Chapitre 11

Tout s'était passé très vite.

Dès que la détermination entre en jeu, de toute façon, toutes les actions s'accélèrent.
Et quand la fatigue s'en mêle...

Lorsqu'enfin, l'esprit d'Adèle reconnecta avec le monde, terminant de se réveiller, elle était sur un vélo — son vélo —, dans la fraîcheur du matin, pédalant le long des routes écaillées de Trois-Rivières.

Le Soleil rasait la mer de tournesols, qui bordait le côté de la route, faisant ressortir leur plus belle couleur.

Des milliers de petits soleils safrans et abricots étaient plantés dans le sol, à ce moment.

Adèle ne pouvait nier : l'aube, ici, était un incroyable moment.

Elle continua de pédaler à toute allure.

Tout le monde, à la maison, continuait de dormir, ignorant ses plans, ignorant même qu'elle avait quitté la maison.

Mais qui pouvait suspecter Adèle de se lever à une heure pareille ?

Elle qui se réveillait habituellement lorsque le Soleil était au zénith...

Mais Adèle était décidée.

Elle entra dans le centre-ville de Trois-Rivières. Les ruelles étaient figées : rien ne bougeait, les volets étaient fermés, les arbres n'oscillaient pas ; tout était endormi, comme suspendu dans le temps.

Seule, une jeune femme s'activait tranquillement devant la bibliothèque municipale, affichant que cette dernière était à présent ouverte.

C'était bien la seule bibliothèque qui ouvrait à cinq heures, à la connaissance d'Adèle.

Qui pouvait bien y aller à cette heure ?

La jeune adulte se détourna, entendant Adèle descendre de son vélo. Quand elle la vit, elle lui adressa un grand sourire.

« Bonjour ! Vous êtes bien matinale ! »

Adèle hocha la tête sans répondre ; son souffle haletant mangeait tout ses mots.

« Vous voulez quelque chose en particulier ? » interrogea la femme.

Adèle fouilla dans son sac de tissu, et dégaina le livre Mille et un secrets à Trois-Rivières.

Elle le tendit vers la bibliothécaire, qui identifia rapidement l'ouvrage d'un œil analyseur.

« Vous voulez le rendre ? » devina t-elle.

Adèle secoua négativement la tête.

Et enfin, elle souffla :

« Je voudrais d'autres livres sur le sujet. »

***

Une vingtaine de minutes plus tard, Adèle était de retour sur son vélo.

Malheureusement, son sac de tissu n'était pas bien plus rempli qu'à l'allée : seuls deux petits livres traitaient les légendes tournant autour de Trois-Rivières.

Pourtant, avec la bibliothécaire, elles avaient cherché : après avoir passé au peigne fin toutes les étagères, elle s'apprêtait à appeler une secrétaire quand Adèle s'était opposée : la bibliothécaire avait fait assez de choses comme ça.

Mais les livres étaient bien maigres...

Allait-elle trouver de quelconques indices sur ces rivières, guérisseuses d'âmes ?...

Adèle rentra à la maison.

Par chance, personne n'était réveillé, ni Nadia, ni Benjamin, ni Jeanne.

Seule, un petit félin vagabond l'accueillit d'un petit miaulement plaintif, à l'entrée du jardin, avant de repartir tranquillement vers les fourrées.

Adèle s'empressa de quitter ses baskets, de refermer la porte clé, et remonter les escaliers, le tout dans le plus grand des silences.

Soudain, alors qu'Adèle longeait prudemment les murs du couloir de l'étage, fixant obstinément la porte de sa chambre, une ombre surgit de l'embrasure de la salle de bain, les cheveux en vrac, le regard assombri par de lourdes cernes.

Adèle eut un mouvement de recul, ravalant son cri.

« Euh... Nadia ? » fit-elle, prise au dépourvue.

Sa grande sœur releva la tête.

Son visage était imprimé de fatigue.

« Mal dormi, maugréa t-elle. J'vais m'recoucher. »

Elle regarda son poignet, pourtant dénudé de montre :

« Il est quel heure, là ?

— ... Je ne sais pas, souffla doucement Adèle, plaquant son sac de tissu contre le mur en espérant que sa sœur ne le voit pas. Très tôt. »

La fatigue semblait avoir réduit la capacité de déduction de Nadia, puisqu'elle ne fit de commentaire ni sur la présence d'Adèle dans le couloir, ni sur sa tenue.

Elle se détourna, et traîna son corps mou jusqu'à sa chambre.

Lorsque la porte se referma derrière elle, Adèle s'autorisa enfin à soupirer.

Elle rentra dans sa chambre, et jeta les quelques livres sur son lit.

Aujourd'hui, elle lirait.

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