Trois petites aiguilles

Dans le couloir vide qui mène à l'infirmerie, Drago prend une longue respiration tremblante. Elle n'aide en rien à calmer le stress vibrant qui remue son être entier et après deux autres tentatives, il se force à pousser la porte de l'infirmerie d'une main moite avec le peu de courage qu'il porte en lui à cet instant précis, bien conscient que c'est une anomalie dans son corps qui ne va pas durer.

- Ah, Monsieur Malfoy, dit immédiatement l'infirmière. Elle ne lui laisse même pas le temps de faire un pas dans la pièce trop éclairée et grouillante de vie ou de prendre une autre longue inspiration qui aurait été tout aussi inutile mais qui aurait cependant été bienvenue quand il réalise que ses mots bloquent l'air tout net en plein milieu de sa gorge.

Comme un lièvre pris dans la lumière d'un sort, il se tétanise, puis débat avec sa lâcheté sur l'éventualité d'amorcer une fuite avant de se rappeler qu'il n'a plus vraiment ce choix en option, l'ayant épuisé les trois dernières fois qu'il a été convoqué ici en battant en retraite avant même de passer la porte, et également conscient que s'il s'enfuit maintenant, ça sera sûrement pour se faire escorter plus tard depuis l'une de ses salles de classe et Drago n'a vraiment pas besoin d'une humiliation publique pour accompagner l'angoisse qui lui bouffe le ventre depuis la veille.

Le petit ne peut pas empêcher le geignement apeuré qui s'échappe de sa gorge en repensant à ce qui l'attend d'ici quelques minutes et il se dépêche d'aller s'installer sur un lit pour en rabattre les rideaux et cacher les larmes qui menacent de couler sur ses joues aux yeux du monde.

Drago n'a pas trop de problème avec sa classification habituellement -il ne s'en vante pas mais ne la cache pas non plus plus que ça- mais il ne peut s'empêcher de se demander s'il aurait eu peur des aiguilles comme maintenant s'il était un alpha ou un dominateur.

Ses pensées se font interrompre par l'ouverture des rideaux et il essuie prestement ses joues alors que l'infirmière rentre dans son espace avec -horreur- un petit charriot contenant différentes seringues et plusieurs flacons posés sur un plateau.

- Alors, Drago Malfoy... commence la femme d'un air jovial qui, pour une fois, n'aide pas du tout à calmer ses nerfs.

- J'ai bien compris que tu n'étais pas le plus grand fan des piqûres, ne t'inquiète pas. Je n'ai pas oublié comment s'est passée ta première vaccination de rappel avec moi.

Des images de sa deuxième année lui reviennent en tête à ses mots et avec elles le souvenir de la peur et du goût de la bile dans le fond de sa gorge.

Elle ne s'est toujours pas retournée et Drago ne peut que l'observer piquer dans le bouchon en liège pour remplir la seringue d'une lèvre tremblante, passant déjà un bras autour de son corps pour essayer de se canaliser et de ne pas fondre en larmes. Ou du moins pas complètement, rectifie-t-il en balayant celle qui coule dans son menton d'un revers vif de sa main.

- Faut pas t'inquiéter mon grand, dit-elle en pressant doucement sur le bout plat pour faire sortir du liquide (ça veut dire qu'elle a bientôt terminé et Drago n'est pas prêt du tout, mais alors pas du tout) et il la regarde, paralysé en sentant les soubresauts qui précèdent souvent une grosse crise de pleurs parcourir son corps.

Elle continue à parler mais il a du mal à l'entendre, même s'il sait qu'elle essaie de le calmer et que ça lui ferait sûrement du bien d'écouter.

- ... et tu sais, ça fait deux semaines que je les enchaînes alors tu n'as vraiment pas de quoi t'en faire. Deux petites minutes et ça sera terminé. Tu es prêt?

Elle se retourne, seringue en main pour lui faire enfin face et l'expression sur son visage doit bien traduire l'effondrement qu'il sent en lui parce qu'elle perd immédiatement son sourire et vient s'accroupir en face de ses jambes qui dépassent du lit après avoir posé l'ustensile sur son plateau en argent.

- Allons, il ne faut pas te mettre dans un état pareil mon grand! dit-elle en prenant sa main dans la sienne pour la tapoter, provoquant un sanglot étranglé chez l'adolescent qui tente encore de se contenir du mieux qu'il peut.

-  Voilà, laisse tout sortir. C'est rien qu'une petite aiguille Drago, tu sais? Ça sera très vite terminé et tu pourras aller prendre un bon petit-déjeuner. Ça ne te fait pas envie?

Mais le cerveau du pauvre garçon est trop concentré sur la fiole vide sur laquelle il voit son nom et qui va bientôt être remplie de son sang et sa vue suffit à totalement effiler ses nerfs. Il ne peut pas s'empêcher de se replier un peu sur lui même quand il se met à pleurer pour de bon et comme il a fermé les yeux, il ne voit pas l'expression de l'infirmière quand elle passe sa main sur son bras pour le réconforter ou quand elle lui chuchote de se calmer et qu'il est en sécurité.

- Non... Je veux pas, implore le garçon. Je veux vraiment pas...

- Je ne le fais pas par plaisir mon grand, mais il le faut bien maintenant.

Ça, ça fait redoubler ses larmes.

- Mais il n'y a pas d'autre moyen?

Il la regarde enfin et si ce n'était pas pour son regard vraiment désolé, Drago n'hésiterait pas à se mettre à genoux pour supplier. Il a toujours la nausée et le goût pâteux du jeûne se fait ressentir dans sa bouche.

- J'ai bien peur que non, Drago.

Il sent de nouveau sa lèvre trembler et ses yeux s'échauffer de larmes mais elle l'interrompt.

- Tu penses que tu peux réussir à te calmer pour que je m'occupe de toi?

- Non, couine-t-il d'une petite voix sincère. Complètement dépassé et incapable de s'imaginer comment il pourrait se convaincre d'aller mieux pour se replonger dedans juste après.

- Et tu ne penses pas que ça pourrait t'aider d'avoir un gardien avec toi? Ça m'a surpris que tu viennes seul aujourd'hui, compte tenu de l'état dans lequel ça te met.

- J'ai pas de gardien, bégaie Drago entre ses larmes, commençant à sentir la régression faire doucement effet sur son corps et se raccrochant toujours à l'espoir qu'elle va abandonner s'il ne l'aide pas à trouver une solution.

Il sait que c'est puéril mais ça ne l'empêche pas de lui en vouloir, au fond de lui, quand elle continue. C'est sûrement son cerveau plus jeune qui se fait sentir plus franchement.

Si Drago n'était pas déjà en train de pleurer, mentionner tout haut qu'il n'a pas trouvé de protecteur qui veuille bien de lui serait certainement suffisant pour l'amener au bord des larmes. Madame Pomfresh a au moins la décence de ne pas le regarder avec pitié quand elle reprend.

- Je peux en appeler un si tu veux, propose-t-elle.

Même si l'idée l'horrifie un peu parce qu'il n'a pas envie que quelqu'un d'autre soit mis au courant de son aversion pour les aiguilles -l'infirmière il peut gérer, un élève il ne sait pas- la part de lui plus enfantine implore pour la présence réconfortante d'un parent et la femme en face de lui doit voir qu'il peut céder car elle ajoute.

- Les bénévoles qui viennent aider à l'infirmerie sont là de leur plein gré et veulent aider dans ce genre de situation mais ils sont avant tout sous mes directions et répondent donc également au secret médical. Ils ont mon entière confiance et je sais qu'aucune des choses qui se passent ici n'en sortent, c'est l'une de mes conditions pour permettre leur présence ici.

Drago hésite encore mais sa résistance s'effrite et il sait qu'il doit répondre rapidement et que, peu importe sa réponse, il ne repartira pas de l'infirmerie sans ses rappels de vaccins.

Et puis, est-ce que ça ne serait pas mieux d'avoir quelqu'un à qui donner la main? ajoute la voix enfantine dans sa tête.

Il cède, hoche la tête et l'infirmière sourit avant de sortir du petit espace pour aller chercher le fameux bénévole pendant que Drago se raccroche désespérément à l'image réconfortante d'une main chaude et ferme dans la sienne pour ne pas commencer à regretter sa décision.

Bien sûr, pour lui prouver immédiatement qu'il fait une erreur, il n'a le temps que de prendre une ou deux inspirations avant que l'infirmière appelle un nom qu'il aurait préféré ne jamais entendre dans ces conditions et il a soudainement l'impression que son estomac cherche à se cacher dans ses chaussettes.

- Monsieur Potter, dit-elle d'une voix beaucoup trop claire pour qu'il se trompe sur son interlocuteur. J'ai besoin de votre aide pour un petit de classe deux.

Drago a envie de refuser, d'insister pour qu'elle trouve quelqu'un d'autre parce que rien ne peut être pire que Potter et il est prêt à le faire savoir. Puis son regard se pose vers le chariot où il peut toujours voir les différentes seringues et il se tait.

Il fait confiance à Madame Pomfresh et si elle a appelé Potter malgré leurs différents, c'est bien que ça doit être le seul disponible.

Il la regarde dans l'embrasure des rideaux alors qu'elle doit expliquer la situation à Potter qu'il ne peut pas voir. Drago se dit que c'est tant mieux, qu'il n'est pas sûr de pouvoir affronter son regard maintenant. Sa panique grandissante est d'accord avec lui.

En plus il sait que je suis tout petit maintenant, chouine un peu sa conscience, comme s'il avait besoin de se rappeler qu'elle a précisé la tranche d'âge de sa classification. Il a un instant peur des répercussions que ça pourrait avoir plus tard mais la voix de la femme l'interrompt.

- ... il n'est pas totalement à l'aise pour le moment donc je pense qu'il doit avoir entre huit et six ans mais j'ai vraiment besoin qu'il se détende pour que je puisse lui faire ses soins.

Il entend un son d'approbation qui doit venir de l'adolescent et la voix de la femme est plus ferme quand elle poursuit.

- Il me semble bon de rappeler que ce n'est pas un environnement privé, que tout doit bien se passer pour le bien du patient et qu'aucune des choses qui se dit ou se passe ici ne doit en sortir, c'est clair Monsieur Potter?

- Bien sûr!

Drago entend distinctement de la surprise dans sa voix et il voit les traits de la femme se détendre et sa posture se redresser, moins menaçante.

- Parfait. Je vais m'occuper de mes autres patients et voir avec Monsieur Weasley s'il arrive mieux à supporter les phéromones des omégas, pour vous laissez le temps de vous préparez.

Drago sent ses mains devenir moites et son regard accroche de nouveau le chariot et les aiguilles.

- Très bien, dit la voix de Potter -et Drago sait qu'il sourit- avant d'ajouter, n'ayant certainement pas compris d'où venait la mise en garde de l'adulte. Vous savez, j'aime bien m'occuper des tous-petits. C'est pas un problème pour moi.

Le blond se demande s'il sera toujours aussi enthousiaste quand il sera en face de lui et il n'a pas besoin de se questionner plus longtemps parce qu'il entend l'infirmière s'éloigner, deux pas se faire dans sa direction puis il voit les rideaux s'ouvrir pour révéler l'adolescent.

Comme Drago s'est reculé dans le lit pour prendre moins de place quand il était seul, il fait complètement face à Potter quand il rentre dans la pièce et peut donc voir avec une considérable netteté le moment où il le voit et où son sourire rassurant s'évanouir pour laisser ses yeux se plisser d'hostilité quand il le reconnaît -un réflexe- puis s'écarquiller de surprise.

- Oh.

Le bruit s'échappe de la bouche de Potter dans son expiration, et bien que Drago sache que c'est complètement involontaire, il ne peut pas s'empêcher de resserrer sa prise sur ses genoux pour les coller encore plus près de son torse.

Il voit les yeux trop verts de Potter passer sur lui brièvement et il a presque envie de lui crier dessus quand il le voit reprendre son sourire rassurant, parce que même si Drago sait qu'il a l'air pitoyable avec ses yeux rouges et sa respiration humide entrecoupée de reniflements, il n'a pas envie que l'adolescent en face de lui arrive à la même conclusion.

Et c'est presque plus humiliant qu'énervant que Potter soit suffisamment touché par son état pathétique pour qu'il ait décidé que Drago ne pourrait pas supporter qu'il le traite comme il le fait d'habitude.

Drago refuse de cligner des yeux alors que le brun se tourne et ferme maladroitement les rideaux derrière lui pour leur laisser un peu d'intimité et garde le silence quand il se retourne de nouveau pour le regarder.

Le garçon sur le lit le voit piétiner et essuyer ses mains sur son pantalon et ça le rassure un peu de voir que Potter n'est pas non plus complètement à son aise. Il sait aussi qu'il a toujours été plus prompt que les autres à prendre des décisions impulsives alors ça ne le surprend pas plus que ça quand il ne laisse pas le malaise le consumer et qu'il s'approche de lui pour s'asseoir sur le lit, toujours avec ce même putain de sourire.

Il ne sait pas quoi en faire de ce sourire, et c'est terriblement perturbant pour Drago d'être le destinataire de cette expression. Ça le chamboule complètement, parce qu'il le frappe en pleine poitrine et qu'il a presque l'air sincère- et il manque presque le moment où Potter s'adresse à lui pour essayer de dissiper la tension.

- Ça a pas l'air d'aller, dit-il d'une voix trop douce, trop douce pour qu'il s'adresse à lui et Drago a presque envie de rouler des yeux et de lui envoyer que si c'est pour dire des choses pareilles, il peut garder le silence mais il ne le fait pas.

Il ne le fait pas parce que Potter a raison, qu'il ne va pas vraiment bien -s'il se fie uniquement au cataclysme qui déchiquète son ventre- et il ne trouve rien de mieux à faire que pincer ses lèvres entre elles, renforçant son mutisme, et éviter du mieux qu'il peut de regarder dans la direction du chariot ou de Potter.

Il perçoit un faible soupçon de ce qui doit être l'odeur de protecteur de Potter et il se force à détourner la tête pour ne pas être tenté de renifler pour mieux sentir ses phéromones. Il est sûr qu'il le fait exprès et ça serait trop dégradant de lui faire savoir qu'une part de lui bouillonne d'envie de se rapprocher pour s'en épancher.

- Je peux me rapprocher? insiste Potter, comme si le silence du blond n'était pas assez clair.

Et comme il ne comprend apparemment pas qu'il n'a pas du tout envie de lui parler, Drago se tourne encore un peu plus sur le côté pour essayer de lui faire passer le message, sans trop s'attarder sur l'image qu'il doit renvoyer.

Il l'entend soupirer. Tant mieux, pense-t-il. Si je passe un mauvais moment, toi aussi. Il a presque envie de lui tirer la langue ou de lui dire qu'il le déteste mais il se retient parce qu'il est encore trop grand pour ne pas se sentir stupide s'il y cédait.

- Je peux partir, tu sais?

S'il l'avait dit différemment, Drago aurait peut-être continué à l'ignorer mais son ton de voix ne lui donne pas d'autre choix que de lui faire face, parce qu'il n'a pas l'air de rentrer dans son jeu et que lorsqu'il le regarde enfin, il n'y a aucune trace de colère sur son visage.

Il y a un moment de flottement où ils ne font que se fixer et Drago en profite pour scruter son expression, voir s'il a réussi à l'irriter en l'ignorant, s'il a l'air aussi frustré et agacé que lui d'être là- mais non, hormis une légère touche de fatigue, le visage du Gryffondor est exceptionnellement neutre.

Et c'est pour ça que lorsqu'il se répète, les yeux de Drago s'agrandissent de panique parce qu'il comprend qu'il est sérieux, que ce n'est pas personnel et qu'il croit vraiment que ça serait la meilleure chose à faire. Si ce n'est pas personnel, ça veut surtout dire que Drago va devoir s'exprimer, dire qu'il crève de peur de rester ici tout seul et -pire- lui verbaliser ses besoins.

Et puisqu'il reste muet durant son épiphanie, Potter -Drago a raison, il doit bien être une sorte de saint pour avoir autant de patience- reprend de nouveau après s'être gratté le sourcil.

- Si c'est plus facile pour toi, je peux partir. Il tousse. C'est pas mon but, de rendre cette expérience plus pénible pour toi et si ma présence empire la situation, je peux partir. Je vois bien que tu refuses de me parler, je vais pas insister. Je le prendrais pas mal mais je ne vais pas m'obstiner. Tu veux que je parte?

Drago a senti toute la colère qu'il avait redirigé vers Potter s'estomper un peu plus à chacun de ses mots pour être remplacé par un mélange visqueux de honte et de la peur qui ne l'avait jamais vraiment quitté et quand, après sa question, leurs yeux se croisent de nouveau, c'est avec un peu d'effroi mais pas tant de surprise qu'il sent une larme lui échapper et fuser tout droit le long de sa joue.

Il ne sait pas lequel d'entre eux est le plus horrifié de voir qu'il se met à pleurer mais Potter semble enfin comprendre que ce n'était pas la bonne chose à dire et même s'il n'y a que deux autres larmes qui suivent la première, ça suffit à l'autre pour que ses instincts prennent le dessus. Quand le blond inspire pour essayer de se calmer, il ne peut pas ignorer la bouffée de phéromones qui rentre dans son système et qui sont tellement concentrées qu'elles le désorientent un instant.

C'est comme si ses poumons avaient été enveloppés dans un câlin et la sensation est tellement déroutante -mais pas désagréable- qu'il n'a besoin que d'expirer pour retrouver un calme relatif. La peur est toujours là, la panique aussi mais c'est comme si les phéromones l'avaient rendu assez lucide pendant quelques secondes pour chuchoter à son oreille qu'il n'est pas vraiment en danger.

Il sait qu'il devrait s'indigner que son corps réagisse aussi bien à l'odeur de Potter ou s'abhorrer pour en vouloir un peu plus mais il n'a pas tellement le temps de s'y pencher.

- ... non, non... Hey, chut, tout va bien, tout va bien... merd- Drago, bafouille encore Potter. Je peux rester là si c'est plus simple. On a même pas besoin de parler, si c'est plus facile, je reste juste là et c'est tout.

Bien qu'il ne soit plus activement en train de pleurer, Drago sent tout de même sa gorge résister hideusement et ne réussit qu'à croasser deux petits mots humides.

- Non, reste.

Il les chuchote à peine, de peur que l'autre ne soit pas vraiment sérieux et décide quand même de le laisser seul pour affronter les aiguilles mais Potter l'entend, arrête son babillage et se remet à sourire.

- D'accord, je reste.

Et Drago s'en veut de sentir une vague de soulagement le traverser, parce qu'il ne devrait jamais se sentir soulagé près de Potter.

- Madame Pomfresh t'a prévenu que tout ça resterait confidentiel, non? Si c'est ça qui t'inquiète, je peux t'assurer que ça le sera, promis.

Drago hoche la tête, à moitié convaincu qu'il dise la vérité mais n'ayant pas vraiment d'autre option que de lui faire confiance et il est récompensé par l'apparition d'une des fossettes de Potter quand son sourire s'élargit un instant.

- Ça va bien se passer. Je suis juste là pour aider.

Et c'est facile de comprendre comment autant de gens suivent Potter comme s'il était leur soleil car tout de suite, il lui parle comme si son bien être était la chose la plus importante au monde et Drago a juste envie de le croire.

- Bien, dit-il plus fermement. Je peux me rapprocher?

Le garçon acquiesce de nouveau, sentant son nez se faire chatouiller par une nouvelle effluve de son odeur. Il regarde avec curiosité l'autre adolescent quand il retire ses chaussures et manque de laisser échapper une exclamation de surprise quand il grimpe complètement sur le lit pour se mettre en tailleur devant lui.

- C'est mieux comme ça, non? Il sourit toujours avant de demander plus bas. Donne ta main, voilà.

Drago ignore les picotements dans son torses et laisse l'autre prendre sa main moite dans la sienne et regarde le pouce du Gryffondor se mettre à passer en boucle sur le dos de sa main sans comprendre ce que ça lui fait dans le ventre, juste conscient que c'est exactement ce qu'il espérait. Chaude et ferme.

Il met un peu de pression dans sa prise, pour essayer de voir ce que ça ferait de lui tenir la main et tente de cacher sa surprise quand Potter répond en resserrant ses doigts autour de lui, comme s'il comprenait ce qui le traversait.

Il ne se sent pas plus prêt à recevoir une piqûre mais il sait que ça sera plus facile à endurer comme ça et alors qu'il prend une grande respiration pour se préparer à ce que Potter appelle l'infirmière, il le surprend encore en continuant à parler.

- Ok, on progresse, dit le brun, lui faisant également prendre conscience qu'il a relâché sa prise sur ses jambes et que ses épaules expulsent leur tension seconde après seconde. Tu penses que tu peux parler ou c'est trop difficile tout de suite?

- Hm, fait-il en haussant les épaules. Ses cordes vocales n'ont apparemment pas très envie de parler aujourd'hui.

Personne ne lui avait dit que ça pouvait arriver, que c'est normal, que certains petits ont du mal à s'exprimer parfois et qu'il ne doit pas forcer et il revoit sous une nouvelle lumière les moments où il avait beau essayer et il ne pouvait pas. Potter devait le savoir, lui, parce qu'il n'a pas l'air plus étonné que ça par sa réponse et le fait qu'il ait posé la question en premier lieu le rassure, parce que ça doit vouloir dire que c'est assez courant.

- Ok, pas de soucis. C'est pas un problème pour moi en tout cas. Un autre sourire. Tu es souvent non verbal quand tu régresses?

- Un peu, dit Drago en détachant son regard des yeux verts accueillants pour regarder sa main toujours prise dans celle de l'autre et qui a le même effet sur son corps qu'une perfusion de positivité... si ça existait.

- Madame Pomfresh m'a dit que tu étais dans la tranche d'âge des deux à quatre ans, c'est juste?

- Oui, répond Drago qui sent son cœur rater un battement.

Il ne peut pas s'empêcher d'avoir peur de lui dévoiler cette partie de lui qui est si vulnérable entre de mauvaise mains, et même si Potter continue à agir comme si leur passé n'avaient pas d'impact sur son attitude et qu'il continue à le rassurer, Drago sent tout de même sa garde remonter d'un cran.

- Et quand tu régresses quand tout va bien, tu as quel âge idéalement ?

Il déglutit et bouge un peu ses doigts dans sa prise, se laissant distraire par les mouvements rassurants du pouce sur sa peau pour ne pas écouter la voix dans sa tête qui lui dit qu'il va être moqué.

- Hum... Deux ans?

Potter acquiesce comme s'il était satisfait de sa réponse et Drago s'en veut immédiatement et si fortement qu'il ne supporte la brûlure du mensonge que quelques secondes avant de reprendre la parole.

- Parfois, commence-t-il, s'interrompant seulement parce que le garçon au regard vert vif est immédiatement attentif à ses paroles. Souvent c'est un peu en dessous...

- Oh!

La surprise sur son visage le fait rougir et détourner les yeux parce que oui, il sait que c'est rare et il sait aussi que quand les gens le voient, ils ne s'imaginent pas ça.

Son égo a envie de crier sur Potter et son expression étonnée qu'il n'est pas un bébé et qu'il est stupide s'il pense qu'il est nul parce qu'il est petit mais il n'est pas sûr que ça serait une grande preuve de maturité.

- Ok!... Cool! dit le Gryffondor après un raclement de gorge. Tu penses que tu serais assez à l'aise pour descendre aussi jeune?

Le Serpentard ne s'attendait pas à cette réponse et se contente d'hausser vaguement ses épaules, surpris de ne pas s'être fait rire au nez ou parlé comme à un demeuré. Il ne faut pas s'y méprendre, Drago apprécie toujours le langage plus doux qu'on réserve aux petits quand ils régressent mais habituellement, les gens se mettent à lui parler comme à un attardé ou n'utilisent pas leurs mots sincèrement. En tout cas, les quelques élèves qui ont appris sa classification le font systématiquement pour se foutre de lui et c'est rafraîchissant de voir que l'adolescent en face de lui fait l'exception.

- Ça t'irais de commencer par viser trois ans? On peut descendre plus bas après si c'est pas suffisant.

- Ok.
Il déglutit.

- Je vois bien que tu as un peu peur tout de suite, mais il n'y a vraiment pas de raison. Tu peux me dire ce qui te fait peur?

Lui qui commençait un peu à oublier la présence du chariot, c'est comme si ses mots l'avaient ramené dans ce pan de la réalité. Ses yeux s'y ruent immédiatement et il sent sa lèvre se mettre à tressauter.

- Hey, interrompt la voix du garçon, le rappelant vers lui. Tout va bien, tout va bien Drago.

- J'ai peur, prononce Drago du mieux qu'il peut, parce que c'est important de montrer à Potter qu'il veut coopérer, même s'il ne veut pas parler et même s'il sent son visage faire une grimace qui ramène son envie de pleurer.

- Je vois bien ça, et c'est très courageux d'essayer quand même.

Son parfum se fait plus présent dans la pièce et le ventre de Drago se réchauffe sous le compliment.

- Dis-moi avec tes mots ou montre-moi avec ton doigt, qu'est-ce qui te fait peur?

Sans hésiter, sa main pointe le petit chariot qui soutient toujours le plateau d'argent. Potter se tourne deux secondes dans cette direction avant de revenir vers lui.

- Tu as peur des seringues?

- Moui, couine-t-il d'une petite voix qui balance entre l'embarra et les larmes.

Il a peur que Potter fasse comme si ce n'était rien et en rigole -parce qu'il est conscient que c'est un peu ridicule de se mettre dans des états pareils pour si peu-, qu'il passe ça en dérision comme l'ont fait ses amis quand il leur a expliqué pourquoi il n'était pas encore allé à l'infirmerie pour faire ses rappels mais l'adolescent reste très sérieux quand il reprend la parole.

- Je vois. Moi aussi j'avais peur des piqûres quand j'étais petit, je comprend.

- Je veux pas, dit-il, n'ayant toujours pas abandonné l'idée de pouvoir y échapper et Potter semblant assez réceptif à ce qui lui arrive pour potentiellement accepter.

- Je sais bien que tu ne veux pas mais tout va bien se passer et je te promets que je reste avec toi du début à la fin.

Sa panique s'efface un peu à ces mots et ses yeux retournent vers leurs mains entremêlées. C'est vrai, pense-t-il, je vais pas être tout seul.

- Et tu sais quoi? dit Potter pour qu'il le regarde. Si tu es sage et que tu continues à être aussi courageux, j'aurais même une petite récompense pour toi.

Drago sent l'anticipation grimper en lui comme une flèche à la mention d'un cadeau -il adore les cadeaux- et il tire un peu sur sa main d'excitation.

- C'est quoi?

- Une petite surprise, rit-il. Tu verras bien quand ça sera fait, pas vrai?

Drago acquiesce. Les conditions du Gryffondor sont vraiment trop simples à suivre et il va lui montrer qu'il est le plus fort à être sage. Et il peut être courageux, c'est sûr.

Drago sent son nez couler un peu et renifle, poussant Potter à lâcher sa main et à quitter la petite cabine pour revenir avec ce qu'il reconnaît comme étant son sac de cours.
Il reprend sa place sur le lit, juste en face de lui, et sort un mouchoir en papier d'un petit sachet.

Drago ne pense pas que ça soit vraiment nécessaire parce qu'il a reniflé une deuxième fois et qu'il a passé sa langue sur la goutte salée qui avait coulé sur sa bouche mais il dit quand même merci. Il est très sage.

- Tu veux de l'aide ou tu peux le faire?

- Je fais.

Potter laisse sa main reposer sur l'un de ses genoux toujours relevé pendant qu'il se mouche, et continue ses mouvements circulaires, sûrement pour l'aider à rester ancré et atténuer la tempête qui remue en lui depuis son réveil. Dans tous les cas, le blond ne s'en plaint pas.

- Je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer autre chose, ajoute Potter une fois qu'il a jeté le mouchoir dans la corbeille. Ça m'a surpris qu'un petit de ton âge n'ait pas de doudou.

Drago hausse les épaules comme si ce n'était qu'un détail. C'est sa chance de lui prouver qu'il est courageux et il a un peu envie de lui montrer qu'il n'est pas juste un petit qui ne fait que pleurer en continue et espère qu'il ne voit pas qu'il serre ses bras contre lui depuis qu'il est arrivé à l'infirmerie.

Comme il ne répond pas, Potter insiste.

- Drago, est-ce que tu as un doudou?

- Dans mon sac, répond-il finalement comme le brun continue d'attendre qu'il parle et qu'il ne veut pas l'agacer.

- Tu ne le veux pas avec toi?

Drago se sent un peu stupide quand il hoche la tête, et il regarde l'autre se pencher vers le bord pour ramasser son sac qui a été abandonné au sol quand il est rentré dans l'alcôve et fouiller dedans à la recherche de la peluche.

Il se sent rougir, traversé par la pensée que Potter pourrait tomber sur une ou deux choses humiliantes dans son sac mais il se dit qu'il ne doit pas les avoir vu parce qu'il ne dit rien. Il sait que Potter a mauvaise vue mais il ne se sent pas moins malin d'avoir si bien caché les langes dans son sac qu'il ne les a pas remarqué. Il garde tout de même un œil aiguisé sur lui, prêt à bondir sur une excuse si la situation le veut et manque de nouveau d'ignorer l'autre quand il parle.

- Pourquoi tu ne l'as pas pris avec toi alors?

Il n'a pas envie d'être ridicule devant Potter et même si ça devient de plus en plus difficile de réussir à impressionner l'adolescent, il persiste en haussant les épaules de la même façon que plus tôt dans une fausse nonchalance.

Mais Potter n'a pas l'air impressionné et à la place de lui faire un compliment comme il l'espérait, il le regarde, attendant sa réponse.

- Je suis pas un bébé.

- Les grands aussi ont des doudous, réplique Potter tellement simplement qu'il le fait se sentir un peu stupide avant de finalement extirper le lapin blanc en peluche de son sac qu'il repose au sol.

Sa simple vue lui donne envie de le serrer très très fort contre lui et il sent ses doigts le démanger, mais il essaie vraiment de se retenir pour avoir l'air cool, se contentant de remuer sur place.

Ça ne sert pas à grand chose et quand il croise son regard, il voit à la lueur dans ses yeux que Potter a tout compris et il récupère le doudou qu'il lui tend en détournant la tête, conscient que le ridicule est en train de faire brûler ses joues.

- C'est les meilleurs les doudous, dit Potter. Je suis presque sûr qu'ils ont leurs propres super-pouvoirs. Ils sont super forts pour calmer les gros chagrins et sont toujours prêts à faire des câlins. Alors il faut pas avoir peur de le prendre avec toi quand ça ne va pas trop, ok?

Il l'entend rire gentiment.

- Ça va déjà un peu mieux, pas vrai?

Drago hoche la tête, son embarra déjà bien loin, trop occupé à serrer la peluche familière dans ses bras et à enfouir son nez dans la fourrure douce qui sent le réconfort. Potter avait raison, c'est chouette d'avoir un doudou et s'il y a une façon de lui montrer qu'il est sage et un pupille intéressant, ce n'est pas en snobant son doudou qu'il aime tant.

- Est-ce qu'il a un prénom ton lapin? demande l'adolescent en se penchant vers lui, profitant de leur proximité pour recommencer à caresser l'une de ses jambes distraitement.

- Nan, dit Drago, la voix à moitié étouffée par la tête de la peluche.

- Ah ouais? insiste Potter d'une voix presque trop surprise et qui lui tire un sourire. Tu l'appelles comment toi? Monsieur lapin? Super doudou?

- Non! s'exclame Drago en réprimant mal le rire dans sa voix. C'est juste doudou! T'es trop nul pour les noms de doudous!

- Tu peux parler, il a même pas de nom le tiens! réplique Potter, ce qui le fait partir dans un éclat de rire involontaire.

- Et puis je te ferais savoir que mon doudou il a un super prénom.

- Et c'est quoi? demande Drago, soudainement très attentif.

Il aimerait bien voir le doudou de Potter et s'il sent comme lui, il est sûr que ça serait chouette de dormir avec ou de lui faire un câlin. Il aimerait bien lui faire un câlin.

- Ne mets pas ton pouce dans la bouche, coupe Potter, lui retirant le doigt qu'il n'avait pas réalisé être en train de téter.

Il a envie de protester et la frustration grimpe vite dans sa poitrine mais l'autre doit le voir parce qu'il sourit gentiment quand il parle.

- Attend, Drago. Tu as le droit mais c'est sale les doigts. Je vais te donner quelque chose.

Il regarde le brun fouiller dans ses affaires avant d'en sortir deux tétines qu'il présente dans ses mains.

- Tu peux en prendre une pour toi, laquelle tu veux?

- Chouette, laisse-t-il échapper avant de se concentrer sur les deux objets dans ses mains pour décider laquelle lui plaît le plus.

Il se décide finalement sur celle d'un violet pâle parce qu'il y a une étoile sur le devant et laisse Potter l'attacher à l'une des oreilles tombantes de son lapin avant de la glisser d'un coup agile dans sa bouche, lui tirant un nouveau bruit satisfait.

- Alors, qu'est-ce que je racontais?

- 'oudou.

- Ah oui, mon nounours. Et bien il s'appelle cacao, parce qu'il est tout marron.

- C'est nul, articule Drago autour de la tétine.

- Ah ouais, tu trouves?! dit Potter qui ne s'en offusque pas du tout et en profite même pour l'attaquer à la taille avec des chatouilles, désintégrant les dernières résistances qu'il avait pour le plonger complètement dans l'état d'esprit d'un tout-petit.

Il laisse sortir un éclat de rire, entraînant Potter avec lui, et quand le Gryffondor arrête, Drago a juste envie qu'il recommence.

Ça doit se lire plus que clairement sur son visage parce que le brun bouge ses doigts comme pour repartir à l'attaque, tirant un autre gloussement de sa gorge, et quand il lui plonge dessus pour une bataille de chatouilles, il laisse son rire qu'il avait gardé en suspend exploser avec un cri.

Le petit réplique, essayant d'atteindre la taille du garçon alors que son corps se tord sous les assauts mais il rit tellement qu'il a du mal à respirer et à bouger ses bras alors il subit sa crise de fou rire plus qu'autre chose.

- Allez, allez, ça suffit, dit la voix un peu essoufflée de Potter après un moment avant de l'aider à revenir à la verticale, le blond s'étant effondré sur le côté durant leur jeu.

- Nan, encore! proteste Drago, des restes de rire dans sa voix et toujours attentif au moindre mouvement de l'adolescent pour essayer de prendre sa revanche.

- Peut-être plus tard, propose l'autre d'une voix douce mais qui ne laisse pas de place à la protestation.

- Oh.

Il est déçu mais les mains de Potter passent gentiment sur sa taille de haut en bas et Drago trouve que c'est un réconfort suffisant pour ne pas insister.

- Toc toc! dit la voix de l'infirmière avant de passer les rideaux, assessant la situation d'un regard avant de rentrer complètement dans le petit espace que Potter avait rendu confortable pour s'y installer.

Dès qu'il entend le son de sa voix, un grand froid parcourt son corps, le sortant presque instantanément de l'insouciance dans laquelle le brun l'avait amadoué.
La panique revient, chasse sa légèreté comme une douche froide et Drago se raccroche désespérément à son doudou, incapable de détourner le regard de la femme qui reprend ses seringues en main comme si de rien n'était.

- Je pense qu'on est prêt à y aller, qu'est-ce que tu en dis Drago? Harry? demande-t-elle avec un sourire, inconsciente que le tout-petit sent son torse fabriquer une petite bombe de peur qui grossit et grossit et n'attend qu'une étincelle pour éclater.

Il n'arrive pas à déglutir et ses yeux le brûlent.

- Je pense que ça va aller, répond l'adolescent sur le même ton faussement joyeux juste pour se faire interrompre par un geignement terrifié.

- Hey, Drago- commence Potter qui lui prend la main pour essayer de le calmer, sans grand succès car le geignement ne s'interrompt pas et devient juste plus fort avant de laisser place à de gros sanglots quand le blond voit Madame Pomfresh s'approcher et tirer le chariot à côté de lui.

- Non... Pas ça, non... Je veux pas, maman-

Drago est plus ou moins conscient que Potter continue à essayer de l'apaiser mais trop pris dans sa détresse, le petit n'entend rien d'autre que ses pleurs, sa peluche serrée entre ses doigts si fortement qu'ils lui font mal.

- Je veux pas-

- Drago...

- J'ai peur! Je veux pas!

- Drago, calme-toi chaton-

- Allez, tout va bien. Ça sera terminé avant que tu ne t'en rendes compte.

- NON! hurle-t-il avec désespoir quand elle remonte facilement sa manche au dessus de son coude. Je veux pas! J'ai peur!

Les phéromones ont beau chanter à chacun de ses sens, il est trop pris dans sa panique pour les écouter et la vision de l'aiguille posée à sa gauche ne fait qu'empirer le tout.

Il respire tellement fort qu'il n'est même pas sûr que l'air rentre vraiment dans ses poumons, et il commence même à avoir envie de vomir mais il continue de supplier, tenant les doigts du brun tellement serrés dans sa prise qu'il doit lui faire mal.

- NON! NON!

Affolé, il ne peut que regarder avec horreur la femme prendre le garrot et commencer à le passer autour de son bras.

- NON! hurle-t-il de toute la capacité de ses poumons.

- Drago, calme-toi tout va bien.

Terrorisé en sentant qu'elle serre l'élastique autour de son bras, il tente de se débattre, en vain.

- NON! MAMAN! MAMAN! HARRY! appelle-t-il à l'aide parce que maintenant il faut qu'il l'aide, ou il ne pourra plus jamais lui faire confiance.

Il a l'impression de mourrir quand l'infirmière insiste de sa voix douce qui ne comprend pas l'horreur qu'il traverse.

- On a presque fini, tu sais? Tu y es presque là-

- Ok, stop. On arrête, dit la voix calme du brun, coupant la parole à l'infirmière.

- On arrête, lui répète-t-il plus directement alors que la femme lui retire le garrot et que Drago pleure encore plus, les membres tremblants d'adrénaline.

- Mama- hoquète plusieurs fois Drago alors qu'il le soulève par les aisselles pour le placer sur le bord du lit, de l'autre côté.

Il tient toujours son doudou dans son poing fermé et tousse presque ses poumons, manquant de s'étouffer à chaque inspiration.

- Je prend juste une petite pause, l'entend-il expliquer à l'infirmière. J'arrive pas à le calmer et on est en train de foncer droit dans un mur là.

- Pas de problème, prends le temps qu'il faut.

- Viens-là toi, dit Potter qui s'active autour de lui. Je sens qu'on est à deux doigts de la catastrophe.

Il ne réagi pas trop quand Potter le prend par la taille après lui avoir retiré ses chaussures et le laisse défaire sa ceinture sans résister, n'ayant même pas assez d'énergie pour être gêné quand il voit la couche-culotte qu'il a dû prendre dans son sac qui repose sagement sur le lit et qu'il comprend la direction que vont prendre la suite des éléments.

Il le laisse lui retirer son pantalon et son sous-vêtement, complètement malléable dans ses mains de gardien parce qu'il n'a pas la force de faire autrement. Il sait aussi que c'est pour le mieux, que Potter est rapide et sait exactement ce qu'il fait et que son caleçon commençait à être humide malgré lui à cause de la peur.

Il ne lui fait aucune remarque, aucun commentaire. Harry se contente juste de lui chuchoter des petits mots d'encouragement entre deux sorts de nettoyage et passe son pouce sur sa hanche quand il peut pour le rassurer, ne prenant pas en compte qu'il n'est pas en état de se rebeller.

Trop petit pour en avoir vraiment quelque chose à faire, Drago l'observe le changer en suçant sa tétine, son lapin contre le nez alors qu'il termine de lui enfiler son lange correctement et est juste content de pouvoir s'asseoir sur le matelas quand il a terminé, aussi préoccupé par sa nudité qu'un enfant de deux ans peut l'être, c'est à dire pas tellement.

Malgré ses larmes qui lui cachent considérablement la vue, il le voit se placer juste en face de lui et geint quand il prend son visage dans ses mains, complètement misérable et désespéré de recevoir son réconfort.

Il ferme les yeux pour profiter des paumes chaudes sur ses joues tant qu'elles sont là, essayant d'ignorer que ça ne va pas durer pour ne pas en rajouter parce que son visage est déjà couvert de larmes et de morve.

- Hey, reste avec moi mon cœur, chuchote Potter pour qu'il ouvre les yeux, et l'accueillant avec un sourire quand il coopère. C'est ça bébé. Le pouce passe contre sa joue. Je vois bien que ça te fait très peur, mais ça va aller.

Il sent les larmes remonter dans sa gorge mais le Gryffondor le fait taire.

- Non, on va reprendre et ça va bien se passer. Tu me fais confiance?

Il hoche la tête.

- Alors tout va bien se passer.

Il se sent frissonner, parce qu'il a transpiré et que maintenant il a froid mais ça n'a pas l'air de déranger l'autre qui passe ses mains sous ses aisselles et le pose sur ses cuisses une fois qu'il s'est remis en tailleur sur le lit.

- Je veux pas, marmonne Drago alors qu'Harry le plaque tout contre lui en faisant attention à ce qu'il passe bien ses cuisses de chaque côté de sa taille sans tordre ses jambes.

- Je sais mon chat, mais on a pas trop le choix, dit-il presque contre son oreille, le laissant s'affaler de tout son poids contre son torse.

Drago essaie d'éclipser tout ce qui se passe autour de lui parce que c'est trop inquiétant et le brun l'invite à continuer à se reposer sur lui quand il glisse son nez à la conjoncture de son cou et de son épaule pour se rapprocher de la petite glande et pouvoir respirer plus facilement les phéromones qu'il essaie de lui faire parvenir.

Il croise ses chevilles derrière le dos du garçon, laisse sa peluche se faire écraser entre eux avec la sucette qu'il a de nouveau fait tomber de sa bouche et ferme les yeux pour essayer d'oublier qu'il est dans l'infirmerie. Peut-être que s'il les ferme assez fort, il disparaîtra.

Il sent Potter passer sa cape autour de sa taille pour couvrir ses jambes nues et passer encore et encore un bras dans son dos un peu moite, l'encourageant à s'effondrer un peu plus, et un peu plus... et un peu plus...

- On va commencer tout doucement bébé, ok? l'entend-il dire distinctement dans son oreille gauche, et le garçon doit sentir son corps se tendre puisque ses narines reçoivent une nouvelle vague d'odeur rassurante dans la seconde.

Il couine un peu quand il sent une main -celle de Madame Pomfresh- prendre son bras gauche pour le poser sur l'épaule droite de l'adolescent et même s'il se sent trembler, il ne se débat pas parce que lui aussi est épuisé de cette matinée et il espère du plus profond de son être qu'il pourra vite la mettre derrière lui.

- Tu t'en sors tellement bien, chuchote Potter au creux de son oreille alors qu'elle lui remet le garrot et lui demande de serrer le poing. Je suis très fier de toi.

Drago sent le torse du garçon vibrer quand il lui parle et il cache ses yeux contre la peau chaude de son cou dans une tentative de se rapprocher encore de lui, sans comprendre comment il est sensé lui dire qu'il a besoin de lui, juste un peu plus.

Il serre ses cuisses brièvement pour mieux sentir le corps auquel il se raccroche et pouvoir mieux s'y ancrer et en retour, il sent une main l'attraper sous ses fesses et le rapprocher jusqu'à ce que le devant de sa couche soit complètement collé au bas-ventre de l'adolescent.

Malgré les repositionnements qu'il lui fait faire, Drago continue de respirer profondément comme sa maman lui a expliqué quand il a peur et alors que sa respiration s'emballe un peu parce qu'il sent l'infirmière lui maintenir le poignet pour s'apprêter à piquer, il se fait surprendre par le brun qui embrasse sa tempe.

Déstabilisé, il manque d'ouvrir les yeux parce qu'il a beau -vraiment trop- apprécier ce geste d'affection, ce n'est pas ce qu'on attend normalement des gardiens qui n'ont pas de relation avec un pupille, d'un protecteur en service et c'est encore plus inattendue qu'il lui fasse un bisou, comme s'il n'était pas Drago Malfoy et lui Harry Potter.

Mais l'adolescent recommence, une fois, deux fois et pose même un baiser dans ses cheveux et sur sa pommette et Drago se sent spécial. Il a envie qu'il n'arrête jamais, qu'il soit le seul à recevoir ses bisous pour montrer à tout le monde qu'il est le préféré de quelqu'un et que Harry reste avec lui, qu'il soit fier de lui. Il veut que Harry soit son gardien, son papa.

Il se risque à entrouvrir un œil, pour apercevoir un bout de sa mâchoire, son oreille et sa gorge qu'il voit déglutir et quand Drago se prépare enfin à dire quelque chose, la sensation foudroyante d'une aiguille qui pénètre sa peau lui coupe la parole.

- HARRY! panique-t-il.

- Tout va bien, murmure la voix chaude.

- Aïe... chouine quand même le blond, ce qui lui permet de recevoir deux autres baisers très brefs sur la tête.

Ça ne lui fait même plus vraiment mal, juste peur parce que l'aiguille est toujours en lui et qu'elle aspire son sang mais il a à peine le temps de se formuler cette pensée que la femme prend la parole.

- Voilà pour la prise de sang! T'as fait le plus dur Drago.

Il couine en s'agrippant au pull rouge foncé de l'autre.

Elle retire le garrot pour aller le mettre sur son autre bras et alors qu'elle le positionne sur l'épaule d'Harry, Drago sent une pression désagréable sur l'endroit fraîchement piqué et couine d'inconfort.

- C'est rien pitchoune, dit Harry -le coupable, réalise Drago en ouvrant les yeux pour voir ce qu'il se passe- qui presse une petite boule de coton contre le creux de son coude.

- Arrête! proteste Drago, parce que c'est vraiment pas juste qu'il appuie là où ça fait mal alors qu'il pensait juste recevoir des piqûres.

- C'est pour éviter que tu aies un bleu après, calme-toi Drago.

Il ne peut pas vraiment lui dire de le lâcher parce qu'il n'a vraiment pas envie d'avoir un bleu et qu'il voudrait qu'il continue de lui faire un câlin pour toujours mais il geint quand même pour la forme avant de se remettre contre son cou, cette fois-ci de l'autre côté pour ne pas voir ce qu'elle lui fait au bras.

- Harry, je peux plus... pleure Drago quand elle pique son bras droit pour la première fois.

- C'est presque fini, chaton.

Il le sent retirer la pression et quand il regarde son bras gauche avant de le passer autour d'Harry, il a un pansement bleu vif dans le creux du coude.

- J'ai des petits autocollants pour les décorer si tu veux, dit Harry -papa- en lui souriant.

Il sait qu'il sourit, ça s'entend dans sa voix. Ça le fait sourire contre sa peau.

- Comme quoi-AH!

- C'est la dernière, dit l'infirmière.

- Harry... supplie Drago qui essaie vraiment très très fort d'être courageux.

- Oui?

- Câlin papa, s'il te plaît.

Il sent les deux bras autour de lui l'envelopper un peu plus, comme dans un cocon et Drago a l'impression d'être protégé du monde entier.

Drago ferme les yeux très fort, compte jusqu'à dix deux fois, essaie d'ignorer la sensation du coton sur sa peau puis du pansement, remue un peu sur place, n'ignore pas les deux autres bisous qu'il reçoit dans les cheveux et commence à dire quatre dans sa tête quand elle reprend la parole.

- Et voilà! Terminé, chantonne Madame Pomfresh d'un ton si triomphant qu'on dirait qu'elle a gagné la coupe du monde de Quiddich à elle toute seule.

- Bravo bébé! dit Harry alors que la femme range ses affaires. C'est bien, Drago. C'est fini, c'est fini, allez ne pleure pas...

Mais Drago n'est pas très fort pour gérer ses émotions et la seule façon qu'il trouve d'évacuer tout son stress, c'est en le laissant dévaler ses joues.

- Tout va bien, pitchoune. C'est terminé. Je suis si fier de toi, tu sais?

- Hum, hum... essaie de répondre Drago qui réalise que sa gorge est trop prise par ses larmes pour réussir à parler et il pose ses yeux contre l'épaule en face de lui et se concentre sur la main qui passe lentement dans ses cheveux en espérant qu'elles vont toutes vite couler.

Harry les balance doucement de gauche à droite en continuant de lui murmurer des mots doux, jusqu'à ce que ses larmes s'arrêtent toutes seules, que sa respiration arrête de trembler et ne se stoppant que parce que l'infirmière lui parle.

- Je vous laisse l'accès à la salle bleue mais je vous fait confiance pour tout remettre en place quand vous la quittez, on est d'accord Monsieur Potter?

- Oui, pas de soucis.

- Au revoir Drago, dit-elle en lui faisant un sourire quand il tourne la tête dans sa direction, toujours appuyé sur l'autre.

Ils restent immobiles durant quelques longues secondes après son départ, le blond fermant les yeux pour se laisser bercer par la respiration du brun, sentant sa cage thoracique se soulever en rythme contre lui. Il est épuisé.

- Comment tu te sens, bébé?

- Hm.

La question est désagréable, parce qu'elle le force à se concentrer sur son corps et ce qu'il ressent et quand il fait abstraction de la sensation des pansements dans l'intérieur de ses coudes, il se rend compte qu'une pression familière et désagréable s'exerce sur son bas-ventre et il se met à gigoter.

- Quelque chose te dérange? questionne gentiment Harry qui ne doit pas réaliser ce que sa question vient de lui faire.

Drago geint pour unique réponse, maintenant frustré de ne pas réussir à retrouver la détente qu'il frôlait, trop conscient de la pression, peu importe la position qu'il prend.

- Ah, je vois. Tu as encore besoin de faire pipi?

Là, il se fige. Parce que Harry a dit encore, comme s'il savait déjà.

Drago se demande quand est-ce qu'il s'en est rendu compte, si tout allait bien et que ses mouvements l'ont trahi. C'est vrai qu'il n'a pas fait particulièrement attention à ça durant les dix dernières minutes et il est presque sûr que sa vessie lui a fait faux-bon quand elle lui a mis le garrot mais il ne pensait pas qu'il ferait la remarque à voix haute non plus.

Il tortille sur place et son esprit se fixe malgré lui sur l'humidité entre ses jambes qu'il ne peut pas tellement fuir dans cette position. Et comme Harry le maintient toujours contre lui sans qu'il puisse refermer les jambes, il sent très clairement que ça risque de recommencer et qu'il ne va pas pouvoir se retenir bien longtemps.

Il essaie de se faire plus petit dans la prise de l'autre, pas tellement sûr de la réaction qu'il va recevoir et très conscient malgré son âge que c'est généralement cette partie de la régression qui pose le plus de problèmes.

- J'ai pas fait exprès de faire pipi, dit-il de la plus petite voix qu'il a dans l'espoir de ne pas trop se faire punir.

Si seulement il avait su se retenir. Il aurait peut-être pu avoir sa surprise... se lamente Drago.

- Je sais, et exprès ou pas c'est pas grave. C'est fait pour ça.

- Pardon, ...' pas voulu, insiste Drago en se cramponnant au pull rouge, évitant à tout prix de croiser son regard et inquiet de laisser sortir ce qu'il sent monter en lui à une vitesse assez effrayante.

Et si jamais il changeait d'avis? Il couine, incapable d'imaginer comment il pourrait aller aux toilettes maintenant sans avoir un accident.

Ses joues sont en feu, il le sent bien et il s'agrippe de toutes ses forces à la taille de l'adolescent avec ses jambes.

- C'est pas grave, Drago! rit Harry en passant une main dans son dos. C'est rien du tout, ça arrive tout le temps. Tu ne m'as pas répondu, tu as encore besoin de faire pipi?

Drago sent sa respiration se bloquer dans son torse et la honte le traverser comme un poison bouillant. Il aurait pu répondre oui, et même s'il aurait eu du mal à le regarder dans les yeux, il s'en serait remis.

Là, Drago ne sait pas quoi lui dire, ne sait même pas s'il peut vraiment lui répondre parce que sa vessie l'a encore lâché, pile quand il lui a posé la question. Il enfonce sa tête dans le cou en face de lui encore plus fort, tentant de faire stopper sa vessie qui soupire que ça fait du bien, ou d'arrêter le jet entre ses cuisses, en vain.

Il contracte ses muscles sans que rien ne se passe, sentant son entre-jambe devenir plus chaud à la seconde et la panique qui le saisit quand il s'imagine avoir une fuite ne fait qu'accélérer le processus.

Harry a presque mal à la clavicule à cause de la force avec laquelle le blond se terre dans son cou et quand il essaie de l'en déloger, la seule réponse qu'il reçoit est un geignement affolé qui, couplé avec la rougeur des oreilles du blond, suffit à lui faire comprendre ce qu'il vient de se passer.

- J'ai posé ma question trop tard, pas vrai? demande-t-il quand même juste pour que le petit lui confirme avec un bruit de détresse assez déchirant.

- C'est rien bébé, je te l'ai déjà dit. Je vais te changer dans quelques minutes, t'inquiète pas.

- Harry... chouine la petite voix dans son cou.

- Tout va bien, je suis pas en colère.

- Je suis pas en colère Drago, répète le brun quand il ose enfin le regarder de ses yeux gris brillants et bouffis d'avoir passé la matinée baignés de larmes.

L'enfant se remet contre lui en fermant les yeux, relâchant heureusement sa prise sur son corps dans la foulée. Harry le regarde, souriant malgré lui et réajuste son doudou dans ses bras pour qu'il ait accès la tétine violette quand il le voit commencer à mâchouiller son pull.

Il embrasse le haut de sa tête, s'autorisant à lui faire un câlin parce que le petit en mérite un qui ne va pas servir à l'amener vers quelque chose de désagréable, et juste parce qu'il a deux ans et que c'est une raison suffisante.

Il regarde la compote et la madeleine que l'infirmière a laissé à portée de main quand le rideau s'ouvre et Harry tourne la tête pour voir son meilleur ami dans l'embrasure.

- Ron! siffle-t-il pour ne pas perturber l'enfant. Je suis en consultation, tu peux pas rester là.

- Ok, pardon! Ça fait une éternité que t'es là dedans, je voulais juste vérifier que tout allait bien.

Harry sait qu'il n'a rien entendu de ce qu'il s'est passé ici -merci aux rideaux qui sont charmés pour ne pas laisser passer le moindre bruit- et même s'il comprend son inquiétude, il sait aussi que tout de suite, il doit protéger Drago et il sait que l'alpha en face de lui a déjà reconnu la tête blonde somnolente dans ses bras.

- Sors! chuchote véhément Harry.

Il s'exécute et le gardien se retient de soupirer, essayant de conserver son calme pour ne pas affoler le petit qui respire toujours ses phéromones.

En faisant attention à ne pas faire tomber le blond, Harry se penche pour récupérer le biscuit, la compote et la cuillère et se fait happer par deux yeux gris perçants une fois qu'il s'est redressé et qu'il l'a ouverte.

- Tu as faim, pitchoune?

Comme il ne fait pas vraiment confiance à ses capacités motrices, c'est lui qui s'occupe de remplir la cuillère et de la porter à sa bouche quand il hoche la tête. Drago n'a pas l'air de vouloir protester non plus, ouvrant sagement la bouche pour manger ce qu'il lui présente à chaque fois.

- Hmm.

- C'est bon, hein?

Son deuxième hochement de tête le prend par surprise et il manque de lui en mettre partout sur le visage.

- Doucement chaton, dit-il avec un rire.

Au final, le petit en ressort rassasié et Harry rassuré sur ses capacités à nourrir un pupille, le blond ne s'étant retrouvé qu'une fois avec de la compote sur le visage. Rien qu'un coup de langue ne peut pas régler, comme il lui prouve quelques secondes plus tard.

Comme il voit bien que Drago utilise toujours son torse pour reposer sa tête et que ses yeux se ferment un peu trop longtemps entre chaque battement de cil, Harry ne traîne pas pour le changer et une fois qu'il lui a mis un autre lange, il récupère leurs deux sacs qu'il passe en bandoulière puis Drago qu'il a couvert de sa cape d'école et qu'il soutient par le dessous des cuisses pour l'amener dans le fond de l'infirmerie.

Drago ne comprend pas vraiment pourquoi la salle bleue porte ce nom quand Harry en ouvre la porte et le pose au sol sur ses pieds.

Certes, les rideaux qui filtrent la lumière des fenêtres sont bleus et la grande salle de bain qu'il peut voir commencer à sa gauche est principalement faite de carrelage bleu pâle mais autrement, il ne comprend pas ce nom.

Cette pièce a l'air faite pour accueillir plusieurs petits à la fois et est certainement plus faite pour eux plus que pour les autres, pense Drago quand il constate que la plupart des meubles sont assez bas et qu'il n'y a pas de chaise autour des deux grandes tables rondes qu'il peut voir, juste des coussins. Il sait qu'il pourrait y être à l'aise en restant à genoux.

Il peut voir des étagères remplies de livres d'images contre un des murs et un tourne disque dans un coin mais ce qui lui fait vraiment envie, c'est de s'allonger dans ce qu'il est sûr de reconnaître comme un espace pour la sieste.

Il fait trois pas dans la pièce, se retournant brièvement vers le gardien qui pose leurs affaires sur un banc pour vérifier qu'il est toujours là et quand Drago est sûr que Harry ne s'en va pas, il se met en tête d'aller explorer les environs.

Son entreprise est vite avortée. Il n'a que le temps de regarder les mobiles en forme d'avions en papier qui pendent du plafond et de fouiller dans l'une des grandes caisses pleine de jouets pour voir si quelque chose pique son intérêt -ce n'est pas le cas, il n'y a que des choses pour les petits de classe une dans celle-ci et même dans ses meilleurs jours, Drago est trop grand pour s'en contenter- qu'il se fait appeler par Harry -papa, pense-t-il avec un sourire- qui s'est installé à une table avec ce qui ressemble à des feuilles de papier.

Drago repose la caisse où il l'a trouvé et rejoint le gardien en ramassant son doudou qu'il avait posé au sol, ses chaussettes faisant un bruit étouffé qui va bien avec le calme ambiant.

- C'est quoi? demande Drago en s'appuyant sur la table de tout son poids pour se pencher et mieux voir les petits dessins en couleur sur le papier.

- Mes autocollants pour décorer tes pansements.

- Y'en a tout plein!

Drago regarde les petits motifs avec une attention nouvelle, avide de tous les observer pour choisir lesquels il pourrait coller sur ses bobos.

Trop concentré, il ne réalise pas que l'adolescent s'est glissé derrière lui jusqu'à ce qu'il lui fasse passer sa chemise par dessus la tête.

- Je vais te donner des habits plus confortables, l'informe papa après lui avoir lancé un petit sort de nettoyage qui n'est pas mal venue après avoir été trempé de sueur durant une bonne partie des deux dernières heures.

- Pourquoi?

Drago se tord un peu sur lui même pour regarder l'autre dans les yeux sans avoir à se déplacer et Harry lui répond après avoir passé sa main dans ses cheveux affectueusement.

- Parce que je veux que tu fasses une petite sieste après avoir choisi tes autocollants pour être sûr de pouvoir bien continuer ta journée.

- Ok.

Il se fiche un peu de ce qu'il va se passer ensuite, bien plus intéressé par ce qui se passe sous son nez.

Harry le laisse examiner les images dans la pièce tamisée, l'interrompant seulement pour l'aider à mettre un bas de survêtement assez ample et un haut de la même couleur qui doit aller avec et où il peut voir l'illustration d'un bonhomme blond avec un petit renard sur la lune. Il ne reconnaît pas le dessin mais il le trouve trop chouette et presse le brun pour qu'il l'aide à l'enfiler.

- Tu as choisis?

- Ouais! dit Drago avec énergie avant de remonter ses manches le plus haut possible pour dévoiler ses bras et les trois pansements colorés.

- Montre-moi lesquels tu veux.

- Lui!

Il pointe une petite fleur avec des pétales de toutes les couleurs et Harry la prend délicatement entre ses doigts.

- Où est-ce que je la colle? demande Harry.

Drago pointe le pansement vert sur son bras droit et est content de voir que ça ne fait pas mal quand son papa appuie un peu dessus pour la faire adhérer.

- Ensuite?

- Le bonhomme qui sourit sur le orange.

Le Gryffondor s'exécute et quand Drago pousse un cri de joie, il se met à rire.

- Et le dernier?

- Je pourrais le mettre tout seul?

- Oui, si tu veux.

- Le cœur, s'il te plaît.

Il le commencer à en décoller un mais en voyant qu'il se trompe, il s'exclame.

- Non! Celui avec les brillants.

- Oups, dit simplement le plus grand, le rassurant un peu.

Il avait peur qu'il ne le laisse pas changer après l'avoir décollé mais il ne comprend pas non plus qui pourrait choisir un cœur tout nul quand on peut avoir un cœur avec des paillettes qui brillent.

Harry lui tend le petit cœur pailleté et Drago fait très attention quand il le prend dans ses doigts et le presse délicatement sur le pansement bleu, fier de lui.

- Super chaton! T'es tout beau comme ça.

- Ouais, dit-il avec un sourire qui lui mange le visage.

- Tu vas aller faire un bon dodo maintenant?

Drago se fait grossièrement interrompre par un bâillement et toute envie de rébellion qui aurait pu monter en lui fond comme neige au soleil.

Il récupère docilement son doudou et prend la main que Harry lui tend pour se relever pour enfin se diriger vers les tapis de sieste.

Harry l'aide à prendre un oreiller et une couverture -celle qui a des étoiles dessus- dans une des étagères et il les pose sur le sol sans grande cérémonie avant de s'y coucher lui aussi.

Comme Harry a éteint la lumière, Drago peut voir avec plus de clarté les étoiles lumineuses qui sont collées au plafond et il les observe un moment dans le silence de la pièce avant de se mettre sur le côté, face à l'adolescent.

Comme il n'a pas voulu qu'il lui raconte une histoire, Harry s'est mis à quelques mètres du petit, affalé dans un pouf très confortable qui fait au moins deux fois sa taille et il sourit au blond quand il croise son regard par dessus son bras.

« Dors » mime-t-il avec sa bouche pour qu'il arrête de se concentrer sur lui, provoquant un rire chez l'enfant qui cache son visage derrière son lapin.

Comme Harry n'a pas envie de transformer ce moment de détente en jeu de regards, il attire jusqu'à lui un livre de cours depuis son sac. Il n'a pas du tout l'intention de le lire mais il l'ouvre quand même avec l'espoir que ça va dissuader le tout-petit de continuer à le fixer quand il verra qu'il n'a pas de réaction de sa part.

Ça fonctionne assez bien et quand il jette un coup d'œil furtif dans sa direction, il peut voir ses yeux qui contemplent les nouvelles gommettes sur ses bras se fermer lentement et sa respiration s'alourdir.

Il pose définitivement le livre quand il voit sa prise sur sa tétine se relâcher et l'observe en silence grâce au peu de lumière qui rentre par les fenêtres couvertes, le cœur plus mou qu'un chamallow fondu.

Il observe la silhouette étendue sur les tatamis épais respirer profondément, les joues douloureuses de trop sourire mais sans pour autant réussir à s'arrêter de fixer son poing fermé qui se cramponne à la couverture, à son visage complètement plaqué contre le lapin blanc ou au mouvement sporadique de sa bouche qui aspire la sucette pour téter avec le même petit bruit adorable à chaque fois.

Il ne compte pas particulièrement les minutes mais il doit bien s'en passer dix où l'enfant dort avant que la porte ne s'ouvre délicatement, tout de même trop bruyante quand il n'y avait que le calme avant elle.

Harry tourne la tête pour voir rentrer Ron qui retire ses chaussures après avoir refermé le passage derrière lui puis il se reconcentre sur l'enfant pour voir si ça a suffit à le réveiller.

Drago dort toujours, imperturbable.

- T'as pas le droit d'être ici, dit Harry quand l'alpha se met à côté de lui sur le pouf, s'avançant doucement à quatre pattes jusqu'à être à sa hauteur.

- Relax, je resterai pas longtemps.

- Je suis sérieux Ron. Qu'est-ce que je dis si on a un petit isolé ici qui réagi mal à cause de ton odeur?

- J'ai mis des patchs et tu sais bien que la pièce va être neutralisée après votre passage.

Harry le sait, c'est même lui qui va devoir installer les diffuseurs d'ici quelques minutes. Il sait aussi que ce n'est pas la seule raison qui fait que la présence de son meilleure ami le dérange ici.

- Je voulais juste voir la salle bleue, chuchote Ron. Mec, c'est tellement mieux que notre salle rouge. Je me sens déjà complètement détendu.

- Sans blague, dit-il en roulant des yeux. J'y mettrai pas les pieds personnellement.

- T'fais comme si on la nettoyait jamais mais je te rappelle qu'on a les mêmes mesures sanitaires que vous.

- Ouais mais quand même, dit Harry. Vos odeurs tiennent bien à la peau et j'aurais trop peur de devoir m'occuper d'un petit en gardant une odeur de rut.

- Elles servent pas qu'à ça et tu le sais, Harry.

- Ça avance au fait? demande le brun en repensant à ce qu'avait dit l'infirmière plus tôt dans le matin.

Ron soupire et il sait déjà que la réponse est négative.

- C'est compliqué... Elle me fout des fioles de phéromones d'oméga en crise sous le nez -et je sais que je dois pouvoir les supporter mieux que ça si je veux pouvoir aider à l'infirmerie mais... j'y arrive pas tellement et là j'ai juste les narines en feu.

- Tu vas finir par y arriver, je le sais, le rassure Harry, trop habitué à faire le protecteur toute la journée pour retenir sa main qui passe sur son bras ou ses phéromones qui s'échappent par réflexe.

Ron lui lance un regard un peu moqueur mais il ne dit rien, laissant plutôt son regard partir vers le tout-petit qui continue paisiblement sa sieste.

- Ça explique tellement de choses, dit Ron sans le quitter des yeux.

- Tu dois me promettre de ne pas en parler, dit-il.

Ron doit voir le sérieux sur son visage parce qu'il ferme sa bouche qu'il avait ouverte.

- Tu sais pas le temps que ça m'a pris pour lui faire comprendre qu'il risquait rien et que je garderai le secret.

- Je vois, dit finalement le roux après un temps de silence où ils ne font qu'observer l'enfant dormir.

- Il a quel âge?

- Deux ans, un peu moins, un peu plus...

- Il le prend comment?

- Plutôt bien je dirais.

- Et toi?

Il se tourne pour faire face aux yeux bleus qui le fixent.

- Qu'est-ce que tu veux dire?

- Tu veux qu'il soit ton petit garçon, pas vrai?

- Peut-être, ouais... dit Harry à demi-mot parce qu'il n'avait pas osé s'avouer la chose.

- Et ça serait possible?

- J'en sais rien, soupire Harry. C'est Drago.

Il le dit comme si ça expliquait tout et peut-être que c'est le cas.

Il voit Ron inspirer du coin de l'œil puis se frotter doucement le nez.

- Papa ou pas, il va avoir besoin que tu l'aides à se changer à son réveil.

- Tu sais que t'as pas intérêt à dire un truc comme ça une fois qu'il est réveillé, pas vrai? dit-il sans venin.

- Je t'informe juste, je suis pas stupide.

Le blond se réveille progressivement, d'abord trop engourdi par sa sieste pour réaliser qu'il n'est pas dans le dortoir des Serpentard.

Il prend une inspiration qui gonfle ses poumons et qui fait se tendre son corps comme un arc, puis il se relâche de bout en bout, ses muscles prêts à fondre dans les tatamis bleu nuit.

Il se rend rapidement compte de deux choses: la première, c'est qu'il a fait pipi au lit et qu'il y a de grandes chances pour que ça soit la sensation lourde et humide entre ses jambes qui l'ait réveillé.
La deuxième, c'est que la couverture qu'il sent contre son corps n'a pas la même texture que la sienne. Il n'arrive pas non plus à se souvenir comment il est arrivé dans son lit ou pourquoi il a une tétine dans la bouche alors qu'il n'en a aucune à lui.

Il lui faut quelques secondes pour réussir à aligner deux pensées cohérentes à la suite mais une fois qu'il y arrive et avec l'aide de l'un de ses pansements qui s'accroche à son haut, la matinée lui revient en tête.

Drago frotte son nez contre son doudou pour s'aider à sortir du sommeil puis cligne des yeux pour voir un semblant de ce qui l'entoure et confirmer ses suspicions. Il n'est pas dans son lit.

Dès que ses yeux sont ouverts et qu'ils reconnaissent bien la salle bleue, il s'assoit doucement sur ses fesses, serrant la couverture contre lui parce qu'elle est toute douce tandis que son regard cherche instinctivement Harry et se pose sur lui presque par réflexe.

Il n'est pas totalement réveillé et il réalise qu'il n'a pas vraiment envie de l'être maintenant alors il ramasse la couverture et son doudou et s'avance maladroitement à quatre pattes sur les trois mètres qui les séparent jusqu'à ce qu'il soit suffisamment près pour se glisser contre lui sur le pouf amorphe avec le moins d'effort possible.

Il soupire de contentement quand il est réceptionné par les bras qui se sont ouverts en le voyant s'avancer et il laisse sortir un bruit satisfait du fond de son âme quand Harry le borde avec la couverture puis passe une main dans ses cheveux, son pouce frôlant son front à répétition.

- Bien dormi?

- Veux papa, répond Drago, la voix étouffée par l'épaule de l'adolescent.

Il ne sait pas si Harry ne va pas lui faire la remarque maintenant qu'il va mieux, s'il va lui dire qu'il n'est pas son papa ou qu'il ne devrait pas l'appeler comme ça mais Harry répond avec un « oh » qui semble attendrit de là où il est et le blond s'enfonce un peu plus dans son affection quand il embrasse sa tête.

Lui qui pensait peut-être se rendormir, il se rend compte qu'il n'est plus vraiment fatigué maintenant, trop excité d'être dans les bras de Harry pour fermer les yeux et aussi parce qu'il avait raison et que maintenant qu'il est bien reposé, Drago n'a pas du tout envie de rester immobile, à part pour continuer cette étreinte.

Il respire contre son cou un moment, les yeux fermés et tellement engrossé dans son bonheur qu'il ne se rend pas compte de l'intrus dans la pièce.

C'est pour ça qu'il n'y pense pas à deux fois quand il sent que toute son attention repose sur son entrejambe et que ça devient trop difficile à ignorer plus longtemps.

- Mouillé, papa...

- Je sais, bébé. Tu veux qu'on s'en occupe tout de suite?

Il ouvre les yeux pour pouvoir le regarder quand il lui répond, et quelle erreur c'est quand il reconnait le garçon aux cheveux roux à côté d'Harry qui le regarde avec un petit sourire!

En soit, son sourire n'a rien de méchant mais Drago ne s'attendait pas à le voir là et la honte de ce qu'il vient de dire -et faire- grimpe si vite qu'il se cache de sa vue du mieux qu'il peut en couinant, mortifié.

- C'est rien Drago, dit Harry, tentant de venir à sa rescousse. On s'en fiche, tout le monde s'en fiche.

Ses phéromones doivent devenir particulièrement amères parce que le brun les fait s'assoir brusquement puis il l'aide à se relever.

Weasley n'est plus à côté de lui mais il est un peu trop pris par ce qui le préoccupe à l'intérieur pour vraiment y faire attention. Il a aussi un peu peur que Harry pense qu'il fait un caprice et s'énerve contre lui. Vu la vitesse à laquelle il l'a fait se relever, c'est peut-être le cas.

Le Gryffondor doit voir l'appréhension sur son visage parce qu'il se force à lui faire un petit sourire avant de l'attraper par les épaules.

- Va faire pipi, mon cœur. Je te suis dans quelques minutes.

Le cœur dans la gorge, Drago acquiesce et traverse la pièce sans se retourner, trop effrayé de se faire un peu plus humilier. Il passe dans l'autre pièce qui n'a même pas de porte, juste une entrée rectangulaire et il fait sagement ce qu'il lui a demandé de faire après avoir retiré sa protection.

Il jette celle usagée dans la petite poubelle et regarde le plafond de carrelage bleu clair pour ne pas pleurer. Weasley le déteste autant qu'il le déteste et Drago vient de dire des choses très intimes devant lui. Des choses ridicules, des trucs de bébé.

Il fixe la porte devant lui avec attention. Elle n'a pas de verrou, juste un loquet qui peut s'ouvrir de chaque côté de la porte et ça ne le dérange pas plus que ça, tant que c'est Harry qui l'ouvre.

Il entend des pas s'approcher de là où il est mais comme il reconnaît la voix de Harry qui le prévient de sa présence, il ouvre la porte, se cachant derrière au cas où. Il n'a pas envie que le rouquin le voit tout nu.

- Il n'y a que moi, viens par là.

Il s'approche, n'essayant pas du tout de cacher qu'il est contrarié par ce qu'il s'est passé.

- Ne fait pas cette tête, Drago, dit Harry en lui souriant et en tenant une couche et un boxer dans une main.

- Mais il sait des trucs et je voulais pas qu'il sache!

- C'est pas grave Drago, tu-

- Il a tout entendu! le coupe Drago qui a du mal à ne pas pleurer. Il va dire à tout le monde que je fais pipi au lit.

Il cache ses yeux derrière ses poings.

- Je veux pas, moi.

Harry le prend dans ses bras quelques secondes, assez indifférent à son manque de sous-vêtement et le serre contre lui si fort que le blond pense un instant qu'il essaie de faire sortir sa tristesse de lui comme d'un citron qu'on presse.

- Personne ne va se moquer de toi, c'est promis. Ron s'en fiche, il travaille aussi avec Madame Pomfresh, il ne dira rien. Et il n'était pas là pour t'embêter, tu sais?

Il le mord faiblement et Harry doit comprendre que ce n'est rien d'autre qu'une pauvre tentative de tout laisser sortir parce qu'il le laisse faire.

- Tu as quel âge Drago? Tout de suite?

- Deux.

- C'est normal pour les pupilles de ton âge de faire pipi au lit, tout le monde le sait. Ron le sait. Personne ne va t'embêter avec ça et personne ne va se moquer de toi, chaton.

Harry caresse sa joue jusqu'à ce qu'il lui rende son sourire.

- Ok, accepte Drago qui est un peu plus rassuré.

- Je lui ai parlé, t'inquiète pas.

Harry retourne vers ses affaires qu'il avait posé au milieu de la pièce -il ramasse aussi le bas de survêtement qui Drago avait laissé tomber au sol pour pouvoir se changer plus facilement- et il lui fait signe de venir le rejoindre.

- Est-ce que tu veux prendre une douche?

Drago a vu les cabines dans le fond de la pièce et même si les savons ont l'air de sentir bon et d'être particulièrement colorés,  il n'a pas envie de ruiner ses autocollants si vite. En plus, il ne se sent pas sale.

- Nan.

- Ok.

Harry lui lance un petit sort de nettoyage avant de reprendre.

- Tu veux rester petit encore longtemps ou alors tu veux que je t'aide à redevenir grand?

Drago se pose quelques secondes pour y réfléchir, traversé par la pensée qu'il va peut-être se retrouver tout seul dans très peu de temps, parce que la vérité c'est qu'il n'a toujours pas de gardien. Il sait aussi qu'il ne peut pas rester petit pour toujours et qu'il faudra bien redevenir grand tôt ou tard.

Il sait au fond de lui que ça va être difficile de laisser partir le brun et que pour sa propre sauvegarde, il vaut peut-être mieux qu'il ne laisse pas les choses traîner en longueur.

- Grand, mais tout à l'heure, demande Drago qui n'est pas non plus totalement prêt à ne plus jamais appeler Harry papa.

- Rien ne presse, lui répond gentiment le garçon avant de l'aider à enfiler le boxer quand il lui affirme qu'il sait suffisamment se retenir si besoin, puis le bas de survêtement gris.

Quand ils se sont lavés les mains, Drago s'agrippe à lui immédiatement, attrapant son avant-bras, sa main ou son pull -peu importe, vraiment- pour retarder le moment où ça ne sera plus possible.

Harry le laisse faire et il prend sa main dans la sienne, même si ça aurait sans doute été plus facile pour lui d'avoir deux mains libres pour ramasser ses affaires.

Quand ils sortent de la salle de bain, Drago ne fait que quelques pas à côté du brun avant de voir que Weasley est toujours là et il n'a qu'une seconde d'hésitation avant de se cacher derrière Harry parce qu'il se sent encore trop petit et vulnérable pour lui faire face, même après qu'il l'ait rassuré.

Le brun s'arrête à cause de son mouvement brusque et Drago l'observe par dessus son épaule, lui lançant un regard suspicieux qu'il ne cache même pas en s'agrippant au pull de papa dans son dos pour qu'il ne le laisse pas lui faire face tout seul, ce qui se révèle essentiel parce que le Gryffondor tente de se retourner pour lui parler.

- Drago... soupire Harry en arrêtant de bouger, lui laissant l'occasion de se terrer dans sa nuque.

C'est une bonne chose que le brun ait eu une poussée de croissance parce que Drago n'est pas sûr que sa cachette serait aussi efficace s'ils ne faisaient pas la même taille.

Harry n'a pas tellement le temps d'argumenter parce que l'autre s'approche et alors que le blond hésite à retourner s'enfermer dans les toilettes, il révèle un biberon qu'il lui tend, ignorant totalement le gardien entre eux.

- Tiens, pour me faire pardonner. Je ne voulais pas te faire peur comme ça.

Drago hésite quelques secondes mais entre son envie de le prendre et le regard encourageant de son papa, il cède et réceptionne la bouteille chaude entre ses mains.

- Hm, dit-il sans desserrer sa mâchoire pour ne pas l'ignorer mais ne pas avoir à lui dire merci non plus.

Il porte l'embout en silicone à ses lèvres pour goûter et accepte son excuse quand le lait vanillé remplit sa bouche.

Il fronce quand même les sourcils quand le rouquin passe une main dans ses cheveux pour lui dire au revoir mais c'est vite oublié parce que Harry l'appelle sur les tatamis pour l'aider à ranger leurs affaires.

Il ramène le coussin à une main là où il l'a pris pendant que le brun replis la couverture et la range dans une armoire puis il le laisse terminer le biberon avant de l'aider à lacer ses chaussures.

- On met doudou dans ton sac?

Drago acquiesce, se sentant déjà un peu plus grand et regarde Harry allumer un petit boîtier qui laisse sortir de la vapeur avant d'éteindre la lumière et de fermer la porte derrière eux.

- Tu te sens prêt à affronter l'extérieur, demande Harry avec un sourire amusé alors qu'il lui rend son sac.

- Ouais, soupire Drago.

Sentir son sac de cours contre lui l'aide déjà à reprendre ses esprits et il sait que s'il avait remis son uniforme, il serait totalement lui-même. En attendant, il a beau avoir gardé le survêtement confortable, il est suffisamment grand pour regarder Potter différemment quand il tourne la clef dans la porte et il commence déjà à faire le deuil de leur complicité.

Ça y est, pense-t-il. C'est fini.

Il ne doit pas être totalement grand non plus parce qu'il ne peut pas s'empêcher de prendre la parole alors qu'ils commencent à sortir de l'infirmerie.

- T'as menti, tu sais?

Potter s'arrête pour le regarder, les sourcils froncés.

- Comment ça? Non je t'ai pas menti.

- Si, insiste Drago avant de se rendre compte que c'est ridicule et qu'il devrait laisser tomber.

- C'est rien, merci Potter.

Il amorce une sortie et ne fait que deux pas dans le couloir avant de se faire attraper par un bras.

Il se tourne pour faire face au brun sans protester, n'ayant pas le cœur de créer une scène parce qu'il a toujours un peu espoir que Potter se propose pour être son parent et que la pire chose à faire serait d'être détestable.

- Je ne dis pas de mensonge, surtout pas aux petits, dit Potter d'un ton sérieux.

- Je ne suis pas en train de mentir! s'insurge Drago, blessé mais prêt à se défendre s'il veut partir dans cette direction.

S'il avait encore un doute il n'en a plus, il n'a définitivement pas encore seize ans dans sa tête.

- C'est pas ce que je suis en train de dire, s'explique l'autre en passant son poignet contre le sien, glande contre glande pour calmer son hostilité.

- Qu'est-ce que tu dis alors?

- Que ça a dû me sortir de la tête. Qu'est-ce que j'avais promis?

Son agacement fond complètement et il se sent un peu stupide d'être aussi investi dans quelque chose d'aussi futile et penaud, il fixe ses chaussures.

- T'as dis que j'aurais une surprise... mais j'ai pas dû être assez sage ou courageux, marmonne Drago quand il se souvient de la condition.

Peut-être qu'il n'a pas menti et qu'il a juste été suffisamment désobéissant pour qu'il décide qu'il ne le méritait pas.

- Tu as été très sage et très courageux, le rassure Harry en tapant le bout de son nez avec son doigt pour qu'il relève sa tête qu'il avait baissé sans s'en rendre compte. Attend ici.

Comme ils sont juste devant l'infirmerie, il ne lui faut que quelques secondes pour faire l'aller-retour et revenir avec trois sucettes dans les mains.

- Et comme t'as été super courageux, tu peux en prendre deux, dit Harry alors que le blond sent sa bonne humeur revenir.

- Pourquoi pas trois? négocie Drago.

- Pourquoi tu en aurais trois? s'amuse l'autre sans refuser directement comme il se l'imaginait.

- Bah... Après tout, j'ai eu trois piqûres.

Il le voit rouler des yeux mais il lui met les sucreries dans les mains.

- Allez, tiens. Mais tu ne manges pas tout d'un coup, on est clair?

- Oui, oui! dis Drago en les rangeant dans son sac, planifiant déjà quand il pourra les manger.

Il se sent totalement grand maintenant et ses phéromones doivent transmettre que c'est aussi le cas alors il ne s'attend pas du tout à se faire étreindre par le garçon en face de lui.

- Va y doucement aujourd'hui, ok?

- Ok, dit-il, distrait pas son odeur qu'il se prend de nouveau de plein fouet.

Elle n'a plus rien de rassurante parce qu'il n'a plus besoin d'être rassuré et que le corps du Gryffondor s'adapte en conséquence mais ce qu'il remarque pour la première fois de la journée, c'est le contentement et l'aise qu'il peut sentir chez le protecteur. Ça pourrait n'être rien de plus qu'une réaction primaire mais il le sent inspirer dans sa nuque et l'odeur se décuple et elle est tellement brute et nette que Drago sait qu'il ne peut pas la simuler et il se sent un peu assommé quand il comprend que c'est lui qui cause le bien-être de Potter.

Peut-être que c'est lui qui doit faire le premier pas, pense le blond. Peut-être qu'il n'ose juste pas.

- Tu n'as pas de petit Potter, n'est-ce pas? demande Drago qui n'est pas assez stupide pour s'humilier pour rien.

- Non, dit-il en se redressant et en pinçant un peu ses joues pour détendre son expression soucieuse. Pourquoi tu demandes ça?

- Maintenant si, rétorque Drago en manifestant tout le courage qu'il a en lui pour le dire puis rester là quand le brun comprend ce qu'il vient de lui demander.

- Oh, souffle Harry avec un rire surpris et comme il est si beau quand il est heureux, Drago réduit l'espace entre eux et pose doucement ses lèvres sur celles du garçon.

- Harry! Le professeur Rogue veut te voir!

Drago se recule comme s'il avait pris la foudre en entendant la voix de Weasley, sentant ses joues rougir alors qu'il a envie de lui lancer son regard le plus sombre.

- Oh, désolé, dit l'alpha avec une grimace quand il a l'air de comprendre ce qu'il vient d'interrompre.

Plus les secondes passent, plus le blond pense que c'est peut-être pour le mieux, se laissant paniquer intérieurement parce qu'il ne comprend pas ce qui lui est passé par la tête.

Il a chaud et il se sent en vrac, parce que Harry ne le regarde pas, tourné lui aussi vers le roux et qu'il ne sait pas à quoi s'attendre mais qu'il n'a pas non plus la force de partir en courant.

- C'est urgent?

- Ouais, désolé Harry j'aurais dû atten-

- J'arrive, donne-moi deux secondes.

Il se tourne vers lui si vite que Drago n'a pas le temps de l'anticiper, ni ça, ni les deux mains chaudes sur ses joues et sa bouche qui revient tendrement sur la sienne.

Leurs lèvres se séparent avec un léger « smack » et il se prend un sourire éblouissant en pleine figure.

- À plus tard, mon cœur?

Drago acquiesce et le regarde partir en direction des cachots, immobile puis avec un petit sourire sur les lèvres et rien ne le déloge, même Weasley qui lui envoie maladroitement un pouce vers le haut.

Il se contente d'observer Harry jusqu'à ce qu'il ne le puisse plus puis il fait demi-tour pour se diriger vers le parc, sort une sucette à la pomme de son sac et la met dans sa bouche.

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