.
De cette façon, une simple phrase était lue en plusieurs dizaines de secondes, tandis qu'un lecteur assidu, Adèle le savait, l'aurait lue en à peine une fraction de temps.
Mais quand elle releva les yeux, elle se rendit compte qu'elle n'était qu'à la fin de la première page.
Décourageant.
Elle claqua son livre en un lourd soupir.
Comment faisait Nadia pour avaler des romans entiers en un claquement de doigt ?
Pourquoi elle n'y arrivait-elle pas ?
Était-ce si grave si elle n'y arrivait pas ?
Elle contempla la couverture, passant une main sur le vieux plastique, avec une envie de le déchiqueter de ses ongles. D'autant plus que le coin gauche semblait un peu corné, il lui suffisait de gratter un peu pour pouvoir voir le plastique s'en aller avec satisfaction.
Elle fut quand-même soulagée que Nadia ne soit pas là pour observer qu'elle n'avait lu qu'une seule et misérable page de son livre, en un temps relativement long.
Adèle regretta ses anciennes bande-dessinées, rendues à la bibliothèque, où l'information, ainsi que l'émotion, passait beaucoup mieux, et beaucoup plus vite, surtout.
Une sauterelle atterrit sur son livre.
Adèle sursauta, surprise, avant de rigoler nerveusement.
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