34. Annabelle.



La colère ne me quitta pas, même durant ma douche. Donc impossible de me détendre. Ce connard de Wade me prenait vraiment la tête depuis que nous avions passé la nuit ensemble il y a deux ans. OK, je ne suis pas totalement innocente, mais putain, on avait bu et j'étais en manque ! Ce n'était pas un laideron et je suis une femme qui avait des désirs. Il y a répondu, point barre. Je ne lui ai jamais demandé de me passer la bague au doigt que je sache !

Je fulminais tellement qu'en allant rejoindre les triplés, j'étais toujours énervée. Casey eut la décence de s'habiller, ce qui en un sens signa une grosse déception dans mon petit cœur. Même avec ses cheveux en bataille, il était sexy. Ça devrait être interdit d'être aussi beau... Je crois que ce que ressentais commençait doucement à me faire peur.

Je me remuais à l'intérieur et feignis l'indifférence. J'ignorai les nouveaux arrivants en particulier Wade et me concentrai sur Casey qui ne me quittait pas des yeux. C' était le mieux que je puisse faire.  D'un soupir las, j'annonçais :

— Je vais devoir y aller.

Je ramassais ma veste et mon sac.

— Tu ne veux pas rester manger avec nous ? me demanda Hayden courtois.

Je le dévisageait d'un air éloquent. Fallait pas pousser non plus.

— Désolée mais ton connard de frère m'a gâché la journée. Et je parle de Wade, bien sûr.

Hayden gloussa suivi de Casey.

— C'est bon La Pierre, j'ai compris, grogna le concerné

— C'est bien, tu es intelligent. T'as peut être une chance de te trouver une nana finalement. Casey, je t'appelle.

Je débarrassai le plancher à la vitesse grand V afin de ne laisser personne ajouter quoi que ce soit sur ce que je venais de dire. Je n'étais pas sortie de l'ascenseur que je reçus un sms de Casey

« Bonne journée beauté. »

Il était mignon et étonnement mon cœur s'emballa comme un petit fou. J'étais autant surprise par ma réaction que par la sensation de bien-être et de bonheur que m'étreignit. Le sexe assurément, une addiction efficace contre la morosité et les tracas. Avec un sourire niais plaqué sur le visage je lui répondis :

« Bonne journée beau gosse »

Si Lise me voyait, elle aurait tôt fait de remarque que j'avais cet air niais qu'ont toutes ces nanas quand elles sont en amour de leur crush. Mais comme je suis entre deux eaux avec elle, je ne pouvais même pas lui faire part de ma nuit démentielle que je venais de passer avec Casey Haymes.

Du travail, j'en avais à la pelle, mais après ma nuit courte et fantastique mon esprit ne faisait que vagabonder au lieu de rester concentré. Toutes mes pensées allaient à Casey. A son corps, ses mains, ses yeux magnifiques et pleins de promesses. Au plaisir qu'il avait su me prodiguer et à ses mots qui ont réveillé une part que j'avais soigneusement relayé derrière un moi hautain et inaccessible.

Bon dieu, j'avais eu des plans culs réguliers, mais rien d'aussi prenant, gratifiant, sauvage et tendre à la fois. Quand je repensais aux regards de Casey, c'est comme si je plongeai dans un univers rempli de douceur et de plaisir exquis. Il dardait sur moi ses yeux qu'aucun de mes amants n'avait jamais posés sur moi. Pas même Wade. Pour lui, je n'étais qu'un défi. Sauf qu'il n'a rien calculé, ni maîtrisé sur cette relation avortée. C'était moi et uniquement moi qui lui avais donné la possibilité de partager mon lit. Et dire qu'il croyait que j'étais naïve pour croire à sa séduction à deux balles. Il avait certainement du penser m'accrocher à son tableau de chasse en s'affichant ouvertement avec moi. Mais je n'étais pas dupe. Je savais ce qu'on disait sur mon compte. J'étais celle que tous les mecs reluquaient et que je repoussais.

Je soupirai pour l'énième fois et repoussai mon stylo. C'était peine perdue, cela faisait trois heures que je planchai sur mon projet et à part trois coups de crayon, rien n'était sorti. Il était plus de treize heures et j'avais faim. J'allais farfouiller dans mon frigo et ne trouvai rien d'acceptable à me mettre sous la dent. Je soupirai de nouveau.

Ma vie était donc si ennuyeuse ? Je repense à la révélation de papa. Au fait qu'Eva n'était en rien ma génitrice ce qui expliquait bien des choses à présent. Et de ce fait Max encore moins mon frère. C'est comme un soulagement de savoir que je n'avais aucun gène avec eux. Mais j'avais des frissons de dégoût à la seule pensée que tout l'empire de papa était entre les mains de cette harpie et son fils. Pour Eva, je n'étais que la verrue sur le pigeon qu'était mon père quand elle lui avait mis le grappin dessus. Une peur tenace soudaine s'accrocha à mes entrailles. Ma vie avait pris un virage à cent quatre vingt degrés.

Alors que je m'apprêtai à commander à déjeuner, mon téléphone sonna. Je lorgnai l'écran et le nom qui s'y inscrit. Maxime.

— Allô, je marmonnai de mauvaise grâce.

— Annabelle, fit-il seulement d'un ton froid qui me rappelait trop Eva.

— Qu'est-ce ce qui se passe ?

— A toi de me dire ?

— Il ne se passe rien. Qu'est-ce que tu veux ? Je bosse là, contrairement à certain.

— Ne joue pas à ça tu veux.

— Oh ! C'est moins drôle quand ce n'est pas toi qui joue on dirait, je ricanai, pince sans rire.

— Parfois je me demande si un jour tu vas devenir une véritable adulte au lieu de faire des coloriages débiles dans ton appartement minable.

— Humm laisse-moi le temps de réfléchir...

L'enfoiré ! Le putain d'enfoiré de première ! Je lui raccrochai au nez et hurlais des insultes, hors de moi.

Le téléphone sonna de nouveau et je décrochai parce que je n'allais pas laisser passer ça. Et je comptai bien lui dire le fond de ma pensée. Qu'on ait ou non vécu trente ans de notre vie dans la même foutue maison !

— Quoi ?

— Une preuve de ton immaturité, cela en est désolant, soupira-t-il désappointé.

— Oh, tu veux vraiment parler d'immaturité ? Arrête-moi, si je me trompe, mais ne serait-ce pas toi qui cours la gueuse chez ton concurrent ? Non ? Oh, est-ce que ce ne serait pas toi qui t'arrange toujours pour décliner tes fonctions de chef d'entreprise au putain de gala de charité de ta mère ?... Non plus ? Oh merde alors, tu es si irréprochable même dans la gestion chaotique des éditions, que je devrais me prosterner à tes pieds de branleur de mes deux ! je crachai furieuse.

Un silence au bout du fil qui se vit couper par un rire mauvais.

— Tellement pathétique.

— Et ta mère qui te materne comme si tu avais encore dix ans. Oui, c'est vrai que c'est tellement pathétique que je me demande si tu arrives encore à te regarder dans le miroir le matin.

— Tu n'as aucune idée de ce que maman sacrifie pour le bien des éditions !

— En effet et je suis toute ouïe. Vas y éclaire ma lanterne un peu pour voir.

— Papa est mal.

Il détournait le sujet de conversation parce qu'il n'avait aucun argument à cela. Et embraya sur un autre pour se soustraire à toutes les questions dont il était incapable de répondre ou de contrer.

— Vraiment ? Et à quel propos ? Au sujet de ta vie de queutard décérébré ou du fait que tu te caches derrière ta mère comme un gosse de dix ans ?

— Commence pas tu veux ! Tu n'as aucune idée du boulot que cela représente de tenir à flot une entreprise.

— Apparemment toi non plus. Puisque tu vas jusqu'à tromper ta femme pour obtenir un auteur à succès chez ton concurrent direct.

— Papa m'a laissé une maison d'édition vieillissante, OK ! Tous ces putains d'auteurs ont un pied dans la tombe ! Les ventes déclinent parce qu'il n'a jamais cherché de nouveau auteurs bien plus intéressants que de vieux schnocks qui vendent de la philosophie arriérée ! Bon dieu les Haymes sont inventifs et se renouvellent tous les ans ! Leur catalogue est mille fois plus varié que le notre !

— Oh et ça te donnait le droit d'aller sauter une de leurs secrétaires pour débaucher l'un de leurs auteurs le plus prolifique ?

— Je n'ai pas trouvé d'idée plus rapide pour clôturer l'année en positif.

Je restai comme deux ronds de flan.

— Parce que baiser pour obtenir ça, est une idée plus rapide ? Encore faut-il que cette vache à lait te ponde son roman et le vende avant cette putain de fin d'année ! Et ce en un mois et demi. Tu crois ça possible ? Réellement ?

Il ne dit rien, il avait tort et il le savait.

— N'essaie pas de te foutre de ma gueule Max. Tu es un piètre menteur, gérant d'entreprise qui pète plus haut que son cul ! Tu ne t'es jamais intéressé à la boite de papa. Seul le fric que cela te fait miroiter t'excite. Tu es un incapable, voilà ce que tu es.

Il ricana à l'autre bout du téléphone.

— Disait celle qui se fait sauter par les frères Haymes. Jolie triplette ! Là, je te tire mon chapeau. Quand le vieux l'apprendra c'est la crise cardiaque assurée !

— Ne t'en fait pas pour ça, il est déjà au courant.

Je ne supportai pas qu'il parle de papa comme il le faisait.

— C'est ce qui s'appelle un coup de maître Anna. En effet, je suis un petit joueur à côté de toi.

— Oh rassure-toi, je ne couche pas pour le fric comme toi, mais uniquement pour le plaisir. Jouer les prostituée, c'est ta spécialité.

Il cria un juron si fort que je fus obligée de reculer le téléphone de mon oreille. Touché.

— Tu sais comment on t'appelle dans les bars que je fréquente Anna ? grinça-t-il presque heureux de me tacler.

J'en avais une vague idée.

— L'allumeuse frigide.

Je n'étais hélas pas surprise.

— Et toi Max, tu sais comment on appelle ta femme ?

Pas de réponse au bout du fil.

— Je serais toi, je vérifierai mon compte en banque avant de jouer les gros dur. Parce que ce n'est pas toi qui tiens les rennes de ton couple. Et s'il doit y avoir quelqu'un sur la paille à la fin de cette histoire, ce sera toi. Uniquement toi, lui dis-je en lui raccrochant au nez.

Max n'avait plus qu'à méditer là dessus. Je soupirai bruyamment. Comment en étais-je arrivée à détester mon frère depuis quelques années ? L'instinct m'avait-il dicté cet état de fait? Tentait-il depuis un bon moment de me prévenir que la famille étrange dans laquelle je vivais avait du vice et que finalement, et fort heureusement, ce n'était pas génétique ?

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