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Hofen était un petit village se trouvant à 5 minutes en voiture de chez Jane. En fin de matinée, Maurice avait décidé de se rendre chez madame Müller, afin de discuter avec elle. Le temps était maussade, il pleuvait et le brouillard dominait la vallée, pour ce dernier jour du mois d'octobre.

Plus le temps passait et plus l'ancien policier avait l'impression d'être suivit, d'ailleurs il n'y avait pas que cela qui le perturbait, mais dans l'immédiat, il devait rencontrer celle qui avait accueilli Amalia Vogel et comprendre pourquoi aucun signalement n'avait été fait au sujet de sa disparition.

La bâtisse de la famille Müller était un vieux corps de ferme qui dans le temps, avait dut être magnifique. Il avait parlé avec Jane de la famille et avait appris, que le père avait été le Bourgmestre, l'équivalent du Maire en France et qu'il était décédé, depuis 5 ans. Que son fils était entré en politique, avant qu'une affaire sordide, n'arrête sa carrière. Désormais, il vivait avec femme et enfants à Timmendorfer Strand, dans le nord de l'Allemagne, au bord de la mer Baltique, à près de mille kilomètres de là.

Et depuis plus de 8 ans, personne n'avait revu la fille, Fiekchen, qui semblait être partie un bon matin, sans laisser d'adresse.

Maurice se garait devant la maison et sortit son petit dictionnaire français-allemand, pour traduire les banalités d'usages. Après quelques minutes, il sortit de sa voiture et sonnait à la porte, mais la maison semblait vide. Il sonnait à nouveau et après quelques minutes, la porte d'entrée s'ouvrit enfin sur une vieille dame, qui semblait s'être échapper d'un terrible conte pour enfant. Les cheveux blancs. Les yeux tristes. Le visage fatigué et ridé. Il eut presque pitié d'avoir déranger cette pauvre femme.

- Ja. Demanda-t-elle, comme si on venait de la sortir de son sommeil.

Maurice regardait ses notes et essayait de se présenter du mieux qu'il pouvait. La vieille dame fronçait les sourcils et faillit même refermer la porte.

- Ich bin Französisch polizist. Expliqua-t-il, le plus simplement.

Les larmes coulèrent soudain sur les joues de la vieille dame et elle plaquait sa main toute fripée sur sa bouche, pour retenir un sanglot. Maurice restait un instant sans oser bouger. Avait-il mal prononcé quelque chose ?

- Fiekchen être morte ? Demanda-t-elle, en sanglotant.

L'ancien policier fut surpris qu'elle parle français. Quoi que moyennement. Un peu comme Hardyl.

- Non. J'aimerais vous parler d'Amalia. Amalia Vogël.

La vieille dame essuyait ses larmes, refermait la porte en hurlant à Maurice, de partir.

- Attendez. Bloqua-t-il la porte. Amalia a disparu. Pourquoi n'aviez-vous pas signalé sa disparition ? Demandait-il avec fermeté.

La vieille dame hésitait, mais laissait finalement Maurice entrer. Elle l'invitait à la suivre jusqu'à sa cuisine et il fut choqué de voir, comment elle vivait.

La maison était sale. Poussiéreuse. Il y avait des journaux partout. Des vieilleries dans tous les coins et l'odeur était insupportable. Il dut retenir sa respiration à plusieurs reprises, pour ne pas avoir un haut le cœur. Elle lui indiquait une chaise replie de linge sale et Maurice prit son courage à deux mains pour la débarrasser et s'installer. La vieille dame s'installait à son tour et l'ancien policier regrettait soudain d'avoir insisté pour lui parler.

- Que vouloir savoir? Demanda-t-elle, mécontente.

- Amalia Vogel était jeune fille au pair chez vous, pourquoi...

- Cette... pute, qui montre cul devant mein garçon. Gronda-t-elle, en s'allumant une cigarette.

Maurice se figeait sur place. La violence des paroles de cette femme peinait à venir jusqu'à lui. Rapidement, il essayait de comprendre de quoi elle parlait. Jane lui avait, dit que le fils de cette femme, n'avait que 2 ans de moins, que son ami Hardyl, qui avait 47 ans. Ce qui voulait dire qu'il devait avoir environ 33 ans à l'époque de la découverte du charnier de 1998, donc, 16 ans de plus que la jeune fille. Qu'était en train d'insinuer cette femme ?

- Je ne suis bien sûr de comprendre ?

- Amalia pas fille pair, mais... fille sexe. Tirait-elle longuement sur sa cigarette.

Les mots étaient d'une cruauté et d'une brutalité sans nom. Maurice en avait presque la nausée et pourtant, il en avait entendu d'autre durant toute sa carrière, mais là, c'était inimaginable.

- Mais... mais c'était une enfant. Arrivait-il, à peine à le formuler

- Ah Kinder... Ja. Raillait-elle, en levant les yeux au ciel. Elle montrer cul. Elle faire chose. Elle beaucoup sexe avec mein garçon.

L'ancien policier dut déglutir. Il n'arrivait pas à savoir si cette femme le provoquait ou si elle disait la vérité.

- Ensuite, eux... là. Montrait-elle les escaliers. Elle crier... elle...

- ÇA SUFFIT. Hurlait soudain Maurice, en abattant durement son poing sur la table. Vous... vous êtes monstrueuse. Lâchait-il sous le coup de l'émotion.

La vieille dame tressaillit, mais se ressaisissait aussitôt, relevant la tête avec condescendance.

- Fiekchen être revenue un jour... grosse. Montrait-elle son ventre. Amalia fruit pas bon. Elle enfant du mal... elle pas naitre.

Elle se levait soudain et sortit de la cuisine, pour ouvrir un des placards de l'entrée. Maurice l'entendait parler en allemand et il était tellement sous le choc de ses paroles, qu'il n'osait même plus bouger. Elle arrivait soudain derrière lui et jetait un carton à chaussure sur la table. Elle s'installait à sa place en finissait sa cigarette et lui montrait la porte d'entrée, dans un geste qui en disait long. L'ancien policier voulut la confondre à ses paroles, mais après tout, elle payait déjà le prix lourd de ce qui c'était passé, dans cette maudite baraque.

Maurice ne se fit pas prier plus longtemps, il prit le carton et sortait enfin à l'air libre. Il fit les quelques pas qui le séparait de sa voiture, en respirant à pleins poumons, en frissonnant d'effroi.

L'ancien policier entrait dans sa voiture, posait le carton sur le siège passager et se dépêchait de quitter ce village. Mais dans quelle histoire aussi sordide que monstrueuse était-il tombé ? Il n'espérait alors plus qu'une chose, c'est qu'Amalia avait réussi à quitter la folie de cette famille et qu'elle vivait heureuse, loin de tout cela.

Il s'arrêtait à mi-chemin pour rassurer Magalie et surtout pour entendre sa voix. Demain à la même heure, il serait dans ces bras. Ensuite, il téléphonerait à son ami Louis et il lui raconterait ce weekend et les deux pistes, qu'il avait découvert.

Il prenait l'un des carnets et l'ouvrit avant de se figer sur place. Il tombait sur un dessin de bouton de rose faite au fuseau dans un style gothique. Il tournait la page et vit une tombe dessinée au stylo bille avec écrit dessus « Amalia und Roseo ».

Il tombait enfin sur un texte écrit en français, qui décrivait la mort. La solitude. L'absence de souffrance. Il prit un autre carnet, puis un autre, mais il y avait toujours les mêmes dessins, la même tombe. Parfois une lune qui dominait un cimetière. Il y avait même des taches de sang.

Puis il tombait sur un texte écrit en allemand, certain mot avait été entourée à plusieurs reprises. Il sortait son téléphone et les traduisait ainsi que le dernier phrase.

« Amant. Pècheresse. Frère et sœur.

Oh, Roseo, pourquoi es-tu Roseo ? Oh Roseo pourquoi es-tu mon frère ? »

Maurice se figeait sur place, il clignait des yeux à plusieurs reprises, avant d'ouvrir la portière pour vomir. Mais qu'était-il arrivé, à Amalia Vogel ?

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